"Les gens qui n’sont pas comme nous Ca nous dérange", fredonne France Gall, en échos à Brassens: "Non, les brav’s gens n’aiment pas que L’on suive une autre route qu’eux..."... Quelle route suit donc le pape?
On a pu lire sur ce respectable site, édition du 14 janvier que Benoît XVI avait, sans demander la permission à M. Lenoir, chef de rédaction pourtant du Monde des Religions, célébré une Messe en la chapelle sixtine "selon le rite traditionnel ou tridentin." Au delà du fait que c’est inexact (le rite était celui de Paul VI qui n’interdit ni de la dire en latin, ni de la dire face au peuple), on peut s’étonner du remous provoqué par cette orientation, jusque dans les rang des anticléricaux et laïcs intégristes de tous poils, qui pourraient (qui leur en tiendrait rigueur ?) se dire qu’il s’en moquent.
Où va le pape ? Revient-il, par crispation identitaire, à un rite révolu par la grâce du dernier concile ?
Le concile de Vatican II ne dit rien de l’orientation de l’autel "face au peuple", c’est en réalité un texte plus tardif, l’Institutio generalis Missalis Romani, l’Introduction générale au nouveau Missel romain de 1969 où, au numéro 262, on lit : « Le grand autel doit être construit détaché du mur, de sorte que l’on puisse facilement tourner autour de lui et célébrer, dessus, vers le peuple [versus populum] ». L’introduction à la nouvelle édition du Missel romain de 2002 a repris ce texte à la lettre, mais il a ajouté à la fin cette remarque : « c’est souhaitable là où c’est possible ».
Commençons par deux remarques : D’abord la question de l’orientation reste, en principe, libre. Autrement dit, si le prêtre considère qu’il en a assez d’avoir devant lui une foule de personnes qui suivent plus ou moins ce qu’il fait, il a bien le droit de changer de sens.
Ensuite, le sens a lui même une signification : les chrétiens à la Messe sont-ils tous tournés vers l’Est, cad vers le soleil levant, c’est à dire vers le Christ (symboliquement, bien sûr), ou bien forment-ils une communauté fermée sur elle-même qui s’autocélèbre dans l’admiration béate de sa propre créativité ?
Dans la préface qu’il a rédigé pour le livre d’Uwe Michael Lang “Conversi ad Dominum”, le cardinal Ratzinger écrit :
L’orientation physique devrait - dit la Congrégation pour le Culte divin - être distincte de l’orientation spirituelle. Quand le prêtre célèbre versus populum, son orientation spirituelle devrait toujours être, de toute façon, versus Deum per Iesum Christum [vers Dieu à travers Jésus-Christ]. Comme les rites, les signes, les symboles et les mots ne peuvent jamais épuiser la réalité ultime du mystère du salut, il faut éviter dans ce domaine les positions unilatérales et érigées en absolu.
Ce n’est pas au peuple que le prêtre tourne le dos, mais avec le peuple il est une communauté ouverte tournée vers Dieu.
On dira, et on aura raison, qu’après tout cela regarde les catholiques. Oui, mais alors pourquoi ce raidissement médiatique, qui voudrait que même le pape soit soumis au magistère suprême de la bien-pensance laïque ?
Une dernière remarque... Au moment où le pape pose ce geste dont on ne consteste pas la valeur symbolique (parce qu’il adresse aux catholiques un message clair : arrêtez de vous regarder le nombril, tournez vos célébrations vers Dieu), il n’est pas un jour sans que de vraies bombes explosent et tuent vraiment des vrais gens. Proportionnellement, reconnaissons que l’indignation s’est émoussée par rapport à ces faits qui pourraient finir par nous sembler relever de la "banalité du mal".
En se tournant vers Dieu, le catholique ne se détourne pas des hommes, au contraire. Mais peut-être qu’en voulant qu’il se tourne vers les hommes, on souhaite secrètement qu’il se détourne de Dieu...
Où va le pape ? Revient-il, par crispation identitaire, à un rite révolu par la grâce du dernier concile ?
Le concile de Vatican II ne dit rien de l’orientation de l’autel "face au peuple", c’est en réalité un texte plus tardif, l’Institutio generalis Missalis Romani, l’Introduction générale au nouveau Missel romain de 1969 où, au numéro 262, on lit : « Le grand autel doit être construit détaché du mur, de sorte que l’on puisse facilement tourner autour de lui et célébrer, dessus, vers le peuple [versus populum] ». L’introduction à la nouvelle édition du Missel romain de 2002 a repris ce texte à la lettre, mais il a ajouté à la fin cette remarque : « c’est souhaitable là où c’est possible ».
Commençons par deux remarques : D’abord la question de l’orientation reste, en principe, libre. Autrement dit, si le prêtre considère qu’il en a assez d’avoir devant lui une foule de personnes qui suivent plus ou moins ce qu’il fait, il a bien le droit de changer de sens.
Ensuite, le sens a lui même une signification : les chrétiens à la Messe sont-ils tous tournés vers l’Est, cad vers le soleil levant, c’est à dire vers le Christ (symboliquement, bien sûr), ou bien forment-ils une communauté fermée sur elle-même qui s’autocélèbre dans l’admiration béate de sa propre créativité ?
Dans la préface qu’il a rédigé pour le livre d’Uwe Michael Lang “Conversi ad Dominum”, le cardinal Ratzinger écrit :
L’orientation physique devrait - dit la Congrégation pour le Culte divin - être distincte de l’orientation spirituelle. Quand le prêtre célèbre versus populum, son orientation spirituelle devrait toujours être, de toute façon, versus Deum per Iesum Christum [vers Dieu à travers Jésus-Christ]. Comme les rites, les signes, les symboles et les mots ne peuvent jamais épuiser la réalité ultime du mystère du salut, il faut éviter dans ce domaine les positions unilatérales et érigées en absolu.
Ce n’est pas au peuple que le prêtre tourne le dos, mais avec le peuple il est une communauté ouverte tournée vers Dieu.
On dira, et on aura raison, qu’après tout cela regarde les catholiques. Oui, mais alors pourquoi ce raidissement médiatique, qui voudrait que même le pape soit soumis au magistère suprême de la bien-pensance laïque ?
Une dernière remarque... Au moment où le pape pose ce geste dont on ne consteste pas la valeur symbolique (parce qu’il adresse aux catholiques un message clair : arrêtez de vous regarder le nombril, tournez vos célébrations vers Dieu), il n’est pas un jour sans que de vraies bombes explosent et tuent vraiment des vrais gens. Proportionnellement, reconnaissons que l’indignation s’est émoussée par rapport à ces faits qui pourraient finir par nous sembler relever de la "banalité du mal".
En se tournant vers Dieu, le catholique ne se détourne pas des hommes, au contraire. Mais peut-être qu’en voulant qu’il se tourne vers les hommes, on souhaite secrètement qu’il se détourne de Dieu...