19 janvier 2017

[Le Suisse Rom@in] Traduction du missel romain en français: traduttore, traditore ?

SOURCE - Le Suisse Rom@in - 19 janvier 2017

Ces deux mots italiens signifient: "traduire, c'est trahir". Le fait de comparer "un traducteur à un traître" signifie que la traduction d'un texte d'une langue dans une autre langue ne peut jamais respecter parfaitement le texte de l'oeuvre originale. 

La liturgie de l'Eglise romaine est originellement en latin. Depuis 2001, une instruction pastorale "Liturgiam authenticam", un document récent pour la correcte application de la constitution sur la sainte liturgie du Concile Vatican II demandait que le texte latin d'origine soit traduit intégralement et précisément. Cette instruction a permis de parvenir à une réforme du missel romain en langue anglaise et espagnole. Malheureusement la traduction en français cause des difficultés et ne pourra pas sortir comme prévue en 2017. 

L'article de la Croix ne révèle pas la source de l'information et qualifie la congrégation de "rigide". Pour le moins curieux. Ce qui semble certain, la proposition romaine a certes été refusée. Mais dorénavant, l'instruction de Saint Jean-Paul II est également visée. La tentative semble sinueuse, et vise à contourner la compétence d'une congrégation, dirigée par un expert en liturgie, le Cardinal Robert Sarah. 
Pour avoir suivi le travail pastoral de 2011 dans une diocèse américain, je sais que les évêques des USA ont pris un an pour implanter avec tact, intelligence et patience la réforme parmi les fidèles. Les prêtres ont donné des conférences afin de bien expliquer les petites corrections. J'ai encore l'ancienne traduction en mémoire.

Toutefois, la traduction anglaise reformée est nettement meilleure théologiquement. Le travail préparatoire s'est fait avec patience, sans reproduire le passage en force des années 1970. Sans discernement, la France a imposé aux fidèles des traductions imprécises. Le climat de l'époque était plutôt à trahir qu'à traduire. 

Pour la réforme en français, les points suivants de la liturgie font entre autre difficultés: 

- Je confesse à Dieu. J'ai vraiment péché ne correspond pas aux autres langues: nous devrions dire: par ma faute, par ma très grande faute. Puis invoquer également la bienheureuse Marie toujours vierge. 

- Le Credo: Jacques Maritain, ami du Cardinal Journet, regrettait amèrement le mot: de même nature que le Père. "Le Fils est de même substance" que le Père. En effet, les hommes partagent tous une même nature humaine, mais ils ne sont pas "Un comme le Père et le Fils"

- La réponse des fidèles à l'offertoire est une création: pour la gloire de Dieu et le salut du monde ne se retrouve dans aucune langue. 

- Enfin le mot "coupe" ne reflète pas l'aspect sacré du "calice". Ce mot semble une insulte, un gros mot pour nos amis canadiens. Cependant, il faut reconnaître que l'accent n'est pas le même. 

Personnellement, je trouve un peu curieux que la nouvelle génération de jeunes soit capable d'apprendre des mots tels que "wifi", "twitter", "hashtag", "modem" et jugée inapte à découvrir ceux de "calice","même substance", "sacrifice"... La liturgie est vivante. Pourquoi rester accroché à des traductions faites hâtivement dans les années 1970 ? Nous devons nous ouvrir au progrès, sans rigidité et sans fixisme.

Peut-être que l'ouverture du Pape François vers les jeunes pour le Synode 2018 permettra de faire entendre leur voix. L'Eglise, en sa dimension humaine, est toujours en réforme, pour que nous plongions dans sa forme originale, originelle.