29 mars 2001

Les intégristes cherchent le pape - Le Vatican a reconnu que des contacts formels étaient en cours.
Michel Holtz, dans Libération, le 29 mars 2001
Le temps de la réconciliation n'est pas encore venu, tout juste celui du dialogue. Depuis quelques mois, le Vatican tente de renouer les liens avec ses dissidents de la fraternité sacerdotale Saint-Pie-X : les "lefebvristes", les "intégristes", " les intégralement catholiques, plutôt ", corrige l'abbé Sellier, l'un de leurs porte-parole en France. Des liens rompus depuis le schisme de 1988 et l'excommunication de quatre évêques ralliés à monseigneur Lefebvre, évêque d'Ecône (Suisse), ex-communié lui-même et fondateur de la fraternité. Mais si le Vatican a officiellement reconnu la semaine passée que des "contacts formels" étaient actuellement en cours, les premières rencontres remontent à l'été dernier, au 8 août précisément. Et elles sont le fait des intégristes eux-mêmes.
C'était le temps des JMJ et du jubilé. Les jeunes catholiques de tous les pays prenaient le chemin de Rome, en autocars, en short et en chantant en choeur des chansons modemes. Eux aussi sont venus en cars, mais tout de noir vêtus. Ils chantaient, comme les autres, mais des kyrie latins. Ils étaient 6000 pèlerins français pour une tournée solennelle des basiliques. Et leur geste eut l'heur de plaire au Saint-Père. Mi-novembre, le cardinal Dario Castrillon Hoyos, préfet de la congrégation pour le clergé, était officiellement mandaté par Jean Paul II pour aller à la rencontre des dissidents. La réunion eut lieu les 29 et 30 décembre 2000. Depuis, d'autres rendez-vous ont été organisés, jusqu'à cette communication officielle du Vatican. Et monseigneur Bernard Fellay, actuel supérieur des lefebvristes se targue même d'avoir "entrevu le pape" au cours de ce premier séjour romain, auquel ont succédé deux autres rencontres, au mois de janvier et février.

Prie-dieu et PC. A la maison du district de Suresnes, QG français de la fraternité, cette affaire occupe évidemment les conversations de la dizaine d'abbés en résidence. Dans cet hôtel particulier, racheté grâce aux dons des fidèles, qui seraient près de 100000 en France, les prie-dieu recouverts de velours rouge cohabitent avec des PC reliés par des kilomètres de câbles : " On est en train de monter un site Internet", s'excuse l'abbé Sellier, guide des lieux et responsable de Fideliter, revue de la confraternité, où se mélangent allégrement les entretiens théologiques et la défense d'"une certaine idée de la France", plutôt antiPacs, antiavortement, antifrancs-maçons et antigaulliste. Combats de quelques vieilles lunes? L'abbé Sellier prétend le contraire. " Les traditionalistes d'aujourd'hui sont de la deuxième génération, les dirigeants de la fraternité ont mon âge (42 ans, ndlr) en moyenne et les jeunes prêtres sont de plus en plus nombreux à nous rejoindre. La plupart d'entre nous n'ont pas connu le traumatisme du schisme de 1988. On n'a pas de passif avec le Vatican. " Ce qui facilite la rapprochement avec Rome.

Non-interdiction. Mais les lefebvristes ont des exigences. Et en premier lieu, " la liberté de la messe ", comme l'écrit Bernard Fellay, dans le texte préalable à toute négociation qu'il a envoyé aux 20000 prêtres français "papistes". Cette messe, il souhaite évidemment la dire en latin, dans un rite immuable depuis 1534. "Et même plus, précise un abbé historien résident de Suresnes. Certains éléments de notre messe n'ont pas changé depuis le IVe siècle. " Et puis, les traditionalistes veulent continuer d'officier en tournant le dos aux fidèles. " Nous nous adressons à Dieu, et non au peuple. "
Selon les représentants français de la fraternité, les " négociations " seraient en bonne voie. "Nous irions vers une non-interdiction de notre célébration, plutôt que vers un accord, mais c'est déjà énorme, résume Grégoire Sellier. Quant aux excommunications, il n y en a pas eu une seule depuis 1988. "

" Messe maçonnique ". Mais certains adeptes d'Ecône en veulent beaucoup plus. Dans une homélie prononcée dimanche dernier à léglise Saint-Nicolas-du Chardonnet, fief de la fraternité à Paris, l'évêque excommunié Bernard Tissier de Malerais a carrément demandé à Rome d'oublier la messe moderne, celle de Vatican II, mise en place après le concile de 1965; racine selon lui du schisme actuel. " Ils ne peuvent garder la nouvelle messe, oecuménique, ambiguë, protestantuée et maçonnique. " Rien que ça. Et de demander au pape " de faire repentance " . Evidemment, de telles salves risquent de hérisser quelque peu Dario Castrillon Hoyos. Mais, à Suresnes, on est confiant. " Jean Paul II est à la fin de son pontificat et il ne veut pas partir sur un schisme. Et puis, vu l'état des troupes, Rome a besoin de nous. Dans dix ans, ils auront deux fois moins de prêtres et encore moins de fidéles. " Cent prêtres français, cinquante nouvelles recrues chaque année et 100000 fidèles très fidèles sont toujours bons à prendre. Quitte à faire quelques énormes concessions?

