5 août 2008

Archive 4 - Lettre aux évêques à l'occasion de la semaine de l'unité des chrétiens (Janvier 1997)
5 août 2008 - lettre 129 de paixliturgique.com
Nous publions aujourd'hui, une "lettre ouverte" écrite il y a plus de onze ans par l'association Oremus à l'ensemble des évêques de France à l’occasion de la Semaine pour l’unité des chrétiens.
Cette lettre pourrait hélas - quasiment au mot près - être datée d'aujourd'hui tant la situation a peu évolué depuis lors.
Prions pour que nos pasteurs légitimes ouvrent leurs coeurs et fassent que si nous publions encore cette lettre dans dix ans, nous ne puissions plus dire que l'ostracisme a continué et que cette lettre n'a pas pris une ride.

Voici le document:


Paris le 21 janvier 1997


Lettre aux évêques de France
à l’occasion de la Semaine pour l’unité des chrétiens


Monseigneur,

Comme depuis de longues années, l’Eglise a décidé de consacrer la semaine du 18 au 25 janvier 1997 à prier et à œuvrer en faveur de l’unité des chrétiens.

Ce désir de reconstituer l’unité perdue de tous les chrétiens qui adhèrent à une même foi en Jésus-Christ Sauveur n’est pas, pour les catholiques, seulement une pieuse intention mais un impératif évangélique majeur puisque Jésus lui-même a considéré que les croyants devaient être un comme lui-même et le Père sont un (Jean XVII,12) et qu’ainsi « ils soient consommés dans l’unité » (Jean XVII, 23).

Malheureusement, et surtout à vue humaine, ce désir de reconstituer une pleine communion de tous les chrétiens peut nous sembler un espoir chimérique pratiquement impossible à atteindre. En effet, bien souvent les ruptures de l’unité que nous pouvons constater aujourd’hui se sont produites il y a si longtemps qu’elles ont engendré des habitudes, des divergences et des incompréhensions qui ne pourront pas disparaître facilement. Aussi, il nous faut croire que l’instauration d’un dialogue entre les différentes communautés chrétiennes, même s’il est nécessaire à la restauration de la charité, ne suffira pas pour permettre un retour à l’unité que seul l’Esprit, soufflant avec force, pourra réaliser, démontrant ainsi que ce résultat sera en fait presque exclusivement un grâce divine.

Cependant, à côté des ruptures anciennes, enracinées dans un passé lointain, engluées dans des querelles inextricables, il existe, semble-t-il, des situations plus proches de nous où, les ruptures n’étant pas toujours entièrement consommées, les chrétiens peuvent espérer revenir à la pleine communion par un surcroît de charité fraternelle et une ferme volonté de retour à l’unité. Comment ne pas considérer ainsi le groupe de ceux que l’on appelle quelquefois d’une manière péjorative « les intégristes », c’est-à-dire les chrétiens qui ont cru devoir suivre au cours des dernières décennies Monseigneur Lefebvre dans ses choix particuliers ?

Bien évidemment, ces communautés ne constituent pas la majeure partie des catholiques qui, malgré leur fidélité à la liturgie de 1962, sont restés indéfectiblement attachés au siège de Pierre et soumis à leurs pasteurs légitimes, les évêques. Cependant, comment nous-mêmes qui nous considérons en pleine communion avec l’Eglise et sa hiérarchie pourrions-nous rester insensibles à la situation dramatique dans laquelle se trouve un grand nombre de ces frères ?

Ceux qui, comme nous, connaissent bien ces chrétiens savent que c’est souvent avec vigueur qu’ils continuent à s’affirmer catholiques, malgré certains de leurs propos ou certaines de leurs attitudes qui peuvent s’avérer parfois regrettables. Ils n’en constituent pas moins une communauté chrétienne pour laquelle il suffirait de peu de chose, peut-être tout simplement d’un peu d’amour, de patience et de compréhension pour que s’estompe un mouvement de séparation et apparaisse ainsi, lentement certes, mais sûrement, la restauration de l’unité ecclésiale.

C’est pourquoi nous nous permettons, à l’occasion de cette semaine de prières et d’actions en faveur de l’unité des chrétiens, d’envoyer cette lettre à tous les évêques de France qui sont les seuls et uniques pasteurs des catholiques de ce pays, pour que ceux-ci agissent avec amour et charité, afin que cesse le scandale d’une rupture qui se produit, actuellement, sous nos yeux. C’est pour cette raison que nous implorons nos pasteurs, afin que ceux-ci acceptent d’oublier les attaques et les insultes dont ils ont peut-être été parfois l’objet, et les maladresses qu’ils ont constatées et que, comme d’authentiques pasteurs, ils tendent généreusement leurs bras et leur cœur vers tous ceux qui, même sans s’en rendre compte, s’éloignent aujourd’hui de l’unité catholique.

