SOURCE - Bernadette Sauvaget - Libération - 10 décembre 2011
Enquête - Lefebvristes, membres de Civitas ou de la Fraternité Saint-Pie X… Les nouveaux croisés ultracatholiques battent le pavé dans la France entière. Rencontre avec un de leurs chefs spirituels, Alain Escada.
Pour lui, c’est la «reconquista» qui commence. Flanqué de ses deux abbés en soutane, Alain Escada est en croisade. Devant les théâtres à la tête de ses troupes, sur les plateaux télé, dans les studios de radio, il pourfend depuis deux mois, la christianophobie des pièces de Roberto Castellucci, Sur le concept du visage du fils de Dieu et de Rodrigo Garcia, Golgota Picnic. En avril, à Avignon, il avait déjà rôdé l’affaire en organisant la manifestation contre l’exposition d’une photographie d’Andres Serrano, Piss Christ. Avec l’abbé Régis de Cacqueray, le chef en France de la Fraternité Saint-Pie X, qui regroupe les catholiques «lefebvristes» (1) et de l’abbé Xavier Beauvais, curé de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, fief lefebvriste dans le Ve arrondissement de Paris, il forme un triumvirat de choc. Alain Escada orchestre les prières de rue devant les théâtres et les manifestations nationales à Paris. Après celle du 29 octobre, la deuxième a lieu ce dimanche après-midi pour défendre une «France chrétienne et qui doit le rester».
Rodé, Alain Escada a l’art de l’esquive. «Rappelle-t-on toujours à Alain Madelin ou à Gérard Longuet leur passé politique ?» s’insurge-t-il lorsqu’on l’interroge sur ses liens avec l’extrême droite. Il avoue volontiers avoir été, «pendant quelques mois» en 1996, le porte-parole de Marguerite Bastien, députée d’extrême droite belge. Très jeune, il a milité dans les milieux nationalistes du royaume et a adhéré en 1997 au Front national (belge). En 1995, Alain Escada a créé un journal, Polémique, disparu en 2002. En 1997, il publiait un article au ton amical sur un ancien membre de la division SS Wallonie à l’occasion de sa mort. Deux ans plus tard, il présentait aussi en une Jean-Marie Le Pen.
Pour Manuel Abramowicz, rédacteur en chef du site Resistances.be qui milite contre l’extrême droite en Belgique, Alain Escada est une vieille connaissance. Ce dernier avait intenté, en 2005, un procès en diffamation contre Résistances, perdu en 2007. Le site avait publié un article qui qualifiait de «nid de fascistes», Belgique et Chrétienté, une autre association que préside Alain Escada. «Il n’a pas réellement trouvé sa place dans les milieux d’extrême droite en Belgique», estime Manuel Abramowicz à propos de l’agitateur catholique intégriste.
En 2009, Alain Escada a pris, en France, la tête de Civitas. Selon ses dires, il partage désormais son temps entre les deux pays et récuse tout lien politique depuis une dizaine d’années. Mais ses relations avec l’extrême droite perdurent. En 2007, il assistait à un meeting de Jean-Marie Le Pen. Conseiller régional du Front national en Rhône-Alpes, Charles Perrot participait, en octobre dernier, à une rencontre de Civitas. Alain Escada reconnaît volontiers qu’à la tête de ce mouvement, il fait du «lobbying politique». Les liens avec la Fraternité Saint-Pie X ? Il les minimise, parle «d’aumônerie spirituelle», répétant à l’envi que les manifestations de cet automne rassemblent plus largement que les troupes de catholiques intégristes.
Alain Escada est, lui, un fidèle assidu des messes lefebvristes, participe aux universités d’été de la Fraternité. A l’inverse, les abbés Cacqueray et Beauvais tiennent, eux, des conférences aux rencontres de Civitas. Au mégaphone, l’abbé Beauvais donnait le la des slogans lors du défilé du 29 octobre, clos par un discours et une prière (un Salve Regina chanté en latin) de l’abbé de Cacqueray. Curé de choc qui a fait son service militaire chez les paras, Beauvais est abrupt. «Quand les journalistes de Libération feront leur travail, je parlerai aux journalistes de Libération», lâche, rogue, le curé de Saint-Nicolas-du-Chardonnet. La conversation s’est arrêtée là.