27 mars 2001

La Fraternité Saint-Pie X et la nouvelle messe (suite)
Yves Chiron, Aletheia n°12 - 27 mars 2001
On a attiré mon attention sur le fait que le dernier numéro d’Alètheia, consacré à l’ouvrage publié par la Fraternité Saint-Pie X sous le titre Le Problème de la réforme liturgique, a suscité un certain émoi dans les sphères dirigeantes de la dite-Fraternité. Ce fut plus que du mécontentement. Venant de tous autres horizons, d’autres réactions me sont parvenues. Je voudrais donc revenir sur ce livre important [1] .
Une figure éminente du monde éditorial de la Fraternité Saint-Pie X disait, avec quelque condescendance, qu’Alètheia  n’a “ qu’un intérêt anecdotique ”. Je dirais plus exactement, au risque de répéter l’avertissement qui figure en tête de chaque numéro, qu’Alètheia est une lettre libre d’informations religieuses. Ni plus, ni moins.
1. Tout ce qui s’y imprime n’engage que moi, et en aucune manière les publications auxquelles, par ailleurs, je collabore.
2. Les analyses que cette modeste lettre publie n’entendent pas prendre parti dans les querelles perpétuelles que certains, dans le monde traditionaliste, s’évertuent, semble-t-il, à maintenir, pour s’assurer de leur existence  et de leur bonne marche sur la voie qu’ils ont choisie.
3. Cette modeste lettre ne vit que de la bienveillance et de la charité de ses lecteurs, des lecteurs qui s’inscrivent dans une géographie ecclésiale très diverse, de Paris à Rome, de la Suisse à la Provence. A défaut de pouvoir être, hélas, un lien d’amitié, elle est un lien d’informations, au service de la seule vérité.
• Ce sont les “ quelques remarques d’un fidèle du dernier rang ”, qui accompagnaient la présentation du livre, qui ont suscité l’émoi évoqué plus haut. On les juge “ superficielles ”, ce qui ne signifie pas erronées. Je laisse aux théologiens qualifiés le soin de discuter plus en profondeur les analyses du livre.
Sur le plan formel, il est clair que cette étude sur “ la messe de Vatican II et de Paul VI ” est, de la part de la FSPX, une nouvelle approche de la question. L’angle d’attaque choisi, si l’on peut dire, est
celui de la doctrine du mystère pascal, qui serait sous-jacente à toute la réforme liturgique. Cet angle d’attaque est-il pertinent ? Aux théologiens et liturgistes de répondre.
En revanche, on peut saluer l’effort doctrinal que fait, par ce livre, la FSPX. Elle ne s’en tient plus au Bref examen de la nouvelle messe des cardinaux Ottaviani et Bacci, qui date de 1969. La FSPX a voulu aller aux sources elles-mêmes de cette réforme : les liturgistes et théologiens qui, à travers notamment le Consilium, l’ont inspirée. D’où une multiplication de références et de citations d’auteurs.
Mais cette méthode a ses limites. A plusieurs reprises, les auteurs appuient leurs démonstrations par des citations de théologiens et de liturgistes, dans leurs oeuvres de différentes époques, et les entremêlent de citations du Magistère actuel. Cette juxtaposition incessante de citations vaut-elle démonstration ?
• Un autre lecteur, figure éminente des catholiques Ecclesia Dei, s’est demandé si ce livre n’était pas une provocation, lancée dans le public au moment où la FSPX négociait à Rome, pour torpiller les dites-négociations.
S’il y a eu, comme je l’ai dit, interrogation, de la part des autorités de la FSPX, sur l’opportunité de publier une tel livre en ce moment, il n’y pas eu volonté de provocation. Cette étude sur la réforme liturgique était  en préparation avant que des négociations s’ouvrent avec Rome.
Elle s’inscrit, plus largement, dans un effort d’approfondissement doctrinal auquel est décidée la FSPX. Après la réédition des Dubia sur la liberté religieuse de Mgr Lefebvre, cette étude théologique et liturgique sur la nouvelle messe est une nouvelle étape de cet effort d’approfondissement doctrinal. Il se prolongera à l’avenir, semble-t-il, par des études sur l’oecuménisme, l’ecclésiologie et d’autres sujets.
On peut même dire que la FSPX, par ces différents ouvrages doctrinaux, veut contribuer au débat auquel Jean-Paul II a appelé dans le motu proprio Ecclesia Dei adflicta (2.7.1988), demandant aux théologiens d’approfondir “ les points doctrinaux qui, peut-être à cause de leur nouveauté, n’ont pas été compris dans certaines parties de l’Eglise. ”
• En matière liturgique, parmi ceux qu’on appelle les catholiques Ecclesia Dei, le C.I.E.L. (Centre International d’Etudes Liturgiques) présidé par Loïc Mérian, est l’instance qui, avec des théologiens qualifiés et le soutien de plusieurs cardinaux, a le plus oeuvré, depuis des années, à cet approfondissement doctrinal. Les colloques réunis chaque année par le CIEL, et dont les actes sont publiés, témoignent de cette réflexion approfondie engagée, au service de l’Eglise.
Ne serait-il pas opportun que le CIEL organise un colloque sur cette doctrine du “ mystère pascal” que mettent en cause les auteurs du Problème de la réforme liturgique  ?
• Le cardinal Medina, Préfet de la Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements, a déjà adressé une lettre aux supérieurs de la FSPX relatives à ce livre. On en ignore la teneur. Il serait étonnant que l’épiscopat français, au moins par le SNOP, ne réagisse pas à son tour puisque le livre a été envoyé à 22.000 prêtres de France. Il est simplement à espérer que cette réaction ne prendra pas la forme d’un communiqué de mise en garde, comme il y en a eu jadis à l’égard d’autres traditionalistes. L’étude sur la nouvelle messe produite par la FSPX mérite une réponse appropriée, c’est à dire des “ clarifications doctrinales et liturgiques ” comme le demande Mgr Fellay dans l’Adresse au Saint-Père  qui ouvre le livre.
• Pendant longtemps, on a prêché dans certaines chapelles de la FSPX qu’il valait mieux ne pas assister à la nouvelle messe si on ne pouvait pas assister à la messe selon le rite traditionnel. Cette position est-elle encore celle soutenue par la FSPX ?  Il le semble, à lire la page 115 de l’ouvrage cité. Cette position n’est pas sans poser des problèmes théologiques divers. Je laisse aux théologiens le soin d’en discuter.
• Enfin, les différents points soulevés dans cette lettre, comme les “ remarques ” faites dans le précédent numéro, n’empêchent pas que je partage pleinement l’objectif poursuivi par les auteurs du livre : que des “ clarifications doctrinales et liturgiques ” du N.O.M. soient apportées par le Magistère. On peut aussi, tout uniment, partager les demandes de la FSPX : que la liturgie romaine traditionnelle soit universellement autorisée pour tous les prêtres et qu’il y ait “ modification ou abrogation ” de la nouvelle liturgie.

[1] Le Problème de la réforme liturgique, éditions Clovis (B.P. 88, 91152 Etampes), 128 pages , 69 F.

[Mgr Eyt - zenit.org] Card. Eyt: Une "attristante caricature de la théologie catholique de l´Eucharistie" - Réponse à une "Lettre à nos frères prêtres"

Mgr Eyt - zenit.org - 27 mars 2001

ROME, Mardi 27 mars 2001 (ZENIT.org) - Dans un communiqué, le cardinal Eyt déplore "l'attristante caricature de la théologie catholique de l'Eucharistie à laquelle se livrent des "théologiens lefebvristes"". Voici à ce propos un communiqué de l'archevêque de Bordeaux, le cardinal Pierre Eyt, publié sur le site du diocèse de Bordeaux: http://catholique-bordeaux.cef.fr

Communiqué de Mgr Eyt concernant les relations entre Rome et la Fraternité Saint-Pie X

"Tout n'est pas négociable"

"D'après des informations parvenues en France assez mystérieusement, le Saint-Siège et le Saint-Père en personne ont manifesté depuis de longs mois déjà, le désir de développer des contacts avec la Fraternité Saint-Pie X en vue d'aboutir à des solutions juridiques.

"Tandis que les médias décrivaient le déroulement positif de ces pourparlers, les prêtres de France recevaient un bulletin, 9ème de la série, intitulé "Lettre à nos frères prêtres", lettre trimestrielle de liaison de la Fraternité Saint-Pie X avec le clergé de France (n°9, mars 2001). Or voici que, dans ce bulletin, les résultats des "Entretiens romains" d'abord salués comme pleins de promesses, sont présentés, dans la suite du texte, comme "provisoirement compromis", les discussions étant en tout cas, pour le moment, "suspendues". Selon l'homme qui semble guider la discussion, Mgr Fellay, la cause de cette suspension serait du côté de Rome. A la lecture de cette "Lettre à nos frères prêtres" , tout comme à la connaissance du bulletin girondin de la Fraternité Saint-Pie X "Le Mascaret", je me félicite que la cause de la dite suspension vienne "du côté de Rome".

"Voici parmi d'autres, un motif qui justifie ma position. Il s'agit dans "La lettre à nos frères prêtres " de l'attristante caricature de la théologie catholique de l'Eucharistie à laquelle se livrent des "théologiens lefebvristes" (Lettre à nos frères prêtres n°9, mars 2001).

"I1 ne s'agit pas moins que de contester radicalement la doctrine énoncée sur l'Eucharistie par Paul VI et Jean-Paul Il. A cet égard, il est évident pour un catholique que l'expression "Mystère pascal" du Christ et de l'Église constitue bien une réalité qui éclaire et soutient la foi, l'esprit de la liturgie, la consécration de nos cœurs et le sens de nos vies.

"Comment pourrions-nous accepter que d'autres catholiques puissent dire d'une théologie aussi autorisée "qu'ils découvrent avec effroi qu'elle est condamnable et partiellement condamnée par le Magistère authentique de l'Église'' ?

"Ce sont hélas des propos de cette sorte que nous tiennent certains évêques et prêtres de la Fraternité Saint-Pie X au moment où ils nous disent aspirer à "se rapprocher" de l'Église catholique...

"De telles différences doctrinales, liturgiques, sacramentelles, institutionnelles, de telles oppositions, non seulement sur le "Mystère pascal" mais sur tant d'autres éléments de la foi, peuvent-elles être surmontées sans examen approfondi et sans délai suffisant ? Pour le moment et concernant ces problèmes, nous sommes nombreux à voir sur cette route davantage d'obstacles que d'ouvertures".

