SOURCE - Nicolas de la Casiniere - liberation.fr - 2 novembre 2005
Des paroissiens de Notre-Dame-des-Victoires ne sont pas ravis de devoir cohabiter avec les traditionalistes.
L'église catholique Notre-Dame-des-Victoires devra désormais aménager dans son choeur un autel «bi-messe». Ses fidèles sont en train de réfléchir aux moyens techniques qui permettront à la table de célébration de se retourner pour accueillir concomitamment deux rites. L'ordinaire, avec un prêtre qui continue de faire face au public pendant la messe, et à lui parler en français. Et le nouveau venu, avec un curé qui tournera le dos aux fidèles pour entonner pater, ave et autres prières, comme dans l'ancien temps. Les paroissiens de Notre-Dame ont jusqu'à Noël pour mettre en place l'autel tournant. En attendant, ça fronde dans les rangs.
Plusieurs votes. D'habitude, les traditionalistes célèbrent leurs cérémonies dans leurs propres lieux de culte. A Angers, c'est la chapelle de la Visitation. Mais celle-ci semble avoir des problèmes de chauffage et de sécurité : près de trois cents «tradis» s'y entassent chaque dimanche dans des conditions qui inquiètent l'évêque de la ville, Mgr Bruguès. Une première paroisse, sollicitée pour les accueillir, a décliné. A Notre-Dame, le oui l'a semble-t-il emporté, sans enthousiasme. «Il y a eu plusieurs votes de l'équipe d'animation partiellement favorables, constate Marie-Caroline Terrière, porte-parole de l'évêché. Mais ce n'est qu'indicatif, ça ne lie pas l'évêque. L'Eglise ne fonctionne pas en démocratie participative.» «Il y a une contestation d'un petit groupe, c'est anecdotique, estime encore la porte-parole. La peur du retour des monstres du passé, c'est le combat de la génération précédente.»
Selon elle, la fusion ne peut qu'être profitable à Notre-Dame : «L'Eglise n'a jamais vraiment abandonné ni interdit le latin. La nouveauté, c'est de faire travailler sur un même territoire des chrétiens qui s'ignoraient.» Car, à Angers comme ailleurs, les traditionalistes refusent généralement l'intégrisme. Ils ont seulement conservé le rite en latin de Pie V, malgré les réformes de Vatican II entre 1962 et 1965. Le pape Jean Paul II a réintégré ces fidèles tournés vers le passé dans la communauté catholique, en 1988, il y a plus de quinze ans.
La décision de l'évêque jette pourtant le trouble parmi les fidèles laïcs de la paroisse. Monique Le Lirzin vient ainsi de démissionner de l'équipe liturgique et du portage du bulletin paroissial. Elle affirme publiquement son écoeurement d'une cohabitation forcée : «Après l'élection de Benoît XVI qui a choqué bien des chrétiens, ce choix exacerbe nos inquiétudes sur le repli de l'Eglise vers ceux qui prônent une certaine rigidité et le refus de l'oecuménisme. Nos réticences de paroissiens de base ont été niées. Nous ne sommes plus des moutons ! Mgr Bruguès a manqué de sagesse, même si c'est difficile de dire ça d'un évêque.» Une de ses amies menace carrément : «Arrêtons là le psychodrame, lance-t-elle. Les tradis vont trouver place nette, ils n'entendront plus parler de nous !»
Flottement. Dimanche, à la chapelle de la Visitation, ça ronchonne aussi un peu, les opinions flottent. Une mère de famille jure qu'elle ne mettra jamais les pieds à Notre-Dame, elle ira rejoindre la chapelle des intégristes : «J'ai mes distances avec le pape, et on doit une grande gratitude à Mgr Lefebvre pour le maintien de la messe tridentine, en latin. Les modernistes saccagent beaucoup en tutoyant Dieu.» Un autre adepte regrette «la polémique», et opte pour la voie de la sagesse : «Il faut éviter que les fidèles se dispersent à droite à gauche.» «Les ordres viennent d'en haut, de l'évêque, renchérit une paroissienne. Et à Notre-Dame, ils n'ont pas foule, on est allés voir.» «C'est peut-être une stratégie des prêtres pour se faire mousser en se vantant de gros effectifs ?» hasarde une autre.
De l'autre côté, on ne désarme pas : «Pas sûr que la communauté qui arrive, plutôt de droite et riche, soit en accord avec le quartier populaire autour de Notre-Dame, le seul du centre où il y a des HLM», avertit Monique Le Lirzin.