Cet automne, la bataille contre les pièces de Roberto Castellucci et Rodrigo Garcia signe la sortie du bois politico-religieuse des lefebvristes, la résurgence publique de la vieille mouvance «nationale-catholique», singularité française née au XIXe siècle, alimentée par la haine de la Révolution et le maurrassisme, active pendant la guerre auprès de Pétain. «L’histoire aurait pu s’arrêter là, souligne le politologue et historien, Philippe Portier, directeur d’études à l’Ecole pratique des hautes études. Cette mouvance ressurgit lors de la décolonisation, pendant les guerres d’Indochine et d’Algérie». Plus tard, les lefebvristes ont repris le flambeau. La stratégie actuelle de Civitas apparaît payante. En s’en prenant à des œuvres culturelles, les lefebvristes ont créé le buzz, gagné en visibilité et pris leur autonomie au sein de l’extrême droite. Depuis deux ans déjà, Civitas organisait son propre défilé en hommage à Jeanne d’Arc, une semaine après celui du Front national. Succédant à son père, Marine Le Pen (les lefebvristes se rangeaient plutôt derrière Bruno Gollnisch) brandit désormais l’étendard de la laïcité pour dénoncer l’islamisation de la France. Une France laïque ? Une abomination pour ceux qui rêvent au retour d’une sorte de chrétienté théocratique. «Ni laïque ni islamiste, une France catholique», revendique, tel un programme, Civitas.
Combattre la présence musulmane est aussi l’un de ses objectifs. Dans une conférence donnée en novembre 2009, Alain Escada agitait les peurs et prédisait qu’à l’horizon d’une quinzaine d’années, Bruxelles et Paris seraient à majorité musulmane avec, dans la foulée, l’instauration de la charia. Le patron de Civitas et les deux abbés ne cachent plus leurs intentions politiques. Dans leur ligne de mire : les élections municipales de 2014. «Nous ne présenterons pas de listes sous l’étiquette Civitas, précise Alain Escada. Mais nous encourageons les catholiques à être candidats.» Plutôt dans les petites communes, là où les étiquettes politiques importent peu. La stratégie d’entrisme est clairement revendiquée. Pour mobiliser, Civitas a créé le «réseau Saint-Martin» et déjà organisé une réunion à Lambersart, près de Lille.
En 2012 ? «Nous n’appellerons pas à voter pour un quelconque candidat», poursuit le patron de Civitas. Pas plus à la présidentielle qu’aux législatives. «Nous sommes malheureusement des orphelins politiques», lâche Alain Escada. Embarrassé, il reste silencieux lorsqu’on lui demande s’il est républicain. Mais cette affaire-là est aussi une très grosse écharde dans le pied du catholicisme français. C’est dans l’Hexagone que les troupes lefebvristes sont les plus fournies (environ 100 000 fidèles). Elles peuvent aussi s’appuyer sur un réseau d’une vingtaine d’écoles. Active et bruyante, cette minorité pèse et veut peser.
En France, les deux abbés Régis de Cacqueray et Xavier Beauvais incarnent une aile radicale, intransigeante. Prudent, Alain Escada, lui, ne veut pas prendre position au sujet de ces négociations avec Rome, se retranchant derrière la distinction qu’il martèle entre Civitas et la Fraternité Saint-Pie X. «Le moment est favorable pour que les lefebvristes se fassent entendre, appuie le politologue Philippe Portier. Ils ont la volonté de montrer qu’ils sont le fer de lance de la défense de la chrétienté. Rome est obsédée par les mêmes chantiers.»
Les milieux ecclésiastiques français font preuve d’un certain agacement devant l’obstination de Benoît XVI à vouloir réintégrer les lefebvristes, minoritaires au milieu du milliard de catholiques sur la planète. Depuis toujours, la Fraternité Saint-Pie X critique violemment les évêques français qui ne partagent pas ses options. De leur côté, ces derniers ont toujours peiné à faire comprendre au Vatican les vieilles accointances des milieux lefebvristes français avec l’extrême droite.