ZF01032708
Les lefebvristes semblent hostiles à un rapprochement avec Rome, suivi d'une déclaration du cardinal Eyt
Isabelle de Gaulmyn, La Croix, 27 mars 2001
POLEMIQUE Dimanche, la messe à Saint-Nicolas du Chardonnet a été l'occasion pour la paroisse intégriste d'exprimer sa réticence au processus en cours avec le Vatican
" Prudence et inquiétude. " C'est l'attitude qui dominait, dimanche, sur le parvis de Saint-Nicolas du Chardonnet, concernant les pourparlers en cours entre les lefebvristes et Rome (lire La Croix du 21 mars). Même ton dans l'homélie de Mgr Bernard Tissier de Mallerais, l'un des quatre évêques schismatiques ordonnés par le fondateur de la Fraternité Saint-Pie-X, venu dimanche célébrer une messe dans la paroisse parisienne intégriste pour le dixième anniversaire de la mort du fondateur d'Ecône.
Rome doit faire " repentance " pour la rencontre d'Assise
En s' appuyant sur le souvenir de Mgr Lefébvre, l'évêque s'est attaché, tout au long de son homélie, à montrer la distance qui persiste entre la Fraternité Saint-Pie-X et Rome : " Nous ne sommes pas de ceux qui se figurent que, d'ici à quelques mois, quelques années, tout sera réglé ", explique Mgr Tissier de Mallerais. Car, poursuit-il : " Il ne suffit pas qu'ils (les responsables romains) nous donnent la messe. Ils doivent aussi l'accepter de grand coeur." En clair, les intégristes ne se contenteront pas de la simple reconnaissance de la messe selon le rite institué par Pie V : " Ils doivent comprendre, à Rome, qu'ils ne peuvent garder la nouvelle messe ", une messe " oecuménique, ambigüe, protestantisée, d'inspiration maçonnique ", qui " confond le sacerdoce commun des fidèles, et le sacerdoce hiérarchique du prêtre ". Il faut que Rome reprenne à son compte ce combat-là, explique en substance Mgr Tissier de Mallerais.
La liturgie actuelle, selon le rite promulgué par Paul VI, n'est pas la seule pierre d'achoppement aux yeux des intégristes. Pour Mgr Tissier de Mallerais, le pouvoir du Successeur de Pierre est de " transmettre fidèlement le dépôt de la foi, et non de découvrir une doctrine nouvelle " comme, par exemple, l'oecuménisme ou la liberté religieuse. Sur ces sujets, les lefebvristes invitent Rome à se " convertir ". Plus encore : " Le Pape doit fait une repentance ", notamment pour la rencontre interreligieuse d'Assise.
Mgr Tissier de Mallerais refuse pourtant de fermer totalement la porte : " Il y a quelques petits signes d'un retour de Rome à Rome, remercions Dieu. "
Mais la prudence domine parmi les fidèles venus très nombreux ce dimanche. "Nous n'allons pas abandonner trente années de combat", souligne cet homme d'âge mûr en sortant. Plus loin, pourtant, une dame note que, rapprochements ou non, de toute façon, elle-même ne s'est "jamais sentie en dehors de l'Église catholique", malgré "cette étiquette de schismatiques dont on voudrait bien nous affubler".
Isabelle de GAULMYN

Le cardinal Pierre Eyt : "Tout n'est pas négociable"
Voici ce que nous écrit l'archevêque de Bordeaux, expliquant sa prudence à l'égard du rapprochement de Rome et des lefebvristes : " Dans " La Lettre à nos frères prêtres " (NDLR : bulletin de la Fraternité Saint-Pie-X, numéro de mars 2001), (...) des " théologiens lefebvristes " se livrent à (une) attristante caricature de la théologie catholique de l'Eucharistie. Il ne s'agit pas moins que de contester radicalement la doctrine énoncée sur l'Eucharistie par Paul VI et Jean-Paul II. (...) Comment pourrions-nous accepter que d'autres catholiques puissent dire d'une théologie aussi autorisée " qu'ils découvrent avec effroi qu'elle est condamnable et partiellement condamnée par le Magistère authentique de l'Église" ? Ce sont hélas ! des propos de cette sorte que nous tiennent certains évêques et prêtres de la Fraternité Saint-Pie-X au moment où ils nous disent aspirer à " se raprocher " de l'Église catholique. De telles différences doctrinales, liturgiques, sacramentelles, institutionnelles, de telles oppositions, non seulement sur le "Mystère pascal" mais sur tant d'autres éléments de la foi, peuvent-elles être surmontées sans examen approfondi et sans délai suffisant ? Pour le moment et concemant ces problèmes, nous sommes nombreux à voir sur cette route davantage d'obstacles que d'ouvertures.

25 mars 2001

Fraternité Saint-Pie X/Rectificatif: Rencontre du 30 décembre dans la "chapelle privée"
25 mars 2001 (ZENIT.org)
ROME, Dimanche 25 mars 2001 (ZENIT.org) Dans notre service du 22 mars il fallait lire "chapelle privée" et non "messe privée": en effet, le responsable de la Fraternité Saint-Pie X, Bernard Fellay, a été reçu par le pape Jean-Paul II pendant cinq minutes le samedi 30 décembre, en sa chapelle privée, vers 11 h 15.
ZF01032506

22 mars 2001

Fraternité St-Pie X: Des contacts "voulus" par Jean-Paul II
Déclaration de M. Navarro-Valls
Cité du Vatican, Jeudi 22 mars 2001 (ZENIT.org) ZF0103220
Le pape Jean-Paul II a "voulu" l'établissement de contacts avec la Fraternité Saint-Pie X.

"Voulus par le Saint-Père"
Le directeur de la salle de presse confirme ce matin dans une déclaration les "contacts formels" entre le Saint-Siège et la Fraternité Saint-Pie X.
"Ces contacts, voulus par le Saint-Père, précise la déclaration de M. Joaquin Navarro-Valls, sont encore en cours". Il concluait: "Pour le moment, je n'ai pas d'autres informations".
Les observateurs autorisés à Rome soulignant en effet que l'insistance du pape Jean-Paul II sur le chemin d'unité que les chrétiens sont appelés à faire pour le troisième millénaire et ses paroles sur l'exercice de la primauté comme service de l'unité, de la charité, de la "communion" ne peuvent qu'inclure la recherche du dialogue aussi avec la Fraternité Saint-Pie X.

La messe du 30 décembre
A l'occasion de la nomination de quatre nouveaux membres de la commission Ecclesia Dei, Zenit avait rappelé, le 25 février, à la fois le Jubilé romain de la Fraternité, en août dernier, mais aussi la présence du supérieur de la Fraternité Saint-Pie X, Mgr Bernard Fellay, à la messe privée de Jean-Paul II le 30 décembre, et les contacts répétés avec le cardinal Hoyos. Nous avons aussi rapporté les propos de Mgr Perl, confirmant ces contacts, le 18 mars dernier.

"Nous n'avons pas à être réintégrés"
Or, l'abbé Arnaud Sélégny, secrétaire général de la Fraternité à Menzingen (Suisse), vient de déclarer à l'Apic que les tractations n'ont pas eu lieu avec la Commission "Ecclesia Dei", que la Fraternité n'accepte pas comme partenaire de négociation, "mais avec le cardinal Castrillon Hoyos en personne, et que celui-ci mène les négociations "en tant que délégué particulier du pape".
"Nous refusons absolument d'avoir quelque chose à faire avec la Commission Ecclesia Dei, qui est chargée de réintégrer des gens dans l'Eglise, alors que nous sommes dans l'Eglise, car nous n'avons pas à être réintégrés", rapporte l'agence de Fribourg.

