5 octobre 2019

[Abbé Pierre-Marie Berthe, fsspx – La Lettre de Saint-Florent] Les dissensions ecclésiales

SOURCE - Abbé Pierre-Marie Berthe, fsspx - La Lettre de Saint-Florent - octobre 2019

L’abbé Pierre-Marie Berthe a publié aux Éditions du Cerf sa thèse de doctorat en droit canonique, intitulée Les dissensions ecclésiales, un défi pour l’Église catholique. Il présente ici à grands traits son ouvrage. 
Que désigne exactement l’expression « les dissensions ecclésiales » ?
L’expression évoque une situation de crise et de division entre baptisés. Ces « dissensions » menacent l’unité de l’Église catholique qui est fondée sur les liens de la profession de foi, du culte et du gouvernement. 

Ces troubles ou dissensions sont de deux sortes. Lorsqu’un différend conduit à une rupture formelle et à la naissance d’une nouvelle entité qui n’appartient plus à l’Église catholique, il y a une « dissidence ». Tel est le cas des Églises dites orthodoxes, du protestantisme et de l’anglicanisme. En revanche, quand une querelle reste dans un cadre institutionnel catholique, il y a un simple « dissentiment ». Telle est la situation du pélagianisme, du jansénisme et du modernisme. 
En quoi les « dissensions ecclésiales » sont-elles un défi pour l’Église catholique ?
Les divisions révèlent souvent qu’il y a un malaise dans l’Église. Elles sont donc un appel à la réforme. De plus, les difficultés d’ordre doctrinal ou disciplinaire qui divisent les chrétiens stimulent la vie intellectuelle, car elles réclament une vraie réflexion. La recherche d’une solution peut être laborieuse, comme le montrent la crise arienne et le Grand Schisme d’Occident. 
Ce livre parle-t-il seulement d’histoire ?
L’ouvrage est sous-titré « Histoire et actualité », car il traite autant du passé que du présent. Il commence par examiner les textes néotestamentaires et patristiques, mais s’achève en évoquant la grave controverse autour d’Amoris laetitia. Ainsi il offre une longue fresque qui intègre l’Antiquité, le Moyen Age, l’époque moderne et contemporaine. Les questions qui sont aujourd’hui très discutées dans l’Église sont éclairées par l’histoire. 
A quel niveau le droit intervient-il ?
Le droit canonique garantit l’ordre à l’intérieur de l’Église catholique. Il impose des règles qui ont pour but de prévenir les conflits et de maintenir la paix, quand des tensions surgissent. Il dispose d’instruments variés pour faire triompher l’unité : exemption, sanction, création d’une commission, convocation d’un concile... De plus, il encadre les relations avec les baptisés non catholiques. Le problème de l’œcuménisme a un aspect canonique. 
En quoi l’œcuménisme est-il problématique ?
L’œcuménisme, tel qu’il est mené habituellement depuis Vatican II, se nourrit d’illusions, car ses acteurs n’ont pas la même conception de l’unité. Ils donnent vie à la communion « imparfaite » par des gestes et des rites sans grande consistance doctrinale. Tous proclament qu’ils sont unis par la foi et la grâce, en attendant d’être rassemblés dans la gloire, mais le fossé doctrinal entre confessions chrétiennes reste entier. C’est pourquoi il est indispensable de changer de perspective. Les ordinariats créés pour les anglicans qui désirent entrer dans l’Église catholique constituent un modèle intéressant pour sortir l’œcuménisme de l’impasse où il se trouve, en lui fixant des objectifs réalistes mieux ancrés dans la doctrine. 
L’ouvrage parle-t-il des relations entre Rome et la Fraternité Saint-Pie X ?
Le livre ne pouvait esquiver ce sujet, mais il ne lui consacre qu’un chapitre, car au regard de l’histoire et de l’actualité ecclésiale l’affaire n’est qu’un petit drame ! Ce chapitre s’intitule « Rome et la Fraternité : exclure et intégrer ». Il met en lumière deux attitudes, d’abord une démarche de condamnation qui s’est révélée pour Rome un échec, puis un lent processus de réconciliation encore inabouti. Il importe de baliser un chemin qui, tout en honorant les exigences canoniques de l’unité catholique, laisse un espace suffisant à la critique doctrinale, chaque fois qu’elle est nécessaire. 
La papauté sort-elle grandie de ce livre ?
Le successeur de Pierre est garant de l’unité dans l’Église. De fait, il arrive que des papes n’apportent pas les réponses adéquates aux difficultés qu’ils rencontrent, mais la primauté romaine demeure une bénédiction pour l’Église. Le christianisme n’a pas d’avenir en dehors de la papauté. Les groupes qui s’écartent d’elle par principe sont dans une impasse institutionnelle. 
Voit-on la main de Dieu dans l’histoire ?
A travers ces querelles multiformes qui opposent les disciples du Christ pour des motifs parfois graves, le croyant découvre que l’Église cache un mystère. Qu’une telle société soit toujours debout, au milieu des nations, après tant de désordres, est un véritable miracle. En tout temps, Dieu suscite des artisans d’unité dans l’Église. 
Comment être artisan d’unité ?
Un chrétien qui cherche véritablement l’unité fait preuve de pondération, de patience et de charité, quand une dissension se produit. Celui qui détient l’autorité doit éviter les solutions trop radicales, en songeant qu’un jour lui aussi se trouvera peut-être en désaccord avec un supérieur ou un pape... D’un autre côté, celui qui critique et conteste les décisions de sa hiérarchie doit garder la déférence envers elle et maîtriser sa colère. Sinon, il n’y a plus de vie en société possible. 
Que faire quand la confusion gagne l’Église ?
Il importe de revenir aux éléments fondamentaux de l’identité catholique et d’aborder sans passion les questions qui divisent à la lumière de la Révélation. 
  • Pierre-Marie BERTHE, Les dissensions ecclésiales, un défi pour l’Église catholique, Paris, Éditions du Cerf, 2019, 910 p. [LIEN] — Disponible en librairie