SOURCE - Père Grosso - radiocristiandad - aout 2011
Cher Monsieur l’Abbé Bouchacourt,
Croyez bien que depuis quelque temps, je prie pour savoir ce que Notre Seigneur attend de moi. Je vous certifie avoir vécu dernièrement des heures pénibles à cause de ce qui me sépare des autorités de la FSSPX, mais comme je ne fais pas partie de celles-ci et que je n’ai aucun avis à émettre en la matière, j’ai décidé de vous faire part de ma volonté de quitter la Fraternité.
Je tiens à vous indiquer quelques-uns des motifs de ma décision, car vous méritez de les connaître en raison de la charité et de la compréhension que vous m’avez témoignées depuis mon arrivée à la Fraternité.
Tout est parti de différences d’appréciation quant à la réalité des faits et à sa confrontation avec l’eschatologie ; je ne parle pas seulement de l’Apocalypse, car la question dépasse le cadre de ce texte dans la mesure où elle évoque également le sermon eschatologique de Notre Seigneur, ainsi que certains passages des écrits des Apôtres saint Pierre, saint Jean et saint Paul et du Prophète Daniel.
Depuis mon séminaire, je lis le R.P. Leonardo Castellani et crois en les prophéties bibliques ; aussi ces idées sur les temps qu’il nous est échu de vivre ne sont-elles pas nouvelles en moi. J’estime qu’en l’état actuel des choses, dire aux fidèles que nous devons reconquérir une chose qui est en train de mourir revient à ne pas comprendre la situation dans laquelle nous nous trouvons. Je crois – et c’est la raison pour laquelle je me décide à agir en conséquence – que la lutte en est au point dont parle l’Ange à l’Église de Sardes : « Sois vigilant, et affermis le reste qui allait mourir. Car je n’ai pas trouvé tes œuvres parfaites devant mon Dieu » (Apoc 3, 2). C’est pourquoi il me semble inutile, voire préjudiciable de se rapprocher de la Rome moderniste, car jusqu’à présent, elle a montré combien elle savait dévorer tous les groupes traditionalistes et les réduire ensuite à la synthèse de ce qu’elle croit être l’Église, c’est-à-dire Vatican II. Bien entendu, Benoît XVI est le principal mentor de cette Rome-là. Or, il semble que vous-même et Mgr Bernard Fellay avez foi en lui et croyez qu’il va sauver l’Église : « Nous pouvons en effet espérer que Dieu récompensera le courage indéniable que Benoît XVI a manifesté en accordant les deux préalables que lui demandait la FSSPX, et qu’Il lui enverra les forces et les lumières nécessaires pour mener à bien une telle restauration, qui semble bien impossible à vue humaine » (votre éditorial Iesus Christi n°121 de mai 2012). Le contraste est frappant avec l’Apocalypse de saint Jean: « Puis je vis monter de la terre une autre bête, qui avait deux cornes semblables à celles d’un agneau, et qui parlait comme un dragon […] et elle séduisait les habitants de la terre… »
J’estime, par conséquent, qu’étant donné le chemin sur lequel elle s’est engagée, la Fraternité court à sa ruine, et je rejoins en cela d’autres personnes qui ont dénoncé ce fait avant moi (voir la démission du R.P. Juan Carlos Ceriani). Grâce au livre de Daniel et à l’Apocalypse, nous savons que les ennemis ont la permission divine « de faire la guerre au saints et de les vaincre » (Apoc. 13, 7) ; il ne subsistera rien d’au moins visiblement organisé que les ennemis n’auront infiltré et détruit, et il n’y aura plus qu’un petit reste insignifiant de fidèles dispersés. Or, cela ne se produira pas sans l’infidélité de la tête du groupe, car nous savons que Dieu n’abandonne que ceux qui L’ont abandonné en premier, ce dont on voit un exemple avec le Vatican actuel, complètement dominé par ses ennemis pour avoir abandonné Notre Seigneur Jésus-Christ.
Ces considérations, parmi beaucoup d’autres, m’éloignent de la Fraternité, car si selon vous et vos confrères, prononcer de tels prêches revient à faire peur aux fidèles, selon moi, au contraire, nous devons enseigner ceci : « Quand donc vous verrez l’abomination de la désolation, annoncée par le prophète Daniel, établie en lieu saint, – que celui qui lit, entende, – alors que ceux qui sont dans la Judée s’enfuient dans les montagnes ; » (St Mat. 24 : 15-16). Et il ne faut pas s’approcher de la Rome anathémisée par Dieu : « Mais quand nous-mêmes, quand un ange venu du ciel vous annoncerait un autre Évangile que celui que nous vous avons annoncé, qu’il soit anathème ! » (Galates 1 : 8-9).
Cher Monsieur l’Abbé, comme je n’ai pas l’intention d’engager une controverse sur l’interprétation des textes, j’ai décidé – après avoir longtemps prié et consulté des personnes prudentes – de m’en aller sans faire le moindre scandale ni rien dire aux fidèles. Je vais m’installer chez mes parents, à San Francisco (Province de Córdoba) ; là, avec l’aide de Dieu et de quelques personnes de ma connaissance qui ressentent ces choses-là comme moi, je compte persévérer dans le sacerdoce.
Dieu vous bénisse, et merci beaucoup pour tout.
In Domino Abbé Gabriel Grosso
P.S. – J’ai repensé à ce dont nous avons parlé hier, et je crois qu’il est de mon devoir d’être fidèle à ce que me demande Notre Seigneur Jésus-Christ.