17 octobre 2018

[Jérôme Bourbon - Rivarol] Paul VI : saint du Ciel ou suppôt de l’Enfer ?

SOURCE - Jérôme Bourbon - Rivarol - 17 octobre 2018

Il a osé. Après avoir “canonisé” le 27 avril 2014 Jean XXIII et Jean-Paul II, François-Bergoglio récidive avec la “canonisation” ce 14 octobre de Paul VI. Les modernistes qui occupent le siège de Pierre depuis soixante ans ne prennent même plus de gants, ne reculent devant aucune provocation, se “béatifient” et se “canonisent” les uns les autres à toute vitesse. N’oublions pas en effet que c’est Jean Paul II qui avait ouvert ce processus en “béatifiant” Jean XXIII le 3 septembre 2000. Pour faire passer la pilule, il avait “béatifié” le même jour Pie IX. C’était se moquer du monde : honorer en même temps le pape du Syllabus et l’organisateur de Vatican II, le pontife de l’intransigeance catholique face au monde révolté contre Dieu et le propagateur de la liberté religieuse et du culte de l’homme. Naturellement, la “béatification” de Pie IX n’a jamais abouti à sa canonisation, contrairement à celle de Jean XXIII. Il s’agissait seulement d’un subterfuge pour éviter que les traditionalistes ne poussent des cris d’orfraie. Mais il était impensable pour les apostats du Vatican de “canoniser” le pape de Quanta Cura qui s’opposait énergiquement au monde et à la civilisation moderne.

En déclarant saints les trois principaux responsables de Vatican II, de son organisation (Jean XXIII), de son déroulement (Paul VI) et de son application (Montini et Wojtyla), Bergoglio entend canoniser le “concile” et toutes les réformes désastreuses qui en sont issues, sur le plan doctrinal, moral, pastoral, liturgique, sacramentel et disciplinaire. Les fruits empoisonnés de Vatican II ne sont que trop visibles : effondrement des vocations religieuses et sacerdotales, raréfaction de l’assistance aux offices dominicaux, perte de la foi, indifférentisme et scepticisme, effondrement de l’esprit apostolique et missionnaire, délitement des repères moraux, inculture religieuse abyssale, apostasie universelle, dépravation des mœurs, perte de la pudeur et de la modestie chrétienne dans le langage, dans les conversations, dans les vêtements, développement de l’athéisme, du matérialisme, essor des sectes et des mages en tous genres, promotion des unions contre-nature, massacre des innocents à travers l’avortement et la pornographie de masse, refus de la transmission de la vie à travers la banalisation de la contraception, déchirement des familles, explosion des suicides, individualisme forcené, dépressions, etc. Les brigands, les intrus qui occupent le siège de Pierre depuis soixante ans veulent que l’on considère comme sainte, bénie, voulue par Dieu leur œuvre démoniaque. Nous sommes là dans l’inversion la plus totale et le cynisme le plus absolu. Mais c’est notre monde moderne en entier qui est fondé sur l’inversion, qui promeut le mensonge et l’erreur et rejette la vérité, qui préfère la laideur à la beauté, qui choisit le mal et refuse le bien et, pis encore, fait le mal en l’appelant bien et diabolise le bien. 

Puisque Paul VI a été officiellement “canonisé”, il faut rappeler qui était vraiment cet homme et quelle fut son œuvre. Ami des juifs et des francs-maçons, comme Roncalli, Wojtyla et leurs prédécesseurs, Montini a voulu faire passer le catholicisme du théocentrisme à l’anthropocentrisme. Qui ne se souvient de son ahurissant discours de clôture de Vatican II : « Vous, humanistes modernes, qui renoncez à la transcendance des choses suprêmes, sachez reconnaître notre nouvel humanisme. Nous aussi, nous plus que quiconque, nous avons le culte de l’homme ». S’exprimant à la tribune des Nations Unies, Paul VI ose dire de l’ONU, organisation mondialiste par excellence : qu’elle « est l’idéal dont rêve l’humanité dans son pèlerinage à travers le temps ; c’est le plus grand espoir du monde » (sic !). Dans la « constitution pastorale » Gaudium et Spes, sur « l’Eglise dans le monde de ce temps », et qui est l’un des principaux documents de Vatican II “promulgués” par Montini, il est écrit : « L’Eglise reconnaît que tout sur terre doit être ordonné à l’Homme, comme à son centre et à son sommet. »

