Notre envoyé spécial Diégo de Caleruéga s’est rendu cet été à la rencontre annuelle de « Vayamos Jubilosos » (« Avançons-nous [vers l’autel] dans la jubilation ! » ) à Madrid. Il s’est entretenu pour nous avec Daniel Martinez, un père de famille nombreuse de 45 ans qui travaille dans le contrôle aérien et qui est le fondateur et l’animateur de cette manifestation.
Q – Diego de Caleruéga – Comment est née cette rencontre estivale « Vayamos Jubilosos » ?
R – Daniel Martinez – Il se trouve en Espagne de nombreuses familles attachées à la liturgie traditionnelle. Elles sont souvent isolées et désireuses d’approfondir leur connaissance de l’Usus antiquior. Or, il n’existait jusqu’alors en Espagne aucune organisation susceptible d’aider ces familles, comprenant des laïcs et des prêtres, à mieux connaitre la liturgie traditionnelle pour mieux l’aimer et mieux la servir. Voilà comment est née notre rencontre, qui n’a été possible, je tiens à le préciser, que grâce à des Pères de l'église du Sauveur de Tolède qui m’ont immédiatement aidé à mettre en place ce projet.
Q – Diego de Caleruéga – Pouvez-vous nous présenter votre rencontre ?
R – Daniel Martinez – Le but de notre rencontre est triple : d’abord proposer pendant quelques jours une formation basée sur la doctrine traditionnelle de l’Église, puis délivrer des connaissances pratiques comme celles de mieux connaitre le service de l’autel et enfin donner aux participants une occasion de se rencontrer dans un cadre à la fois studieux, spirituel et amical. En outre, les enfants peuvent profiter d’activités culturelles et religieuses spécifiquement adaptées à leurs âges.
Q – Diego de Caleruéga – Pensez-vous que ce soit à un laïc d’avoir l’initiative de ce type d’activité ?
R – Daniel Martinez – C’est le besoin de ce type de rencontre qui nous a entrainés dans cette aventure car qui plus que des parents peut avoir conscience des besoins de ses enfants ? Et grâce à Dieu l'organisation de la rencontre « Vayamos Jubilosos » a été possible grâce aux prêtres de l'église du Sauveur de Tolède, qui nous ont apporté une aide fantastique, assurant ainsi le succès de cette initiative.
Q – Diego de Caleruéga – Depuis quand organisez-vous cette Rencontre ?
R – Daniel Martinez – C’est en 2018, à Madrid, que nous avons pour la première fois organisé notre rencontre « Vayamos Jubilosos ». Nous y avions déjà réuni près de 65 participants qui nous ont invités à renouveler celle-ci cette année.
Q – Diego de Caleruéga – Quel bilan tirez-vous de la seconde « édition » de votre rencontre » ?
R – Daniel Martinez – Les participants nous ont affirmé que les contenus des conférences et des ateliers leur ont été très bénéfiques. Du point de vue du nombre des participants cette rencontre fut un succès car si l’an dernier nous étions 65, cette année nous étions 96 personnes, dont 25 enfants, originaires de différentes régions d’Espagne et même d’autres pays de langue espagnole – ou presque ! Nous avions des participants venus du Texas, de Colombie et même de Pologne… Mais le plus grand nombre venaient naturellement d’Espagne. Dans le domaine liturgique, il est essentiel de mentionner les messes solennelles qui ont été célébrées chacun des quatre jours de la réunion. Bien sûr, la célébration de la messe solennelle dans le monastère de l'Incarnation où vécut Sainte Thérèse d'Avila fut un moment très fort d'une beauté indescriptible.
Q – Diego de Caleruéga – Avez-vous toujours connu la messe traditionnelle?
R – Daniel Martinez – Malheureusement, je n'ai pas toujours connu la messe traditionnelle. Je l'ai découverte comme beaucoup d'autres catholiques par hasard, en ligne, juste avant le motu proprio Summorum Pontificum.
Q – Diego de Caleruéga – Quel impact cette découverte a-t-elle eu sur votre vie ?
R – Daniel Martinez – Un impact absolu. Dans le cas de ma famille, le vieil adage Lex Orandi, Lex Credendi a été pleinement confirmé. Depuis que nous avons commencé à assister à la messe traditionnelle, pratiquement tous les aspects de notre vie ont changé en nous donnant une plus grande intimité avec Dieu et son Eglise.
Q – Diego de Caleruéga – Comment voyez-vous cet intérêt, surprenant pour beaucoup d’observateurs, pour la masse traditionnelle, en particulier chez les jeunes, partout dans le monde ?
