Rome met les lefebvristes au pied du mur |
25/06/2008 - Nicolas Seneze et Isabelle de Gaulmyn - la-croix.com |
Rome met les lefebvristes au pied du mur Le Saint-Siège, qui reconnaît la « main tendue » aux intégristes, estime que la reconnaissance de Vatican II et de la liturgie rénovée « ne sont absolument pas remis en question » C’est un véritable ultimatum que Rome a lancé à la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X (FSSPX). Alors que le 30 juin marquera les 20 ans des ordinations épiscopales illicites qui avaient consommé le schisme entre Mgr Lefebvre et l’Église catholique, la commission "Ecclesia Dei", chargée à Rome des relations avec le monde intégriste, aurait envoyé une proposition d’accord à Mgr Bernard Fellay, actuel supérieur général de la FSSPX. Le cardinal Dario Castrillon Hoyos, président de la commission "Ecclesia Dei", aurait demandé à la Fraternité de souscrire à cinq conditions : « un engagement proportionné à la générosité du pape », « éviter toute intervention publique qui ne respecte pas la personne du pape et qui puisse être négative à la charité ecclésiale », « éviter la prétention à un magistère supérieur à celui du Saint-Père et ne pas ériger la Fraternité en opposition à l’Église », « démontrer la volonté d’agir honnêtement dans la pleine charité ecclésiale et le respect de l’autorité du vicaire du Christ ». Dernier point : la Fraternité a jusqu’à la fin juin pour s’engager positivement sur ces questions, en retour de quoi les excommunications prononcées en 1988 seraient levées. Contrairement aux accords proposés précédemment par l’Église catholique, celui-ci ne cite pas explicitement Vatican II. Cela veut-il dire que Benoît XVI, passionnément attaché à éviter que le schisme ne devienne définitif, renoncerait à faire de la reconnaissance du concile la condition d’un accord ? ![]() "La reconnaissance du concile Vatican II (...) pas remis en question" ![]() Pour lui, les cinq conditions citées, sont « les conditions minimales pour qu’il puisse y avoir un rapport caractérisé par le respect et la disponibilité à l’égard du Saint-Père ». « Il faut que cette offre, cette “main tendue”, soit reçue avec une attitude et un esprit de charité et de communion », ajoute-t-il. En fait, depuis plus de 20 ans, Rome et Écône sont d’accord pour reconnaître le concile « à la lumière de la Tradition de l’Église ». Les intégristes en profitaient alors pour opérer un tri sévère dans les textes conciliaires, pour en exclure tout ce qui, à leur avis, était contraire à la Tradition. Le cardinal Castrillon Hoyos prend donc une autre voie en demandant aux lefebvristes d’agir « dans le respect de l’autorité » du pape, et de ne pas prétendre à un magistère supérieur au sien. En clair, Rome leur demande d’obéir au pape et à son magistère (qui intègre les décisions du concile). ![]() ![]() Même si Benoît XVI rejette l’idée que le concile ait été une « rupture » avec la Tradition de l’Église, certaines de ses déclarations, et notamment sur la liberté religieuse, sont inacceptables pour les intégristes. Peu enclin à céder sur le fond ![]() Après avoir claqué la porte de toutes les négociations précédentes (1976, 1988, 2001, 2006), la Fraternité Saint-Pie-X va-t-elle cette fois accepter la main tendue par Rome, et le geste de « générosité » du pape ? Même si Mgr Fellay semble avoir refréné ses critiques contre Benoît XVI après sa rencontre du 4 juin avec le cardinal Castrillon Hoyos, il semble peu enclin à céder sur le fond. D’autant qu’à Écône, on est surpris que les propositions romaines sortent aujourd’hui dans la presse. « À la procédure d’urgence, ils ont ajouté une sorte de pression médiatique, constatait-on mercredi 25 juin du côté de la Fraternité. Mais il ne faut pas préjuger d’une décision définitive. » Mercredi, Mgr Fellay n’avait pas encore rédigé sa réponse à Rome. « Mon impression est qu’il faut attendre un moment, et peut-être un bon moment », expliquait-il toutefois dans son sermon de Winona. Reconnaissant que la Fraternité était à un « carrefour ». « Nous n’avons pas le choix. Nous ne prendrons pas ce chemin. Nous continuerons ce que nous avons toujours fait. (…) Arrivera ce qui doit arriver. N’ayons pas peur : nous attendrons des temps meilleurs. C’est ce que disait Monseigneur (NDLR : Mgr Lefebvre) il y a 20 ans. C’est ce que nous continuons à dire. » Nicolas SENÈZE (avec Isabelle DE GAULMYN, à Rome) |