Ceux qui ont franchi l’entrée du parc de Couloutre ou traversé le parvis de Saint-Nicolas du Chardonnet n’ont pas manqué de croiser un jour cette silhouette familière dont la grande discrétion cachait le charisme débordant. L’abbé Schaeffer avait ceci de commun avec Mgr Lefebvre. Préférant laisser parler son sourire plutôt que d’élever la voix, il s’était attiré le respect de tous, privilégiant toujours les encouragements, évitant systématiquement l’emportement. D’une grande culture, à la mesure de sa modeste bibliothèque, il avait ce don de mettre aussi sa mémoire au service de la charité. N’oubliant jamais un prénom, il était surprenant par sa capacité à connaître les gens et leur environnement familial avant même que ceux-ci sachent à qui ils avaient affaire.
Il y a du Don Bosco dans l’abbé Schaeffer tant il était avide de s’occuper des jeunes. Les camps chantiers, les retraites de Notre-Dame de la Sainte-Espérance, les jeudis au parloir, ses réunions de juristes et d’historiens rythmaient ses mois et ses semaines. Il formait ainsi patiemment les générations de demain qu’il accompagnait toujours avec joie dans leurs préparations au mariage ou au sacerdoce. A cet égard, deux questions me taraudent : Quelqu’un saura-t-il nous révéler le nombre d’invitations de mariage qu’il a pu recevoir ? Y a-t-il des années où il n’était pas prêtre assistant lors des ordinations à Écône ?
Il faut reconnaître que ses filets il les jetait sans examiner la couleur des flots. Ses relations lui faisaient croiser les sédévacantistes comme les progressistes. Il a même reçu à déjeuner l’archevêque de Clermont-Ferrand dans sa grande salle du rez-de-chaussée de la rue Galande, où il nous a tant conviés ! Ces repas qu’il enchaînait, ces numéros qu’il griffonnait sur son carnet lui permettaient de se dispenser d’internet et du portable. Il était très vite au courant des faits de ce monde sans que cela semblât l’affranchir pour autant des réalités surnaturelles. Ces têtes qu’il croisait au bureau de garde de Saint-Nicolas, à une université d’été de Renaissance catholique, et même à un BBR, étaient variées. Avec grand amusement, il disait un jour : On dit que je suis un guérardien tradi-oecuméniste ! En fait, de guérardien, il n’en avait que l’ombre puisqu’à Saint-Nicolas on ne peinait nullement à l'entendre entonner l’oremus pro pontifice nostro Benedicto lors des saluts.
Où trouvait-il le temps ? Toujours est-il qu’il y avait à côté du Don Bosco un curé d’Ars dont le sens sacerdotal était particulièrement profond. L’une de ses plus grandes douleurs fut de ne pas parvenir à retenir l’un de ses confrères qui quittait sa congrégation. Car, cette Fraternité Saint-Pie X, dont il n’était pas membre, quoi qu’il en devint l’un des fils les plus loyaux, lui doit beaucoup. Lors des dernières crises qu’elle traversa au cours de la décennie, il ne ménagea pas sa peine pour relever ceux qui tombaient et retenir ceux qui se décourageaient. Lui qui avait connu l’isolement lors de ses périples provençaux et bourbonnais, savait pour l’avoir vécu ce que coûte l’isolement. Inlassablement présent au confessionnal, malgré l’heure tardive, malgré la maladie qui avançait, il a sans doute vécu dans le silence et l’abnégation son purgatoire sur terre. Souvent, avant de se quitter, il disait : « Prie pour moi ». Nous continuerons à prier pour l'abbé Schaeffer comme nous lui demandons ardemment de prier pour nous qui continuons notre route ici-bas.
Notre-Dame de la Sainte-Espérance, convertissez-nous !
Notre-Dame de la Sainte-Espérance, convertissez-nous !
Notre-Dame de la Sainte-Espérance, convertissez-nous !