L'ordination épiscopale du 30 juin 1988
Cependant, le document "Ecclesia Dei adflicta" de 1988 parle d'un acte de "désobéissance", un "acte schismatique" de la part de Mgr Marcel Lefebvre. Le texte du Motu proprio rappelle les faits (n. 1): "C'est avec beaucoup de tristesse que l'Eglise de Dieu a appris l'ordination épiscopale illégitime conférée le 30 juin dernier par Mgr. Marcel Lefebvre, qui a rendu vains tous les efforts que le Saint-Siège a déployés ces dernières années pour assurer la pleine communion avec l'Eglise de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X fondée par le même Mgr. Lefebvre. Tous ces efforts, spécialement ceux de ces derniers mois particulièrement intenses, n'ont servi à rien alors que le Siège apostolique a fait preuve de patience et d'indulgence jusqu'à la limite du possible".

"Un véritable refus de la primauté de l'évêque de Rome"
Le texte prend acte de cette "désobéissance" "en une matière très grave", à savoir un "véritable refus de la primauté de l'évêque de Rome", ce qui "constitue un acte schismatique" (n. 3): "En lui-même, cet acte a été une désobéissance au Souverain Pontife en une matière très grave et d'une importance capitale pour l'unité de l'Eglise, puisqu'il s'agit de l'ordination d'évêques par laquelle se perpétue sacramentellement la succession apostolique. C'est pourquoi une telle désobéissance, qui constitue en elle-même un véritable refus de la primauté de l'évêque de Rome, constitue un acte schismatique. En accomplissant un tel acte malgré la monition formelle qui lui a été envoyée par le cardinal préfet de la Congrégation pour les Evêques le 17 juin dernier, Mgr. Lefebvre a encouru avec les prêtres Bernard Fellay, Bernard Tissier de Mallerais, Richard Williamson et Alfonso de Galarreta, la grave peine de l'excommunication prévue par la discipline ecclésiastique".

Pour un "engagement renouvelé de fidélité au Christ et à son Eglise"
Mais le texte invitait aussi tous les catholiques à la "réflexion" et à la "fidélité" au Christ et à l'Eglise. Il souligne la "tristesse" ressentie par Jean-Paul II (n. 2): "Cette tristesse est particulièrement ressentie par le successeur de Pierre à qui revient en premier de veiller à l'unité de l'Eglise, même si le nombre des personnes concernées directement par ces événements est relativement réduit. Car chaque personne est aimée de Dieu pour elle-même et a été rachetée par le sang du Christ versé sur la Croix pour le salut de tous les hommes. Les circonstances particulières, objectives et subjectives, qui entourent l'acte accompli par Mgr. Lefebvre offrent à tous l'occasion d'une réflexion profonde et d'un engagement renouvelé de fidélité au Christ et à son Eglise".
[Coordonnées des documents "Ecclesia Dei Adflicta"]

21 mars 2001

[Aletheia n°12] La Fraternité Saint-Pie X et la nouvelle messe (suite) - par Yves Chiron

Aletheia n°12 - 27 mars 2001

On a attiré mon attention sur le fait que le dernier numéro d’Alètheia, consacré à l’ouvrage publié par la Fraternité Saint-Pie X sous le titre Le Problème de la réforme liturgique, a suscité un certain émoi dans les sphères dirigeantes de la dite-Fraternité. Ce fut plus que du mécontentement. Venant de tous autres horizons, d’autres réactions me sont parvenues. Je voudrais donc revenir sur ce livre important [1] .

Une figure éminente du monde éditorial de la Fraternité Saint-Pie X disait, avec quelque condescendance, qu’Alètheia n’a “ qu’un intérêt anecdotique ”. Je dirais plus exactement, au risque de répéter l’avertissement qui figure en tête de chaque numéro, qu’Alètheia est une lettre libre d’informations religieuses. Ni plus, ni moins.

1. Tout ce qui s’y imprime n’engage que moi, et en aucune manière les publications auxquelles, par ailleurs, je collabore.

2. Les analyses que cette modeste lettre publie n’entendent pas prendre parti dans les querelles perpétuelles que certains, dans le monde traditionaliste, s’évertuent, semble-t-il, à maintenir, pour s’assurer de leur existence et de leur bonne marche sur la voie qu’ils ont choisie.

3. Cette modeste lettre ne vit que de la bienveillance et de la charité de ses lecteurs, des lecteurs qui s’inscrivent dans une géographie ecclésiale très diverse, de Paris à Rome, de la Suisse à la Provence. A défaut de pouvoir être, hélas, un lien d’amitié, elle est un lien d’informations, au service de la seule vérité.

• Ce sont les “ quelques remarques d’un fidèle du dernier rang ”, qui accompagnaient la présentation du livre, qui ont suscité l’émoi évoqué plus haut. On les juge “ superficielles ”, ce qui ne signifie pas erronées. Je laisse aux théologiens qualifiés le soin de discuter plus en profondeur les analyses du livre.

Sur le plan formel, il est clair que cette étude sur “ la messe de Vatican II et de Paul VI ” est, de la part de la FSPX, une nouvelle approche de la question. L’angle d’attaque choisi, si l’on peut dire, est

celui de la doctrine du mystère pascal, qui serait sous-jacente à toute la réforme liturgique. Cet angle d’attaque est-il pertinent ? Aux théologiens et liturgistes de répondre.

En revanche, on peut saluer l’effort doctrinal que fait, par ce livre, la FSPX. Elle ne s’en tient plus au Bref examen de la nouvelle messe des cardinaux Ottaviani et Bacci, qui date de 1969. La FSPX a voulu aller aux sources elles-mêmes de cette réforme : les liturgistes et théologiens qui, à travers notamment le Consilium, l’ont inspirée. D’où une multiplication de références et de citations d’auteurs.

Mais cette méthode a ses limites. A plusieurs reprises, les auteurs appuient leurs démonstrations par des citations de théologiens et de liturgistes, dans leurs oeuvres de différentes époques, et les entremêlent de citations du Magistère actuel. Cette juxtaposition incessante de citations vaut-elle démonstration ?

• Un autre lecteur, figure éminente des catholiques Ecclesia Dei, s’est demandé si ce livre n’était pas une provocation, lancée dans le public au moment où la FSPX négociait à Rome, pour torpiller les dites-négociations.

S’il y a eu, comme je l’ai dit, interrogation, de la part des autorités de la FSPX, sur l’opportunité de publier une tel livre en ce moment, il n’y pas eu volonté de provocation. Cette étude sur la réforme liturgique était en préparation avant que des négociations s’ouvrent avec Rome.

Elle s’inscrit, plus largement, dans un effort d’approfondissement doctrinal auquel est décidée la FSPX. Après la réédition des Dubia sur la liberté religieuse de Mgr Lefebvre, cette étude théologique et liturgique sur la nouvelle messe est une nouvelle étape de cet effort d’approfondissement doctrinal. Il se prolongera à l’avenir, semble-t-il, par des études sur l’oecuménisme, l’ecclésiologie et d’autres sujets.

On peut même dire que la FSPX, par ces différents ouvrages doctrinaux, veut contribuer au débat auquel Jean-Paul II a appelé dans le motu proprio Ecclesia Dei adflicta (2.7.1988), demandant aux théologiens d’approfondir “ les points doctrinaux qui, peut-être à cause de leur nouveauté, n’ont pas été compris dans certaines parties de l’Eglise. ”

• En matière liturgique, parmi ceux qu’on appelle les catholiques Ecclesia Dei, le C.I.E.L. (Centre International d’Etudes Liturgiques) présidé par Loïc Mérian, est l’instance qui, avec des théologiens qualifiés et le soutien de plusieurs cardinaux, a le plus oeuvré, depuis des années, à cet approfondissement doctrinal. Les colloques réunis chaque année par le CIEL, et dont les actes sont publiés, témoignent de cette réflexion approfondie engagée, au service de l’Eglise.

Ne serait-il pas opportun que le CIEL organise un colloque sur cette doctrine du “ mystère pascal” que mettent en cause les auteurs du Problème de la réforme liturgique ?

