15 mars 2019

[Abbé Gabriel Billecocq, fsspx - Le Chardonnet] Le pape du pluralisme

SOURCE - Abbé Gabriel Billecocq, fsspx - Le Chardonnet - mars 2019

Du 3 au 5 février dernier, le pape François s’est rendu aux Emirats Arabes Unis pour un voyage « apostolique ». Il en a profité pour rencontrer plusieurs personnalités du monde islamique. Ces rencontres se sont soldées par un texte intitulé Document sur la Fraternité humaine pour la paix mondiale et la coexistence commune. [1]  Le document est co-signé par le pape François et le grand imam d’Al-Azhar Ahmad Al-Tayyeb.
Bien révélateur du souffle œcuméniste qui s’est emparé de Rome, ce texte, s’il parle de Dieu, ne nomme ni Jésus, ni la très Sainte Vierge, ne parle même pas du Père, et s’il contient une fois le mot salut, c’est pour parler «  de valeurs comme ancre de salut pour tous… » 
     
L’avant-propos commence par ces mots : « La foi amène le croyant à voir dans l’autre un frère à soutenir et à aimer. » Le but est clairement explicité : « Ce document [doit devenir] un guide pour les nouvelles générations envers la culture du respect réciproque, dans la compréhension de la grande grâce divine qui rend frères tous les êtres humains ». 
     
À l’imitation d’une prière, le cœur du document commence par une série de phrases qui débutent toutes par les mots « Au nom de ». Inutile d’y chercher une invocation au Père au Fils ou au Saint-Esprit ! Cependant, dans la série de thèmes invoqués, on trouvera la trilogie révolutionnaire : « Au nom de Dieu qui a créé tous les êtres humains égaux en droits », autrement dit au nom de l’égalité. « Au nom de la fraternité humaine qui embrasse tous les hommes... » « Au nom de la liberté que Dieu a donnée à tous les êtres humains... » On ne peut être mieux servi... L’esprit franc-maçon est là. 
     
Après ces incises, le document se développe autour des notions de tolérance, de paix, de fraternité humaine, d’éthique sans fin dernière et condamne tous les extrémismes. On notera alors quelques attaques larvées contre le véritable christianisme. Par exemple l’intégrisme religieux, associé ici au fondamentalisme (il faut donc entendre certes les intégristes musulmans mais aussi les intégristes catholiques), est le fruit de la solitude, de la frustration et du désespoir et ont tous deux pour conséquence « la dépendance et l’autodestruction individuelle et collective » ! Autrement dit les catholiques dit intégristes sont des malades mentaux. 
    
Un peu plus loin, les Croisades sont implicitement condamnées au nom de la tolérance et de la paix puisque «  les religions n’incitent jamais à la guerre et ne sollicitent pas des sentiments de haine, d’hostilité, d’extrémisme, ni n’invitent à la violence ou à l’effusion de sang ». D’ailleurs, ajoute le document parlant de « notre foi commune en Dieu », « Dieu, le Tout-Puissant, n’a besoin d’être défendu par personne ». Les martyrs des premiers siècles ou les missionnaires ont donc versé leur sang en vain… Le Pape François ne se fait certainement pas des amis avec les saints du Ciel... 
    
Il y a derrière tous ces arguments une notion fausse de père et de frère. Un père est celui qui donne la vie. Les frères sont fils d’un même père et il coule en eux une vie dont l’origine est la même. Or s’il est bien vrai que tous les hommes ont été créés par Dieu, à ce titre ils ont quelque chose de commun : ils dépendent tous du même créateur. Mais à titre de créatures seulement. En revanche on ne dit pas que tout homme est enfant de Dieu. Cette expression est réservée à ceux qui ont en eux la vie divine, laquelle est dans l’âme par la grâce. C’est pourquoi ne sont donc frères au vrai sens du terme et par rapport à Dieu que ceux qui vivent de la grâce et de la charité. Autrement dit ceux qui appartiennent à l’Église catholique.  
    
Ainsi, les juifs, les musulmans et les catholiques ne sont pas frères entre eux, loin s’en faut. Il y a donc dans ces expressions faussées un naturalisme patent, c’est-à-dire que la vie surnaturelle est rabaissée à la vie humaine. 
     
Mais il faut encore lire quelques paragraphes de ce document pour trouver ce qu’il y a peut-être de plus monstrueux. Arguant que « la liberté est un droit de toute personne », le texte affirme aussitôt que « le pluralisme et les diversités de religion, de couleur, de sexe, de race et de langue sont une sage volonté divine ». Autrement dit, dans sa sagesse infinie, Dieu veut qu’il y ait plusieurs religions pour sauvegarder la liberté humaine. Rien n’est plus monstrueux ni même contraire à la foi. Il s’agit là sinon d’une hérésie, tout au moins d’un blasphème. Signé par François. Dans d’autres temps, Rome aurait déclaré sans hésitation hérétique un évêque signant de tels propos. Dans l’avion du retour, François a enfoncé le clou : « Du point de vue catholique, le document ne s’est pas éloigné d’un millimètre de Vatican II… » 
     
En se voulant un consensus a minima sur des notions religieuses très vagues, ce document répond là aux vœux d’une religion noachide, religion universelle voulue par les juifs et si bien expliquée par le rabbin Benamozegh [2]. C’est à se demander donc si le pape a encore la foi et surtout s’il la professe.
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[1] Le document est disponible sur le site du Vatican à l’adresse suivante : vatican.va - Les citations de cet article en sont issues. 
[2]  Élie Benamozegh, Israël et l’Humanité, Albin Michel, 1961