SOURCE - Paix Liturgique - lettre n°390 - 4 juin 2013
Le 19 mai dernier, dimanche de Pentecôte, une centaine de fidèles Summorum Pontificum venus de toute l’Émilie-Romagne se sont retrouvés au pied de Notre-Dame du Poggetto, dans un sanctuaire des environs de Ferrare. Ce pèlerinage, un an après le tremblement de terre qui a secoué la région, avait notamment pour objet de remercier la Sainte Vierge pour sa protection : de tous les clochers de Ferrare, la petite église du sanctuaire est en effet la seule à être sortie totalement indemne du séisme.
Le 19 mai dernier, dimanche de Pentecôte, une centaine de fidèles Summorum Pontificum venus de toute l’Émilie-Romagne se sont retrouvés au pied de Notre-Dame du Poggetto, dans un sanctuaire des environs de Ferrare. Ce pèlerinage, un an après le tremblement de terre qui a secoué la région, avait notamment pour objet de remercier la Sainte Vierge pour sa protection : de tous les clochers de Ferrare, la petite église du sanctuaire est en effet la seule à être sortie totalement indemne du séisme.
L’événement était aussi l’occasion pour les groupes de fidèles attachés à la forme extraordinaire de la région de mieux faire connaissance et de préparer le prochain pèlerinage international du peuple Summorum Pontificum à Rome. À ces pèlerins, la Providence ménagea une très agréable surprise : alors que l’archevêque, Mgr Luigi Negri, ne devait que les saluer brièvement à l’issue de la matinée, son emploi du temps lui permit finalement d’arriver au moment de l’homélie qu’il accepta de prononcer au pied levé. Et, au fur et à mesure que les prêtres (diocésains) et fidèles entendaient cette homélie, et son éloge appuyé du Motu Proprio Summorum Pontificum, ils comprenaient qu’ils assistaient à un véritable événement.
I – HOMÉLIE DE MGR LUIGI NEGRI, ARCHEVÊQUE DE FERRARE, LORS DU PÈLERINAGE AU SANCTUAIRE DE NOTRE-DAME DU POGGETTO, DIMANCHE DE PENTECÔTE 2013
La Sainte Messe selon le rite traditionnel est célébrée
aujourd’hui dans la grande solennité de la Pentecôte qui rappelle à l’Église,
en tout temps, en tous lieux, et donc à tout chrétien, que la révélation de
la Foi et son développement en une vie de communauté et de communion, en une
pratique de la charité, en un exercice actif de la mission, naissent précisément
du miracle de l’effusion de l’Esprit Saint dans le cœur des fidèles, pur
don du Seigneur !
Le Saint-Père Benoît XVI, dans une intervention admirable lors de l’assemblée du Synode des Évêques sur la Nouvelle évangélisation, auquel j’eus l’honneur de participer sur son invitation personnelle, dit que l’Église ne naît pas par décision de la base, l’Église ne naît pas d’une quelconque assemblée constituante : l’Église naît de l’action de l’Esprit Saint, qui change le cœur des hommes et les identifie au Cœur même de Dieu. C’est l’Esprit du Seigneur crucifié et ressuscité, son regard sur la vie, sa façon d’appréhender l’existence, sa relation aux hommes ; c’est la nouveauté de son être et de son existence qui est passée de façon – comment dire ? – impétueuse, dans la vie d’une communauté qui était incontestablement en prière, en attente de lui, mais qui ne pouvait en aucun cas prétendre entrer dans le mystère de l’événement dont elle était spectatrice et devint protagoniste. L’Esprit change le cœur de l’homme, sa façon d’être, sa façon d’agir et sa façon d’appréhender l’existence. L’humanité du Christ se prolonge dans le monde. L’Église qui naît de l’Esprit se maintient dans l’Esprit, se communique aux hommes par l’Esprit. L’Église est le visage définitif pris par Jésus dans l’histoire.
Quant à nous, nous avons cette autre grande et tout aussi définitive hérédité : celle de participer véritablement au mystère de l’Église une, sainte, catholique et apostolique. Cette hérédité, nous la vivons pour de vrai dans notre vie de tous les jours, dans le bonheur comme dans le malheur, dans la santé et dans la maladie, dans la joie comme dans la douleur, ainsi que le proclament les acteurs de ce grand sacrement ecclésial qu’est le mariage. Je crois que cela situe la très louable initiative de ce pèlerinage, et de cette Messe, dans son contexte véritable.