• Le cardinal Medina, Préfet de la Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements, a déjà adressé une lettre aux supérieurs de la FSPX relatives à ce livre. On en ignore la teneur. Il serait étonnant que l’épiscopat français, au moins par le SNOP, ne réagisse pas à son tour puisque le livre a été envoyé à 22.000 prêtres de France. Il est simplement à espérer que cette réaction ne prendra pas la forme d’un communiqué de mise en garde, comme il y en a eu jadis à l’égard d’autres traditionalistes. L’étude sur la nouvelle messe produite par la FSPX mérite une réponse appropriée, c’est à dire des “ clarifications doctrinales et liturgiques ” comme le demande Mgr Fellay dans l’Adresse au Saint-Père qui ouvre le livre.

• Pendant longtemps, on a prêché dans certaines chapelles de la FSPX qu’il valait mieux ne pas assister à la nouvelle messe si on ne pouvait pas assister à la messe selon le rite traditionnel. Cette position est-elle encore celle soutenue par la FSPX ? Il le semble, à lire la page 115 de l’ouvrage cité. Cette position n’est pas sans poser des problèmes théologiques divers. Je laisse aux théologiens le soin d’en discuter.

• Enfin, les différents points soulevés dans cette lettre, comme les “ remarques ” faites dans le précédent numéro, n’empêchent pas que je partage pleinement l’objectif poursuivi par les auteurs du livre : que des “ clarifications doctrinales et liturgiques ” du N.O.M. soient apportées par le Magistère. On peut aussi, tout uniment, partager les demandes de la FSPX : que la liturgie romaine traditionnelle soit universellement autorisée pour tous les prêtres et qu’il y ait “ modification ou abrogation ” de la nouvelle liturgie.

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[1] Le Problème de la réforme liturgique, éditions Clovis (B.P. 88, 91152 Etampes), 128 pages , 69 F.

20 mars 2001

[Alexandre Moncrif - Certitudes] "Le problème de la réforme liturgique"

Alexandre Moncrif - Certitudes - mars 2001

En novembre dernier, le Supérieur général de la Fraternité Saint-Pie X, Mgr Fellay, a été invité par le cardinal Castrillon, au nom du pape Jean-Paul II, à se rendre à Rome en vue de « conversations ». La Fraternité Saint-Pie X a répondu à ces avances avec le maximum de bonne volonté.

Lors d'un entretien le 16 janvier, Mgr Fellay a cependant posé des conditions à ces négociations. De plus, le 19 février, un document sur la messe, intitulé Le problème de la réforme liturgique, a été remis au pape et à ses conseillers.

Les propositions romaines suscitent la méfiance dans la Fraternité Saint-Pie X. Ses dirigeants se demandent si ces ouvertures n'ont pas pour but de la diviser, voire de la faire exploser. L'entreprise de déstabilisation menée récemment contre la Fraternité Saint-Pierre par le cardinal Castrillon invite à cette méfiance.

Cependant, ces arguments ne sont pas les seuls à considérer. L'espérance chrétienne certifie que les portes de l'enfer n'ont pas prévalu et ne prévaudront pas contre l'Église. Celle-ci est ébranlée, affaiblie, mais pas morte. Or c'est précisément l'Église que la Fraternité Saint-Pie X veut servir, selon ses moyens, afin de lui rendre sa Tradition.

Aujourd'hui, le fait vraiment nouveau est que Rome fait les propositions les plus larges qu'elle ait jamais faites, et ceci de façon entièrement spontanée. 
Les « conversations » avec Rome 
Nul ne sait, donc, si ces « conversations » vont aboutir à quoi que ce soit. Mais Mgr Fellay estime qu'avec la plus grande prudence, il faut essayer de travailler pour l'Église en participant à ces « conversations ».

Comme il a été dit, la Fraternité Saint-Pie X a posé des conditions à ces « conversations ». Le préalable essentiel consiste en la reconnaissance Officielle de la liberté de la messe traditionnelle pour tous les prêtres et fidèles du monde entier.

Cependant, il est patent que la Fraternité Saint-Pie X ne réclame pas uniquement la liberté de la liturgie traditionnelle. Son opposition à la nouvelle liturgie et son attachement à la liturgie traditionnelle sont fondés sur des motifs théologiques graves. C'est ce qui explique la parution du récent document de la Fraternité Saint-Pie X sur la nouvelle messe, Le problème de la réforme liturgique.

Ce document s'insère dans une série de travaux que la Fraternité Saint-Pie X compte mener sur les points qui font problème entre Rome et elle, afin d'instaurer sur le plan théologique un dialogue sérieux et honnête, n fait suite au premier ouvrage concernant la liberté religieuse, ouvrage remis à Rome en 1985 et récemment réédité (Mgr Marcel Lefebvre, Mes doutes sur la liberté religieuse, Clovis, 2000).

La préparation de ce document est antérieure aux récentes « conversations » avec Rome. C'est en janvier 2000 qu'a été constituée la commission de cinq prêtres chargée de rédiger cette nouvelle analyse critique de la réforme liturgique.

L'un des membres de la commission ayant attiré l'attention sur la notion de « mystère pascal », la commission est partie dans cette direction, qui lui a fait découvrir deux notions connexes, celle du sacrement comme « mystère » et celle du « mémorial ».

En reprenant à cette lumière l'analyse systématique des documents officiels de la réforme liturgique, la commission a découvert une multitude de textes indiquant qu'il s'agit des notions centrales pour interpréter la réforme. La commission a alors travaillé sur ces thèmes pour mieux les comprendre et manifester leur cohérence interne.

Il faut d'ailleurs noter que la première réponse de Rome à la Fraternité Saint-Pie X, réponse semi-officielle, a reconnu la parfaite pertinence de cette présentation des faits, même si, évidemment, elle en conteste les conclusions.

L'ouvrage est donc bâti autour des trois notions-clés déjà citées : le « mystère pascal », le sacrement comme « mystère » et le « mémorial ». Ces trois notions sont d'abord retrouvées dans la nouvelle messe (les trois chapitres de la première partie, liturgique), exposées et analysées ensuite en elles-mêmes (les trois chapitres de la deuxième partie, théologique), comparées enfin au Magistère authentique de l'Église (les trois chapitres de la troisième partie, dogmatique).

En utilisant cette nouvelle approche, la commission s'est profondément démarquée du Bref examen critique du Novus ordo missae (Disponible dans le recueil La raison de notre combat, la messe catholique, Clovis, 1999). Cet ouvrage majeur, d'une exceptionnelle qualité, rédigé en 1969 juste après la parution de la nouvelle messe, est la source de toutes les analyses critiques de la réforme liturgique des trente dernières années.

On peut exposer la différence fondamentale entre les deux textes de la façon suivante. Le Bref examen critique part de la « grille de lecture » catholique. Il prend donc la nouvelle messe telle qu'elle se présente à lui et l'examine du point de vue de la théologie classique.

Le problème de la réforme liturgique, lui, utilise la « grille de lecture » conciliaire, réformatrice. Il commence par rechercher sur quelles bases théologiques, et en fonction de quelle cohérence interne, cette nouvelle liturgie se construit et se comprend. C'est seulement quand la pensée de la réforme est clairement définie qu'elle est comparée à l'enseignement catholique.

On peut aussi les distinguer de la façon suivante. Le Bref examen critique, ayant pour objet d'aider ses lecteurs à prendre une décision pratique immédiate, rassemble, c'est sa force, tous les motifs nécessaires et suffisants pour qu'un catholique refuse la nouvelle messe.

Le problème de la réforme liturgique, lui, fait un pas en avant : il s'efforce de comprendre la nouvelle messe, d'en situer le principe explicatif et d'en tirer les conséquences sous le regard de la foi.

Or, selon le mot de Paul VI, le 13 janvier 1965, « la nouvelle pédagogie religieuse que veut instaurer la présente rénovation liturgique s'insère, pour prendre presque la place de moteur central, dans le grand mouvement inscrit dans les principes constitutionnels de l'Église de Dieu ». C'est dire que mieux comprendre la réforme liturgique permet de mieux comprendre la révolution conciliaire, et ainsi de mieux la combattre. A ce titre, Le problème de la réforme liturgique est une avancée majeure dans le combat de la Tradition, un ouvrage que tout catholique doit lire absolument.

Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, Le problème de la réforme liturgique, Clovis, 2000, 128 pages, 69 francs.

15 mars 2001

[Aletheia] La Fraternité Saint-Pie X et la nouvelle messe

Yves Chiron - Aletheia n°11 - 15 mars 2001

La Fraternité Saint-Pie X et la nouvelle messe

La Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X vient de faire paraître un ouvrage sur la réforme liturgique. D’après nos informations, l’ouvrage était en préparation avant l’ouverture des discussions avec Rome, mais celles-ci lui donnent un relief particulier. Aussi, cette étude est-elle précédée d’une Adresse au Saint Père, en date du 2 février, rédigée par Mgr Fellay. L’ouvrage, avant d’être rendu public, a été envoyé, au milieu du mois de février, au pape Jean-Paul II, et aux cardinaux Ratzinger, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la Foi, Medina, préfet de la Congrégation pour le culte divin et Castrillon Hoyos, préfet de la Congrégation pour le clergé et président de la Commission pontificale Ecclesia Dei..

C’est dire si, pour la Fraternité Saint-Pie X, il ne s’agit là pas seulement d’une étude de plus sur la nouvelle messe mais aussi d’une prise de position solennelle, en forme de manifeste et de revendication. L’ouvrage, imprimé depuis un certain temps, n’a pas été diffusé de suite dans le public, pour ne pas paraître une provocation au moment où les discussions avec Rome se poursuivaient. Puis, finalement, et alors que ces discussions continuent, l’ouvrage est livré au public. Il sera envoyé aussi à 22.000 prêtres de France, par l’intermédiaire de la Lettre à nos frères prêtres de l’abbé de La Rocque.

Intitulé Le Problème de la réforme liturgique (éditions Clovis, B.P. 88, 91152 Etampes cedex, 125 pages, 69 F), l’ouvrage n’est pas signé mais on croit reconnaître, entre autres, la méthode argumentaire qu’avait employée l’abbé Grégoire Celier dans son essai, La Dimension oecuménique de la réforme liturgique (Fideliter, 1987); et parmi les autres auteurs de cet ouvrage collectif, il y a aussi, sans doute, M. l’abbé de La Rocque, qui travaillait depuis longtemps à une étude de la nouvelle messe.

L’ouvrage se présente comme une “ étude théologique et liturgique ” du nouvel ordo. Sans se référer aux nombreuses études critiques déjà existantes, les auteurs font référence uniquement aux textes officiels de l’Eglise sur la réforme liturgique (notamment l’Institutio generalis Missalis romani, 1969) et aux nombreux théologiens et liturgistes qui ont inspiré ou collaboré à la réforme liturgique.

Dans son “ Adresse au Saint Père ”, Mgr Fellay demande, à propos de la Nouvelle messe, “ des clarifications doctrinales et liturgiques de la part de l’Autorité suprême ” (p. 7) et “ sa modification ou son abrogation ” (p. 7). Il demande aussi - ce fut, on le sait, une des deux exigences posées lors de l’ouverture des négociations avec Rome - que faculté soit donnée à “ tout prêtre de célébrer selon l’intègre et fécond missel romain révisé par saint Pie V, trésor précieux si profondément enraciné dans la tradition millénaire de l’Eglise Mère et Maîtresse. ”

L’étude s’articule ensuite en trois parties et en 122 paragraphes numérotés.

Une première partie tend à démontrer que “ pour désigner les différences entre le missel traditionnel et le nouveau missel le terme de rupture liturgique est plus juste que celui de réforme liturgique ” (p. 16).

Une deuxième partie veut montrer que “ les nombreuses et substantielles différences entre le missel traditionnel et le nouveau missel ” trouvent leur “ principe unificateur ” - et leur inspiration - dans la doctrine, nouvelle, de “ mystère pascal ” (p. 49). En une quarantaine de pages, les auteurs s’emploient à démontrer qu’appliquée à la liturgie cette “ nouvelle théologie ” - qui nierait “ la valeur expiatoire de la mort du Christ comme essentielle à l’oeuvre rédemptrice ” (p. 64) - aboutit à gommer ou à réduire la dimension sacrificielle de la messe.

La dernière partie, la plus brève, entend prouver que la nouvelle messe a introduit une “ rupture dogmatique ” et que “ le nouveau missel ne propage plus la lex credendi de l’Eglise, mais une doctrine à saveur hétérodoxe ” (p. 115).

Quelques remarques d’un fidèle du dernier rang

N’étant pas théologien, et simple fidèle du dernier rang (à la messe dans l’un ou l’autre rite), je me permettrai seulement de faire trois remarques.

• Cette étude, qui cite de très nombreux actes du Magistère, de différentes époques, et de très nombreux théologiens et liturgistes, ne fait pas une seule référence aux actes du Magistère qui, depuis le concile Vatican II, ont réaffirmé avec solennité la doctrine traditionnelle sur la Sainte Eucharistie. Entre autres, l’encyclique Mysterium fidei (1965) de Paul VI toute entière consacrée à mettre en garde, à propos du “ mystère très saint ” de l’Eucharistie, contre “ certaines opinions qui troublent les esprits des fidèles ”. Et du même pape, la Profession de foi (1968), qui réaffirmait, notamment, que la messe “ est le sacrifice du calvaire rendu sacramentellement présent sur nos autels ”.

• Quand les auteurs du Problème de la réforme liturgique font référence aux définitions du Catéchisme de l’Eglise Catholique (1992), ils le font, me semble-t-il, de manière partiale et minimalisante. Le CEC ne définit pas seulement la messe comme un “ mémorial sacrificiel ” mais définit bien l’Eucharistie comme “ un sacrifice ” (1365) et rappelle longuement les définitions du concile de Trente (1366 et 1367).

• Enfin, à propos de la la théologie du “ mystère pascal ”, que les auteurs contestent, on remarquera que l’ouvrage le plus important sur le sujet, celui du père Louis Bouyer, Le Mystère pascal, Cerf, 1945, n’est pas cité. Or, dans cet ouvrage, le père Bouyer, par exemple, faisait une vigoureuse mise en garde contre une conception erronée de l’offertoire et du sacrifice (p. 460, de la 5e édition revue et augmentée, 1957). Cette page rejoint exactement ce que disent les auteurs (p.19-21).

Ceci dit, on lira avec intérêt ce livre accessible à un grand public. On sera d’accord avec Mgr Fellay quand il demande à l’Autorité suprême “ modification ou abrogation ” de la nouvelle messe. Mais entre l’une ou l’autre décision, il y a une différence de taille et on voit mal comment pourrait disparaître une nouvelle liturgie dorénavant trentenaire ...

