SOURCE - Paix Liturgique n°314 - 21 décembre 2011
Au moment où le Saint Père estime nécessaire à la fois une nouvelle évangélisation des vieilles nations catholiques et l’instauration d'une année de la Foi pour l'Église universelle (quel effondrement depuis la dernière année de la Foi, celle instaurée par Paul VI du 29 juin 1967 au 29 juin 1968 !), la question du catéchisme semble devoir prendre le relais de celle de la liturgie pour soutenir la réforme de la réforme souhaitée par Benoît XVI. Deux des quinze articles du Motu Proprio Porta Fidei instaurant l'année de la Foi portent ainsi exclusivement sur le catéchisme.
Dans le même temps, en France, des personnes aussi différentes que Jean Madiran et Jean-Marie Guénois, chroniqueur religieux du Figaro, s'intéressent de près à l'enjeu crucial du catéchisme. De fait, tout en commentant la sortie de Youcat, le catéchisme pour ados présenté au moment des JMJ de Madrid, Jean Madiran poursuit dans les colonnes de Présent sa longue et importante bataille pour la réintroduction du petit catéchisme pour enfants parmi les outils mis à disposition des catéchistes diocésains. Quant à Jean-Marie Guénois, il ouvrait l'un de ses récents billets sur son blog par LA question que toute personne qui s'intéresse de près ou de loin au catéchisme finit un jour par se poser : “L'Église de France veut-elle encore transmettre sa foi ?”...
Parce que le combat de Paix liturgique pour la réconciliation liturgique dans l'Église se fonde sur un combat pour la perpétuation du socle de la foi, nous ne pouvons rester indifférents, comme nous l’avons dit à plusieurs reprises (voir spécialement notre lettre n° 256, « Catéchisme "ordinaire" et catéchisme "extraordinaire" », à cette question. Nous vous proposons donc cette semaine de méditer sur l'articulation entre foi et catéchisme que propose le Souverain Pontife dans le Motu Proprio Porta Fidei et sur les réflexions de Jean-Marie Guénois à propos de la « rentrée du caté » de l'Église de France.
I – FOI ET CATÉCHISME SELON BENOÎT XVI
Dans son tout récent Motu Proprio Porta Fidei, le pape explique que l'année de la Foi qu'il instaure coïncide avec le cinquantième anniversaire de l’ouverture du Concile Vatican II et le vingtième anniversaire de la publication du Catéchisme de l’Église catholique par Jean-Paul II. Il fait également allusion à l’Assemblée générale du Synode des Évêques qu'il a convoquée au mois d’octobre 2012, sur le thème de « La nouvelle évangélisation pour la transmission de la foi chrétienne ». Foi, nouvelle évangélisation et catéchisme sont pour le Saint Père des éléments indissociables, comme le prouvent les paragraphes 11 et 12 de Porta Fidei, entièrement consacrés au catéchisme et dont nous reproduisons l'essentiel ici.
Lettre apostolique Porta Fidei du 11 octobre 2011
Article 11. Pour accéder à une connaissance systématique des contenus de la foi, tous peuvent trouver dans le Catéchisme de l’Église catholique une aide précieuse et indispensable. Il constitue un des fruits les plus importants du Concile Vatican II. (...) L’Année de la foi devra exprimer un engagement général pour la redécouverte et l’étude des contenus fondamentaux de la foi qui trouvent dans le Catéchisme de l’Église catholique leur synthèse systématique et organique. Ici, en effet, émerge la richesse d’enseignement que l'Église a accueilli, gardé et offert au cours de ses deux mille ans d’histoire. De la sainte Écriture aux Pères de l'Église, des Maîtres de théologie aux Saints qui ont traversé les siècles, le Catéchisme offre une mémoire permanente des nombreuses façons dans lesquelles l'Église a médité sur la foi et produit un progrès dans la doctrine pour donner certitude aux croyants dans leur vie de foi.
Dans sa structure elle-même, le Catéchisme de l’Église catholique présente le développement de la foi jusqu’à toucher les grands thèmes de la vie quotidienne. Page après page on découvre que tout ce qui est présenté, n’est pas une théorie, mais la rencontre avec une Personne qui vit dans l'Église. À la profession de foi, en effet, succède l’explication de la vie sacramentelle, dans laquelle le Christ est présent, agissant et continue à construire son Église. Sans la liturgie et les sacrements, la profession de foi n’aurait pas d’efficacité, parce qu’elle manquerait de la grâce qui soutient le témoignage des chrétiens. De la même manière, l’enseignement du Catéchisme sur la vie morale acquiert toute sa signification s’il est mis en relation avec la foi, la liturgie et la prière.
