Pour un séminaire, c’est le sommet de l’année académique. Pour une communauté, un signe d’espérance pour les années à venir. Le samedi 1er juillet, les ordinations sacerdotales de sept séminaristes européens de la Fraternité Saint-Pierre ont été conférées en Bavière. Parmi eux, quatre Français, un Polonais, un Tchèque et un Allemand.
La personnalité du pontife avait un relief particulier cette année puisqu’il s’agissait du cardinal Raymond L. Burke, « Cardinalis patronus » de l’Ordre de Malte et figure incontournable de la fidélité au magistère traditionnel. Respectant l’enracinement allemand du séminaire européen de la Fraternité Saint-Pierre, la messe d’ordination était célébrée dans l’église paroissiale de Lindenberg-im-Allgau, au sud-ouest de la Bavière, à quelques kilomètres du séminaire. Une église bavaroise telle qu’on peut la rêver, avec le style baroque si caractéristique de la région. Un rococo qui demeure plutôt discret à Lindenberg si on le compare à la célèbre église de Wies, souvent considérée comme le joyau baroco de l’Europe.
Les bancs, pourtant nombreux, peinaient à contenir la foule des fidèles présents qui ont dû investir les différentes tribunes. En plus des séminaristes présents, les prêtres des différents districts européens étaient venus exceptionnellement nombreux entourer leurs jeunes confrères. Ils furent ainsi 80 à venir imposer les mains aux ordinands, selon le beau rite du sacrement de l’ordre. A peu de choses près, ce premier jour de juillet était pour nombre d’entre eux la date anniversaire de leur propre ordination. Les deux recteurs des séminaires européen et américain, les abbés Patrick du Faÿ et Joseph Bisig, fêtaient ainsi respectivement leurs trente et quarante ans de sacerdoce.
Splendeur de la liturgie
Si la tonsure, les ordres mineurs, le sous-diaconat puis le diaconat permettent au séminariste de se préparer, par degrés, à se rendre plus digne de devenir prêtre, la messe d’ordination qui fait de chacun un alter Christus est empreinte d’une très vive émotion. Qui ne conserve en mémoire le tableau des ordinants allongés les bras en croix devant l’autel durant le chant de la litanie des saints ? La beauté et l’intelligence de la liturgie unissent ici le don total des séminaristes au Dieu d’amour et l’importance de la prière des fidèles pour les aider dans cette future vie sacerdotale qui dépasse infiniment les forces humaines. Puis chaque séminariste s’avance dans la nef pour que sa mère vienne dénouer la fine bandelette que le pontife a entourée autour de ses mains jointes, le tragique qui brise autant qu’il réjouit le cœur de chaque mère est alors visible. Par ce « dénouement », le don total de leur fils est fait à l’Eglise. Voici un mystère que l’on serait bien en peine de sonder… La splendeur de la liturgie se déploie pendant plus de trois heures avant que la longue procession ne quitte le chœur avec, en son sein, sept nouveaux prêtres pour l’éternité.
Ne pas laisser nos prêtres seuls
Sur le parvis de l’église, chaque prêtre se trouve entouré de ses proches. De sa famille qui, comme l’a rappelé l’abbé John Berg, supérieur général de la Fraternité Saint-Pierre, est l’éducatrice principale des futurs prêtres. « Nous ne pourrons jamais remplacer au séminaire le trésor de l’éducation reçue dans les familles », a-t-il déclaré avant de remercier chaleureusement les pères et mères présents du magnifique cadeau qu’ils viennent de faire à l’Eglise. Les amis d’enfance et de jeunesse, ceux rencontrés dans les troupes scoutes ou sur les routes du pèlerinage de Chartres, ces camarades des « petites chrétientés », ne manquaient pas à l’appel. Et puis les familles amies, déjà attachées aux séminaristes, aux diacres qui ont dirigé leurs enfants le temps d’une colonie, d’un camp, d’une année de catéchisme, qui ont su les toucher par une parole ou un sourire, venaient manifester aux nouveaux prêtres qu’ils pourront désormais compter sur la famille immense de leurs futures brebis.
Il n’empêche, le cardinal Burke a rappelé, tant dans son homélie que dans les quelques mots adressés à chaque famille à l’occasion du déjeuner, que la communion des saints ne devait pas être un vain mot. Nous avons l’impérieux devoir d’entourer nos prêtres. De les entourer de nos prières, de nos attentions concrètes, de notre aide la plus bassement matérielle, de notre bienveillance surtout. « Ces grands aventuriers du monde moderne », disait Charles Péguy des pères de famille, combien cela est vrai pour les prêtres d’aujourd’hui qui doivent naviguer sur les eaux marâtres de la société liquide et parler du sacré sous le règne de la dérision ! Pour eux et pour nous, il ne sera jamais vain de serrer les rangs et, ensemble, de se mettre à genoux.