Certes, il n’est pas question pour nous de considérer que l’application « large et généreuse » dans chaque diocèse du motu proprio Ecclesia Dei est « un droit », mais plutôt de vous demander humblement que dans tous les diocèses, avec charité et générosité, vous puissiez instaurer, dans la paix et la concorde, un lieu de culte où serait célébrée régulièrement chaque semaine la liturgie de 1962. Ainsi, Monseigneur, vous qui êtes pasteur du troupeau, vous démontrerez à ceux qui sont parfois aveuglés, que vous-même et l’ensemble des évêques êtes authentiquement les pasteurs de tous, et que les suspicions, sans doute illégitimes, dont vous êtes l’objet de la part de certains, ne sont pas fondées puisque vous aurez fait tout ce qui est en votre pouvoir pour montrer que vous voulez rassembler tous les fidèles de votre diocèse. C’est ainsi que vous concourrez à réduire le scandale que constitue le fait que de nombreux catholiques attachés à l’Eglise, mais désireux de vivre leur foi selon la liturgie de 1962, soient entraînés localement à fréquenter des chapelles ou des prieurés en dehors de la communion de l’Eglise par le simple fait que n’existe pas près de chez eux, et au moins dans chaque diocèse, un lieu de culte où ils pourraient prier selon leur sensibilité comme le motu proprio leur en a octroyé l’autorisation.

Certains évêques pourraient croire, ou croient peut-être déjà, que ce type de signe et d’autorisation reste ou restera en effet… Nous pouvons cependant témoigner avec force qu’il n’en est rien, et qu’au contraire, même parmi les « traditionalistes » les plus critiques par rapport à l’autorité épiscopale, l’application large et généreuse du motu proprio engendre des sentiments dont nous pouvons affirmer, car nous les avons souvent constatés et entendu exprimer, qu’ils sont générateurs d’une renaissance du « sens de l’Eglise » et donc d’un retour à l’unité. Cependant, sachons-le, autant les ruptures sont rapides, autant les réconciliations sont lentes. C’est pourquoi, Monseigneur, nous vous le demandons avec force, gardez patience, sachez rester généreux à temps et à contretemps, jusqu’à ce que l’unité soit restaurée entre des chrétiens qui, nous en sommes convaincus, continuent à être unis sur l’essentiel de la foi et de la morale catholique, et restent désireux de ne pas se séparer de l’Eglise.

Croyez, Monseigneur, que tout au long de cette semaine nous prierons d’une manière intense pour qu’une solution heureuse puisse être trouvée afin d’éviter de nouvelles ruptures ; croyez également, Monseigneur, en notre fidélité indéfectible en l’Eglise dont vous êtes les seuls pasteurs légitimes et en nos salutations les plus respectueuses en Notre Seigneur Jésus-Christ.

Réflexions de Paix Liturgique
1/ Nos évêques sont nos pasteurs légitimes, les Pères communs de nos diocèses respectifs. Sans eux, aucune initiative pastorale ne peut être prise. Le pouvoir de mettre fin à la crise liturgique et aux divisions est entre leurs mains. C'est pourquoi, à temps et à contre-temps, nous continuerons de les supplier afin qu'ils entendent enfin le cri d'amour de leurs enfants délaissés.

2/ Nous n'acceptons plus de nous laisser discréditer par ceux qui, à court d'arguments, affirment, comme dernier argument, que nous insultons nos évêques pour ne pas répondre sur le fond de la question que nous posons. Qu'ils relisent cette lettre, qu'ils relisent toutes celles que nous leur avons envoyé depuis des années, jamais, ils ne trouveront dans les lignes d'Oremus ou de Paix Liturgique le moindre commencement de début d'insulte.

3/ Bien au contraire, cette lettre est un bon exemple pour rappeler que depuis plus de 11 ans, les familles attachées à la liturgie traditionnelle de l'Eglise ne revendiquent aucun droit ni ne souhaitent imposer quoi que ce soit aux fidèles à la sensibilité différente. Elles demandent simplement à leurs évêques d'être bons. Elles leur demandent de les aimer comme elles sont, avec leur richesses et leurs faiblesses. Rien de très compliqué en somme pour ceux dont on disait autrefois : "Voyez comme ils s'aiment"...