SOURCE - Lettre 119 de Paix Liturgique - 10 juillet 2008
A 70 jours de la visite de Benoît XVI à Paris, pourquoi Mgr Vingt-Trois renouvelle-t-il ses provocations à propos du Motu Proprio Summorum Pontificum ?
En cette première décade de juillet, la stratégie suicidaire de la Conférence des Evêques de France s'amplifie... comme s'il fallait que le désir de dialogue et de réconciliation qui monte au sein de l'Eglise de France soit muselé avant la venue du Saint Père en France, dans 70 jours.
Nous ne comprenons pas la politique de provocation qui s'est développée cette semaine avec la publication d'un article surréaliste de Nicolas Senèze dans La Croix à l'occasion du premier anniversaire de la promulgation par Benoît XVI du Motu Proprio Summorum Pontificum.
Pourquoi nier à ce point la réalité ? Pourquoi continuer à refuser de voir qu'au moins 15 % des catholiques français veulent vivre leur foi, en pleine communion avec l'Eglise, au rythme de la forme extraordinaire du rite romain (et encore ces chiffres sont-ils le fruit d'études réalisées par des organismes indépendants à une époque où de nombreux fidèles croyaient les mensonges consistant à prétendre que la messe traditionnelle était interdite... que donnerait une telle enquête un an après la réhabilitation de la liturgie traditionnelle...)?
Certes, nous n'incriminons pas personnellement le pauvre Nicolas Senèze qui dans cette pénible affaire, n'est que le bras de la Conférence des Evêques de France et de son Président le Cardinal Vingt-Trois. De fait, ce sont eux les vrais "patrons" de La Croix, organe officieux pour ne pas dire officiel du Conseil permanent de l'épiscopat, et donc les vrais instigateurs de cette campagne incompréhensible. Heureusement, cette cabale n'est pas souhaitée par tous nos pasteurs évêques et curés : les signes nombreux de paix dont nous vous informons chaque semaine et aujourd'hui encore le démontrent.
Mais c'est bien une campagne de grande envergure qui est lancée par les tenants du refus de la paix et depuis une semaine ce sont des dizaines de personnes qui nous interpellent : "Arrêtez, même si vous n'avez pas tort, il faut aimer l'Eglise... Soyez patients, il faut donner du temps au temps et ne pas être trop pressé pour appliquer le motu proprio…il faut docilement suivre vos pasteurs, vous soumettre..."
Mais qui sont donc ces interlocuteurs qui feignent aujourd'hui de tout ignorer de nous ?
20 années ont passé depuis le Motu Proprio de 1988, vingt années durant lesquelles des milliers de fidèles ont adressé - en vain - avec douceur et charité des demandes à nos pasteur pour les implorer d'être généreux et bienveillants. Nous avons eu hélas un bel aperçu de la largesse et de la générosité vues au travers du prisme de l'épiscopat français.
Oui, nous aimons l'Eglise et ne cherchons pas le scandale mais le temps de la langue de buis et du non-dialogue est définitivement terminé. Nous ne pourrons plus continuer à supporter de nos pères la désinformation et le mépris. C'est pourquoi nous allons amplifier dès lundi prochain notre campagne de sensibilisation pour qu'enfin le dialogue s'instaure et que progresse la paix liturgique. En effet, nous allons profiter du long été qui commence pour publier les textes et documents que l'association Oremus à édité et commenté depuis 1990 afin que nos pasteurs et les hommes de bonne volonté constatent que cela fait vingt ans que les ennemis de la paix utilisent les mêmes stratagèmes, voient quelle est la véritable situation et constatent à la lecture de tous ces textes notre profond amour de l'Eglise et de la réconciliation.
N'oublions pas de remercier avec chaleurs tous les évêques et les curés qui avec bonté concourent à la réconciliation.
Qu’ils sachent que nous les aimons et prions pour que le Seigneur les aide.
Christian Marquant
Président d'Orémus
NOTRE DOSSIER ET NOS COMMENTAIRES au sujet de l’article paru dans « La Croix » du 6 juillet 2008
Le motu proprio s’est appliqué en douceur
Un an après la publication de « Summorum Pontificum », par lequel Benoît XVI a libéralisé la liturgie d’avant Vatican II, peu de demandes ont été déposées.
