9 février 2018

[FSSPX Actualités] Premier entretien de Mgr Michel Aupetit

SOURCE - FSSPX Actualités - 9 février 2018

Peu après son installation à la tête de l'archevêché de Paris, le 6 janvier 2018, Mgr Aupetit a donné sa première interview. Il a choisi de s'exprimer dans les colonnes du journal Le Monde. Dans cet entretien paru le 11 janvier, il aborde principalement sa jeunesse et son parcours, la question des migrants, la bioéthique et la laïcité.

Avec deux grands-pères « anticléricaux jusqu’au bout des ongles », une famille où la pratique religieuse n’était pas de règle - son père, un cheminot, ne mettait pas les pieds à l'église -, c’est « de manière isolée », comme il le confie, que Michel Aupetit a vécu sa foi, avec l'aide toutefois de sa mère, qui lui a appris à prier.
La crise migratoire
Interrogé sur la question des migrants, le nouvel archevêque distingue ceux « qui sont dans une situation de détresse absolue et ceux qui viennent pour des raisons économiques » - le cas de ces derniers passant « effectivement moins bien au niveau des fidèles ». Quant aux tensions et aux conflits, ils viennent de la difficulté d'articuler « le principe évangélique de l’accueil inconditionnel des personnes » avec celui du « bien commun ». De plus, ajoute-t-il, le communautarisme fait craindre un choc culturel. En effet.

Mgr Aupetit se place manifestement du côté de l'acceptation par les fidèles, et plus largement par la société, de l'arrivée des réfugiés, migrants et autres clandestins. A la suite du pape François, il énonce le principe de l'accueil inconditionnel, au nom de l'Evangile, auquel le bien commun se trouvera nécessairement subordonné - sinon comment serait-il inconditionnel ?

Dans un entretien au journal La Croix le 13 janvier, l'archevêque dit la même chose : « Il nous faut nous demander comment préserver le bien commun tout en accueillant de manière inconditionnelle tous ceux qui frappent à notre porte ». Il comprend les réserves de certains catholiques, mais pour les mettre sur le compte de la peur provoquée par le climat d'insécurité et la crainte d'un choc culturel. Optimiste, il y voit l'occasion de bâtir « la civilisation de l’amour qu’avait prônée Jean-Paul II » (!). Le prochain numéro de la revue Nouvelles de Chrétienté présentera un dossier spécial consacré à ce sujet. En particulier, à la fausse opposition entre la charité de l'Evangile et le bien commun de la société, opposition engendrée par le personnalisme appliquée à la philosophie politique, le lecteur trouvera une analyse des principales carences d'un certain discours chrétien sur l’immigration ainsi que les voies de solution que l'Eglise, gardienne de la cité, devrait urgemment prêcher.
Les questions bioéthiques
Sur les questions de bioéthique sur lesquelles il est très attendu, Mgr Aupetit se présente en défenseur de la vie. Il dénonce une « société des encombrants », où l'on se débarrasse par exemple des personnes handicapées avant leur naissance (avortement pour raison thérapeutique). Il s'inquiète des récents sondages en faveur de la Procréation médicale assistée, de la Gestation pour autrui ou du suicide assisté ; il les commente en rappelant qu'une majorité ne suffit pas à rendre une chose juste.

Face aux questions soulevées par le développement de l'intelligence artificielle et de la robotisation, le nouvel archevêque de Paris défend « ce qui fait que nous sommes humains ». Sans en appeler à l'ordre rationnel ou à l'existence d'une âme créée par Dieu, il préfère s'adresser aux cœurs de nos contemporains : « ce qui distingue l’humain, c’est la capacité à intégrer la fragilité ». Il entend par là « la capacité d’accompagner les plus faibles et de leur laisser une place aussi digne que les plus forts. Sinon, c’est la loi de la jungle ».
La place de Dieu
Sur la question de l’enseignement du fait religieux à l’école, résume Gauthier Vaillant pour La Croix, le prélat veut qu'il ne se borne pas aux aspects seulement culturel et historique, mais qu'il aborde aussi les questions de foi et de théologie, de la transcendance et de la prière. Mgr Aupetit déclare : « Ne peut-on parler de Dieu ? C'est le tabou, Dieu, aujourd'hui ! Ce n'est plus le sexe, c'est Dieu. On n'a pas le droit de parler de Dieu, sinon on gêne ».

Audacieux, l'archevêque a raison de dénoncer cette épouvantable ambiance qui proscrit Dieu de la vie publique. Elle n'est pourtant que l'aboutissement de la laïcité, qui fait régner un climat d'apostasie pratique. Elle aboutit en effet à chasser Dieu de tout enseignement et de la vie même de la société. Mais faut-il pour autant confier aux « hussards noirs de la République » le soin de traiter des questions de foi et de théologie ? Il est permis d'en douter.