Article 12. En cette Année, par conséquent, le Catéchisme de l’Église catholique, pourra être un véritable instrument pour soutenir la foi, surtout pour tous ceux qui ont à cœur la formation des chrétiens, si déterminante dans notre contexte culturel. (...)
II – LE BILLET DE JEAN-MARIE GUÉNOIS SUR LA RENTRÉE DU CATÉ
L'Église de France veut-elle encore transmettre sa foi ?
Par Jean-Marie Guénois, le 1 septembre 2011
Je suis très perplexe après avoir assisté, hier matin, à un point presse à la Conférence des Évêques de France sur la réforme de la catéchèse préparée depuis cinq ans et mise en œuvre cette rentrée. Un article, publié vendredi matin dans le journal, en rend compte mais j'avoue, entre nous, ne pas comprendre plusieurs choses. Et je vous livre simplement quelques réflexions :
Le pédagogisme mais avec un train de retard
- Alors que dans le monde de l'enseignement beaucoup d'enseignants sont revenus depuis longtemps des dérives de ce qu'eux mêmes appellent, le "pédagogisme", c'est-à-dire le primat des méthodes de transmission sur l'acquisition des contenus, l'Église de France y entre à plein.
- Les outils pédagogiques - livrets, dvd - abondent. Ils sont fort bien "faits". Sous la forme de "modules", ils permettent de bâtir des menus à la carte pour chaque enfant. Mais, sans aucune vision de synthèse sur la foi chrétienne et surtout sur l'Église catholique ! Le mot n'a pas été prononcé ou à peine. On préfère parler de "communautés", de "foule immense", de "foule de chercheurs de Dieu".
- Ce qui est proposé est intéressant, vivant, chatoyant, mais il me semble - particulièrement après la crise de la pédophilie - qu'une des priorités serait justement pour les catholiques non pas la sensation mais l'intelligence - perdue - de ce qu'est l'Église catholique. Je ne vois pas qu'un enfant, à travers ce qui a été présenté, en puisse avoir la moindre idée car le noyau de base, synthétique, de cette foi chrétienne catholique, n'est pas exprimé.
Une différence étonnante de traitement entre les enfants et les adolescents
- À côté de cette indigence intellectuelle, un document publiée au printemps dernier, fait sensation sur un plan international. Il s'appelle "Youcat". Il s'adresse aux adolescents et aux jeunes adultes. Il a été traduit dans beaucoup de langues. Il a fait un tabac aux JMJ. Et, pour le coup, sous la forme d'un catéchisme moderne et synthétique, il cherche précisément à donner cette intelligence de la foi.
- D'où cette question : comment se fait-il que l'Église soit incapable d'exprimer l'essentiel ce qu'elle croit dans une langage simple, accessible, à des... enfants. Vingt pages suffiraient qu'elles soient écrites, en mots, en sons, en images ou interactives. Rodés à la vivacité, les enfant sont loin d'être des moutons ou des cerveaux inertes. Plus que les adultes, ils sont capables d'acquisitions fulgurantes.
L'Église veut-elle vraiment transmettre ?
- Mais l'Église veut-elle encore transmettre au sens intellectuel ?
Pas certain... Puisque l'on expliquait, jeudi matin, que ce temps était passé. Et qu'il s'agissait maintenant d'expérimenter la foi en communauté. Et que le jeune, prenant ainsi le goût d'être chrétien, construirait lui même son parcours de formation, notamment par ses questions.
- Ce qui me paraît être en partie une illusion, à tout le moins un anachronisme au moment où les jeunes générations (les JMJ viennent encore de le démontrer avec éclat ; ou le succès, à Paris, de groupes de formation pour jeunes étudiants comme "Even") sont en attente de contenus, de formation solide. Et, dit modestement : d'intelligence.
