Motu proprio à l'horizon |
24 mars 2007 - Pro Liturgia |
Selon certaines informations - ou rumeurs - le pape Benoît XVI s'apprêterait à publier le Motu proprio facilitant la célébration du rite romain selon les livres liturgiques en usage avant Vatican II. Mgr Malcolm Ranjith, Secrétaire de la Congrégation pour le Culte divin avait déjà précisé, il y a quelques temps, que le document se trouvait entre les mains de Benoît XVI, entièrement libre de choisir les modalités de sa publication. Le Motu proprio ne pouvant pas contredire les termes de la récente Exhortation Sacramentum Caritatis, il est évident qu'il ne sera pas en une remise en cause du Concile ou de la liturgie romaine actuelle dite "de Paul VI". Le texte donnera simplement, à des groupes de fidèles, le droit de participer librement à la messe célébrée selon une forme "extraordinaire" du rite romain. Mais cette autorisation apparaît aussi comme une façon habile de taper sur les doigts de l'épiscopat français qui a toujours eu l'aplomb de se dire attaché aux enseignements de Vatican II alors qu'il n'a cessé de refuser aux fidèles la liturgie restaurée à la suite de ce même Concile. Que risque-t-il de se passer après la publication du Motu proprio? Hors de France, pas grand-chose: au-delà de l' "Hexagone", on se sent généralement bien peu concerné par les questions de dentelles et de génuflexions qui secouent une partie du microcosme franco-catholique. En France cependant, cela risque d'être un peu plus agité: on entendra à nouveau nos évêques nous jurer, la main sur le coeur, qu'ils ont tout fait pour que la liturgie conciliaire soit une réalité dans les paroisses... Mais qui va les croire? Sûrement pas les fidèles qui ont lu Sacrosanctum Concilium... il en existe! Il est donc assez probable que, dans le climat de confusion liturgique actuel, le Motu proprio favorisera le transfert de certains fidèles d'un lieu de culte à un autre: délaissant leurs paroisses où la liturgie désacralisée est généralement célébrée de façon aléatoire sur des autels à peine différents d'une table de salon, ils viendront occasionnellement grossir les effectifs des communautés attachées à l'ancienne liturgie romaine. En fait, le Motu proprio va de plus en plus apparaître comme un moyen de piéger les évêques français qui, depuis des années ont exercé, dans les séminaires et les paroisses, un abus de pouvoir évident, visant à refuser aux fidèles la liturgie romaine "réellement" voulue par le Concile. Le 19 avril 1999, notre Association Pro Liturgia adressait à Mgr Billé, alors Archevêque de Lyon et Président de la Conférence des Evêques de France, la demande suivante: "(...) le moment n'est-il pas venu de proposer "aussi", à côté des célébrations en langues courantes, des liturgies en latin selon l'Ordo Missae actuel (...)?" Cette demande, nul le peut le nier, était totalement conforme à la lettre et à l'esprit de Vatican II. Or, le 12 mai 2000 - mieux vaut tard que jamais! - Mgr Bernard Lagoutte, Secrétaire général de la Conférence des Evêques de France, répondait: "(...) je ne suis pas sûr qu'il soit possible et nécessaire de restaurer, au moins de façon habituelle, des liturgies en latin." Avec le Motu proprio, la dignité, le sacré, le latin et le chant grégorien vont réinvestir les célébrations liturgiques d'une façon que les évêques de France n'avaient sûrement jamais prévue. N'est-ce pas une façon polie de leur faire comprendre que, désormais, dans le domaine liturgique, les fidèles se passeront de leurs autorisations pour obtenir ce à quoi ils ont droit: des célébrations dignes par lesquelles le sens du sacré est mis en valeur? Car en fin de compte, qui peut dire que la "désinfection" des liturgies paroissiales actuelles ne se fera pas par le biais de l'exemplarité des célébrations autorisées ponctuellement par le Motu proprio? Le Motu proprio n'est donc pas souhaité uniquement par des fidèles "traditionalistes" attachés à l'ancienne forme de la liturgie romaine: il est aussi souhaité par des fidèles qui en ont par-dessus la tête de ne plus savoir où aller, le dimanche, pour trouver une messe non bricolée par une "équipes d'animation pastorale"ou par un célébrant... ayant mandat de son évêque pour désacraliser et trahir la liturgie. |