Je souhaite, et vous souhaite, que cette célébration eucharistique le jour même de la Pentecôte serve à chacun de vous, comme j’espère cela m’a servi, pour retrouver l’ardeur des origines, l’ardeur de la naissance de l’Église engendrée par l’Esprit Saint. La grandeur qui entoure la manifestation de notre mission sert à nous faire part de cette nouveauté et nous incite à ne pas la garder pour nous mais à la diffuser à tous les hommes.
J’ai participé hier à la Vigile de Pentecôte que le pape François a partagée avec plus de 150 000 jeunes des différentes réalités ecclésiales. À un certain moment, le Pape a dit avec son style sincère et franc qui peut aller jusqu’à une dureté à laquelle nous ne sommes plus habitués : « L’Église doit sortir d’elle-même », elle ne doit pas se renfermer. « Quand l’Église se renferme, elle tombe malade. » L’Église doit s’ouvrir, non pas en abandonnant son identité mais pour vivre son identité, parce que le milieu naturel de l’Église, c’est la mission. Il convient donc que l’Église sorte d’elle-même pour aller vers les hommes, explorant toutes les périphéries de la vie de l’homme contemporain.
La Pentecôte vous assigne donc la mission ecclésiale. Elle vous confère l’insigne honneur d’être témoins du Christ ressuscité jusqu’aux extrémités du monde. Elle vous fait générateurs, comme le dit saint Irénée dans un texte formidable, des fils de Dieu. Elle vous rend capables de faire des hommes les enfants de Dieu.
Il m’est déjà arrivé, lors de ces premiers mois de service épiscopal [Mgr Negri, anciennement évêque de San Marino, a été nommé archevêque de Ferrare dans les derniers temps du pontificat de Benoît XVI], de définir quels sont les termes de la vie et de la mission. Je ne peux et ne dois, au cours de ce salut que je vous adresse, tout passer en revue mais il me semble important de placer cette célébration sous le regard tendre et ferme de Marie, et de la considérer comme un moment de grâce et de responsabilité.
Le christianisme est un événement de grâce parce qu’il nous est donné tout entier et que personne ne peut dire « j’ai le droit ». Nous n’avions pas droit à la Foi. Nous n’avions pas droit à l’Incarnation du Fils de Dieu. Ainsi nous arrive-t-il quelquefois de rappeler à certains fidèles qui viennent demander, voire réclamer des sacrements, qu’ils n’ont aucun droit sur les sacrements. Les sacrements sont un don que l’Église a reçus du Seigneur Jésus-Christ et que l’Église confère à ceux qui sont dans la condition de les recevoir de façon adéquate. Je veux parler de la question absolument sans fondement – du point de vue théologique et pastorale – du « droit » que les divorcés remariés auraient de recevoir l’Eucharistie.
Cette grâce de l’Église, vous la vivez à la source de la Foi qu’est l’Eucharistie, la célébration liturgique. Par la prudente et grande miséricorde de Benoît XVI, vous la puisez auprès d’un des deux grands trésors de la liturgie de l’Église, la liturgie traditionnelle. Celle-ci n’est pas une alternative à la liturgie réformée par le concile Vatican II mais exprime tout son caractère aux côtés de la liturgie réformée, en toute dignité, en toute liberté et en pleine responsabilité.
Benoît XVI l’a énoncé avec une clarté admirable dans le Motu Proprio. Il a voulu accroître la possibilité de vivre des richesses de la liturgie de l’Église et a demandé pour cela à toute l’Église, à commencer par les évêques, de se montrer respectueux de son intention d’augmenter les trésors de l’Église, en favorisant l’accès à ce bien antique à ceux qui en ressentent légitimement le désir et souhaitent le vivre pleinement pour la vérité de la Foi et de la mission d’aujourd’hui. Incontestablement, le Pape a ainsi dépassé la fausse et inacceptable opposition entre l’ancien et le nouveau, rompant avec cette herméneutique de la discontinuité entre ce qui existait avant le Concile et ce que le Concile a annoncé, et ce que la mise en œuvre du Concile a douloureusement produit pour notre époque. Il y a une unique Église du Seigneur, à laquelle l’Esprit a donné de traverser des moments différents : le concile Vatican II a été un moment d’extraordinaire importance, même s’il a représenté un grand défi pour le développement de l’Église.