- Je trouve louable, la prise de conscience par l'Église, il y a plusieurs années, suite au fameux "rapport Dagens", de vouloir, pour faire court, "proposer la foi" et non plus dominer la société. Mais je trouve étrange que la traduction catéchétique de cette "politique" ait aujourd'hui l'apparence d'un déficit d'intelligence. Ma fonction me met en contact, avec des mondes très divers, ultra favorables ou ultra hostiles aux questions religieuses. Il m'apparaît que la requête "extérieure" aujourd'hui ne porte pas tant sur le christianisme, en tant que tel, que sur l'Église catholique que l'on ne "comprend" plus au sens intellectuel. Comment ces jeunes catholiques, formés sur un mode aléatoire, pourront répondre à ces questions ?
- Enfin, je suis fasciné par le contraste qui existe actuellement entre les religions sur ce plan de la formation. Comment se fait-il que les juifs, en premier lieu, les musulmans ensuite, parviennent à transmettre leur croyance et que l'Église catholique soit en panne à ce sujet ? Cela serait passionnant à étudier de près.
Un dernier mot. Pour suivre ces questions depuis des dizaines d'années, je m'aperçois que la politique des "bon sentiments" dans le domaine de la catéchèse pour ne pas, disait-on, décourager les milliers de bénévoles qui donnent du temps pour faire le catéchisme, a conduit à l'épuisement du système.
Bons sentiments, en clair : ne jamais faire de bilan de résultats ou d'efficacité ; ne tester aucune connaissance (ce que l'on admet pourtant dans les études de théologie et dans les autres religions ) ;
ne plus publier aucun chiffre national (en chute libre) sur la fréquentation du catéchisme depuis ... 1994 ; surtout ne rien dire quand cela ne marche pas.
Mais il y a, surtout, en arrière fond, une forte division des évêques, sur la notion même d'Église catholique et sur son identité. Ce différent théologique et idéologique explique largement la situation actuelle.
Mais, tout de même, comment cette Église catholique qui vit dans un des pays les plus rationnels du monde, la France, a pu laisser la question cruciale de la transmission, dans un tel état ? Les catholiques allemands, italiens, américains, auraient, de ce point de vue, beaucoup de leçons à donner.
III – LES COMMENTAIRES DE PAIX LITURGIQUE
1) « Sans la liturgie et les sacrements, la profession de foi n’aurait pas d’efficacité, parce qu’elle manquerait de la grâce qui soutient le témoignage des chrétiens. De la même manière, l’enseignement du Catéchisme sur la vie morale acquiert toute sa signification s’il est mis en relation avec la foi, la liturgie et la prière. » Par ces phrases, le Saint Père résume bien le lien fort qui unit foi, prière, liturgie et catéchisme et nous indique, par là-même, que la réforme qu'il promeut ne saurait se limiter à un seul de ces champs, d'où notre intérêt pour la question du catéchisme.
2) Dans l'article 12, Benoît XVI donne une définition simple et exemplaire de ce qu'est le catéchisme : « un véritable instrument pour soutenir la foi », au service de ceux « qui ont à cœur la formation des chrétiens ». En ce sens, le Souverain Pontife légitime la bataille de Jean Madiran pour la réintroduction d'un catéchisme pour enfants dans l'appareil pédagogique, pléthorique mais inefficace, à disposition des catéchistes. Jean-Marie Guénois ne dit pas autre chose quand il plaide pour un document de 20 pages, exprimant « le noyau de base, synthétique, de (la) foi chrétienne catholique ».
3) En phase avec une certaine politique qui veut que pour ne pas mesurer la fièvre on casse le thermomètre, bien des hommes d’Église n’ont cessé, depuis 1994, de communiquer les statistiques nationales d'enfants effectivement inscrits au catéchisme. Toutefois, lors de la conférence de presse de la CEF, il était indiqué que le taux moyen de catéchisation (comparaison du nombre d'enfants scolarisés avec les enfants catéchisés) dans les trois diocèses de Saint-Claude, Créteil, Aire et Dax était de 16,5%. Soit un enfant sur 6 qui assiste au catéchisme. Mais, dans un article du Figaro, Jean-Marie Guénois précise que ce taux est “uniquement calculé sur des concentrations urbaines, car l'intégration de zones rurales plomberait ce pourcentage au-dessous des 10%”. On lira avec profit, à ce propos, le dossier consacré par L’Homme nouveau du 8 octobre 2011 à : « Des pistes pour un catéchisme rénové ». L’auteur, l’abbé Laurent Jestin, relève lui aussi les statistiques catastrophiques : « en 1994, quand la conférence épiscopale de France fit une évaluation systématique, il apparaissait qu’environ 40% des enfants de Cours moyen suivaient une initiation catholique ; aujourd’hui, sont catéchisés 25% à 30% des enfants d’une classe d’âge scolaire, la décroissance étant de 0,5% par an ». De 2000 à 2007, le nombre des enfants catéchisés, déjà faible, a chuté de 70%. Font exception les Communautés et les traditionalistes.
