SOURCE - Breizh-info.com - 16 juin 2016
La communauté catholique réunie autour de l’Institut du Christ Roi à Rennes, est en émoi : l’évêque de Rennes, Monseigneur d’Ornellas, a fait savoir par son auxiliaire Mgr Souchu, qu’il ne reconduisait pas la convention annuelle qui le liait avec l’ICRSP (Institut du Christ Roi Souverain Prêtre) qui dessert la chapelle Saint-François de Rennes depuis huit ans maintenant. Pire, l’évêché a l’intention de vendre la chapelle. Une décision qui met en péril une communauté traditionnelle catholique ancrée dans les lieux depuis 1988 et qui est en plein essor.
La communauté catholique réunie autour de l’Institut du Christ Roi à Rennes, est en émoi : l’évêque de Rennes, Monseigneur d’Ornellas, a fait savoir par son auxiliaire Mgr Souchu, qu’il ne reconduisait pas la convention annuelle qui le liait avec l’ICRSP (Institut du Christ Roi Souverain Prêtre) qui dessert la chapelle Saint-François de Rennes depuis huit ans maintenant. Pire, l’évêché a l’intention de vendre la chapelle. Une décision qui met en péril une communauté traditionnelle catholique ancrée dans les lieux depuis 1988 et qui est en plein essor.
La chapelle Saint-François accueille des messes traditionnelles depuis 1988, en vertu du premier Motu Proprio prononcé par Jean Paul II en 1988. Le célébrant historique fut le Père Antonio Perrero, missionnaire de la Salette. Avant son décès en 2010, il avait réussi à transmettre le flambeau à l’ICRSP (Institut du Christ Roi Souverain Prêtre), une société de vie apostolique traditionelle, fondée en 1990 par les pères Gilles Wach et Philippe Mora, puis reconnue de droit pontifical par le Saint-Siège le 7 octobre 2008. L’ICRSP signa sa première convention avec le diocèse de Rennes en 2002, sous l’épiscopat de Mgr Saint Macary, rappelé à Dieu en 2007. Le premier célébrant fut le chanoine Trézières, remplacé depuis par le chanoine Cristofoli.
La chapelle Saint-François a été construite en 1877 avec le couvent des Récollets qui la jouxte. Après 1905, le diocèse réussit à récupérer l’ensemble et y installe son grand séminaire. En 1970, tout est vendu, sauf la chapelle. Abandonnée, elle sera récupérée par les traditionalistes qui souhaitent maintenir la messe de toujours, la messe tridentine en latin, aujourd’hui appelée de « rite extraordinaire » au sein de l’Eglise. Une volonté qui n’avait rien d’évident en 1988, alors que nombre d’évêchés en France et dans le monde avaient quasiment banni, rejeté aux marges de l’Eglise, ceux qui tenaient à l’ancien rite.
Pourtant, ce rite romain attire. De nombreux catholiques, notamment des jeunes, viennent tous les dimanches à la chapelle Saint-François, suscitant jalousie et méfiance dans d’autres églises qui, elles, se vident années après années. Le Chanoine Cristofoli, exerce son apostolat avec joie et talent. Communauté bien constituée, riche de nombreux groupes, d’activités, de jeunes, d’une centaine de Scouts (Europa Scouts), la paroisse Saint-François de Rennes rayonne dans tout le diocèse et a réussi à conjurer la crise des vocations : chaque année, de 2 à 4 jeunes de cette paroisse entraient au séminaire de l’ICRSP en Italie. Ils seront encore trois en 2016.
Comme l’a annoncé Mgr Souchu, évêque auxiliaire, au chanoine Cristofoli le vendredi 10 juin entre 15 h et 15h30, la rupture de la convention a des conséquences immédiates. D’une part, le chanoine Cristofoli est congédié et se voit dans l’obligation de quitter la chapelle ; il a d’ailleurs déjà été remplacé dans ses fonctions d’archiviste à l’évêché. Il doit quitter son apostolat pendant l’été, sans faire de vagues. D’autre part l’évêché prévoit de faire appel à plusieurs prêtres diocésains, notamment très âgés et dans des paroisses différentes, afin d’assurer un service dominical minimum à tour de rôle. La chapelle elle-même sera vendue par l’évêché : d’ici 2019, elle va se trouver à quelques mètres d’une station du métro rennais, et son emplacement est donc idéal pour un projet immobilier.
L’action de la paroisse – notamment l’apostolat vers les différents groupes de la société – deviendrait impossible. Hubert des Minières, président de l’association Saint-Benoît de Nursie qui gère la chapelle depuis 1988, informait ses paroissiens au sortir de la messe du 12 juin :
« La pérennité de notre grande communauté est donc plus que jamais en danger : la décision n’est pas encore entérinée, mais devrait l’être dans les jours à venir. Comme vous le comprenez, cela signifie l’éclatement et la disparition totale de notre communauté à court terme ».