Benoît XVI l’aurait confié à des évêques français de passage à Rome : à ses yeux, le motu proprio Summorum Pontificum du 7 juillet 2007, redonnant droit de cité à la liturgie telle qu’elle était célébrée avant Vatican II, ne concernait qu’un petit nombre de fidèles. De fait, un an exactement après sa publication, le nombre de lieux de culte où la liturgie catholique est célébrée selon la « forme extraordinaire du rite romain » n’a pas explosé : 172 en France, dont 124 où était déjà appliqué le motu proprio Ecclesia Dei adflicta publié en 1988 par Jean-Paul II.
A Paris, les six lieux où la messe dominicale est ainsi célébrée « à l’ancienne » ne rassemblent pas plus d’un millier de fidèles. « On dénombre en général cinq ou six personnes par paroisse qui demandent une célébration selon la forme extraordinaire, explique Mgr Patrick Chauvet, vicaire général, chargé de ce dossier par le cardinal André Vingt-Trois. Du coup, nous les rassemblons par arrondissement ». Selon lui, les curés accueillent avec bienveillance les demandes, du moment qu’elles ne sont pas instrumentalisées par des groupes qui, à l’instar de La Paix liturgique, tentent de fédérer l’opposition aux évêques sur ce sujet.
« Mais avec quelques conditions, souligne le P. Chauvet : qu’il n’y ait pas d’agressivité, et qu’il n’y ait pas de communautés les unes à côté des autres ». C’est le principal souci des évêques de France : éviter toute « ghettoïsation » des fidèles attachés à l’ancien rite. « Dans le 16e arrondissement, ceux qui viennent à Sainte-Jeanne-de-Chantal s’intègrent bien dans la vie paroissiale », relève-t-il. Un an après Summorum Pontificum, seuls douze diocèses de France métropolitaine n’ont pas mis le motu proprio en application.
Faute de demandes
Et c’est davantage faute de demandes que par mauvaise volonté. Ainsi, à Blois, Mgr Maurice de Germiny constatait en septembre dernier qu’« il n’existe pas dans le diocèse de groupe stable de fidèles désireux de reprendre l’usage de la liturgie romaine antérieure à la réforme de 1970 ». Depuis, une « demande courtoise de mise en œuvre » du motu proprio a été adressée pour Vendôme, et l’évêque cherche « un prêtre “ad hoc” » dans son diocèse, plutôt que de faire appel à un institut relevant de la Commission pontificale Ecclesia Dei.
C’est aussi ce choix qu’a fait le cardinal Vingt-Trois à Paris, déclinant l’offre de l’Institut du Bon-Pasteur qui dispose d’un local et d’une chapelle dans le 2e arrondissement. « Ils ne célèbrent que la messe tridentine, ce qui est contraire au motu proprio », souligne Mgr Chauvet. Pas non plus de paroisse personnelle : « Le cardinal ne souhaite pas que les traditionalistes soient traités comme des chrétiens à part : l’objectif du motu proprio est justement de réunifier l’ensemble des catholiques », explique encore le vicaire général.
À Fréjus-Toulon, c’est au contraire cette dernière solution qu’avait retenue Mgr Dominique Rey dès 2005. Résultat : « Il y a eu peu de demandes. Sauf dans le golfe de Saint-Tropez, mais il semble s’agir plus de demandes d’estivants, pour lesquels nous allons trouver une solution », explique le P. Marc Aillet, vicaire général du diocèse.
"Insérer les fidèles dans la vie paroissiale"
« L’important est d’insérer les fidèles dans la vie paroissiale », insiste-t-il, soulignant par exemple que les séminaristes relevant de la paroisse personnelle reçoivent la même formation que les autres au séminaire diocésain – où ils célèbrent chaque jour dans la forme ordinaire –, et que des couples de la paroisse personnelle participent aux équipes de préparation au mariage sur le doyenné de Toulon.
« Mais, si cela se passe bien, cela tient aussi à la personnalité des prêtres qui desservent la paroisse : autant ils sont attachés à la forme extraordinaire du rite romain, autant ils sont ouverts à Vatican II », conclut le P. Aillet.
Reste la question de la réconciliation avec les intégristes, toujours en rupture avec Rome, qui formait l’un des buts avoués de ce motu proprio. Sans doute Benoît XVI n’espérait-il pas grand-chose des responsables de la Fraternité Saint-Pie -X qui, fin juin, ont refusé une énième main tendue ( La Croix du 2 juillet). Rome garde toutefois l’espoir que certains fidèles et prêtres intégristes sauteront cette fois le pas.