Vous utilisez donc cette liturgie, et je suis heureux que vous le fassiez dans ce diocèse dont je suis depuis peu l’archevêque. Vous ne le faites pas contre quelqu’un ou pour affirmer des opinions mais pour vivre le mystère de l’Église selon la profondeur et la vérité que vous retenez avoir le devoir et le droit de pratiquer. Et l’Église permet aussi cela. Benoît XVI, et je ne suis pas habitué à parler en l’air, a manifesté une vraie miséricorde pastorale en mettant cette possibilité au service de la Foi de chaque chrétien et de petits groupes qui n’ont même pas besoin d’être quantifiés numériquement : les groupes stables sont composés de tous les fidèles qui ont le droit et le devoir de bénéficier de cette liturgie. Vous l’avez à portée de main et l’Église vous permet de la pratiquer en toute liberté.
Personne, aucun diocèse d’Italie ou du monde, ne pourra vous dire non. S’il devait y avoir un seul “non”, vous devez alors vous adresser à l’évêque. Avant cela, le dialogue entre les fidèles qui veulent la liturgie traditionnelle et l’Église est un dialogue entre vous et le prêtre qui est prêt à vous aider dans cette pratique ancienne et très belle. Bien sûr tout cela nécessite une préparation adéquate, mais je suis sûr que vous l’avez. Je pense que pour que cela devienne une expérience accessible à tous ceux qui ne la connaissent pas, il faudra un temps de formation et de préparation. [Mgr Negri évoque son expérience dans son précédent diocèse de Saint-Marin, voir notre lettre 297.]
Comme ceux de la liturgie réformée, pratiquez l’ancienne liturgie pour vous. Pour la vérité de votre Foi. Pour la vérité de votre Charité. Pour donner une impulsion à votre mission. Ce sont deux trésors pour un même peuple. Et ce peuple unique et mature se nourrit de la Foi précisément s’il sait vivre la liberté que l’Église lui accorde. Or cette liberté liturgique, non seulement l’Église la concède mais elle la garantit aussi.
N’ayez pas des opinions à défendre ou à opposer aux autres. L’archevêque de Ferrare et Comacchio n’est ni le gardien ni le propagateur d’aucune opinion que ce soit. Il n’a qu’une opinion : la vérité du Seigneur, l’Évangile, la Tradition de l’Église, le magistère du Saint-Père et, en union avec celui-ci, son propre magistère.
Voici le cadre dans lequel Benoît XVI a promulgué le Motu Proprio. Je fais partie des évêques, à dire la vérité pas si nombreux que cela, qui en ont retiré un approfondissement de leur propre identité au regard de l’expérience de Dieu. C’est une grandeur non seulement pour ceux qui le pratiquent mais aussi pour toute l’Église.
De ce fait, et je conclus, vous devez toujours rechercher la majeure participation à la vie de la communauté ecclésiale. Cette pratique ne vous soustrait pas à la vie de la communauté et encore moins à la difficile mais belle réalisation de la communion ecclésiale.
Dans notre région [frappée un an auparavant par le tremblement de terre, NdT], la vie ecclésiale est toujours fortement engagée dans la lente mais inexorable entreprise d’émerger des ruines matérielles qui, comme je l’ai écrit, sont comme un défi pour nous inciter à retrouver la Foi et la Charité. Je suis arrivé parmi le clergé de ce diocèse et ai vu tant de laïcs bouleversés par le séisme de l’an dernier qui a rendu impraticables des centaines d’églises. Cela les a obligés, et nous oblige encore, à vivre l’Eucharistie dans des lieux de fortune, dans les salles où les communautés sont hébergées et dans les quelques lieux épargnés par le séisme. Le tremblement de terre a détruit les maisons et les églises mais il n’a pas détruit la Foi. Sur cette Foi, nous fondons la reprise. Malheureusement, nous devons aussi compter sur les institutions qui, jusqu’à présent, n’ont pas donné signe de grande diligence.
