SOURCE - Côme de Prévigny - Credidimus caritati - 3 décembre 2012
A Rome la question des traditionalistes est aussi brûlante que celle de la commission qui la gère et l’évolution structurelle de cette dernière permettrait de noircir à elle seule des dizaines de pages ! Apparaissant tantôt comme un dicastère autonome, tantôt comme un bureau rattaché à une congrégation, elle est quelques fois pilotée par un cardinal, parfois par un simple monsignore, cette fois par un archevêque. La hiérarchie qui se surimpose à elle peut s’avérer coercitive comme elle peut sembler, en d’autres cas, purement symbolique. Quel rôle joue donc vraiment le tandem Müller – di Noia sur cette commission dont le but est d’une part de s’occuper des relations du Saint-Siège avec la Fraternité Saint-Pie X et d’autre part de présider aux destinées du monde traditionnel régularisé?
Il y a dix ans, tout le monde s’accordait à voir dans le cardinal Dario Castrillón Hoyos le véritable maître de ces dossiers. Cumulant les charges de préfet de la Congrégation pour le Clergé et de président de la commission pontificale Ecclesia Dei, ce prélat typiquement latin quitta la première à l’automne 2006 pour s’occuper exclusivement de la seconde. La tâche n’était pas mince dans la mesure où Benoît XVI avait quelques semaines auparavant reçu Mgr Fellay afin de procéder « par étapes » à une résolution du différend avec Écône. Bien que simple secrétaire et coiffé d’un préfet de tutelle, Mgr Guido Pozzo semblait être à partir de 2009 le véritable interlocuteur de la Fraternité. Le pape Ratzinger confiait ce dossier qui lui tenait tant à cœur à ses proches, ses anciens collaborateurs au Saint-Office, même si le cardinal Levada, officiellement président d’Ecclesia Dei ne s’occupait pas quotidiennement du dossier. Faut-il penser que l’équilibre est demeuré le même dès lors que ces deux derniers prélats ont été respectivement remplacés ?
Tout le laisse penser. Mgr Müller est, comme son prédécesseur, essentiellement accaparé par l’énorme Congrégation pour la Doctrine de la Foi dont Ecclesia Dei n’est qu’un satellite. En revanche, le responsable à plein temps du dossier n’est plus un simple prêtre, il est archevêque. Par ailleurs, il n’est pas seulement secrétaire, il est titré vice-président. Mgr di Noia se trouvait jusque là secrétaire d’un dicastère presque aussi prestigieux, celui du Culte Divin et tout laissait présager qu’il prendrait la tête d’un grand office romain, certains le voyant même remplacer le cardinal Levada. Le fait qu’il ait été nommé quelques jours seulement avant Mgr Müller laisse fortement penser que le dossier Ecclesia Dei a été ostensiblement retiré à ce dernier pour le confier dans les faits à un responsable d’envergure et pour déminer la nomination de l’évêque de Ratisbonne, bien peu en vue dans les milieux traditionalistes auprès desquels il avait multiplié les maladresses.
Depuis, plusieurs signaux semblent refléter la répartition des rôles.
1. Au cours de l’été, Mgr Müller a accordé divers entretiens dans lequel il aborde la question de la Fraternité. Dans l’un d’entre eux, il prédit fermement « qu’il n'y aura pas de compromis » sur le Concile, ajoutant qu’il « ne pense pas qu'il y aura de nouvelles discussions » avec la Fraternité. Cette fermeté semble trancher avec le contenu du communiqué de la commission Ecclesia Dei daté du 27 octobre qui invite au contraire à « faire preuve de patience, de sérénité, de persévérance et de confiance » dans les pourparlers entre le Saint-Siège et l’œuvre fondée par Mgr Lefebvre. Apparemment, la pensée du président en titre ne semble pas à avoir prise sur la rédaction des écrits de la commission…
2. Le 3 novembre, un collectif d’associations attachées au missel traditionnel a organisé une messe pontificale à Saint-Pierre de Rome. Évidemment, face à un tel événement, la commission pontificale Ecclesia Dei était particulièrement concernée et ses membres pouvaient difficilement manquer ce rendez-vous. Mgr di Noia et ses divers assistants figuraient dans la longue procession qui s’avançait vers l’autel de la chaire de Pierre. Néanmoins, il manquait un membre de taille, puisque le président en titre, Mgr Müller n’a pas assisté à cette cérémonie.
3. Le 19 novembre au matin, le pape Benoît XVI a reçu dans sa bibliothèque privée tous les membres de la Commission Ecclesia Dei. Tous ? Pas exactement, puisqu’il manquait précisément le président, à savoir Mgr Müller, dont l’œil finirait presque par oublier qu’il en fait partie.
Au sein d'Ecclesia Dei, le président ne semble donc constituer qu'une ombre. Quel reflet celle-ci porte-t-elle sur les travaux de la commission ? Pour l'instant, rien n'est écrit. Les signaux semblent contrevenir aux faits. Ce qui est certain, c'est que l'autonomie de l'ère Castrillon avait au moins le mérite de la clarté.
