SOURCE - Jean Mercier - La Vie - 21 janvier 2010
La levée de l’excommunication des lefebvristes et l’affaire Williamson avaient chauffé les esprits en 2009. Un an après, La Vie fait l'état des lieux.
C’était il y a un an. Le 21 janvier 2009, Rome levait l’excommunication des quatre évêques ordonnés en 1988 par Mgr Lefebvre. Le même jour, la télévision suédoise diffusait un documentaire où l’un d’eux, Richard Williamson, niait l’existence des chambres à gaz. Cette conjonction allait provoquer la plus grande crise ayant secoué l’Église depuis 40 ans. La Vie avait alors lancé l’appel des intellectuels catholiques « contre le négationnisme dans l’Église ».
Benoît XVI, qui ne peut être soupçonné d’antisémitisme, compte tenu de ses positions de toujours en faveur des juifs, se devait de réagir et de rassurer. Il l’a fait à plusieurs reprises, affirmant qu’il ignorait les opinions de Williamson et les condamnant, rappelant l’engagement de l’Église pour la fraternité avec les juifs. Lors de son voyage en Terre sainte, en mai dernier, et, tout récemment, à l’occasion de son déplacement à la synagogue de Rome, le 17 janvier, sa troisième visite à une synagogue après Cologne (2005) et New York (2008).
Un an après l’affaire Williamson, l’événement était une aubaine. Benoît XVI a réaffirmé « le chemin irrévocable du dialogue », répété son horreur de la Shoah, et renouvelé la contrition de l’Église élaborée en 1998 pour l’antijudaïsme et l’antisémitisme de ses fils. Mais aussi, pour la première fois, il a redit en public les mots de repentance glissés dans le Mur des lamentations par Jean Paul II en 2000, au sujet des souffrances subies par le peuple élu du fait des catholiques. « Nous sommes profondément meurtris par le comportement de ceux de tes fils, qui, au cours de l’Histoire, l’ont fait souffrir et, en t’en demandant pardon, nous voulons nous engager à vivre une fraternité authentique avec le peuple de l’Alliance. » Ce qui est une façon de ritualiser cette prière de pardon, de la faire entrer dans la tradition de l’Église.
Mais ceux qui attendaient un mot d’explication sur Pie XII en sont pour leurs frais. Celui dont le pape vient d’entériner les « vertus héroïques » (pour le béatifier) est le grand absent de son texte. Benoît XVI, de toute manière, a déjà pris position au sujet du silence de son prédécesseur face à la Shoah. Lors d’une déclaration en 2008, il s’était situé dans le camp de ceux qui estiment que Pie XII a agi au mieux des intérêts des juifs de l’époque. Compte tenu de ce positionnement et suite à l’annonce de la future béatification d’Eugenio Pacelli, la communauté juive s’est révélée très divisée sur l’opportunité de la visite à la synagogue des bords du Tibre. Le grand rabbin de Rome, Riccardo Di Segni, s’est battu pour qu’elle ait lieu, contre certains confrères. Dans son allocution, le président de la communauté juive de Rome, Riccardo Pacifici, a autant loué les catholiques ayant sauvé des juifs que vidé son cœur sur les déportations romaines de 1943 : « Le silence de Pie XII fait encore mal, comme un acte manqué. Peut-être n’aurait-il pas arrêté les trains de la mort, mais il aurait transmis un signal, une preuve de réconfort, de solidarité humaine envers nos frères transportés vers Auschwitz. »
Le dialogue entre juifs et chrétiens est solide. Il a résisté à la crise Williamson et tient bon dans la polémique Pie XII. La plupart des juifs estiment en effet que, si la béatification de celui-ci est une marque d’indélicatesse, elle ne remet pas en cause une amitié solidement établie par une multitude d’acteurs et des gestes d’amitié irréversibles
La levée de l’excommunication des lefebvristes et l’affaire Williamson avaient chauffé les esprits en 2009. Un an après, La Vie fait l'état des lieux.
C’était il y a un an. Le 21 janvier 2009, Rome levait l’excommunication des quatre évêques ordonnés en 1988 par Mgr Lefebvre. Le même jour, la télévision suédoise diffusait un documentaire où l’un d’eux, Richard Williamson, niait l’existence des chambres à gaz. Cette conjonction allait provoquer la plus grande crise ayant secoué l’Église depuis 40 ans. La Vie avait alors lancé l’appel des intellectuels catholiques « contre le négationnisme dans l’Église ».
Benoît XVI, qui ne peut être soupçonné d’antisémitisme, compte tenu de ses positions de toujours en faveur des juifs, se devait de réagir et de rassurer. Il l’a fait à plusieurs reprises, affirmant qu’il ignorait les opinions de Williamson et les condamnant, rappelant l’engagement de l’Église pour la fraternité avec les juifs. Lors de son voyage en Terre sainte, en mai dernier, et, tout récemment, à l’occasion de son déplacement à la synagogue de Rome, le 17 janvier, sa troisième visite à une synagogue après Cologne (2005) et New York (2008).
Un an après l’affaire Williamson, l’événement était une aubaine. Benoît XVI a réaffirmé « le chemin irrévocable du dialogue », répété son horreur de la Shoah, et renouvelé la contrition de l’Église élaborée en 1998 pour l’antijudaïsme et l’antisémitisme de ses fils. Mais aussi, pour la première fois, il a redit en public les mots de repentance glissés dans le Mur des lamentations par Jean Paul II en 2000, au sujet des souffrances subies par le peuple élu du fait des catholiques. « Nous sommes profondément meurtris par le comportement de ceux de tes fils, qui, au cours de l’Histoire, l’ont fait souffrir et, en t’en demandant pardon, nous voulons nous engager à vivre une fraternité authentique avec le peuple de l’Alliance. » Ce qui est une façon de ritualiser cette prière de pardon, de la faire entrer dans la tradition de l’Église.
Mais ceux qui attendaient un mot d’explication sur Pie XII en sont pour leurs frais. Celui dont le pape vient d’entériner les « vertus héroïques » (pour le béatifier) est le grand absent de son texte. Benoît XVI, de toute manière, a déjà pris position au sujet du silence de son prédécesseur face à la Shoah. Lors d’une déclaration en 2008, il s’était situé dans le camp de ceux qui estiment que Pie XII a agi au mieux des intérêts des juifs de l’époque. Compte tenu de ce positionnement et suite à l’annonce de la future béatification d’Eugenio Pacelli, la communauté juive s’est révélée très divisée sur l’opportunité de la visite à la synagogue des bords du Tibre. Le grand rabbin de Rome, Riccardo Di Segni, s’est battu pour qu’elle ait lieu, contre certains confrères. Dans son allocution, le président de la communauté juive de Rome, Riccardo Pacifici, a autant loué les catholiques ayant sauvé des juifs que vidé son cœur sur les déportations romaines de 1943 : « Le silence de Pie XII fait encore mal, comme un acte manqué. Peut-être n’aurait-il pas arrêté les trains de la mort, mais il aurait transmis un signal, une preuve de réconfort, de solidarité humaine envers nos frères transportés vers Auschwitz. »
Le dialogue entre juifs et chrétiens est solide. Il a résisté à la crise Williamson et tient bon dans la polémique Pie XII. La plupart des juifs estiment en effet que, si la béatification de celui-ci est une marque d’indélicatesse, elle ne remet pas en cause une amitié solidement établie par une multitude d’acteurs et des gestes d’amitié irréversibles