A Civitas, Alain Escada fait le pari d’élargir sa base. «Les journalistes passent à côté de la réalité des manifestations s’ils ne voient pas la grande mobilisation des jeunes», martèle-t-il. Pour éviter que les jeunes catholiques n’aillent rejoindre justement les troupes de Civitas devant le théâtre du Rond-Point où se joue Golgota Picnic, l’archevêque de Paris a organisé, jeudi soir, une veillée de prières à Notre-Dame. Goguenard, Alain Escada souriait déjà de cette contre-attaque.
(1) Le mouvement «lefebvriste» est né dans les années 70. L’évêque français Marcel Lefebvre s’opposait à Rome après le concile Vatican II et ses réformes, dont la suppression de la messe en latin. Le schisme est intervenu en 1988. Les négociations sont en cours pour une normalisation.
Enquête - Lefebvristes, membres de Civitas ou de la Fraternité Saint-Pie X… Les nouveaux croisés ultracatholiques battent le pavé dans la France entière. Rencontre avec un de leurs chefs spirituels, Alain Escada.
Pour lui, c’est la «reconquista» qui commence. Flanqué de ses deux abbés en soutane, Alain Escada est en croisade. Devant les théâtres à la tête de ses troupes, sur les plateaux télé, dans les studios de radio, il pourfend depuis deux mois, la christianophobie des pièces de Roberto Castellucci, Sur le concept du visage du fils de Dieu et de Rodrigo Garcia, Golgota Picnic. En avril, à Avignon, il avait déjà rôdé l’affaire en organisant la manifestation contre l’exposition d’une photographie d’Andres Serrano, Piss Christ. Avec l’abbé Régis de Cacqueray, le chef en France de la Fraternité Saint-Pie X, qui regroupe les catholiques «lefebvristes» (1) et de l’abbé Xavier Beauvais, curé de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, fief lefebvriste dans le Ve arrondissement de Paris, il forme un triumvirat de choc. Alain Escada orchestre les prières de rue devant les théâtres et les manifestations nationales à Paris. Après celle du 29 octobre, la deuxième a lieu ce dimanche après-midi pour défendre une «France chrétienne et qui doit le rester».
«Mère 100 % belge»Visage poupin, Alain Escada présente bien. Le ton est courtois, l’allure policée, le phrasé un peu traînant. A la tête de l’institut Civitas, le bras armé politique de la Fraternité Saint-Pie X, le nouveau chantre de la France catholique est… belge. Enfin, presque. Alain Escada, jeune quadragénaire à la calvitie naissante, est le fils d’un immigré portugais et d’une mère «100% belge». A Bruxelles, il tient une petite bouquinerie de livres d’occasion, dans un quartier où il y a une forte présence turque. En vitrine, beaucoup de bandes dessinées. Ce vendredi, les clients ne s’y bousculent pas. Par correspondance, il propose aussi des ouvrages pieux.
Rodé, Alain Escada a l’art de l’esquive. «Rappelle-t-on toujours à Alain Madelin ou à Gérard Longuet leur passé politique ?» s’insurge-t-il lorsqu’on l’interroge sur ses liens avec l’extrême droite. Il avoue volontiers avoir été, «pendant quelques mois» en 1996, le porte-parole de Marguerite Bastien, députée d’extrême droite belge. Très jeune, il a milité dans les milieux nationalistes du royaume et a adhéré en 1997 au Front national (belge). En 1995, Alain Escada a créé un journal, Polémique, disparu en 2002. En 1997, il publiait un article au ton amical sur un ancien membre de la division SS Wallonie à l’occasion de sa mort. Deux ans plus tard, il présentait aussi en une Jean-Marie Le Pen.
Pour Manuel Abramowicz, rédacteur en chef du site Resistances.be qui milite contre l’extrême droite en Belgique, Alain Escada est une vieille connaissance. Ce dernier avait intenté, en 2005, un procès en diffamation contre Résistances, perdu en 2007. Le site avait publié un article qui qualifiait de «nid de fascistes», Belgique et Chrétienté, une autre association que préside Alain Escada. «Il n’a pas réellement trouvé sa place dans les milieux d’extrême droite en Belgique», estime Manuel Abramowicz à propos de l’agitateur catholique intégriste.
