15 février 2006

[Sophie de Ravinel - Le Figaro] La Fraternité Saint Pie X se méfie de la main tendue - Mgr Bernard Fellay hésite à écrire au Pape, comme on le lui suggère.

Sophie de Ravinel - Le Figaro - 14 février 2006

Le supérieur de la Fraternité Saint Pie X est entré dans la dernière passe, étroite et hérissée d'écueils, qui pourrait le mener vers la normalisation avec Rome. Mgr Bernard Fellay n'ignore pas que la main tendue par Benoît XVI doit être saisie d'une manière ou d'une autre, mais il souhaite prendre le temps et soigner la manière pour ne pas brader leur combat destiné à «remettre Rome sur le droit chemin». Sa réélection en juillet prochain en dépend. Le 2 février, au cours d'une célébration de prise de soutane à Flavigny, Mgr Fellay avait vivement démenti les rumeurs d'un projet d'«administration apostolique» destiné aux adeptes du rite antéconciliaire. «C'est du vent !», avait-il assuré à des ouailles indécises. Quelques semaines plus tôt, il décrivait pourtant à la presse sa dernière entrevue de décembre avec le cardinal Hoyos, chargé du dossier à Rome. «Les discussions sont longues, mais elles sont probablement les plus fructueuses de celles que nous avons eues jusqu'ici», avait-t-il confié. Quant à l'administration apostolique, une «étape transitoire», il s'est dit «presque sûr qu'on nous l'accordera».
Pressions en interne
Après avoir échangé à Flavigny avec les supérieurs dominicains, capucins ou bénédictins appartenant à la même obédience, Mgr Fellay étudierait à présent la situation avec les autres évêques consacrés par Mgr Lefebvre.
 
Le cardinal Castrillon leur a suggéré de prendre eux-mêmes l'initiative d'écrire au Pape pour demander une levée de l'excommunication. «Nous avons toujours refusé de reconnaître la validité de ces excommunications, nous ne pouvons donc pas demander qu'on enlève quelque chose qui n'existe pas», répond Mgr Fellay, cependant disposé à demander le retrait du décret d'excommunication, «cet épouvantail» destiné «à limiter le bien que l'on pourrait faire».
 
Certains, parmi les prêtres et les fidèles proches de la Fraternité Saint Pie X, sont déterminés à pousser à la réconciliation. C'est le cas de l'abbé parisien Guillaume de Tanouärn, qui entretient des relations houleuses avec Saint-Nicolas-du-Chardonnet, dont il a été mis à la porte, en particulier avec le curé de la paroisse lefebvriste, l'abbé Xavier Beauvais. Vigoureusement opposé à Rome, ce dernier a pris la tête d'une sorte de «front du refus» qui, tout en étant minoritaire, exerce une forte pression sur Mgr Fellay. Le 21 février prochain à Paris, l'abbé de Tanouärn organise, «avec les encouragements du Vatican», une conférence en compagnie de Mgr Fernando Rifan, supérieur d'une administration apostolique du diocèse de Campos au Brésil, réconcilié avec Rome depuis le début 2002...