Des paroissiens de Notre-Dame-des-Victoires ne sont pas ravis de devoir cohabiter avec les traditionalistes.
L'église catholique Notre-Dame-des-Victoires devra désormais aménager dans son choeur un autel «bi-messe». Ses fidèles sont en train de réfléchir aux moyens techniques qui permettront à la table de célébration de se retourner pour accueillir concomitamment deux rites. L'ordinaire, avec un prêtre qui continue de faire face au public pendant la messe, et à lui parler en français. Et le nouveau venu, avec un curé qui tournera le dos aux fidèles pour entonner pater, ave et autres prières, comme dans l'ancien temps. Les paroissiens de Notre-Dame ont jusqu'à Noël pour mettre en place l'autel tournant. En attendant, ça fronde dans les rangs.
Plusieurs votes. D'habitude, les traditionalistes célèbrent leurs cérémonies dans leurs propres lieux de culte. A Angers, c'est la chapelle de la Visitation. Mais celle-ci semble avoir des problèmes de chauffage et de sécurité : près de trois cents «tradis» s'y entassent chaque dimanche dans des conditions qui inquiètent l'évêque de la ville, Mgr Bruguès. Une première paroisse, sollicitée pour les accueillir, a décliné. A Notre-Dame, le oui l'a semble-t-il emporté, sans enthousiasme. «Il y a eu plusieurs votes de l'équipe d'animation partiellement favorables, constate Marie-Caroline Terrière, porte-parole de l'évêché. Mais ce n'est qu'indicatif, ça ne lie pas l'évêque. L'Eglise ne fonctionne pas en démocratie participative.» «Il y a une contestation d'un petit groupe, c'est anecdotique, estime encore la porte-parole. La peur du retour des monstres du passé, c'est le combat de la génération précédente.»
Selon elle, la fusion ne peut qu'être profitable à Notre-Dame : «L'Eglise n'a jamais vraiment abandonné ni interdit le latin. La nouveauté, c'est de faire travailler sur un même territoire des chrétiens qui s'ignoraient.» Car, à Angers comme ailleurs, les traditionalistes refusent généralement l'intégrisme. Ils ont seulement conservé le rite en latin de Pie V, malgré les réformes de Vatican II entre 1962 et 1965. Le pape Jean Paul II a réintégré ces fidèles tournés vers le passé dans la communauté catholique, en 1988, il y a plus de quinze ans.
La décision de l'évêque jette pourtant le trouble parmi les fidèles laïcs de la paroisse. Monique Le Lirzin vient ainsi de démissionner de l'équipe liturgique et du portage du bulletin paroissial. Elle affirme publiquement son écoeurement d'une cohabitation forcée : «Après l'élection de Benoît XVI qui a choqué bien des chrétiens, ce choix exacerbe nos inquiétudes sur le repli de l'Eglise vers ceux qui prônent une certaine rigidité et le refus de l'oecuménisme. Nos réticences de paroissiens de base ont été niées. Nous ne sommes plus des moutons ! Mgr Bruguès a manqué de sagesse, même si c'est difficile de dire ça d'un évêque.» Une de ses amies menace carrément : «Arrêtons là le psychodrame, lance-t-elle. Les tradis vont trouver place nette, ils n'entendront plus parler de nous !»
Flottement. Dimanche, à la chapelle de la Visitation, ça ronchonne aussi un peu, les opinions flottent. Une mère de famille jure qu'elle ne mettra jamais les pieds à Notre-Dame, elle ira rejoindre la chapelle des intégristes : «J'ai mes distances avec le pape, et on doit une grande gratitude à Mgr Lefebvre pour le maintien de la messe tridentine, en latin. Les modernistes saccagent beaucoup en tutoyant Dieu.» Un autre adepte regrette «la polémique», et opte pour la voie de la sagesse : «Il faut éviter que les fidèles se dispersent à droite à gauche.» «Les ordres viennent d'en haut, de l'évêque, renchérit une paroissienne. Et à Notre-Dame, ils n'ont pas foule, on est allés voir.» «C'est peut-être une stratégie des prêtres pour se faire mousser en se vantant de gros effectifs ?» hasarde une autre.
De l'autre côté, on ne désarme pas : «Pas sûr que la communauté qui arrive, plutôt de droite et riche, soit en accord avec le quartier populaire autour de Notre-Dame, le seul du centre où il y a des HLM», avertit Monique Le Lirzin.