4) En fait, tout le monde sait désormais que ce domaine est sans doute le plus sinistré du catholicisme contemporain : aux chiffres sur l’effondrement continu de la fréquentation du catéchisme, il faut ajouter que, dans la majorité des cas, ce qui reste de catéchisme ne transmet qu’un sous-produit d’enseignement. Autrement dit, la transmission de la foi catholique, en France et en bien d’autres pays, n’est pratiquement aujourd’hui plus assurée.
De tels résultats, après 40 ans d'expériences catéchétiques plus audacieuses les unes que les autres, nourries à l'aune de la communication, du marketing et de la sociologie, ne devraient-ils pas inciter les évêques à remettre les choses à plat en faisant appel aux méthodes éprouvées qui font toujours le succès des écoles hors contrat et des chapelles Summorum Pontificum ? Sauf que, ce constat global provoque une foule de réactions vitales « à la base » de prêtres, de laïcs, de parents, initiatives dont le présent dossier, prétendant bien moins encore que les précédents être exhaustif, donne une idée. Le temps de tirer La Miche de Pain et bien d’autres instruments des oubliettes n'est-il pas venu (voir dans le dossier ci-dessus indiqué de L’Homme nouveau, un article, « Des solutions alternatives », qui indique des revues, catéchismes par correspondance, sites Internet et autres nombreuses possibilités aujourd’hui actives pour pallier les carences de la catéchèse en faillite) ? De la même façon que le Missel de 1962 a vocation à enrichir celui de Paul VI, n'est-il pas temps que les petits catéchismes de nos grands-parents viennent remplir le désert créé par des années de Pierres Vivantes ? Car, toutes choses égales, comme en liturgie, à côté du catéchisme « ordinaire » en perdition, il existe un très vivant catéchisme « extraordinaire ».
Au moment où le Saint Père estime nécessaire à la fois une nouvelle évangélisation des vieilles nations catholiques et l’instauration d'une année de la Foi pour l'Église universelle (quel effondrement depuis la dernière année de la Foi, celle instaurée par Paul VI du 29 juin 1967 au 29 juin 1968 !), la question du catéchisme semble devoir prendre le relais de celle de la liturgie pour soutenir la réforme de la réforme souhaitée par Benoît XVI. Deux des quinze articles du Motu Proprio Porta Fidei instaurant l'année de la Foi portent ainsi exclusivement sur le catéchisme.
Dans le même temps, en France, des personnes aussi différentes que Jean Madiran et Jean-Marie Guénois, chroniqueur religieux du Figaro, s'intéressent de près à l'enjeu crucial du catéchisme. De fait, tout en commentant la sortie de Youcat, le catéchisme pour ados présenté au moment des JMJ de Madrid, Jean Madiran poursuit dans les colonnes de Présent sa longue et importante bataille pour la réintroduction du petit catéchisme pour enfants parmi les outils mis à disposition des catéchistes diocésains. Quant à Jean-Marie Guénois, il ouvrait l'un de ses récents billets sur son blog par LA question que toute personne qui s'intéresse de près ou de loin au catéchisme finit un jour par se poser : “L'Église de France veut-elle encore transmettre sa foi ?”...
Parce que le combat de Paix liturgique pour la réconciliation liturgique dans l'Église se fonde sur un combat pour la perpétuation du socle de la foi, nous ne pouvons rester indifférents, comme nous l’avons dit à plusieurs reprises (voir spécialement notre lettre n° 256, « Catéchisme "ordinaire" et catéchisme "extraordinaire" », à cette question. Nous vous proposons donc cette semaine de méditer sur l'articulation entre foi et catéchisme que propose le Souverain Pontife dans le Motu Proprio Porta Fidei et sur les réflexions de Jean-Marie Guénois à propos de la « rentrée du caté » de l'Église de France.