R – Daniel Martinez – Je vois cet intérêt avec une grande joie. Évidemment c’est quelque chose de tout à fait inattendu pour la génération précédente, à l’exception sans doute de ceux qui se sont battus pour la conserver et à qui nous devons être éternellement reconnaissants car sans eux la « Messe de toujours » aurait pu disparaitre. Cependant, dans un sens cet enthousiasme est assez logique. Les jeunes, bombardés continuellement par l'immédiateté, le bruit et, en réalité, par le vide du monde profane mais aussi malheureusement du monde ecclésial, trouvent dans la messe traditionnelle ce qu'ils cherchent parfois sans même le savoir : profondeur, souvenir et beauté. Et une fois qu’ils ont fait cette rencontre, ils y restent fidèles.
Q – Diego de Caleruéga – Quelle est la situation de la messe traditionnelle en Espagne ?
R – Daniel Martinez – En Espagne, plus que dans d'autres pays, la messe traditionnelle a mis beaucoup de temps à renaitre, probablement à cause de la culture espagnole qui poussait à suivre aveuglement les clercs. Cependant, il est évident que ces dernières années, le nombre d'apostolats et de fidèles qui demandent la messe traditionnelle a augmenté de manière exponentielle et que cette croissance n’en est qu’à ses débuts.
Q – Diego de Caleruéga – Les évêques espagnols ont-ils été bienveillants face à des initiatives telles que « Vayamos Jubilosos » ?
R – Daniel Martinez – Dans le cas précis de « Vayamos Jubilosos », les évêques n'ont mis aucun obstacle. Il est sûr que l’accueil des demandeurs de messes n’est pas identique d’un diocèse à l’autre, certains évêques restant encore très hostiles.
Q – Diego de Caleruéga – Pensez-vous que la messe traditionnelle pourrait aider les diocèses et les fidèles de quelque manière que ce soit ?
R – Daniel Martinez – Bien sûr. La messe traditionnelle est une énorme source de grâce, de joie et de paix. Il suffit de regarder dans les pays voisins pour nous convaincre que les apostolats de la messe traditionnelle débordent de jeunes et de familles nombreuses.
Q – Diego de Caleruéga – Que peut faire un laïc pour promouvoir la messe traditionnelle afin que les autres puissent la connaître et l’aimer ?
R – Daniel Martinez – Les laïcs ont un rôle important à jouer dans la promotion de la messe traditionnelle surtout lorsqu’ils ont compris qu’elle était bonne et même indispensable pour leurs enfants. Ils ne peuvent pas attendre que d’autres fassent ou ne fassent pas alors que l’attente est immense. Pour agir de la sorte nous devons être formés et savoir donner des explications sur la sainte Messe. Il me semble également important d’être patient avec ceux qui l’approchent pour la première fois et de leur faire découvrir la richesse et la beauté de la messe traditionnelle avec prudence et pédagogie.
Q – Diego de Caleruéga – Avez-vous déjà assisté à la rencontre Summorum Pontificum à Rome ?
R – Daniel Martinez – J'ai assisté à la rencontre Summorum Pontificum à plusieurs reprises. C'est une excellente façon de commémorer le Motu Proprio de Benoît XVI. Les conférences du premier jour et les différentes fonctions liturgiques sont très enrichissantes. Et pouvoir assister à une messe traditionnelle dans la basilique Saint-Pierre est tout simplement impressionnant. C’est aussi une occasion unique de rencontrer des fidèles du monde entier. Enfin, je dirais que c’est un intense moment missionnaire pour les hésitants qui n’ont pas encore saisi l’infini richesse de la liturgie traditionnelle.
Q – Diego de Caleruéga – Quel message laisseriez-vous aux lecteurs de Paix Liturgique ?
R – Daniel Martinez – Un message d'espérance ! Il est clair qu’il existe de nombreux endroits où les fidèles n’ont pas accès à la « Messe de toujours ». Il existe d’autres endroits où les messes traditionnelles sont encore très sporadiques. Cependant, le nombre de fidèles qui demandent que la messe traditionnelle soit célébrée dans leurs paroisses augmente chaque année. Le nombre de diocèses où la messe traditionnelle est célébrée a considérablement augmenté et tout semble indiquer que cette tendance se poursuivra. Continuons donc à travailler pour l'expansion de la « Messe de toujours », Messe de l’avenir de l’Eglise, et demandons au Seigneur d'envoyer des ouvriers à sa moisson.
- Le site de “Vayamos Jubilosos” : https://www.lamisadesiempre.com/fr-accueil