SOURCE - La Croix - 19 janvier 2010
Le 21 janvier 2009, Benoît XVI levait les excommunications pesant sur les évêques intégristes. Un an après, il a reçu les responsables de la Conférence des évêques de France, qui ont ainsi pu tirer un premier bilan
Il y a un an, à la surprise générale, Benoît XVI annonçait la levée de l’excommunication des quatre évêques de la Fraternité Saint-Pie-X, ordonnés par Mgr Lefebvre. Le 8 juillet, après plusieurs mois d’une polémique envenimée par l’affaire Williamson, il confiait à la Congrégation pour la doctrine de la foi le soin de mener des discussions doctrinales avec la Fraternité Saint-Pie X, dont l’ordre du jour a été ainsi fixé en octobre lors d’une première rencontre : Vatican II, la liberté religieuse, l’œcuménisme, le dialogue interreligieux.
Selon l'agence I.Média, un second rendez-vous a eu lieu lundi 18 janvier, dans le plus grand secret. les théologiens de l’Eglise catholique et de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X se sont retrouvés une nouvelle fois dans les bureaux de la Congrégation pour la doctrine de la foi, le 18 janvier 2010.
Benoît XVI a reçu la présidence de la CEF
Les deux parties «ont commencé à approfondir les thèmes inscrits à l’agenda de ces discussions doctrinales» voulues par Benoît XVI, a indiqué l'un des participants à I.Média... En décembre dernier, Mgr Galarreta, qui conduit les discussions pour la FSPX, avait indiqué à La Reja que cette rencontre devait porter sur la liturgie. Une prochaine réunion est prévue durant la deuxième quinzaine du mois de mars.
À chaque fois, ces débats, à huis clos et dont rien ne filtre, sont enregistrés en vidéo… L’objectif de Rome est de ramener une partie des intégristes au sein de l’Église, tout en restant ferme sur le caractère non négociable de Vatican II.
C’est dans ce contexte que, lundi 18 janvier, la présidence de l’épiscopat français a été reçue en tête-à-tête trente minutes par Benoît XVI. Étaient présents son président, le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, son vice-président, Mgr Hippolyte Simon, archevêque de Clermont (1) et son secrétaire général, Mgr Antoine Hérouard.
Un terreau idéologique et politique proche du maurassisme
Un rendez-vous traditionnel – il a lieu après chaque assemblée plénière, mais qui a permis cette fois d’évoquer une année marquée par une série de crises qui ont secoué l’Église. Benoît XVI a été attentif, manifestant une réelle connaissance des dossiers. Les suites de la levée des excommunications furent bien évidemment abordées. Les évêques français regrettent aujourd’hui de n’en avoir été informés que fortuitement. « Prévenus à l’avance, nous aurions pu préparer le terrain » affirment-ils aujourd’hui.
Si les demandes de célébrations en rite extraordinaire (préconciliaire), autorisé par le motu proprio Summorum pontificum n’ont pas explosé, des groupes utilisent néanmoins ce texte, pratiquant la surenchère systématique et agressive, avec des moyens militants, en se réclamant du pape. Les évêques, donnant les exemples des diocèses de Strasbourg et Versailles, particulièrement touchés, s’en sont ouvert lundi 18 à Benoît XVI. « S’il ne s’agit que de petits groupes isolés à ramener au bercail, il faut les traiter avec respect, disent-ils. Mais s’ils cherchent à faire du prosélytisme au détriment du rite de Paul VI, c’est différent. » Un cardinal de curie français a ainsi été malmené publiquement par de jeunes intégristes, à Bordeaux et à Lyon.
Au fond, note un évêque, « l’attitude de ces groupes relève d’un relativisme moderne : ils choisissent l’autorité à laquelle ils se soumettent, se réclamant du pape, qui est loin, au détriment des évêques, qui sont proches ». Pourtant, les évêques sont nommés par le pape et sont en communion avec lui. La démarche des groupes contestataires s’enracine, selon les évêques, dans un terreau idéologique et politique proche du maurassisme. Mais « Maurras est peu connu au Vatican… »
Le trouble de l’Église de France a été faiblement perçu
Benoît XVI l’a redit aux évêques : il n’existe qu’un seul rite, romain, avec deux formes, ordinaire et extraordinaire. Son motu proprio ne concerne a priori qu’un petit nombre de personnes, familières du latin, troublées par le passage rapide au rite de Paul VI. Pour Benoît XVI, l’unité de l’Église passe par la reconnaissance de la richesse de son patrimoine liturgique, avant et après Vatican II, dans une continuité à laquelle il est très attaché.
Mais, avec ces groupes militants, les évêques français se trouvent face à la revendication d’une nouvelle liturgie. Ils rappellent que le pape célèbre lui-même tous les jours, en communion avec les évêques du monde entier, selon le rite de Paul VI. Et que dans ces affaires, c’est l’autorité de l’évêque, gardien de la liturgie dans son diocèse – qui se trouve défiée.
Ce climat général explique la vivacité des évêques français face à l’affaire brésilienne, trois mois après la levée des excommunications. Submergés de réactions, « ils ne pouvaient pas se taire ! » expliquent-ils. Mais à Rome, cela n’a pas été compris. De même, la présence intégriste étant faible en Italie, le trouble qui a balayé l’Église de France n’a été que faiblement perçu.