Côme de Prévigny
A Rome la question des traditionalistes est aussi brûlante que celle de la commission qui la gère et l’évolution structurelle de cette dernière permettrait de noircir à elle seule des dizaines de pages ! Apparaissant tantôt comme un dicastère autonome, tantôt comme un bureau rattaché à une congrégation, elle est quelques fois pilotée par un cardinal, parfois par un simple monsignore, cette fois par un archevêque. La hiérarchie qui se surimpose à elle peut s’avérer coercitive comme elle peut sembler, en d’autres cas, purement symbolique. Quel rôle joue donc vraiment le tandem Müller – di Noia sur cette commission dont le but est d’une part de s’occuper des relations du Saint-Siège avec la Fraternité Saint-Pie X et d’autre part de présider aux destinées du monde traditionnel régularisé?
Il y a dix ans, tout le monde s’accordait à voir dans le cardinal Dario Castrillón Hoyos le véritable maître de ces dossiers. Cumulant les charges de préfet de la Congrégation pour le Clergé et de président de la commission pontificale Ecclesia Dei, ce prélat typiquement latin quitta la première à l’automne 2006 pour s’occuper exclusivement de la seconde. La tâche n’était pas mince dans la mesure où Benoît XVI avait quelques semaines auparavant reçu Mgr Fellay afin de procéder « par étapes » à une résolution du différend avec Écône. Bien que simple secrétaire et coiffé d’un préfet de tutelle, Mgr Guido Pozzo semblait être à partir de 2009 le véritable interlocuteur de la Fraternité. Le pape Ratzinger confiait ce dossier qui lui tenait tant à cœur à ses proches, ses anciens collaborateurs au Saint-Office, même si le cardinal Levada, officiellement président d’Ecclesia Dei ne s’occupait pas quotidiennement du dossier. Faut-il penser que l’équilibre est demeuré le même dès lors que ces deux derniers prélats ont été respectivement remplacés ?
Tout le laisse penser. Mgr Müller est, comme son prédécesseur, essentiellement accaparé par l’énorme Congrégation pour la Doctrine de la Foi dont Ecclesia Dei n’est qu’un satellite. En revanche, le responsable à plein temps du dossier n’est plus un simple prêtre, il est archevêque. Par ailleurs, il n’est pas seulement secrétaire, il est titré vice-président. Mgr di Noia se trouvait jusque là secrétaire d’un dicastère presque aussi prestigieux, celui du Culte Divin et tout laissait présager qu’il prendrait la tête d’un grand office romain, certains le voyant même remplacer le cardinal Levada. Le fait qu’il ait été nommé quelques jours seulement avant Mgr Müller laisse fortement penser que le dossier Ecclesia Dei a été ostensiblement retiré à ce dernier pour le confier dans les faits à un responsable d’envergure et pour déminer la nomination de l’évêque de Ratisbonne, bien peu en vue dans les milieux traditionalistes auprès desquels il avait multiplié les maladresses.
Depuis, plusieurs signaux semblent refléter la répartition des rôles.
1. Au cours de l’été, Mgr Müller a accordé divers entretiens dans lequel il aborde la question de la Fraternité. Dans l’un d’entre eux, il prédit fermement « qu’il n'y aura pas de compromis » sur le Concile, ajoutant qu’il « ne pense pas qu'il y aura de nouvelles discussions » avec la Fraternité. Cette fermeté semble trancher avec le contenu du communiqué de la commission Ecclesia Dei daté du 27 octobre qui invite au contraire à « faire preuve de patience, de sérénité, de persévérance et de confiance » dans les pourparlers entre le Saint-Siège et l’œuvre fondée par Mgr Lefebvre. Apparemment, la pensée du président en titre ne semble pas à avoir prise sur la rédaction des écrits de la commission…
2. Le 3 novembre, un collectif d’associations attachées au missel traditionnel a organisé une messe pontificale à Saint-Pierre de Rome. Évidemment, face à un tel événement, la commission pontificale Ecclesia Dei était particulièrement concernée et ses membres pouvaient difficilement manquer ce rendez-vous. Mgr di Noia et ses divers assistants figuraient dans la longue procession qui s’avançait vers l’autel de la chaire de Pierre. Néanmoins, il manquait un membre de taille, puisque le président en titre, Mgr Müller n’a pas assisté à cette cérémonie.
3. Le 19 novembre au matin, le pape Benoît XVI a reçu dans sa bibliothèque privée tous les membres de la Commission Ecclesia Dei. Tous ? Pas exactement, puisqu’il manquait précisément le président, à savoir Mgr Müller, dont l’œil finirait presque par oublier qu’il en fait partie.
Au sein d'Ecclesia Dei, le président ne semble donc constituer qu'une ombre. Quel reflet celle-ci porte-t-elle sur les travaux de la commission ? Pour l'instant, rien n'est écrit. Les signaux semblent contrevenir aux faits. Ce qui est certain, c'est que l'autonomie de l'ère Castrillon avait au moins le mérite de la clarté.
Côme de Prévigny