Amiens : les « catholiques SDF » réclament un toit pour la Messe Dimanche matin, parvis de la cathédrale ; temps glacial. Des centaines de catholiques assistent, pourtant, pieusement, à la deuxième messe dominicale tridentine célébrée « dehors » à Amiens depuis que la Fraternité Saint-Pie X a dû quitter la chapelle du Bon Pasteur, qui l’accueillait depuis plusieurs années. Pour eux, il n’y a pas de toit, alors même que de nombreuses églises de la ville sont aujourd’hui vacantes, désaffectées, abandonnées.
Que demandent ces fidèles ? Un lieu de culte, tout simplement. Cela faisait déjà six mois qu’ils le réclamaient, depuis que la décision de résilier le bail du Bon Pasteur en vue de la vente de la chapelle avait été notifiée par le conseil général qui venait d’en prendre la responsabilité. Six mois que les responsables de la Fraternité Saint-Pie X avaient pris contact, respectueusement, avec l’évêque d’Amiens, pour trouver un lieu où célébrer la messe traditionnelle. Mgr Bouilleret leur a adressé une nouvelle fin de non-recevoir le 14 novembre dernier, alors qu’une première messe avait déjà dû être célébrée dehors, sur le parvis de l’église Saint-Germain, dans la pluie et le froid.
Le 11 novembre, plus de 700 personnes – pas toutes « fidèles » de la Fraternité Saint Pie X ! – avaient assisté à cette première messe des rejetés. Mgr Bouilleret a fait savoir par lettre que, s’il n’est pas par principe opposé à la célébration d’une messe selon la « forme extraordinaire » dans sa ville, ce sera seulement par des « prêtres diocésains ».
Et c’est ainsi qu’en France, les restrictions au Motu proprio Summorum Pontificum vont bon train…
La question se pose certes de savoir si, dans le cadre de ce Motu propio, on peut espérer des règlements locaux en faveur de la Fraternité Saint-Pie X : n’est-ce pas trop demander ?
A cela, plusieurs réponses. Le combat pour la Messe a été justifié a posteriori par la confirmation qu’elle ne pouvait être interdite. En d’autres lieux – comme à Lourdes lors du pèlerinage du Christ-Roi, début novembre – un accueil charitable, fraternel, catholique commence à être offert aux prêtres de la Fraternité Saint-Pie X : à Lourdes, c’est même l’un d’entre eux qui a été officiellement invité à célébrer selon la « forme extraordinaire » dans la crypte de la Basilique pour un groupe de fidèles qui se trouvaient sans prêtre.
Et il y eut, à Amiens, la réaction de fidèles du diocèse qui, pendant que les traditionalistes gelaient dehors, sans toit, assistaient à une messe à l’intérieur de la cathédrale. Interpellant le vicaire qui prêchait sur la nécessité de « l’ouverture aux autres religions » et à son affection pour la célébration « face au peuple » parce que « le respect de l’homme, c’est ça que Dieu veut », des laïcs ont dénoncé le manque d’amour fraternel qui conduit à laisser des prêtres et des familles dehors, dans le froid… « Il y a de la charité pour les protestants, les musulmans, mais pas pour les chrétiens traditionalistes ! », lançait une paroissienne.
Il semblerait que la mobilisation des catholiques attachés à la messe tridentine porte des fruits, puisqu’il serait question de pourparlers en vue de leur accorder l’hospitalité de l’église Saint-Rémi, rue des Cordeliers : rumeur non confirmée. Ce qui est sûr, c’est que la presse locale ne les considère point avec malveillance. Le Courrier Picard, par la voix de son correspondant Jacques Goffinon, insistait longuement sur la jeunesse de l’assistance et le nombre d’enfants présents lors des messes des « catholiques SDF » ; et d’observer : « Chants grégoriens et messe en latin, avouons-le, ça en jette un maximum ! »
Prochain rendez-vous : devant la cathédrale d’Amiens, dimanche 25 novembre à 10 heures.
JEANNE SMITS
Article extrait du n° 6468 de Présent, du Mercredi 21 novembre 2007, p.2 |