Frédéric MOUNIER
(1) L’autre vice-président, Mgr Laurent Ulrich, archevêque de Lille, était retenu en France./i>
Le 21 janvier 2009, Benoît XVI levait les excommunications pesant sur les évêques intégristes. Un an après, il a reçu les responsables de la Conférence des évêques de France, qui ont ainsi pu tirer un premier bilan
Il y a un an, à la surprise générale, Benoît XVI annonçait la levée de l’excommunication des quatre évêques de la Fraternité Saint-Pie-X, ordonnés par Mgr Lefebvre. Le 8 juillet, après plusieurs mois d’une polémique envenimée par l’affaire Williamson, il confiait à la Congrégation pour la doctrine de la foi le soin de mener des discussions doctrinales avec la Fraternité Saint-Pie X, dont l’ordre du jour a été ainsi fixé en octobre lors d’une première rencontre : Vatican II, la liberté religieuse, l’œcuménisme, le dialogue interreligieux.
Selon l'agence I.Média, un second rendez-vous a eu lieu lundi 18 janvier, dans le plus grand secret. les théologiens de l’Eglise catholique et de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X se sont retrouvés une nouvelle fois dans les bureaux de la Congrégation pour la doctrine de la foi, le 18 janvier 2010.
Benoît XVI a reçu la présidence de la CEF
Les deux parties «ont commencé à approfondir les thèmes inscrits à l’agenda de ces discussions doctrinales» voulues par Benoît XVI, a indiqué l'un des participants à I.Média... En décembre dernier, Mgr Galarreta, qui conduit les discussions pour la FSPX, avait indiqué à La Reja que cette rencontre devait porter sur la liturgie. Une prochaine réunion est prévue durant la deuxième quinzaine du mois de mars.
À chaque fois, ces débats, à huis clos et dont rien ne filtre, sont enregistrés en vidéo… L’objectif de Rome est de ramener une partie des intégristes au sein de l’Église, tout en restant ferme sur le caractère non négociable de Vatican II.
C’est dans ce contexte que, lundi 18 janvier, la présidence de l’épiscopat français a été reçue en tête-à-tête trente minutes par Benoît XVI. Étaient présents son président, le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, son vice-président, Mgr Hippolyte Simon, archevêque de Clermont (1) et son secrétaire général, Mgr Antoine Hérouard.
Un terreau idéologique et politique proche du maurassisme
Un rendez-vous traditionnel – il a lieu après chaque assemblée plénière, mais qui a permis cette fois d’évoquer une année marquée par une série de crises qui ont secoué l’Église. Benoît XVI a été attentif, manifestant une réelle connaissance des dossiers. Les suites de la levée des excommunications furent bien évidemment abordées. Les évêques français regrettent aujourd’hui de n’en avoir été informés que fortuitement. « Prévenus à l’avance, nous aurions pu préparer le terrain » affirment-ils aujourd’hui.
Si les demandes de célébrations en rite extraordinaire (préconciliaire), autorisé par le motu proprio Summorum pontificum n’ont pas explosé, des groupes utilisent néanmoins ce texte, pratiquant la surenchère systématique et agressive, avec des moyens militants, en se réclamant du pape. Les évêques, donnant les exemples des diocèses de Strasbourg et Versailles, particulièrement touchés, s’en sont ouvert lundi 18 à Benoît XVI. « S’il ne s’agit que de petits groupes isolés à ramener au bercail, il faut les traiter avec respect, disent-ils. Mais s’ils cherchent à faire du prosélytisme au détriment du rite de Paul VI, c’est différent. » Un cardinal de curie français a ainsi été malmené publiquement par de jeunes intégristes, à Bordeaux et à Lyon.
Au fond, note un évêque, « l’attitude de ces groupes relève d’un relativisme moderne : ils choisissent l’autorité à laquelle ils se soumettent, se réclamant du pape, qui est loin, au détriment des évêques, qui sont proches ». Pourtant, les évêques sont nommés par le pape et sont en communion avec lui. La démarche des groupes contestataires s’enracine, selon les évêques, dans un terreau idéologique et politique proche du maurassisme. Mais « Maurras est peu connu au Vatican… »
Le trouble de l’Église de France a été faiblement perçu
Benoît XVI l’a redit aux évêques : il n’existe qu’un seul rite, romain, avec deux formes, ordinaire et extraordinaire. Son motu proprio ne concerne a priori qu’un petit nombre de personnes, familières du latin, troublées par le passage rapide au rite de Paul VI. Pour Benoît XVI, l’unité de l’Église passe par la reconnaissance de la richesse de son patrimoine liturgique, avant et après Vatican II, dans une continuité à laquelle il est très attaché.
Mais, avec ces groupes militants, les évêques français se trouvent face à la revendication d’une nouvelle liturgie. Ils rappellent que le pape célèbre lui-même tous les jours, en communion avec les évêques du monde entier, selon le rite de Paul VI. Et que dans ces affaires, c’est l’autorité de l’évêque, gardien de la liturgie dans son diocèse – qui se trouve défiée.
Ce climat général explique la vivacité des évêques français face à l’affaire brésilienne, trois mois après la levée des excommunications. Submergés de réactions, « ils ne pouvaient pas se taire ! » expliquent-ils. Mais à Rome, cela n’a pas été compris. De même, la présence intégriste étant faible en Italie, le trouble qui a balayé l’Église de France n’a été que faiblement perçu.
Frédéric MOUNIER
(1) L’autre vice-président, Mgr Laurent Ulrich, archevêque de Lille, était retenu en France./i>