SOURCE - Jacques Tremolet de Villers - Présent - via le blog de l'abbé Philippe Laguérie - 9 juin 2010
L’affaire de l’école Saint-Projet à Bordeaux est un modèle parfait du nouveau totalitarisme qui sévit en France, et peut-être aussi dans quelques pays d’Europe. Observons bien les faits : tout commence par une dénonciation, qui est, en réalité, une délation, et, pour employer le mot juste, une manoeuvre ignoble : un journaliste se présente mensongèrement comme un candidat au baptême et un homme désireux de rendre service à cette école. Il arrive ainsi à se faire embaucher, à s’infiltrer. Parvenu à entrer, sous couvert de son mensonge, dans ce lieu où les enfants s’expriment librement, il les pousse, les incite, les provoque à quelques propos ou chansons déplacés, qui auraient des relents de racisme ou d’antisémitisme, ou les deux à la fois. Quand son reportage est complet, il le publie, sur une chaîne de télévision, à des millions de téléspectateurs, comme étant la vérité cachée de cette école. L’école, c’est le prolongement de la famille. Comme la famille, c’est un lieu préservé, privé, où les propos échangés sont réservés à ceux qui les ont tenus, et qu’il est formellement interdit de publier, sans leur autorisation – comme il s’agit de mineurs – sans l’autorisation de leurs parents, et, comme il s’agit d’école, sans l’autorisation de leur supérieur, ou directeur. Toute publication faite au mépris de ces deux autorisations est assimilable à un viol de la vie privée, à une diffamation grave, et le caractère pernicieux ou délictuel de ces propos ne peut incomber qu’à celui qui les publie, seul coupable, les enfants, parents, maîtres ou supérieurs étant, eux, victimes, et seulement victimes de cette violence et de cette diffamation. Aussitôt pourtant, les autorités politiques et administratives, le maire, le Rectorat, déclenchent des poursuites, non contre les auteurs infâmes de cette émission ignoble, mais contre les victimes, parents, enfants, éducateurs. Les enquêtes du Rectorat débouchent sur une conclusion sans appel : « Le collège ne donne pas l’instruction à laquelle les enfants ont droit, dit l’inspecteur d’académie, notamment en ce qui concerne l’histoire et les sciences naturelles. » Et il précise : « Celles-ci (les sciences naturelles) ne sont pas enseignées et l’histoire est vue à travers le filtre chrétien et plus particulièrement catholique. Une méthode qui ne laisse pas sa part à l’esprit critique. » En conséquence, le rectorat signifie aux parents qu’ils ne doivent pas inscrire, pour l’an prochain, leurs enfants dans cette école. S’ils le faisaient, ils encourraient des poursuites judiciaires, les enfants n’étant pas scolarisés. Légalement, le fondement de cette décision serait le décret du 5 mars 2009, qui a étendu aux établissements d’enseignement hors contrat le socle commun d’éducation défini à l’annexe mentionnée à l’article D122-1. Si vous vous reportez à cette longue annexe, une simple et première lecture vous permet de mesurer qu’au gré de n’importe quel inspecteur, aucune école, sous contrat, hors contrat, publique, privée, n’est à l’abri du constat selon lequel elle n’enseigne pas, ou pas suffisamment, ce socle commun. Faute de précision dans le choix des mots, d’énoncé clair des connaissances à apprendre, le verbiage vague, humaniste, mondialiste et prétendument tolérant permet toutes les poursuites, toutes les injustices, envers ceux que la dernière institution soviétique existant dans le monde – l’Education nationale de la République française – veut poursuivre, exclure et anéantir. Le lecteur attentif aura remarqué que les motifs de condamnation de l’école Saint-Projet sont sans aucun rapport avec la délation diffamatoire initiale. On peut légitimement penser que si les inspecteurs avaient trouvé, dans l’enseignement, des traces de racisme et d’antisémitisme, ils les auraient dénoncées, comme l’article 40 du Code de procédure pénale leur en fait l’obligation. Rien. Donc, le prétexte initial, qui a déclenché les poursuites n’était qu’un faux prétexte. « Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? « Dit cet animal plein de rage… », mais quand l’agneau a expliqué et démontré « qu’en aucune façon, il ne peut troubler sa boisson », le loup, aussitôt, rétorque : « de moi tu médis l’an passé ! », et quand il est obligé de convenir que l’agneau n’était pas né, il renvoie l’accusation sur le frère. Méthode imparable de la parfaite mauvaise foi du loup armé de la force injuste de la loi, « pour dévorer, sans autre forme de procès, l’agneau qui se désaltérait dans le courant d’une onde pure ». Les élèves de Saint-Projet (quel beau nom !), au contraire de beaucoup de leurs semblables des écoles bénies par le Rectorat, auront compris la leçon de cette Fable, puisque je sais qu’ils étudient l’un des piliers de notre seul et vrai socle commun d’éducation : les fables de La Fontaine, l’autre pilier étant, naturellement, si j’ose dire, le catéchisme catholique. Que faire contre cette injustice caractérisée ? Cette manoeuvre liberticide d’étouffement des familles, des enfants, et, plus loin, de la pensée ! Résister. Les parents seront poursuivis ? Ils se défendront en expliquant que le socle commun est parfaitement respecté, que les sciences naturelles sont enseignées et que le filtre catholique de l’enseignement de l’histoire est le seul objectif, complet, universel parce que d’abord, il est le seul à inscrire, en premier devoir pour l’enseignement, le respect de la vérité. Monsieur Debré sillonne la France pour expliquer aux avocats qu’ils doivent utiliser le plus souvent possible la question prioritaire de constitutionnalité qu’il a mise au point. En voilà une belle occasion ! Est-il conforme au respect des libertés prévues par la Constitution que des parents soient poursuivis pénalement parce qu’un inspecteur, dans un rapport, qui n’a aucun caractère contradictoire, qui est établi sans aucune garantie d’impartialité, a jugé qu’un enseignement de l’histoire, parce qu’il était fait selon ce qu’il appelle « le filtre catholique » ne laissait pas part à l’esprit critique des élèves ? Où est le respect du droit, de la liberté, du minimum de procédure, dans ces méthodes d’apparatchik totalitaire ? Il n’y a pas que ce collège au joli nom qui soit concerné. Il n’y a pas que les écoles hors contrat ! Il y a tout professeur, digne de ce nom, de l’enseignement public ou de l’enseignement privé. Et nous savons combien il y en a, d’admirables, dont la vie, la morale, témoignent de leur amour du vrai, du beau et du bien, et que persécute aussi, d’une autre manière, non moins sournoise, cette armée rouge de la dictature du relativisme. Benoît XVI a tout vu. La dictature du relativisme est infiniment plus redoutable que le fut celle du communisme, car ses armes sont multipliées et, dans le vide juridique qui est le fruit même de ce relativisme puisque, si tout peut être justifié, logiquement, tout peut être condamné ! C’est vraiment la peste de notre fabuliste : « Ils n’en mourraient pas tous, mais tous étaient frappés. » Celui – homme, famille, école ou institution – qui a contre lui l’administration, le texte, le juge et la presse n’a aucune chance de s’en sortir, sauf s’il a, autour de lui, avec lui, des amis. Et donc, pour résister victorieusement, il faut une vraie solidarité. Comme en Pologne, au temps de Walesa et de Wojtyla – Solidarnosc. Dans cette solidarité, on commence toujours, avant tout, par soutenir, secourir, entourer, aider celui qui est attaqué. Même – et surtout – si la victime a commis une faute, une imprudence, une erreur. La haine s’accroche toujours à quelque chose de vrai – seul Notre Seigneur a été « haï sans raison ». Chacun de nous offre une prise, et sur cette prise, les méchants commencent leur mauvais procès. Si les bons se mettent à leur tour, et parfois même avant les méchants, à accabler de leurs reproches, ou de leurs suspicions, celui que la rumeur orchestrée a déjà désigné comme coupable, la défaite est inéluctable. Mais, si, au contraire, la parfaite lucidité sur nos inévitables manquements individuels devient une raison supplémentaire de défendre et d’aider, alors la victoire devient possible. La charité fraternelle, avec tout ce qu’elle comporte de lucidité impeccable et de fraternité généreuse – de courage, en somme, et de sens de l’honneur – est, contre la dictature du relativisme, la seule arme invincible. Veritas in caritate ! Caritas in veritate ! Sous le regard intelligent et doux de Benoît XVI, ut semper !