Démolisseur de la foi, il promulgue en décembre 1965 le concile Vatican II qui contient moult erreurs et hérésies, dont l’œcuménisme libéral, la liberté religieuse et la collégialité, lave dans Nostra Aetate les juifs du crime de déicide, ouvrant la voie aux reptations des derniers hommes en blanc devant le judaïsme talmudique, visitant les synagogues non pour y prêcher Jésus-Christ crucifié et ressuscité mais pour vanter « nos frères aînés dans la foi » et déclarer que l’Ancienne Alliance n’a jamais été abrogée, ce qui est faire fi de la divinité et de la messianité du Christ. Paul VI abroge également en 1967 le serment anti-moderniste et la profession de foi du concile de Trente, vend la tiare, couronne du pape et symbole de son triple pouvoir d’ordre, de juridiction et de magistère, après avoir définitivement cessé de la porter en novembre 1963 lorsqu’il la pose sur l’autel de la basilique saint-Pierre.

C’est à Paul VI que l’on doit l’abandon du latin et du grégorien à la messe, dans les monastères et les séminaires, à lui que l’on doit la création d’une « nouvelle messe » qui n’est en réalité qu’une synaxe protestante dont de surcroît les prières de l’offertoire reprennent des bénédictions juives. La première version de l’article 7 du Novus ordo missae définit la « nouvelle messe » comme un repas et évacue complètement la définition catholique de la messe qui est le renouvellement non sanglant du saint sacrifice du Calvaire. C’est à Paul VI encore que l’on doit le changement de tous les rites, l’adultération des sacrements, la profonde altération des rituels, obstruant ainsi les canaux de la grâce. En juin 1968, au moment où il s’emploie à rassurer faussement les conservateurs avec son Credo et avec l’“encyclique” Humanae vitae, il promulgue un nouveau rituel des sacres des évêques dont des études sérieuses et approfondies ont conclu à l’invalidité radicale, ce qui pose sérieusement la question de la validité des ordres reçus par les candidats au sacerdoce dans ce nouveau rite depuis un demi-siècle. Tous les rituels sont profondément altérés : on met en place un nouveau baptême où sont supprimés tous les exorcismes, une nouvelle confirmation où il n’est plus obligatoire d’utiliser comme matière de l’huile d’olive, un nouveau mariage (le nouveau code de droit de canon promulgué en 1983 sous Jean Paul II inverse les fins du mariage, développant chez les époux une mentalité contraceptive), etc. La désacralisation des lieux saints est systématique : on retourne les autels, le célébrant devenant un simple président tourné vers l’assemblée et non plus vers Dieu, on supprime les bancs de communion, on enlève des statues de saints, on transforme les confessionnaux en placards à balais, on brûle sans aucune piété filiale les anciens ornements liturgiques, on impose la communion dans la main, on supprime quasiment tous les jeûnes, tant eucharistiques qu’ecclésiastiques. Pour communier il faut être à jeun de nourriture solide depuis une heure seulement, et pour les malades et leurs accompagnants, quinze minutes suffisent. C’est ce que feu Jean Madiran avait appelé avec une ironie mordante dans Itinéraires « le quart d’heure de Paul VI ». A la limite, se moquait l’auteur de l’Hérésie du XXème siècle, on pouvait boire son verre de gnôle à l’église en pleine célébration et communier quinze minutes après !