À Paris, quelques fidèles de Saint-Nicolas du Chardonnet fréquentent aujourd’hui régulièrement les messes du diocèse selon l’ancien Missel. Et on a recensé l’un ou l’autre prêtre de la Fraternité qui ont demandé à rejoindre des diocèses français. Mais pas non plus, pour l’instant, de raz de marée sur ce plan-là.
Nicolas Senèze
LES COMMENTAIRES DE PAIX LITURGIQUE
- Nous remercions vivement La Croix et en particulier Nicolas Senèze pour cet article qui illustre à merveille la ligne du parti d’un certain clergé français qui contrôle le Conseil permanent de l'épiscopat : « Il y a très peu de demandes d’application du Motu Proprio de Benoît XVI, cela ne concerne qu’un très petit nombre de fidèles, pas de quoi fouetter un chat en somme dans l’Eglise de France qui ne connaît pas de problème liturgique »... Rien de très nouveau pour La Croix qui le jour même de l’entrée en vigueur du Motu Proprio – le 14 septembre 2007 - dans un article qui restera dans les annales de la mauvaise foi titrait déjà « L’ancienne messe ne fait pas recette » ou « Le motu proprio ne provoque pas de raz de marée ». On imagine assez bien quelle sera encore la teneur des articles de La Croix sur le sujet dans un an, dans dix ans ou dans vingt ans… tant son souci premier semble être de coller à un schéma idéologique prédéfini plutôt qu'à la réalité. La Messe était déjà dite avant le Motu Proprio : « Il n’y a pas de demande, cela n’intéresse personne, il n’y a pas de problème liturgique en France » et la publication de ce texte n’a rien changé pour les apparatchiks de l’Eglise de France en faillite de vocations et de fidèles.
- Sur le fond, qu’il nous soit permis de « nuancer » les propos de Nicolas Senèze. Si le Motu Proprio ne fait pas recette, c’est seulement chez les évêques de France, car le peuple des fidèles quant à lui ne l’entend pas de cette oreille. Ainsi à ce jour ce sont près de 900 demandes qui se sont manifestées en France auprès de leurs curés pour obtenir la célébration dans leurs paroisses de la forme extraordinaire du rite romain.
- Ces demandes se répartissent globalement ainsi : un peu plus de 250 demandes "formelles" adressées par des groupes précis, organisés et identifiés à leurs curés, à leur doyens ou dans certains cas directement à leurs évêques et un minimum de 600 demandes " informelles" c'est à dire des demandes adressées avec discrétion par des fidèles à leurs curés dans le souci de ne pas les mettre dans une situation difficile. Dans l'écrasante majorité des cas, ces demandes ont été vaines, pire, pour Nicolas Senèze, elles n'existent même pas !
- Les exemples sont trop nombreux et nous vous renvoyons à nos bilans concernant le diocèse de Versailles (Lettre 112) ou celui de Paris (Lettre 116) que vous pourrez retrouver sur www.paixliturgique.com.
- Que dire aussi des diocèses où la messes est "accordée" (comme si nous en étions encore au régime de 1988 et que le 7 juillet 2007 n'était pas passé par là) une fois par mois devant des centaines de fidèles… Est-ce dans ces cas, comme à Reims, Limoges ou Beaune que la demande n'existe pas pour La Croix ?
Et que dire de ces 15 diocèses où aucune messe motu proprio n'est célébrée mais ou la présence de prieurés de la Fraternité Saint-Pie X démontre que la demande existe bel et bien ?
- Que dire enfin de ces situations, comme à Rambouillet (78) ou Sèvres (92) où les fidèles, bien qu'ayant manifesté leur enthousiasme par centaines, ne sont pas écoutés, tout simplement car pour leurs pasteurs, pour leurs pères ils n'existent pas !