Notre première ressource est notre expérience de la Foi. Nous sommes tous membres d’une même Église et c’est pour cela que vous devez, y compris au travers de cette expérience belle et particulière [de la liturgie traditionnelle], chercher à vivre chaque jour d’avantage en tant que membre vivant de l’Église, participant à l’unique Sang et Corps du Christ, de sorte que grandissent en vous la Foi, l’Espérance et la Charité.
Je vous suis avec affection, je vous encourage sur votre chemin. Je vous demande cette saine humilité que le pape François, avant même de la demander à son Église, manifeste chaque jour par sa simple présence et sa façon d’être. N’ayez pas d’autre préoccupation sinon celle de vivre intensément ce que l’Église a concédé pour votre bien et celui de toute l’Église. Soyez certains que ni mon écoute ni mon soutien ne vous feront défaut. Ni, si nécessaire, ma correction paternelle, et ce comme envers toute communauté dès lors que ce devoir qui me revient devrait s’exprimer, mais je doute que cela survienne jamais ! Continuez cette Sainte Messe que je ne voulais pas interrompre. Je veux dire par là que je ne pouvais pas participer totalement à cette initiative louable seulement parce que m’attendaient, et m’attendent encore, les obligations diocésaines liées à la Fête que nous célébrons aujourd’hui.
Maintenant, afin que votre chemin soit sûr et clair, embrassez la vérité, don du Seigneur que l’Esprit Saint fait à toute l’Église et que l’évêque conserve, protège et communique. Priez pour moi, pour cette charge peu légère que je porte et que j’ai acceptée au soir de ma vie, par obéissance au Vicaire du Christ qui me l’a demandé avec une insistance qui m’a interdit toute forme de résistance. Bonne fête à tous !
Le Saint-Père Benoît XVI, dans une intervention admirable lors de l’assemblée du Synode des Évêques sur la Nouvelle évangélisation, auquel j’eus l’honneur de participer sur son invitation personnelle, dit que l’Église ne naît pas par décision de la base, l’Église ne naît pas d’une quelconque assemblée constituante : l’Église naît de l’action de l’Esprit Saint, qui change le cœur des hommes et les identifie au Cœur même de Dieu. C’est l’Esprit du Seigneur crucifié et ressuscité, son regard sur la vie, sa façon d’appréhender l’existence, sa relation aux hommes ; c’est la nouveauté de son être et de son existence qui est passée de façon – comment dire ? – impétueuse, dans la vie d’une communauté qui était incontestablement en prière, en attente de lui, mais qui ne pouvait en aucun cas prétendre entrer dans le mystère de l’événement dont elle était spectatrice et devint protagoniste. L’Esprit change le cœur de l’homme, sa façon d’être, sa façon d’agir et sa façon d’appréhender l’existence. L’humanité du Christ se prolonge dans le monde. L’Église qui naît de l’Esprit se maintient dans l’Esprit, se communique aux hommes par l’Esprit. L’Église est le visage définitif pris par Jésus dans l’histoire.
Quant à nous, nous avons cette autre grande et tout aussi définitive hérédité : celle de participer véritablement au mystère de l’Église une, sainte, catholique et apostolique. Cette hérédité, nous la vivons pour de vrai dans notre vie de tous les jours, dans le bonheur comme dans le malheur, dans la santé et dans la maladie, dans la joie comme dans la douleur, ainsi que le proclament les acteurs de ce grand sacrement ecclésial qu’est le mariage. Je crois que cela situe la très louable initiative de ce pèlerinage, et de cette Messe, dans son contexte véritable.
Je souhaite, et vous souhaite, que cette célébration eucharistique le jour même de la Pentecôte serve à chacun de vous, comme j’espère cela m’a servi, pour retrouver l’ardeur des origines, l’ardeur de la naissance de l’Église engendrée par l’Esprit Saint. La grandeur qui entoure la manifestation de notre mission sert à nous faire part de cette nouveauté et nous incite à ne pas la garder pour nous mais à la diffuser à tous les hommes.