I – FOI ET CATÉCHISME SELON BENOÎT XVI
Dans son tout récent Motu Proprio Porta Fidei, le pape explique que l'année de la Foi qu'il instaure coïncide avec le cinquantième anniversaire de l’ouverture du Concile Vatican II et le vingtième anniversaire de la publication du Catéchisme de l’Église catholique par Jean-Paul II. Il fait également allusion à l’Assemblée générale du Synode des Évêques qu'il a convoquée au mois d’octobre 2012, sur le thème de « La nouvelle évangélisation pour la transmission de la foi chrétienne ». Foi, nouvelle évangélisation et catéchisme sont pour le Saint Père des éléments indissociables, comme le prouvent les paragraphes 11 et 12 de Porta Fidei, entièrement consacrés au catéchisme et dont nous reproduisons l'essentiel ici.
Lettre apostolique Porta Fidei du 11 octobre 2011
Article 11. Pour accéder à une connaissance systématique des contenus de la foi, tous peuvent trouver dans le Catéchisme de l’Église catholique une aide précieuse et indispensable. Il constitue un des fruits les plus importants du Concile Vatican II. (...) L’Année de la foi devra exprimer un engagement général pour la redécouverte et l’étude des contenus fondamentaux de la foi qui trouvent dans le Catéchisme de l’Église catholique leur synthèse systématique et organique. Ici, en effet, émerge la richesse d’enseignement que l'Église a accueilli, gardé et offert au cours de ses deux mille ans d’histoire. De la sainte Écriture aux Pères de l'Église, des Maîtres de théologie aux Saints qui ont traversé les siècles, le Catéchisme offre une mémoire permanente des nombreuses façons dans lesquelles l'Église a médité sur la foi et produit un progrès dans la doctrine pour donner certitude aux croyants dans leur vie de foi.
Dans sa structure elle-même, le Catéchisme de l’Église catholique présente le développement de la foi jusqu’à toucher les grands thèmes de la vie quotidienne. Page après page on découvre que tout ce qui est présenté, n’est pas une théorie, mais la rencontre avec une Personne qui vit dans l'Église. À la profession de foi, en effet, succède l’explication de la vie sacramentelle, dans laquelle le Christ est présent, agissant et continue à construire son Église. Sans la liturgie et les sacrements, la profession de foi n’aurait pas d’efficacité, parce qu’elle manquerait de la grâce qui soutient le témoignage des chrétiens. De la même manière, l’enseignement du Catéchisme sur la vie morale acquiert toute sa signification s’il est mis en relation avec la foi, la liturgie et la prière.
Article 12. En cette Année, par conséquent, le Catéchisme de l’Église catholique, pourra être un véritable instrument pour soutenir la foi, surtout pour tous ceux qui ont à cœur la formation des chrétiens, si déterminante dans notre contexte culturel. (...)
II – LE BILLET DE JEAN-MARIE GUÉNOIS SUR LA RENTRÉE DU CATÉ
L'Église de France veut-elle encore transmettre sa foi ?
Par Jean-Marie Guénois, le 1 septembre 2011
Je suis très perplexe après avoir assisté, hier matin, à un point presse à la Conférence des Évêques de France sur la réforme de la catéchèse préparée depuis cinq ans et mise en œuvre cette rentrée. Un article, publié vendredi matin dans le journal, en rend compte mais j'avoue, entre nous, ne pas comprendre plusieurs choses. Et je vous livre simplement quelques réflexions :
Le pédagogisme mais avec un train de retard
- Alors que dans le monde de l'enseignement beaucoup d'enseignants sont revenus depuis longtemps des dérives de ce qu'eux mêmes appellent, le "pédagogisme", c'est-à-dire le primat des méthodes de transmission sur l'acquisition des contenus, l'Église de France y entre à plein.
- Les outils pédagogiques - livrets, dvd - abondent. Ils sont fort bien "faits". Sous la forme de "modules", ils permettent de bâtir des menus à la carte pour chaque enfant. Mais, sans aucune vision de synthèse sur la foi chrétienne et surtout sur l'Église catholique ! Le mot n'a pas été prononcé ou à peine. On préfère parler de "communautés", de "foule immense", de "foule de chercheurs de Dieu".
- Ce qui est proposé est intéressant, vivant, chatoyant, mais il me semble - particulièrement après la crise de la pédophilie - qu'une des priorités serait justement pour les catholiques non pas la sensation mais l'intelligence - perdue - de ce qu'est l'Église catholique. Je ne vois pas qu'un enfant, à travers ce qui a été présenté, en puisse avoir la moindre idée car le noyau de base, synthétique, de cette foi chrétienne catholique, n'est pas exprimé.
