SOURCE - Conversation entre Vittorio Messori et Andrea Tornielli - Paru en italien sur la Bussola - Traduction par benoit-et-moi.fr - 2 janvier 2012
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La Fraternité Saint-Pie X
Les positions politiques sont pour une bonne part déterminées par des situations psychologiques qui ont à voir avec les histoires et les tempéraments personnels. La même chose s'applique aux schismes et aux hérésies. Je relisais quelques pages de Calvin, non pas l'écrivain vénéré par les "liberal" (sic!), mais l'hérétique du XVIe siècle: en lui, on sent la joie d'être libéré du piège catholique, de pouvoir construire le christianisme à sa guise, de se sentir choisi par le Christ et oint par le Saint-Esprit pour combattre l'Antéchrist papal. Voilà, il me semble que désormais les lefebvristes eux aussi se sentent comme des archanges avec l'épée dégainée, et pour cette raison aussi, la fracture me semble difficile à réduire.
Toutefois, comme tu le sais, la prophétie, dans le sens de dévoiler l'avenir, n'est pas vraiment ma profession ...
- Vittorio, pour conclure cette longue conversation (nous sommes à table pour le réveillon ...) je voulais te demander quelque chose à propos de l'accord possible entre la FSSPX et le Saint-Siège. Tout semble encore en haute mer: les lefebvristes considèrent le Concile comme un vrai malheur pour l'Eglise et ils lui attribueent tous les maux, et toute la responsabilité de la crise actuelle ...- Là encore - sans doute que je suis plutôt sceptique par tempérament - mais plus le temps passe et plus je pense que la fracture va être incurable, comme celle qui s'est produite avec les Vétéro-Catholiques de Vatican I (ndt: L’Eglise vétéro-catholique italienne est une petite congrégation qui a quitté le Catholicisme romain au 19ème siècle. Cette Église suit un dogme autonome, à mi-chemin entre le Vatican et la Réforme, administre les sept sacrements de l’Église romaine, communie avec le pain et le vin, vénère la Vierge et les saints, mais ne reconnaît pas le dogme de l’infaillibilité pontificale), les «lefebvristes» de Pie IX, qui, comme tu le sais, existent encore et ont leur propre église ... J'ai toujours pensé que c'est une vue simpliste de croire que le problème est la liturgie latine ou la position du prêtre, quand il dit la messe. Le fait est que les perspectives ecclésiologiques sont très différentes aujourd'hui. D'autre part nous voyons aussi que nous avons un schisme dans le schisme, car si pour une partie de l'establishment lefebvriste, l'accord semble possible, il y a parmi eux ceux qui n'en veulent pas. Ici, Andrea, entre en jeu une question psychologique: au fond, c'est très gratifiant pour beaucoup de membres du clergé lefebvriste d'être parmi les «purs et durs», le dernier vestige d'Israël qui résiste à l'Antéchrist qui a investi la grande Église de Rome ... Je ne crois pas que la majorité de la Fraternité Saint-Pie X veuille rentrer dans l'Eglise, où elle serait seulement un point de vue parmi d'autres dans la grande famille catholique. Ils n'auraient plus la possibilité de se sentir les authentiques, uniques, paladins de l'orthodoxie.
Les positions politiques sont pour une bonne part déterminées par des situations psychologiques qui ont à voir avec les histoires et les tempéraments personnels. La même chose s'applique aux schismes et aux hérésies. Je relisais quelques pages de Calvin, non pas l'écrivain vénéré par les "liberal" (sic!), mais l'hérétique du XVIe siècle: en lui, on sent la joie d'être libéré du piège catholique, de pouvoir construire le christianisme à sa guise, de se sentir choisi par le Christ et oint par le Saint-Esprit pour combattre l'Antéchrist papal. Voilà, il me semble que désormais les lefebvristes eux aussi se sentent comme des archanges avec l'épée dégainée, et pour cette raison aussi, la fracture me semble difficile à réduire.
Toutefois, comme tu le sais, la prophétie, dans le sens de dévoiler l'avenir, n'est pas vraiment ma profession ...