JACQUES TREMOLET DE VILLERS
[Abbé Philippe Laguérie:]
"Il y a longtemps que je connais le plus brillant avocat de sa génération, Jacques Tremolet de Villers ; depuis la mort de Me Isorni, de Me Tixier Vignancourt et de Me Varaut, le meilleur c’est lui. J’ai écouté le premier en direct à Bourg-La-Reine à 14 ans, j’ai enterré le second à Saint-Nicolas, j’ai été défendu avec succès contre le blasphème par le troisième. Mais Me Tremolet est vivant : c’est le seul avantage qu’ont les autres sur lui (je ne dis pas l’inverse !). Il ne leur cède en rien et je rêvais depuis lonftemps de lui donner la parole et de lui rendre l’hommage de son inimitable lucidité . Il m’en donne l’occasion splendide dans un texte intrépide et truculent, les deux atouts majeurs de Trémolet ; comment n’en saisirai-je pas l’occasion ? Cher Maître, vous êtes l’honneur persistant d’une France décadente et celui d’une Eglise infiltrée : Dieu vous bénisse et vous couronne, de cette gloire que la terre ne fournit point. Dans le procès "Ave Maria", et en maintes autres occasions, vous avez été l’honneur du barreau français et vous incarnez pour toujours cette justice qui ne plie pas. Nous sommes fiers de cette France qui produit encore des fils aussi loyaux et aussi simplement...surdoués. Cette page est extraite du Journal PRESENT avec l’aimable autorisation subséquente ( !) de sa directrice, Jeanne Smits que je remercie vivement."
L’affaire de l’école Saint-Projet à Bordeaux est un modèle parfait du nouveau totalitarisme qui sévit en France, et peut-être aussi dans quelques pays d’Europe. Observons bien les faits : tout commence par une dénonciation, qui est, en réalité, une délation, et, pour employer le mot juste, une manoeuvre ignoble : un journaliste se présente mensongèrement comme un candidat au baptême et un homme désireux de rendre service à cette école. Il arrive ainsi à se faire embaucher, à s’infiltrer. Parvenu à entrer, sous couvert de son mensonge, dans ce lieu où les enfants s’expriment librement, il les pousse, les incite, les provoque à quelques propos ou chansons déplacés, qui auraient des relents de racisme ou d’antisémitisme, ou les deux à la fois. Quand son reportage est complet, il le publie, sur une chaîne de télévision, à des millions de téléspectateurs, comme étant la vérité cachée de cette école. L’école, c’est le prolongement de la famille. Comme la famille, c’est un lieu préservé, privé, où les propos échangés sont réservés à ceux qui les ont tenus, et qu’il est formellement interdit de publier, sans leur autorisation – comme il s’agit de mineurs – sans l’autorisation de leurs parents, et, comme il s’agit d’école, sans l’autorisation de leur supérieur, ou directeur. Toute publication faite au mépris de ces deux autorisations est assimilable à un viol de la vie privée, à une diffamation grave, et le caractère pernicieux ou délictuel de ces propos ne peut incomber qu’à celui qui les publie, seul coupable, les enfants, parents, maîtres ou supérieurs étant, eux, victimes, et seulement victimes de cette violence et de cette diffamation. Aussitôt pourtant, les autorités politiques et administratives, le maire, le Rectorat, déclenchent des poursuites, non contre les auteurs infâmes de cette émission ignoble, mais contre les victimes, parents, enfants, éducateurs. Les enquêtes du Rectorat débouchent sur une conclusion sans appel : « Le collège ne donne pas l’instruction à laquelle les enfants ont droit, dit l’inspecteur d’académie, notamment en ce qui concerne l’histoire et les sciences naturelles. » Et il précise : « Celles-ci (les sciences naturelles) ne sont pas enseignées et l’histoire est vue à travers le filtre chrétien et plus particulièrement catholique. Une méthode qui ne laisse pas sa part à l’esprit critique. » En conséquence, le rectorat signifie aux parents qu’ils ne doivent pas inscrire, pour l’an prochain, leurs enfants dans cette école. S’ils le faisaient, ils encourraient des poursuites judiciaires, les enfants n’étant pas scolarisés. Légalement, le fondement de cette décision serait le décret du 5 mars 2009, qui a étendu aux établissements d’enseignement hors contrat le socle commun d’éducation défini à l’annexe mentionnée à l’article D122-1. Si vous vous reportez à cette longue annexe, une simple et première lecture vous permet de mesurer qu’au gré de n’importe quel inspecteur, aucune école, sous contrat, hors contrat, publique, privée, n’est à l’abri du constat selon lequel elle n’enseigne pas, ou pas suffisamment, ce socle commun. Faute de précision dans le choix des mots, d’énoncé clair des connaissances à apprendre, le verbiage vague, humaniste, mondialiste et prétendument tolérant permet toutes les poursuites, toutes les injustices, envers ceux que la dernière institution soviétique existant dans le monde – l’Education nationale de la République française – veut poursuivre, exclure et anéantir. Le lecteur attentif aura remarqué que les