Des tensions entre Mgr d’Ornellas et la chapelle saint François depuis 2011
Des tensions avaient déjà marqué les relations entre évêché et ICRSP depuis 2011 ; à l’époque l’avenir de la chapelle Saint-François s’écrivait déjà en pointillés. La lettre n°287 de la Paix Liturgique, datée du 17 juin 2011, donne quelques précisions à ce sujet. Le diocèse de Rennes comptait alors à peine 50.000 pratiquants pour plus d’un million d’habitants. « On dit l’apostolat [de l’ICRSP] menacé par Mgr d’Ornellas qui souhaiterait « normaliser » la chapelle Saint-François en nommant un prêtre diocésain peu favorable à l’antique forme liturgique dans le but de ramener les fidèles à la forme ordinaire du rite romain ».
Or il se trouve que Mgr Pierre d’Ornellas a été formé au sein de l’institut Notre-Dame de Vie (Vénasque), d’inspiration très Vatican II. Cet intellectuel parisien, un des très nombreux secrétaires du cardinal Lustiger,. « Directeur de l’école cathédrale », écrit la Paix Liturgique, « poste d’extrême-confiance, et enfin évêque auxiliaire en 1997. Dans la politique parisienne de « recentrage », il fut un des bras les plus puissants, spécialement le plus attentif à préserver les jeunes clercs de la capitale de tout virus intégriste ».
Il faut comprendre qu’il était vent debout contre toute possibilité, déjà, de pratiquer la messe traditionnelle en latin. « Il devient ainsi le plus proche collaborateur de [Lustiger] mais dans un style très différent, peu amène, au point de réussir à faire l’unanimité contre lui. Son influence dans le haut clergé lui vaut d’être nommé directement à un siège métropolitain, Rennes », où il arrive comme coadjuteur en 2006 et est nommé archevêque dans la foulée en 2007.
« Homme de très fort (et mauvais) caractère, Mgr d’Ornellas entend faire de Rennes un pôle de la troisième voie : ni progressiste, ni, ô grand jamais ! Traditionnelle », concluait alors la lettre de la Paix Liturgique. Il cherche à se débarrasser de la chapelle saint-François, bastion de la messe traditionaliste, dès 2011. Puis finalement, entre 2011 et 2012, trouve son existence fort utile pour refuser toutes les demandes de messe tridentine émanant de groupes de fidèles – comme le permet le Motu proprio de Benoît XVI en 2007 – en Ille-et-Vilaine. Que ce soit à Vitré, Redon, Saint-Méen le Grand ou Châteaubourg – ce dernier dossier arrivera même jusqu’à Rome – la réponse de l’archevêque est la même : c’est un refus, car il existe Saint-François et cela suffit comme ça.
Comme il est peu réputé pour son sens du dialogue, les fidèles attachés à la messe en latin s’en contenteront. Et la communauté de la chapelle Saint-François se maintiendra quand même, contre vents et marées, dans un climat fort hostile : depuis quatre ans, Mgr d’Ornellas refuse de recevoir son desservant le chanoine Gwenaël Cristofoli, et la convention, jadis pluriannuelle, n’est renouvelée que pour un an depuis plusieurs années, plaçant la communauté dans une situation de précarité et de fragilité sans cesse renouvelée. «Tout cela n’empêche pas les grâces du Seigneur de faire leur œuvre », nous dit un fidèle. En effet, d’année en année, alors que le déclin du diocèse, un temps plus épargné que les autres, s’accélère, les vocations se font jour à Saint-François, la chapelle est comble chaque dimanche, les paroissiens sans cesse plus nombreux.
C’est pourquoi la décision de l’évêché de ne pas renouveler la convention avec l’ICRSP et de tout mettre en œuvre pour provoquer l’éclatement et la disparition de la communauté Saint-François tombe comme un coup de tonnerre. Et même le provincial de France de l’ICRSP, Mgr Michael Schmitz, est lui-même étonné : « Cette information était pour nous une surprise puisque on a bien sur l’intention de continuer cet apostolat pour le bien des âmes. Pourquoi aurait-on voulu se retirer après 14 ans de service? », nous répond-il. Dans un communiqué officiel l’ICRSP confirme que la congrégation « n’a jamais eu l’intention de se retirer et de cesser la convention qui régit ses rapports avec l’archidiocèse de Rennes, Dol et Saint Malo » et que « lors des derniers entretiens avec les autorités diocésaines, il nous a été demandé le départ du desservant actuel [le chanoine Cristofoli], présenté comme un ‘acquis’ lors du dernier entretien ce que nous avons dû accepter.«
Une page Facebook créée il y a deux jours à peine, a rassemblé déjà plus de 1500 « j’aime ». La cause de la chapelle Saint-François de Rennes, menacée par son évêché car elle est pleine tous les dimanches, ne laisse pas indifférent.