14 septembre 2008

[Le Point] A Lourdes, le pape s'ouvre aux traditionalistes

SOURCE - Le Point - 14 septembre 2008

A Lourdes, le pape s'ouvre aux traditionalistes

Au troisième jour de sa visite en France, le pape Benoit XVI a lancé dimanche, lors d'une messe en plein air célébrée à Lourdes, un appel aux vocations religieuses et de l'esprit d'évangélisation.

Au troisième jour de sa visite en France, le pape Benoît XVI a lancé à Lourdes un appel aux vocations religieuses, rappelé aux évêques les dogmes contre la "permissivité morale" et leur a suggéré une ouverture vers les traditionalistes.
Devant 150.000 fidèles réunis dimanche pour une messe en plein air, le chef de l'Eglise catholique a d'abord évité les sujets de société les plus sensibles pour la jeunesse française, pays où plus d'un enfant sur deux naît hors mariage et où environ un mariage sur trois finit par un divorce.
 
Par la pratique liturgique vue comme conservatrice durant la messe - communion dans la bouche reçue à genoux -, il a pourtant confirmé une concession aux traditionalistes.
 
"Qu'à la suite des grands évangélisateurs de votre pays, l'esprit missionnaire qui a animé tant d'hommes et de femmes de France, au cours des siècles, soit encore votre fierté et votre engagement!", a-t-il dit dans un français parfait aux fidèles massés sur la Prairie, en face de la grotte de Matabielle.
Après Jean Paul II en 2004, Benoît XVI est le deuxième pape à se rendre sur ce site où, selon l'Eglise, la Vierge Marie serait apparue à Bernadette Soubirous, il y a 150 ans, en 1858. Lourdes est aujourd'hui l'un des principaux lieux de pèlerinage catholique dans le monde.
"NUL N'EST DE TROP DANS L'ÉGLISE"
Sur fond de crise drastique des vocations, notamment en France, le pape a renouvelé son appel déjà lancé la veille à Paris à la jeunesse, avec la célèbre apostrophe de son prédécesseur Jean Paul II: "N'ayez pas peur!", pour inviter les fidèles à davantage d'engagement.
 
"À votre tour, chers jeunes, n'ayez pas peur de dire oui aux appels du Seigneur, lorsqu'Il vous invite à marcher à sa suite. Répondez généreusement au Seigneur!", a-t-il dit.
 
C'est lors d'une rencontre à huis clos avec les évêques que le chef de l'Eglise catholique a précisé ses vues sur les questions de société. Il a souhaité une "pacification des esprits" avec les traditionalistes.
"Je ne doute pas que vous puissiez parvenir, en temps raisonnable, à des solutions satisfaisantes pour tous, afin que la tunique sans couture du Christ ne se déchire pas davantage", a-t-il dit aux évêques, selon le texte de son adresse transmise à la presse par le Saint-Siège.
"Nul n'est de trop dans l'Eglise. Chacun, sans exception, doit pouvoir s'y sentir chez lui et jamais rejeté", a-t-il ajouté.
 
Les traditionalistes de la Fraternité Saint Pie X, organisation fondée par Mgr Lefebvre, excommunié en 1988, souhaitent le retour de la messe en latin, s'opposent aux conséquences du concile Vatican II ayant renouvelé la liturgie et engagé une modernisation du catholicisme, et sont hostiles au rapprochement avec les autres religions.
 
Le pape avait déjà obtenu le ralliement de plusieurs prêtres de cette obédience mais le schisme reste vif en France, où les traditionalistes se sont souvent montrés proches du Front national de Jean-Marie Le Pen.
 
Devant les évêques, le pape s'est aussi montré intransigeant sur les dogmes de l'Eglise. Concernant les remariages de personnes divorcées, il a dit : "L'Eglise maintient fermement le principe de l'indissolubilité du mariage. On ne peut admettre les initiatives qui visent à bénir des unions illégitimes."
 
Il a rappelé une phrase de Jean Paul II qui selon lui a eu un vif succès chez les jeunes Français : "La permissivité morale ne rend pas l'homme heureux."
 
Dimanche soir, le pape devait participer à une procession eucharistique. Lundi matin, il doit visiter l'oratoire de l'hôpital pour une onction aux malades, avant une nouvelle messe. Une ultime visite est prévue lundi matin à l'hôpital de Tarbes, ce qui pourrait donner lieu à une intervention sur les questions de bioéthique.
 
Nicolas Fichot et Tom Heneghan avec Thierry Lévêque à Paris