Abbé Arnaud Sélégny, fsspx - Bernard Bovigny - APIC - 24 avril 2005
Entretien de M. l’abbé Arnaud Sélégny, secrétaire général de la Fraternité Saint Pie X, à l’agence Apic. - Menzingen
L’élection du cardinal Ratzinger comme successeur de Pierre a été saluée par la Fraternité sacerdotale St-Pie X, basée à Menzingen en Suisse centrale. Les contacts vont-ils se renouer avec Benoît XVI ? L’abbé Sélégny, secrétaire général de la Fraternité, se montre en même temps prudent et ferme sur une suite possible : oui à un rapprochement, mais pas à n’importe quel prix.
Apic : Votre message adressé au nouveau pape constitue-t-il une occasion de bons contacts avec l’Autorité de l’Eglise catholique ou exprime-t-il la joie de la Fraternité face au choix du cardinal Ratzinger ?
Abbé Arnaud Sélégny : La Fraternité tient à souligner son caractère catholique. C’est comme Société appartenant à l’Eglise catholique qu’elle a accueilli l’élection du pape Benoît XVI. Par ailleurs, les supérieurs de la Fraternité n’ont jamais interrompu totalement les contacts avec les autorités de l’Eglise.
Apic : Auriez-vous aussi envoyé des voeux si le pape élu était réputé progressiste ?
A. S : Ils auraient eu alors une teneur sans doute différente… De même que les réactions dans le monde catholique eussent été différentes elles aussi…
Apic : Vous appelez Benoît XVI « successeur de Pierre ». S’agit-il d’une expression de reconnaissance habituelle de la part de la Fraternité Saint Pie X ?
A. S : Tout à fait. La Fraternité n’a jamais remis en cause la validité de la succession des papes.
Apic : Allez-vous entreprendre des initiatives de rapprochement avec Benoît XVI ?
A. S : Notre conduite ne changera pas fondamentalement. Nos reproches sur le nouveau cours ecclésial suivi depuis le Concile Vatican II sont toujours pertinents à ce jour, et nous désirons aider l’Eglise en maintenant, avec la grâce de Dieu, sa tradition bimillénaire.
Apic : Attendez-vous des signes de sa part ? Et s’ils venaient, comment les accueilleriez-vous ?
A. S : Nous avons demandé voici quelque temps déjà, deux garanties de la part de Rome : la possibilité pour tout prêtre de célébrer la messe tridentine, et l’annulation des excommunications portées contre Mgr Lefebvre et les quatre évêques qu’il a ordonnés. Si ces gestes étaient accomplis, cela améliorerait immédiatement le climat et serait pour nous une invitation à poursuivre.
Apic : Quelles sont les principales conditions que vous fixeriez pour retrouver l’unité entre la Fraternité et l’Eglise catholique à Rome ?
A. S : Plutôt que de conditions, nous préférons parler de préliminaires. Je viens de vous donner les deux préliminaires qui pourraient débloquer la situation. Cela permettrait d’engager des discussions plus théologiques sur la situation actuelle de l’Eglise.
Apic : Et quelles conditions êtes-vous prêts à accepter, notamment dans l’application des résolutions du Concile Vatican II ?
A. S : La formule déjà proposée par Monseigneur Lefebvre et acceptée à l’époque par le pape Jean Paul II, lors d’une audience au début de son pontificat, pourrait être un bon point de départ : « Nous acceptons le Concile examiné à la lumière de la Tradition ».
Apic : En tant que président de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, le cardinal Ratzinger a dû participer à l’excommunication de Mgr Lefebvre. Gardez-vous de la rancune pour cela ?
A. S : Il est difficile d’apprécier la participation du pape Benoît XVI, alors Préfet de la Congrégation pour la doctrine de Foi, à l’injuste sentence portée contre Mgr Lefebvre et les quatre évêques lors du sacre en 1988, puisqu’il s’agit avant tout d’une question disciplinaire ; c’est d’ailleurs le cardinal Gantin qui fut chargé de la signifier, en tant que Préfet de la Congrégation des évêques.
A. S : Notre ligne de conduite restera la même sous Benoît XVI que sous ses prédécesseurs. Nous nous efforçons de rester fidèles à la doctrine pérenne de l’Eglise, et nous sommes prêts à affronter les désagréments et les condamnations que cette attitude risque d’attirer. Nous ne pouvons connaître les intentions du pape Benoît XVI à notre sujet et nous continuons avec confiance dans la ligne que notre vénéré fondateur nous a tracée.Apic : Vous appréciez Benoît XVI pour sa volonté de renforcer la doctrine catholique et sa prudence face au dialogue oecuménique et interreligieux, mais ne pourrait-il pas se montrer ferme également envers la Fraternité.
(Entretien réalisé par Bernard Bovigny)