Sous le “règne” — ou plutôt l’usurpation — de Montini, tout est bouleversé : les constitutions religieuses, toutes défigurées, y compris celle des Chartreux qui n’avait jamais été modifiée depuis son fondateur saint Bruno, les Etats, partis, écoles et syndicats chrétiens. Paul VI contraint l’Espagne de Franco en 1967 à abandonner sa constitution explicitement catholique. Il fait de même avec la Colombie en 1973. Proche du judaïsme, Paul VI porte significativement l’éphod des grands prêtres juifs à plusieurs occasions, et notamment en 1968 lors d’un voyage en Amérique. Il est, dans la même logique, favorable au mondialisme croyant au retour de l’âge d’or, ce qui fait écho à son prédécesseur Roncalli qui, dans son discours d’ouverture de Vatican II, s’en prenait « aux prophètes de malheur » : « L’Humanité est en marche. Elle tend vers l’unité, vers la justice. La Paix est la fin logique du monde présent » s’écrie-t-il à Pâques 1971. « La cause n’est pas perdue, l’unité du monde se fera. Le caractère inviolable de la vie sera admis par tous d’une manière effective » ajoute-t-il dans la même allocution au moment même où les différents pays occidentaux se préparent à légaliser le crime de l’avortement ! Le 24 mai 1978, dans un message à l’ONU, il appelle explicitement à l’avènement d’un « nouvel ordre mondial ». Ses successeurs ne diront pas autre chose. 

Non content de lever l’excommunication des schismatiques orientaux, de légitimer la réforme anglicane en invitant le pasteur Ramsey à bénir la foule avec lui, lui passant au doigt son anneau personnel, d’autoriser l’intercommunion des protestants sans abjuration ni confession, non content de recevoir les chefs communistes russes, encore rougies du sang des chrétiens martyrs, d’accorder une audience aux rebelles des colonies portugaises, Paul VI rendit aux musulmans l’Étendard de Lépante. Cette bannière très célèbre fut prise à un amiral turc durant une bataille navale en 1571. Tandis que le pape saint Pie V jeûnait et priait le Rosaire, une flotte chrétienne en infériorité numérique défit une marine musulmane beaucoup plus importante numériquement, sauvant ainsi la chrétienté des infidèles. En l'honneur de cette victoire miraculeuse obtenue le 7 octobre 1571, Pie V avait institué la fête de Notre-Dame du Très Saint Rosaire pour commémorer son intercession. En un seul acte inouï, Paul VI a non seulement renoncé à une victoire chrétienne historique et décisive, mais aussi aux prières et aux sacrifices d'un saint pape.

Tout miel avec tous les ennemis historiques de l’Eglise catholique, Paul VI se montra en revanche plein de fiel avec les traditionalistes qui contestaient ses réformes et combattaient ses erreurs et hérésies, condamnant Mgr Lefebvre et l’abbé Georges de Nantes à la suspense a divinis, faisant persécuter, via les évêques modernistes, les prêtres, souvent âgés, voulant rester fidèles à la messe de leur ordination. 

Alors même que les Journées mondialistes de la jeunesses, les fameuses JMJ, n’ont pas encore été créées (c’est Jean-Paul II qui en sera à l’origine en 1985), Paul VI se montre d’une écœurante démagogie à l’égard de la jeunesse dans une allocution du 1er janvier 1972, dans la Cité des Jeunes à Rome, réunissant 150 garçons de 10 à 19 ans : « Vous qui êtes modernes, qui avez un sens inné de la justice, sachez que nous, les anciens, les vieux, nous vous comprenons, nous vous suivons » (sic !). Car il s’agit d’épouser toutes les modes, d’accompagner la modernité décadente, et de l’approuver, y compris dans ses dérives les plus effrayantes. Il ne faut donc pas s’étonner si Bergoglio aujourd’hui légitime de facto les unions homosexuelles, promeut l’invasion du continent européen par des migrants mahométans, il est parfaitement dans la logique de Vatican II et de Paul VI qui est l’ouverture et la soumission à un monde qui a renié le Christ, sa loi, sa morale, son Evangile. 

On peut faire de notre monde une critique politique, sociologique fort intéressante et très pertinente. Mais si l’on évacue de son analyse le cataclysme qu’a représenté Vatican II et qu’il continue toujours à représenter par ses conséquences désastreuses et par sa révolution plus que jamais à l’œuvre, on s’interdit de toucher du doigt l’essentiel. L’homme est fondamentalement un animal religieux. Les anciens le savaient. Il n’est pas innocent, il n’est pas anodin, il n’est pas neutre d’évacuer complètement Dieu de la cité, des institutions, de la conscience et du cœur de l’homme. C’est ouvrir devant soi un gouffre gigantesque dans lequel l’homme moderne plonge chaque jour davantage. Au point de s’y noyer irrémédiablement.

Jérôme BOURBON,
Editorial du numéro 3348 de RIVAROL daté du 17 octobre 2018.