Le 12 octobre, l’agence Apic titrait la dépêche consacrée à cet entretien : « Pour Mgr Fellay, la seule solution est un "retour au passé" ». C’est un jugement plutôt hâtif, mais cette hâte est révélatrice. Le contexte de ce membre de phrase isolé montre une pensée plus nuancée : « (…) j’ai l’impression que nous sommes devant une situation bien délicate. La réalité de la crise est admise (par les autorités romaines, ndlr), mais pas les remèdes. Nous disons, et on le prouve par les faits, que la solution à la crise est un retour au passé. Benoît XVI dit la même chose : il insiste sur l’importance de ne pas couper avec le passé - l’herméneutique de la continuité -, mais il entend maintenir les nouveautés du concile, considérant qu’elles ne sont pas une rupture avec ce passé. Selon lui, ne sont dans l’erreur et la rupture avec le passé que ceux qui vont plus loin que le concile. C’est un problème des plus sensibles ».
Mgr Fellay indique, à la veille des discussions doctrinales avec Rome, où est le point de convergence : le constat commun d’une crise sans précédent dans l’Eglise, mais aussi où se situe la divergence : la nécessité d’un retour à la Tradition pour remédier à cette crise, car Vatican II n’est pas en continuité pleine et entière avec cette Tradition bimillénaire.
Présenter dans un raccourci rapide le « retour au passé » comme « la seule solution » à la crise, c’est suggérer combien l’analyse de la Fraternité Saint-Pie X est simpliste et faire entendre qu’elle croit naïvement pouvoir tout résoudre par un simple retour en arrière. On pourrait citer ici quelques slogans progressistes : « crispation nostalgique », « effort illusoire de remonter le temps », « tentative pathétique d’arrêter le cours de l’histoire »… Ces caricatures ont la vertu de rassurer à peu de frais ceux qui les emploient. Surtout ne troublons pas leur tranquillité !
Mais à ceux que la réalité intéresse, deux questions se posent :
1. Quand on s’aperçoit que l’on a fait fausse route, est-il sage ou non de faire un retour en arrière pour reprendre le bon chemin ?
2. Quand on ne chante pas avec les révolutionnaires « Du passé faisons table rase », est-il dérisoire de revenir à cet héritage doctrinal et spirituel qu’on appelle la Tradition, pour assurer à l’Eglise un avenir qui ne soit pas celui d’un « bateau qui prend l’eau de toutes parts » ?