En 2009, Alain Escada a pris, en France, la tête de Civitas. Selon ses dires, il partage désormais son temps entre les deux pays et récuse tout lien politique depuis une dizaine d’années. Mais ses relations avec l’extrême droite perdurent. En 2007, il assistait à un meeting de Jean-Marie Le Pen. Conseiller régional du Front national en Rhône-Alpes, Charles Perrot participait, en octobre dernier, à une rencontre de Civitas. Alain Escada reconnaît volontiers qu’à la tête de ce mouvement, il fait du «lobbying politique». Les liens avec la Fraternité Saint-Pie X ? Il les minimise, parle «d’aumônerie spirituelle», répétant à l’envi que les manifestations de cet automne rassemblent plus largement que les troupes de catholiques intégristes.
Alain Escada est, lui, un fidèle assidu des messes lefebvristes, participe aux universités d’été de la Fraternité. A l’inverse, les abbés Cacqueray et Beauvais tiennent, eux, des conférences aux rencontres de Civitas. Au mégaphone, l’abbé Beauvais donnait le la des slogans lors du défilé du 29 octobre, clos par un discours et une prière (un Salve Regina chanté en latin) de l’abbé de Cacqueray. Curé de choc qui a fait son service militaire chez les paras, Beauvais est abrupt. «Quand les journalistes de Libération feront leur travail, je parlerai aux journalistes de Libération», lâche, rogue, le curé de Saint-Nicolas-du-Chardonnet. La conversation s’est arrêtée là.
Simone Veil, l’ennemie de toujoursL’abbé n’oublie rien. Surtout pas ses ennemis. En l’occurrence, son ennemie, Simone Veil. Toujours armé de son mégaphone, Xavier Beauvais était à pied d’œuvre, en mars 2010, pour la réception de l’ancienne ministre à l’Académie française qu’il maudissait et invectivait à cause de la loi sur l’IVG. A Saint-Nicolas-du-Chardonnet, il célèbre des messes à la mémoire du général Franco et du fondateur de la Phalange, Primo de Rivera. Avec l’abbé de Cacqueray et des fidèles, il était en pèlerinage, en septembre 2007, sur la tombe du maréchal Pétain à l’île d’Yeu.
Cet automne, la bataille contre les pièces de Roberto Castellucci et Rodrigo Garcia signe la sortie du bois politico-religieuse des lefebvristes, la résurgence publique de la vieille mouvance «nationale-catholique», singularité française née au XIXe siècle, alimentée par la haine de la Révolution et le maurrassisme, active pendant la guerre auprès de Pétain. «L’histoire aurait pu s’arrêter là, souligne le politologue et historien, Philippe Portier, directeur d’études à l’Ecole pratique des hautes études. Cette mouvance ressurgit lors de la décolonisation, pendant les guerres d’Indochine et d’Algérie». Plus tard, les lefebvristes ont repris le flambeau. La stratégie actuelle de Civitas apparaît payante. En s’en prenant à des œuvres culturelles, les lefebvristes ont créé le buzz, gagné en visibilité et pris leur autonomie au sein de l’extrême droite. Depuis deux ans déjà, Civitas organisait son propre défilé en hommage à Jeanne d’Arc, une semaine après celui du Front national. Succédant à son père, Marine Le Pen (les lefebvristes se rangeaient plutôt derrière Bruno Gollnisch) brandit désormais l’étendard de la laïcité pour dénoncer l’islamisation de la France. Une France laïque ? Une abomination pour ceux qui rêvent au retour d’une sorte de chrétienté théocratique. «Ni laïque ni islamiste, une France catholique», revendique, tel un programme, Civitas.