La Fraternité Saint-Pie X et la nouvelle messe
Yves Chiron, Aletheia n°11 - 15 mars 2001
La Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X vient de faire paraître un ouvrage  sur la réforme liturgique. D’après nos informations, l’ouvrage était en préparation avant l’ouverture des discussions avec Rome, mais celles-ci lui donnent un relief particulier.  Aussi, cette étude est-elle précédée d’une Adresse au Saint Père, en date du 2 février, rédigée par Mgr Fellay. L’ouvrage, avant d’être rendu public, a été envoyé, au milieu du mois de février, au pape Jean-Paul II, et aux cardinaux Ratzinger, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la Foi, Medina, préfet de la Congrégation pour le culte divin et Castrillon Hoyos, préfet de la Congrégation pour le clergé et président de la Commission pontificale Ecclesia Dei..
C’est dire si, pour la Fraternité Saint-Pie X, il ne s’agit là pas seulement d’une étude de plus sur la nouvelle messe mais aussi d’une prise de position solennelle, en forme de manifeste et de revendication. L’ouvrage, imprimé depuis un certain temps, n’a pas été diffusé de suite dans le public, pour ne pas paraître une provocation au moment où les discussions avec Rome se poursuivaient. Puis, finalement, et alors que ces discussions continuent, l’ouvrage est livré au public. Il sera envoyé aussi à 22.000 prêtres de France, par l’intermédiaire de la Lettre à nos frères prêtres de l’abbé de La Rocque.
Intitulé Le Problème de la réforme liturgique (éditions Clovis, B.P. 88, 91152 Etampes cedex, 125 pages, 69 F), l’ouvrage n’est pas signé mais on croit reconnaître, entre autres, la méthode argumentaire qu’avait employée l’abbé Grégoire Celier dans son essai, La Dimension oecuménique de la réforme liturgique  (Fideliter, 1987); et parmi les autres auteurs de cet ouvrage collectif, il y a aussi, sans doute, M. l’abbé de La Rocque, qui travaillait depuis longtemps à une étude de la nouvelle messe.
L’ouvrage se présente comme une “ étude théologique et liturgique ” du nouvel ordo. Sans se référer aux nombreuses études critiques déjà existantes, les auteurs font référence uniquement aux textes officiels de l’Eglise sur la réforme liturgique (notamment l’Institutio generalis Missalis romani, 1969) et aux nombreux théologiens et liturgistes qui ont inspiré ou collaboré à la réforme liturgique.
Dans son “ Adresse au Saint Père ”, Mgr Fellay demande, à propos de la Nouvelle messe, “ des clarifications doctrinales et liturgiques de la part de l’Autorité suprême ” (p. 7) et “ sa modification ou son abrogation ” (p. 7). Il demande aussi - ce fut, on le sait, une des deux exigences posées lors de l’ouverture des négociations avec Rome - que faculté soit donnée à “ tout prêtre de célébrer selon l’intègre et fécond missel romain révisé par saint Pie V, trésor précieux si profondément enraciné dans la tradition millénaire de l’Eglise Mère et Maîtresse. ”
L’étude s’articule ensuite en trois parties et en 122 paragraphes numérotés.
Une première partie tend à démontrer que “ pour désigner les différences entre le missel traditionnel et le nouveau missel le terme de rupture liturgique est plus juste que celui de réforme  liturgique ” (p. 16). 
Une deuxième partie veut montrer que “ les nombreuses et substantielles différences entre le missel traditionnel et le nouveau missel ” trouvent leur “ principe unificateur ” - et leur inspiration - dans la doctrine, nouvelle, de “ mystère pascal ” (p. 49). En une quarantaine de pages, les auteurs s’emploient à démontrer qu’appliquée à la liturgie cette “ nouvelle théologie ” - qui nierait “ la valeur expiatoire de la mort du Christ comme essentielle à l’oeuvre rédemptrice ” (p. 64) - aboutit à gommer ou à réduire la dimension sacrificielle de la messe.
La dernière partie, la plus brève, entend prouver que la nouvelle messe a introduit une “ rupture dogmatique ” et que “ le nouveau missel ne propage plus la lex credendi de l’Eglise, mais une doctrine à saveur hétérodoxe ” (p. 115).

Quelques remarques d’un fidèle du dernier rang
N’étant pas théologien, et simple fidèle du dernier rang (à la messe dans l’un ou l’autre rite), je me permettrai seulement de faire trois remarques.
• Cette étude, qui cite de très nombreux actes du Magistère, de différentes époques, et de très nombreux théologiens et liturgistes, ne fait pas une seule référence aux actes du Magistère qui, depuis le concile Vatican II, ont réaffirmé avec solennité la doctrine traditionnelle sur la Sainte Eucharistie. Entre autres, l’encyclique Mysterium fidei (1965) de Paul VI  toute entière consacrée à mettre en garde, à propos du “ mystère très saint ” de l’Eucharistie, contre “ certaines opinions qui troublent les esprits des fidèles ”. Et du même pape, la Profession de foi (1968), qui réaffirmait, notamment, que la messe “ est le sacrifice du calvaire rendu sacramentellement présent sur nos autels ”.
• Quand les auteurs du Problème de la réforme liturgique font référence aux définitions du Catéchisme de l’Eglise Catholique (1992), ils le font, me semble-t-il, de manière partiale et  minimalisante. Le CEC ne définit pas seulement la messe comme un “ mémorial sacrificiel ” mais définit bien l’Eucharistie comme “ un sacrifice  ” (1365) et rappelle longuement les définitions du concile de Trente (1366 et 1367).
• Enfin, à propos de la la théologie du “ mystère pascal ”, que les auteurs contestent, on remarquera que l’ouvrage le plus important sur le sujet, celui du père Louis Bouyer, Le Mystère pascal, Cerf, 1945, n’est pas cité. Or, dans cet ouvrage, le père Bouyer, par exemple, faisait une vigoureuse mise en garde contre une conception erronée de l’offertoire et du sacrifice (p. 460, de la 5e édition revue et augmentée, 1957). Cette page rejoint exactement ce que disent les auteurs (p.19-21).
Ceci dit, on lira avec intérêt ce livre accessible à un grand public. On sera d’accord avec Mgr Fellay quand il demande à l’Autorité suprême “ modification ou abrogation ” de la nouvelle messe. Mais entre l’une ou l’autre décision, il y a une différence de taille et on voit mal comment pourrait disparaître une nouvelle liturgie dorénavant trentenaire ...

2 mars 2001

[Aletheia] Une notification de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi - Renforcement de la Commission Pontificale Ecclesia Dei - Revue des revues

Yves Chiron - Aletheia n°10 - 2 mars 2001

I. Une notification de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (document).

II. Renforcement de la Commission Ecclesia Dei.

III. Revue des revues.


Une notification de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi

La récente Déclaration Dominus Jesus “ sur l’unicité et l’universalité salvifique de Jésus-Christ et de l’Eglise ” publiée par la Congrégation pour la doctrine de la Foi en 2000 [AAS, 92 (2000), 742-765] réfutait des erreurs répandues dans certains milieux et dans certains écrits. Etait visé, notamment, sans être nommé explicitement, l’ouvrage publié par le père Jacques Dupuis, s.j., ancien professeur à l’Université grégorienne : Vers une théologie chrétienne du pluralisme religieux (Paris, Cerf, 1997).

Aujourd’hui, de manière plus explicite, la même Congrégation publie une Notification concernant directement ce livre. Estimant que l’ouvrage contient “ de graves ambiguïtés et des difficultés sur des points doctrinaux qui peuvent conduire le lecteur à des opinions erronées ou dangereuses ”, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi publie une mise au point doctrinale qui a été approuvée par Jean-Paul II durant l’audience du 21 novembre 2000 et confirmée le 19 janvier 2001.

Le père Jacques Dupuis, dit la Notification, “ s’est engagé à reconnaître les thèses énoncées et à s’en tenir à l’avenir, dans ses activités théologiques et ses publications, aux contenus doctrinaux indiqués ”. Il s’est engagé aussi à faire figurer la Notification de la Congrégation pour la Doctrine de la foi dans toute réédition, réimpression et traduction de son ouvrage.

Voici les cinq points doctrinaux rappelés par la Notification (dont on trouvera le texte intégral sur le site internet du Vatican et, bientôt, dans la Documentation catholique) :

I. A propos de la médiation salvifique unique et universelle de Jésus-Christ

1. Il faut croire fermement que Jésus-Christ, Fils de Dieu fait homme, crucifié et ressuscité, est le médiateur unique et universel du salut de toute l’humanité.

2. Il faut aussi croire fermement que Jésus de Nazareth, Fils de Marie et seul Sauveur du monde est le Fils et le Verbe du Père. En raison de l’unité du plan divin de salut, qui a son centre en Jésus-Christ, il faut tenir en outre que l’oeuvre salvifique du Verbe est accomplie dans et par Jésus-Christ, Fils incarné du Père, en tant que médiateur du salut de toute l’humanité. Il est donc contraire à la foi catholique non seulement d’affirmer une séparation entre le Verbe et Jésus ou une séparation entre l’action salvifique du verbe et celle de Jésus, mais aussi de soutenir la thèse d’une action salvifique du verbe comme tel dans sa divinité, indépendamment de l’humanité du Verbe incarné.