motifs de condamnation de l’école Saint-Projet sont sans aucun rapport avec la délation diffamatoire initiale. On peut légitimement penser que si les inspecteurs avaient trouvé, dans l’enseignement, des traces de racisme et d’antisémitisme, ils les auraient dénoncées, comme l’article 40 du Code de procédure pénale leur en fait l’obligation. Rien. Donc, le prétexte initial, qui a déclenché les poursuites n’était qu’un faux prétexte. « Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? « Dit cet animal plein de rage… », mais quand l’agneau a expliqué et démontré « qu’en aucune façon, il ne peut troubler sa boisson », le loup, aussitôt, rétorque : « de moi tu médis l’an passé ! », et quand il est obligé de convenir que l’agneau n’était pas né, il renvoie l’accusation sur le frère. Méthode imparable de la parfaite mauvaise foi du loup armé de la force injuste de la loi, « pour dévorer, sans autre forme de procès, l’agneau qui se désaltérait dans le courant d’une onde pure ». Les élèves de Saint-Projet (quel beau nom !), au contraire de beaucoup de leurs semblables des écoles bénies par le Rectorat, auront compris la leçon de cette Fable, puisque je sais qu’ils étudient l’un des piliers de notre seul et vrai socle commun d’éducation : les fables de La Fontaine, l’autre pilier étant, naturellement, si j’ose dire, le catéchisme catholique. Que faire contre cette injustice caractérisée ? Cette manoeuvre liberticide d’étouffement des familles, des enfants, et, plus loin, de la pensée ! Résister. Les parents seront poursuivis ? Ils se défendront en expliquant que le socle commun est parfaitement respecté, que les sciences naturelles sont enseignées et que le filtre catholique de l’enseignement de l’histoire est le seul objectif, complet, universel parce que d’abord, il est le seul à inscrire, en premier devoir pour l’enseignement, le respect de la vérité. Monsieur Debré sillonne la France pour expliquer aux avocats qu’ils doivent utiliser le plus souvent possible la question prioritaire de constitutionnalité qu’il a mise au point. En voilà une belle occasion ! Est-il conforme au respect des libertés prévues par la Constitution que des parents soient poursuivis pénalement parce qu’un inspecteur, dans un rapport, qui n’a aucun caractère contradictoire, qui est établi sans aucune garantie d’impartialité, a jugé qu’un enseignement de l’histoire, parce qu’il était fait selon ce qu’il appelle « le filtre catholique » ne laissait pas part à l’esprit critique des élèves ? Où est le respect du droit, de la liberté, du minimum de procédure, dans ces méthodes d’apparatchik totalitaire ? Il n’y a pas que ce collège au joli nom qui soit concerné. Il n’y a pas que les écoles hors contrat ! Il y a tout professeur, digne de ce nom, de l’enseignement public ou de l’enseignement privé. Et nous savons combien il y en a, d’admirables, dont la vie, la morale, témoignent de leur amour du vrai, du beau et du bien, et que persécute aussi, d’une autre manière, non moins sournoise, cette armée rouge de la dictature du relativisme. Benoît XVI a tout vu. La dictature du relativisme est infiniment plus redoutable que le fut celle du communisme, car ses armes sont multipliées et, dans le vide juridique qui est le fruit même de ce relativisme puisque, si tout peut être justifié, logiquement, tout peut être condamné ! C’est vraiment la peste de notre fabuliste : « Ils n’en mourraient pas tous, mais tous étaient frappés. » Celui – homme, famille, école ou institution – qui a contre lui l’administration, le texte, le juge et la presse n’a aucune chance de s’en sortir, sauf s’il a, autour de lui, avec lui, des amis. Et donc, pour résister victorieusement, il faut une vraie solidarité. Comme en Pologne, au temps de Walesa et de Wojtyla – Solidarnosc. Dans cette solidarité, on commence toujours, avant tout, par soutenir, secourir, entourer, aider celui qui est attaqué. Même – et surtout – si la victime a commis une faute, une imprudence, une erreur. La haine s’accroche toujours à quelque chose de vrai – seul Notre Seigneur a été « haï sans raison ». Chacun de nous offre une prise, et sur cette prise, les méchants commencent leur mauvais procès. Si les bons se mettent à leur tour, et parfois même avant les méchants, à accabler de leurs reproches, ou de leurs suspicions, celui que la rumeur orchestrée a déjà désigné comme coupable, la défaite est inéluctable. Mais, si, au contraire, la parfaite lucidité sur nos inévitables manquements individuels devient une raison supplémentaire de défendre et d’aider, alors la victoire devient possible. La charité fraternelle, avec tout ce qu’elle comporte de lucidité impeccable et de fraternité généreuse – de courage, en somme, et de sens de l’honneur – est, contre la dictature du relativisme, la seule arme invincible. Veritas in caritate ! Caritas in veritate ! Sous le regard intelligent et doux de Benoît XVI, ut semper !
JACQUES TREMOLET DE VILLERS