J’ai participé hier à la Vigile de Pentecôte que le pape François a partagée avec plus de 150 000 jeunes des différentes réalités ecclésiales. À un certain moment, le Pape a dit avec son style sincère et franc qui peut aller jusqu’à une dureté à laquelle nous ne sommes plus habitués : « L’Église doit sortir d’elle-même », elle ne doit pas se renfermer. « Quand l’Église se renferme, elle tombe malade. » L’Église doit s’ouvrir, non pas en abandonnant son identité mais pour vivre son identité, parce que le milieu naturel de l’Église, c’est la mission. Il convient donc que l’Église sorte d’elle-même pour aller vers les hommes, explorant toutes les périphéries de la vie de l’homme contemporain.
La Pentecôte vous assigne donc la mission ecclésiale. Elle vous confère l’insigne honneur d’être témoins du Christ ressuscité jusqu’aux extrémités du monde. Elle vous fait générateurs, comme le dit saint Irénée dans un texte formidable, des fils de Dieu. Elle vous rend capables de faire des hommes les enfants de Dieu.
Il m’est déjà arrivé, lors de ces premiers mois de service épiscopal [Mgr Negri, anciennement évêque de San Marino, a été nommé archevêque de Ferrare dans les derniers temps du pontificat de Benoît XVI], de définir quels sont les termes de la vie et de la mission. Je ne peux et ne dois, au cours de ce salut que je vous adresse, tout passer en revue mais il me semble important de placer cette célébration sous le regard tendre et ferme de Marie, et de la considérer comme un moment de grâce et de responsabilité.
Le christianisme est un événement de grâce parce qu’il nous est donné tout entier et que personne ne peut dire « j’ai le droit ». Nous n’avions pas droit à la Foi. Nous n’avions pas droit à l’Incarnation du Fils de Dieu. Ainsi nous arrive-t-il quelquefois de rappeler à certains fidèles qui viennent demander, voire réclamer des sacrements, qu’ils n’ont aucun droit sur les sacrements. Les sacrements sont un don que l’Église a reçus du Seigneur Jésus-Christ et que l’Église confère à ceux qui sont dans la condition de les recevoir de façon adéquate. Je veux parler de la question absolument sans fondement – du point de vue théologique et pastorale – du « droit » que les divorcés remariés auraient de recevoir l’Eucharistie.
Cette grâce de l’Église, vous la vivez à la source de la Foi qu’est l’Eucharistie, la célébration liturgique. Par la prudente et grande miséricorde de Benoît XVI, vous la puisez auprès d’un des deux grands trésors de la liturgie de l’Église, la liturgie traditionnelle. Celle-ci n’est pas une alternative à la liturgie réformée par le concile Vatican II mais exprime tout son caractère aux côtés de la liturgie réformée, en toute dignité, en toute liberté et en pleine responsabilité.
Benoît XVI l’a énoncé avec une clarté admirable dans le Motu Proprio. Il a voulu accroître la possibilité de vivre des richesses de la liturgie de l’Église et a demandé pour cela à toute l’Église, à commencer par les évêques, de se montrer respectueux de son intention d’augmenter les trésors de l’Église, en favorisant l’accès à ce bien antique à ceux qui en ressentent légitimement le désir et souhaitent le vivre pleinement pour la vérité de la Foi et de la mission d’aujourd’hui. Incontestablement, le Pape a ainsi dépassé la fausse et inacceptable opposition entre l’ancien et le nouveau, rompant avec cette herméneutique de la discontinuité entre ce qui existait avant le Concile et ce que le Concile a annoncé, et ce que la mise en œuvre du Concile a douloureusement produit pour notre époque. Il y a une unique Église du Seigneur, à laquelle l’Esprit a donné de traverser des moments différents : le concile Vatican II a été un moment d’extraordinaire importance, même s’il a représenté un grand défi pour le développement de l’Église.
Vous utilisez donc cette liturgie, et je suis heureux que vous le fassiez dans ce diocèse dont je suis depuis peu l’archevêque. Vous ne le faites pas contre quelqu’un ou pour affirmer des opinions mais pour vivre le mystère de l’Église selon la profondeur et la vérité que vous retenez avoir le devoir et le droit de pratiquer. Et l’Église permet aussi cela. Benoît XVI, et je ne suis pas habitué à parler en l’air, a manifesté une vraie miséricorde pastorale en mettant cette possibilité au service de la Foi de chaque chrétien et de petits groupes qui n’ont même pas besoin d’être quantifiés numériquement : les groupes stables sont composés de tous les fidèles qui ont le droit et le devoir de bénéficier de cette liturgie. Vous l’avez à portée de main et l’Église vous permet de la pratiquer en toute liberté.