II. A propos de l’unicité et de la plénitude de la révélation de Jésus-Christ

3. Il faut croire fermement que Jésus-Christ est le médiateur, l’accomplissement et la plénitude de la révélation. Il est donc contraire à la foi de l’Eglise de soutenir que la révélation par/en Jésus-Christ soit limitée, incomplète ou imparfaite. En outre, même si on ne possédera la pleine connaissance de la vérité divine qu’au jour de la venue glorieuse du Seigneur, la révélation historique de Jésus-Christ offre tout ce qui est nécessaire pour le salut de l’homme et n’a pas besoin d’être complétée par d’autres religions.

4. Il est conforme à la doctrine catholique d’affirmer que les graines de vérité et de bonté qui se trouvent dans les autres religions participent d’une certaine manière aux vérités contenues par/en Jésus-Christ. Par contre, considérer que ces éléments de vérité et de bonté, ou certains d’entre eux, ne dérivent pas ultimement de la méditation-source de Jésus-Christ, est une opinion erronée.

III. A propos de l’action salvifique universelle de l’Esprit Saint

5. La foi de l’Eglise enseigne que l’Esprit Saint, à l’oeuvre après la résurrection de Jésus Christ, est encore l’Esprit du Christ envoyé par le Père qui opère de manière salvifique aussi bien dans les chrétiens que dans les non-chrétiens. Il est donc contraire à la foi catholique de considérer que l’action salvifique de l’Esprit Saint puisse s’étendre au-delà de l’unique économie salvifique universelle du Verbe incarné.

IV. A propos de l’ordination de tous les hommes à l’Eglise

6. Il faut croire fermement que l’Eglise est signe et instrument de salut pour tous les hommes. Il est contraire à la foi catholique de considérer les diverses religions du monde comme des voies complémentaires à l’Eglise pour ce qui est du salut.

7. Selon la doctrine catholique, les adeptes des autres religions sont eux aussi ordonnés à l’Eglise et sont tous appelés à en faire partie.

V. A propos de la valeur et de la fonction salvifique des traditions religieuses

8. Selon la doctrine catholique, il faut tenir que “ ce que l’Esprit fait dans le coeur des hommes et dans l’histoire des peuples, dans les cultures et les religions, remplit une fonction de préparation évangélique (cf. Const. dogm. Lumen gentium, n. 16) ”. Il est donc légitime de soutenir que l’Esprit Saint pour sauver les non-chrétiens, utilise aussi les éléments de vérité et de bonté qui se trouvent dans les diverses religions, mais considérer comme voie de salut ces religions, prises comme telles, n’a aucun fondement dans la théologie catholique ; en effet, elles présentent des lacunes, des insuffisances et des erreurs sur les vérités fondamentales regardant Dieu, l’homme et le monde.

En outre, le fait que les éléments de vérité et de bonté des différentes religions puissent préparer les peuples et les cultures à accueillir l’événement salvifique de Jésus-Christ, ne suppose pas que les textes sacrés des autres religions puissent être considérés comme complémentaires à l’Ancien Testament, qui est la préparation immédiate à l’évènement du Christ.

Cette Notification est uniquement consacrée aux religions non-chrétiennes ; alors que Domini Jesus évoquait aussi les confessions non-catholiques et l’oecuménisme. Cette Notification, si elle est une critique de certaines tendances actuelles de la théologie des religions, peut aussi être lue comme une clarification de certains actes de Jean-Paul II. Des initiatives spectaculaires, et contestées, comme la rencontre des religions à Assise, le 27 octobre 1986, doivent être interprétées à la lumière de cette Notification qu’il sera difficile d’accuser de syncrétisme.

II. Renforcement de la Commission Pontificale Ecclesia Dei

La Commission avait été instituée par le motu proprio Ecclesia Dei du 2 juillet 1988 “ pour faciliter la pleine communion ecclésiale des prêtres, séminaristes, communautés ou simples religieux et religieuses jusque là liés de quelque manière à la Fraternité fondée par Mgr Marcel Lefebvre, et qui souhaitent restés unis au Successeur de Pierre dans l’Eglise Catholique. ”

Depuis avril 2000, cette Commission est présidée par le cardinal Dario Castrillon Hoyos, préfet de la Congrégation pour le clergé. Ses deux initiatives les plus spectaculaires ont été, jusqu’ici, ses interventions dans la vie interne de la Fraternité Saint-Pierre (avec la nomination d’un nouveau supérieur) et l’ouverture de discussions avec la Fraternité Saint-Pie X (discussions non achevées à ce jour).

Le samedi 24 février, Jean-Paul II a institué un conseil de quatre membres qui viendra assister le Président de la commission. Ce conseil est composé du cardinal Joseph Ratzinger, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi ; du cardinal Jorge Medina Estevez, préfet de la Congrégation pour le culte divin ; du cardinal Louis-Marie Billé, archevêque de Lyon et de Mgr Julian Herranz, président du Conseil pontifical pour l’interprétation des textes législatifs.

Ce renforcement notable de la Commission Ecclesia Dei et la présence, pour la première fois, d’un Français dans ses organes de direction, ne sont sans doute pas sans rapport avec les discussions ouvertes actuellement avec la Fraternité Saint-Pie X.

III. Revue des revues

. Pio IX (Palazzo dei Canonici, 00120 Cité du Vatican), la revue de la postulation du bienheureux Pie IX publie, en un numéro spécial de 125 pages, les actes du symposium international qui s’est tenu à Rome le 14 septembre 2000 :

- cardinal Vincenzo Fagiolo La santità di Pio IX ed il suo messagio oggi ;

- cardinal Alfons Maria Stickler, Due perle del Pontificato di Pio IX : l’Immacolata Concezione e l’Infaillibilità Papale ;

- Walter Brandmüller, Il concilio Vaticano I nella storiografia ;

- Francesco Leoni, Pio IX e la storiografia italiana ;

- Yves Bruley, Pie IX vu par les Français : itinéraire dans les sources et l’historiographie ;

- Yves Chiron, Pie IX et la Franc-Maçonnerie.

. Certitudes (23 bis rue des Bernardins, 75005 Paris) publie dans le n° 4 de sa nouvelle série (128 pages, 50 F), un très abondant dossier consacré à “ La gnose éternelle, hérésie et nouvelle religion ”. Par rapport aux élucubrations que l’on a pu lire depuis de nombreuses années dans plusieurs publications traditionalistes, on a là une série d’approches sérieuses et d’un grand intérêt. Sous la plume de Paul Sernine (pseudonyme d’un ecclésiastique, semble-t-il) on trouve une magistrale réfutation de la notion de “ gnose ” qu’ont diffusée Etienne Couvert et ses (défunts) Cahiers Barruel. On appréciera, entre autres, l’étude de la pensée de F. Schuon par l’abbé Christophe Héry qui montre qu’il s’agit, en fait, d’une pensée de l’immanence. Intéressant aussi le témoignage de deux “ rescapés d’une secte gnostique ”.

Si la justice est de à rendre à chacun ce qui lui est dû, il semble que cette définition soit inconnue de certaines publications catholiques. Coup sur coup, l’une reproduit intégralement un document publié par Alètheia sans citer sa source ; l’autre reprend dans un article tous les éléments d’information parus dans Alètheia n° 8, p. 1 à 3, y compris certains détails significatifs, sans citer, elle non plus, sa source.

Alètheia n’est pas une publication commerciale. Ses lecteurs ne lui doivent rien, ses utilisateurs non plus, si ce n’est une utilisation juste quand il s’agit d’informations qu’on ne trouve pas ailleurs.