Une différence étonnante de traitement entre les enfants et les adolescents
- À côté de cette indigence intellectuelle, un document publiée au printemps dernier, fait sensation sur un plan international. Il s'appelle "Youcat". Il s'adresse aux adolescents et aux jeunes adultes. Il a été traduit dans beaucoup de langues. Il a fait un tabac aux JMJ. Et, pour le coup, sous la forme d'un catéchisme moderne et synthétique, il cherche précisément à donner cette intelligence de la foi.
- D'où cette question : comment se fait-il que l'Église soit incapable d'exprimer l'essentiel ce qu'elle croit dans une langage simple, accessible, à des... enfants. Vingt pages suffiraient qu'elles soient écrites, en mots, en sons, en images ou interactives. Rodés à la vivacité, les enfant sont loin d'être des moutons ou des cerveaux inertes. Plus que les adultes, ils sont capables d'acquisitions fulgurantes.
L'Église veut-elle vraiment transmettre ?
- Mais l'Église veut-elle encore transmettre au sens intellectuel ?
Pas certain... Puisque l'on expliquait, jeudi matin, que ce temps était passé. Et qu'il s'agissait maintenant d'expérimenter la foi en communauté. Et que le jeune, prenant ainsi le goût d'être chrétien, construirait lui même son parcours de formation, notamment par ses questions.
- Ce qui me paraît être en partie une illusion, à tout le moins un anachronisme au moment où les jeunes générations (les JMJ viennent encore de le démontrer avec éclat ; ou le succès, à Paris, de groupes de formation pour jeunes étudiants comme "Even") sont en attente de contenus, de formation solide. Et, dit modestement : d'intelligence.
- Je trouve louable, la prise de conscience par l'Église, il y a plusieurs années, suite au fameux "rapport Dagens", de vouloir, pour faire court, "proposer la foi" et non plus dominer la société. Mais je trouve étrange que la traduction catéchétique de cette "politique" ait aujourd'hui l'apparence d'un déficit d'intelligence. Ma fonction me met en contact, avec des mondes très divers, ultra favorables ou ultra hostiles aux questions religieuses. Il m'apparaît que la requête "extérieure" aujourd'hui ne porte pas tant sur le christianisme, en tant que tel, que sur l'Église catholique que l'on ne "comprend" plus au sens intellectuel. Comment ces jeunes catholiques, formés sur un mode aléatoire, pourront répondre à ces questions ?
- Enfin, je suis fasciné par le contraste qui existe actuellement entre les religions sur ce plan de la formation. Comment se fait-il que les juifs, en premier lieu, les musulmans ensuite, parviennent à transmettre leur croyance et que l'Église catholique soit en panne à ce sujet ? Cela serait passionnant à étudier de près.
Un dernier mot. Pour suivre ces questions depuis des dizaines d'années, je m'aperçois que la politique des "bon sentiments" dans le domaine de la catéchèse pour ne pas, disait-on, décourager les milliers de bénévoles qui donnent du temps pour faire le catéchisme, a conduit à l'épuisement du système.
Bons sentiments, en clair : ne jamais faire de bilan de résultats ou d'efficacité ; ne tester aucune connaissance (ce que l'on admet pourtant dans les études de théologie et dans les autres religions ) ;
ne plus publier aucun chiffre national (en chute libre) sur la fréquentation du catéchisme depuis ... 1994 ; surtout ne rien dire quand cela ne marche pas.
Mais il y a, surtout, en arrière fond, une forte division des évêques, sur la notion même d'Église catholique et sur son identité. Ce différent théologique et idéologique explique largement la situation actuelle.
Mais, tout de même, comment cette Église catholique qui vit dans un des pays les plus rationnels du monde, la France, a pu laisser la question cruciale de la transmission, dans un tel état ? Les catholiques allemands, italiens, américains, auraient, de ce point de vue, beaucoup de leçons à donner.