Personne, aucun diocèse d’Italie ou du monde, ne pourra vous dire non. S’il devait y avoir un seul “non”, vous devez alors vous adresser à l’évêque. Avant cela, le dialogue entre les fidèles qui veulent la liturgie traditionnelle et l’Église est un dialogue entre vous et le prêtre qui est prêt à vous aider dans cette pratique ancienne et très belle. Bien sûr tout cela nécessite une préparation adéquate, mais je suis sûr que vous l’avez. Je pense que pour que cela devienne une expérience accessible à tous ceux qui ne la connaissent pas, il faudra un temps de formation et de préparation. [Mgr Negri évoque son expérience dans son précédent diocèse de Saint-Marin, voir notre lettre 297.]
Comme ceux de la liturgie réformée, pratiquez l’ancienne liturgie pour vous. Pour la vérité de votre Foi. Pour la vérité de votre Charité. Pour donner une impulsion à votre mission. Ce sont deux trésors pour un même peuple. Et ce peuple unique et mature se nourrit de la Foi précisément s’il sait vivre la liberté que l’Église lui accorde. Or cette liberté liturgique, non seulement l’Église la concède mais elle la garantit aussi.
N’ayez pas des opinions à défendre ou à opposer aux autres. L’archevêque de Ferrare et Comacchio n’est ni le gardien ni le propagateur d’aucune opinion que ce soit. Il n’a qu’une opinion : la vérité du Seigneur, l’Évangile, la Tradition de l’Église, le magistère du Saint-Père et, en union avec celui-ci, son propre magistère.
Voici le cadre dans lequel Benoît XVI a promulgué le Motu Proprio. Je fais partie des évêques, à dire la vérité pas si nombreux que cela, qui en ont retiré un approfondissement de leur propre identité au regard de l’expérience de Dieu. C’est une grandeur non seulement pour ceux qui le pratiquent mais aussi pour toute l’Église.
De ce fait, et je conclus, vous devez toujours rechercher la majeure participation à la vie de la communauté ecclésiale. Cette pratique ne vous soustrait pas à la vie de la communauté et encore moins à la difficile mais belle réalisation de la communion ecclésiale.
Dans notre région [frappée un an auparavant par le tremblement de terre, NdT], la vie ecclésiale est toujours fortement engagée dans la lente mais inexorable entreprise d’émerger des ruines matérielles qui, comme je l’ai écrit, sont comme un défi pour nous inciter à retrouver la Foi et la Charité. Je suis arrivé parmi le clergé de ce diocèse et ai vu tant de laïcs bouleversés par le séisme de l’an dernier qui a rendu impraticables des centaines d’églises. Cela les a obligés, et nous oblige encore, à vivre l’Eucharistie dans des lieux de fortune, dans les salles où les communautés sont hébergées et dans les quelques lieux épargnés par le séisme. Le tremblement de terre a détruit les maisons et les églises mais il n’a pas détruit la Foi. Sur cette Foi, nous fondons la reprise. Malheureusement, nous devons aussi compter sur les institutions qui, jusqu’à présent, n’ont pas donné signe de grande diligence.
Notre première ressource est notre expérience de la Foi. Nous sommes tous membres d’une même Église et c’est pour cela que vous devez, y compris au travers de cette expérience belle et particulière [de la liturgie traditionnelle], chercher à vivre chaque jour d’avantage en tant que membre vivant de l’Église, participant à l’unique Sang et Corps du Christ, de sorte que grandissent en vous la Foi, l’Espérance et la Charité.
Je vous suis avec affection, je vous encourage sur votre chemin. Je vous demande cette saine humilité que le pape François, avant même de la demander à son Église, manifeste chaque jour par sa simple présence et sa façon d’être. N’ayez pas d’autre préoccupation sinon celle de vivre intensément ce que l’Église a concédé pour votre bien et celui de toute l’Église. Soyez certains que ni mon écoute ni mon soutien ne vous feront défaut. Ni, si nécessaire, ma correction paternelle, et ce comme envers toute communauté dès lors que ce devoir qui me revient devrait s’exprimer, mais je doute que cela survienne jamais ! Continuez cette Sainte Messe que je ne voulais pas interrompre. Je veux dire par là que je ne pouvais pas participer totalement à cette initiative louable seulement parce que m’attendaient, et m’attendent encore, les obligations diocésaines liées à la Fête que nous célébrons aujourd’hui.