Combattre la présence musulmane est aussi l’un de ses objectifs. Dans une conférence donnée en novembre 2009, Alain Escada agitait les peurs et prédisait qu’à l’horizon d’une quinzaine d’années, Bruxelles et Paris seraient à majorité musulmane avec, dans la foulée, l’instauration de la charia. Le patron de Civitas et les deux abbés ne cachent plus leurs intentions politiques. Dans leur ligne de mire : les élections municipales de 2014. «Nous ne présenterons pas de listes sous l’étiquette Civitas, précise Alain Escada. Mais nous encourageons les catholiques à être candidats.» Plutôt dans les petites communes, là où les étiquettes politiques importent peu. La stratégie d’entrisme est clairement revendiquée. Pour mobiliser, Civitas a créé le «réseau Saint-Martin» et déjà organisé une réunion à Lambersart, près de Lille.
En 2012 ? «Nous n’appellerons pas à voter pour un quelconque candidat», poursuit le patron de Civitas. Pas plus à la présidentielle qu’aux législatives. «Nous sommes malheureusement des orphelins politiques», lâche Alain Escada. Embarrassé, il reste silencieux lorsqu’on lui demande s’il est républicain. Mais cette affaire-là est aussi une très grosse écharde dans le pied du catholicisme français. C’est dans l’Hexagone que les troupes lefebvristes sont les plus fournies (environ 100 000 fidèles). Elles peuvent aussi s’appuyer sur un réseau d’une vingtaine d’écoles. Active et bruyante, cette minorité pèse et veut peser.
Tous les chemins ne mènent pas à RomeGénéralement discrets sur leurs divergences internes, les évêques n’ont pas pu masquer leur désaccord à l’occasion des manifestations de Civitas. Parmi ceux qui les ont condamnées : le cardinal-archevêque de Paris et président de la Conférence des évêques de France, André Vingt-Trois, ou encore l’archevêque de Rennes, Pierre d’Ornellas. En revanche, Civitas a reçu le soutien de l’évêque de Vannes, Raymond Centène. Dans l’épiscopat français, une dizaine de prélats ont des sympathies pour les catholiques lefebvristes, encore en marge mais peut-être plus pour longtemps. A Rome, Benoît XVI a entamé, il y a deux ans, les négociations pour que la Fraternité Saint-Pie X réintègre le giron de l’Eglise. En septembre, une feuille de route lui a été proposée en vue d’un accord officiel. Pour le moment, les débats sont vifs chez les lefebvristes pour savoir s’il faut accepter ou non.
En France, les deux abbés Régis de Cacqueray et Xavier Beauvais incarnent une aile radicale, intransigeante. Prudent, Alain Escada, lui, ne veut pas prendre position au sujet de ces négociations avec Rome, se retranchant derrière la distinction qu’il martèle entre Civitas et la Fraternité Saint-Pie X. «Le moment est favorable pour que les lefebvristes se fassent entendre, appuie le politologue Philippe Portier. Ils ont la volonté de montrer qu’ils sont le fer de lance de la défense de la chrétienté. Rome est obsédée par les mêmes chantiers.»
Les milieux ecclésiastiques français font preuve d’un certain agacement devant l’obstination de Benoît XVI à vouloir réintégrer les lefebvristes, minoritaires au milieu du milliard de catholiques sur la planète. Depuis toujours, la Fraternité Saint-Pie X critique violemment les évêques français qui ne partagent pas ses options. De leur côté, ces derniers ont toujours peiné à faire comprendre au Vatican les vieilles accointances des milieux lefebvristes français avec l’extrême droite.
A Civitas, Alain Escada fait le pari d’élargir sa base. «Les journalistes passent à côté de la réalité des manifestations s’ils ne voient pas la grande mobilisation des jeunes», martèle-t-il. Pour éviter que les jeunes catholiques n’aillent rejoindre justement les troupes de Civitas devant le théâtre du Rond-Point où se joue Golgota Picnic, l’archevêque de Paris a organisé, jeudi soir, une veillée de prières à Notre-Dame. Goguenard, Alain Escada souriait déjà de cette contre-attaque.
(1) Le mouvement «lefebvriste» est né dans les années 70. L’évêque français Marcel Lefebvre s’opposait à Rome après le concile Vatican II et ses réformes, dont la suppression de la messe en latin. Le schisme est intervenu en 1988. Les négociations sont en cours pour une normalisation.