- Que dire de Paris où l’on sait que de nombreuses demandes sont superbement ignorées par un clergé qui refuse de voir la réalité en face. Que dire de la situation à Nogent-sur-Seine, à Langres, à Nanterre, à Verdun, à Evreux, à Amiens, à Saintes et La Rochelle… Les exemples des pieds de plomb avec lesquels les évêques de France reçoivent le texte du Saint Père sont légions. Nous continuerons à nous en faire l’écho. Quoi qu’il en soit, ce ne sont pas les demandes qui font défaut mais bien la mauvaise volonté et n’ayons pas peur des mots, la haine de certains, qui rend lente et difficile l’application du Motu Proprio dans les paroisses.
- La Croix ne semble pas avoir pris à sa juste portée le Motu Proprio et la coexistence pacifique des deux formes de l’unique rite romain qu’il entend établir de fait dans les paroisses. Aux bavardages auxquels certains curés et évêques se prêtent pour refuser l’application du Motu Proprio « faute de groupe stable », nous pouvons renvoyer aux paroles du Cardinal Castrillon Hoyos relatées dans un article publié dans le Daily Telegraph en date du 14 juin 2008 écrit à l'occasion de la célébration d'une messe dans la forme extraordinaire du rite romain à la Cathédrale de Westminster. Lorsqu’on a demandé au Cardinal Castrillon si la messe traditionnelle serait célébrée dans beaucoup de paroisses ordinaires dans l'avenir, il a dit : « Non, pas dans beaucoup de paroisses, mais dans toutes les paroisses ». Le Saint Père offre cette possibilité, non pas à quelques groupes qui la demandent, mais afin que tous connaissent cette façon de célébrer l’Eucharistie. Le Pape Benoît réintroduira le rite ancien, qui sera connu sous le nom de « forme extraordinaire », même là où l’assemblée ne l’a pas demandé. « Les gens ne le connaissent pas, et par conséquent, ne le demandent pas » a expliqué le cardinal.
- Le décalage entre les paroles et les gestes du Saint Père en faveur de la liturgie traditionnelle tant directement qu’à travers ses plus proches collaborateurs et les vieilles rengaines idéologiques gallicanisantes de La Croix est si abyssal qu’on croit rêver… On pourra expliquer une partie de cet aveuglement par la difficulté d’accepter que ce que l’on a considéré comme mort et enterré est bien vivant et en plein essor. Nous n’insisterons pas sur les vocations sacerdotales et religieuses toujours plus nombreuses dans les séminaires traditionnels puisque La Croix dit que cela n’intéresse pas grand monde ; nous n’insisterons pas non plus sur l’explosion des lieux de culte traditionnel dans la plupart du temps trop petits puisque Nicolas Senèze a tranché le débat, « À Paris, les six lieux où la messe dominicale est ainsi célébrée « à l’ancienne » ne rassemblent pas plus d’un millier de fidèles ». Notre ami oublie de préciser que la messe de Sainte-Jeanne-de-Chantal est célébrée à 12 h 45, celle de Saint Pierre de Montrouge à 12 h 00. Alors, oui, tant que le Motu Proprio sera concrètement appliqué à Paris ou ailleurs pour en limiter la portée et le développement, les conclusions hâtives des journalistes aux ordres seront toujours tronquées. La vitalité et l’affluence à l’Eglise Saint-Nicolas-du-Chardonnet (23 rue des Bernardins – 75005 Paris) qui avec ses 5 messes dominicales combles et ses 3 messes par jour en semaine est une des plus importantes paroisses de Paris, démontre s’il en était besoin l’énorme demande insatisfaite de célébrations de la forme extraordinaire du rite romain à Paris.
- Nous en sommes au tout début du commencement de la mise en œuvre du Motu Proprio Summorum Pontificum. Les résistances sont telles que le facteur temps a une importance capitale. La jeune génération de prêtres et de fidèles lassée des querelles d’anciens combattants des uns et des autres aspire plus à travailler à la nouvelle évangélisation qu’à polémiquer. Le Saint Père dans son Motu Proprio permet aux hommes de bonne volonté de mettre en place les conditions pratiques d’une authentique paix liturgique au cœur de toutes les paroisses. Alors travaillons avec courage, demandons à temps et à contre-temps l’application de ce texte prophétique et laissons les morts enterrer les morts. Que notre Saint Père Benoît XVI soit vivement remercié pour la publication de ce texte providentiel pour l’Eglise. Soyons très nombreux à Paris et à Lourdes pour l’en remercier comme il le faut.
Sylvie Mimpontel
Présidente du mouvement pour la Paix Liturgique et la Réconciliation dans l’Église.