Maintenant, afin que votre chemin soit sûr et clair, embrassez la vérité, don du Seigneur que l’Esprit Saint fait à toute l’Église et que l’évêque conserve, protège et communique. Priez pour moi, pour cette charge peu légère que je porte et que j’ai acceptée au soir de ma vie, par obéissance au Vicaire du Christ qui me l’a demandé avec une insistance qui m’a interdit toute forme de résistance. Bonne fête à tous !
II – LES RÉFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE
1) Il faut noter que Mgr
Negri, lorsqu’il a prononcé ces paroles, revenait de Rome : le contact avec
le Pape n’a donc aucunement modéré son enthousiasme ni freiné sa langue. En
cela, après la bonne nouvelle du pèlerinage Summorum Pontificum d’octobre prochain et l’article de Il Foglio (voir notre lettre précédente), cette homélie concourt à la sérénité qui nous illumine quant
aux perspectives offertes à la forme extraordinaire du rite romain.
2) Cela est d’autant plus remarquable que Mgr Negri, très proche du mouvement Communion et Libération, est un grand ami du cardinal Biffi, ancien archevêque de Bologne, du cardinal Scola, archevêque de Milan, du cardinal Caffarra, archevêque de Bologne, qu’il est lié à Mgr Moraglia, patriarche de Venise, au cardinal Piacenza, Préfet de la Congrégation du Clergé, en un mot qu’il fait partie des prélats italiens dits « de restauration », parmi lesquels il est peut-être le plus décidé dans ses propos. Sa liberté de parole – semblable à celle de Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon, annonçant dans une conférence de presse, immédiatement après avoir été reçu par le Pape, le colloque Sacra Liturgia du 25 au 28 juin à l’Université Romaine de la Sainte-Croix, avec célébration des deux formes liturgiques – montre que ce courant, non seulement n’est pas écarté, mais qu’il est encouragé dans sa légitime expression par le pape François.
3) Le rappel clair et précis de l’esprit et de la lettre du Motu Proprio par un évêque de ce “calibre” est à souligner :
a) Les groupes stables de fidèles qui souhaitent vivre leur foi catholique au rythme de la liturgie extraordinaire n’ont pas de condition particulière à remplir : « Benoît XVI, et je ne suis pas habitué à parler en l’air, a manifesté une vraie miséricorde pastorale en mettant cette possibilité au service de la Foi de chaque chrétien et de petits groupes qui n’ont même pas besoin d’être quantifiés numériquement : les groupes stables sont composés de tous les fidèles qui ont le droit et le devoir de bénéficier de cette liturgie. Vous l’avez à portée de main et l’Église vous permet de la pratiquer en toute liberté ».
b) C’est au curé, et non à l’évêque qu’il faut s’adresser. Si le curé refuse, ce qui ne devrait pas être, alors seulement les demandeurs doivent se tourner vers l’évêque : « Personne, aucun diocèse d’Italie ou du monde, ne pourra vous dire non. S’il devait y avoir un seul “non”, vous devez alors vous adresser à l’évêque. Avant cela, le dialogue entre les fidèles qui veulent la liturgie traditionnelle et l’Église est un dialogue entre vous et le prêtre qui est prêt à vous aider dans cette pratique ancienne et très belle ».
c) Cette manière de célébrer s’intègre à la vie normale de l’Église et à sa mission : « Comme ceux de la liturgie réformée, pratiquez l’ancienne liturgie pour vous. Pour la vérité de votre Foi. Pour la vérité de votre Charité. Pour donner une impulsion à votre mission. Ce sont deux trésors pour un même peuple. Et ce peuple unique et mature se nourrit de la Foi précisément s’il sait vivre la liberté que l’Église lui accorde. Or cette liberté liturgique, non seulement l’Église la concède mais elle la garantit aussi ».