III – LES COMMENTAIRES DE PAIX LITURGIQUE
1) « Sans la liturgie et les sacrements, la profession de foi n’aurait pas d’efficacité, parce qu’elle manquerait de la grâce qui soutient le témoignage des chrétiens. De la même manière, l’enseignement du Catéchisme sur la vie morale acquiert toute sa signification s’il est mis en relation avec la foi, la liturgie et la prière. » Par ces phrases, le Saint Père résume bien le lien fort qui unit foi, prière, liturgie et catéchisme et nous indique, par là-même, que la réforme qu'il promeut ne saurait se limiter à un seul de ces champs, d'où notre intérêt pour la question du catéchisme.
2) Dans l'article 12, Benoît XVI donne une définition simple et exemplaire de ce qu'est le catéchisme : « un véritable instrument pour soutenir la foi », au service de ceux « qui ont à cœur la formation des chrétiens ». En ce sens, le Souverain Pontife légitime la bataille de Jean Madiran pour la réintroduction d'un catéchisme pour enfants dans l'appareil pédagogique, pléthorique mais inefficace, à disposition des catéchistes. Jean-Marie Guénois ne dit pas autre chose quand il plaide pour un document de 20 pages, exprimant « le noyau de base, synthétique, de (la) foi chrétienne catholique ».
3) En phase avec une certaine politique qui veut que pour ne pas mesurer la fièvre on casse le thermomètre, bien des hommes d’Église n’ont cessé, depuis 1994, de communiquer les statistiques nationales d'enfants effectivement inscrits au catéchisme. Toutefois, lors de la conférence de presse de la CEF, il était indiqué que le taux moyen de catéchisation (comparaison du nombre d'enfants scolarisés avec les enfants catéchisés) dans les trois diocèses de Saint-Claude, Créteil, Aire et Dax était de 16,5%. Soit un enfant sur 6 qui assiste au catéchisme. Mais, dans un article du Figaro, Jean-Marie Guénois précise que ce taux est “uniquement calculé sur des concentrations urbaines, car l'intégration de zones rurales plomberait ce pourcentage au-dessous des 10%”. On lira avec profit, à ce propos, le dossier consacré par L’Homme nouveau du 8 octobre 2011 à : « Des pistes pour un catéchisme rénové ». L’auteur, l’abbé Laurent Jestin, relève lui aussi les statistiques catastrophiques : « en 1994, quand la conférence épiscopale de France fit une évaluation systématique, il apparaissait qu’environ 40% des enfants de Cours moyen suivaient une initiation catholique ; aujourd’hui, sont catéchisés 25% à 30% des enfants d’une classe d’âge scolaire, la décroissance étant de 0,5% par an ». De 2000 à 2007, le nombre des enfants catéchisés, déjà faible, a chuté de 70%. Font exception les Communautés et les traditionalistes.
4) En fait, tout le monde sait désormais que ce domaine est sans doute le plus sinistré du catholicisme contemporain : aux chiffres sur l’effondrement continu de la fréquentation du catéchisme, il faut ajouter que, dans la majorité des cas, ce qui reste de catéchisme ne transmet qu’un sous-produit d’enseignement. Autrement dit, la transmission de la foi catholique, en France et en bien d’autres pays, n’est pratiquement aujourd’hui plus assurée.
De tels résultats, après 40 ans d'expériences catéchétiques plus audacieuses les unes que les autres, nourries à l'aune de la communication, du marketing et de la sociologie, ne devraient-ils pas inciter les évêques à remettre les choses à plat en faisant appel aux méthodes éprouvées qui font toujours le succès des écoles hors contrat et des chapelles Summorum Pontificum ? Sauf que, ce constat global provoque une foule de réactions vitales « à la base » de prêtres, de laïcs, de parents, initiatives dont le présent dossier, prétendant bien moins encore que les précédents être exhaustif, donne une idée. Le temps de tirer La Miche de Pain et bien d’autres instruments des oubliettes n'est-il pas venu (voir dans le dossier ci-dessus indiqué de L’Homme nouveau, un article, « Des solutions alternatives », qui indique des revues, catéchismes par correspondance, sites Internet et autres nombreuses possibilités aujourd’hui actives pour pallier les carences de la catéchèse en faillite) ? De la même façon que le Missel de 1962 a vocation à enrichir celui de Paul VI, n'est-il pas temps que les petits catéchismes de nos grands-parents viennent remplir le désert créé par des années de Pierres Vivantes ? Car, toutes choses égales, comme en liturgie, à côté du catéchisme « ordinaire » en perdition, il existe un très vivant catéchisme « extraordinaire ».