4) Comme bien des prêtres qui ont pu, grâce au Motu Proprio, célébrer la messe traditionnelle, l’archevêque de Ferrare fait part de l’enrichissement personnel que cela lui a apporté : « Je fais partie des évêques, à dire la vérité pas si nombreux que cela, qui en ont retiré un approfondissement de leur propre identité au regard de l’expérience de Dieu. C’est une grandeur non seulement pour ceux qui le pratiquent mais aussi pour toute l’Église ».
5) Si bien que nous retiendrons avec émotion ces paroles qu’on aimerait souvent entendre de la part des pasteurs de l’Église : « Je vous suis avec affection, je vous encourage sur votre chemin… Soyez certains que ni mon écoute ni mon soutien ne vous feront défaut ». Ad multos annos, Excellence !
2) Cela est d’autant plus remarquable que Mgr Negri, très proche du mouvement Communion et Libération, est un grand ami du cardinal Biffi, ancien archevêque de Bologne, du cardinal Scola, archevêque de Milan, du cardinal Caffarra, archevêque de Bologne, qu’il est lié à Mgr Moraglia, patriarche de Venise, au cardinal Piacenza, Préfet de la Congrégation du Clergé, en un mot qu’il fait partie des prélats italiens dits « de restauration », parmi lesquels il est peut-être le plus décidé dans ses propos. Sa liberté de parole – semblable à celle de Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon, annonçant dans une conférence de presse, immédiatement après avoir été reçu par le Pape, le colloque Sacra Liturgia du 25 au 28 juin à l’Université Romaine de la Sainte-Croix, avec célébration des deux formes liturgiques – montre que ce courant, non seulement n’est pas écarté, mais qu’il est encouragé dans sa légitime expression par le pape François.
3) Le rappel clair et précis de l’esprit et de la lettre du Motu Proprio par un évêque de ce “calibre” est à souligner :
a) Les groupes stables de fidèles qui souhaitent vivre leur foi catholique au rythme de la liturgie extraordinaire n’ont pas de condition particulière à remplir : « Benoît XVI, et je ne suis pas habitué à parler en l’air, a manifesté une vraie miséricorde pastorale en mettant cette possibilité au service de la Foi de chaque chrétien et de petits groupes qui n’ont même pas besoin d’être quantifiés numériquement : les groupes stables sont composés de tous les fidèles qui ont le droit et le devoir de bénéficier de cette liturgie. Vous l’avez à portée de main et l’Église vous permet de la pratiquer en toute liberté ».
b) C’est au curé, et non à l’évêque qu’il faut s’adresser. Si le curé refuse, ce qui ne devrait pas être, alors seulement les demandeurs doivent se tourner vers l’évêque : « Personne, aucun diocèse d’Italie ou du monde, ne pourra vous dire non. S’il devait y avoir un seul “non”, vous devez alors vous adresser à l’évêque. Avant cela, le dialogue entre les fidèles qui veulent la liturgie traditionnelle et l’Église est un dialogue entre vous et le prêtre qui est prêt à vous aider dans cette pratique ancienne et très belle ».
c) Cette manière de célébrer s’intègre à la vie normale de l’Église et à sa mission : « Comme ceux de la liturgie réformée, pratiquez l’ancienne liturgie pour vous. Pour la vérité de votre Foi. Pour la vérité de votre Charité. Pour donner une impulsion à votre mission. Ce sont deux trésors pour un même peuple. Et ce peuple unique et mature se nourrit de la Foi précisément s’il sait vivre la liberté que l’Église lui accorde. Or cette liberté liturgique, non seulement l’Église la concède mais elle la garantit aussi ».
4) Comme bien des prêtres qui ont pu, grâce au Motu Proprio, célébrer la messe traditionnelle, l’archevêque de Ferrare fait part de l’enrichissement personnel que cela lui a apporté : « Je fais partie des évêques, à dire la vérité pas si nombreux que cela, qui en ont retiré un approfondissement de leur propre identité au regard de l’expérience de Dieu. C’est une grandeur non seulement pour ceux qui le pratiquent mais aussi pour toute l’Église ».
5) Si bien que nous retiendrons avec émotion ces paroles qu’on aimerait souvent entendre de la part des pasteurs de l’Église : « Je vous suis avec affection, je vous encourage sur votre chemin… Soyez certains que ni mon écoute ni mon soutien ne vous feront défaut ». Ad multos annos, Excellence !