SOURCE - Osservatore Vaticano - 29 octobre 2009
Nul n’ignore que l’issue des discussions entre le Saint-Siège et la Fraternité Saint-Pie-X est suspendue à la volonté de Mgr Bernard Fellay. Tout laisse penser qu’il veut parvenir à un accord, sans doute d’abord provisoire vers l’été prochain avant même la conclusion des conversations doctrinales, ensuite définitif sous la forme du statut proposé par le Saint-Siège, à savoir une prélature personnelle sui generis qui garantirait à sa communauté une indépendance vis-à-vis des évêques locaux (ordinations et autres sacrements) en même temps que la reconnaissance du caractère « respectueusement » discutable des questions brûlantes.
Toute la difficulté est que, si le pouvoir de Bernard Fellay est grand sur sa Fraternité, il est loin d’être absolu. De la même manière que le Pape doit compter avec une « opinion publique » épiscopale, Mgr Fellay doit compter avec l’« opinion publique » de ses troupes. Or, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce ne sont pas directement les questions doctrinales pures qui motivent les « anti-accordistes », mais le risque encouru par les troupes anticonciliaires : les accords sont vus comme la sortie du château fort doctrinal et liturgique pour se risquer en rase campagne moderniste (« Voyez ce qui est arrivé aux ralliés ! »).
La force de la diplomatie de Mgr Fellay tient en trois points, dont le troisième est incertain:
1) D’abord, c’est le Saint-Siège qui est en position de demandeur de la cessation de la « rupture » plus que l’inverse. En effet, en raison des blessures (liturgie, doctrine), les vocations affluent dans la FSSPX (et plus largement dans les autres instituts traditionnels, car l’osmose morale existe quoi qu’on en ait) et l’on sait que le nombre des fidèles traditionnels, actuellement incompressible, est potentiellement très extensible.
2) Ensuite, la lenteur helvétique de Mgr Fellay lui a permis d’obtenir que sa « feuille de route » soit, de fait, avalisée par le saint-siège (libéralisation de la messe traditionnelle ; levée des excommunications ; ouverture de discussions doctrinales).
3) Enfin, il a su adopter progressivement un langage mesuré, qui fait oublier ses déclarations en tous sens du passé, comme les discours agressifs des autres évêques de la FSSPX, et qui enlève des armes à l’« opinion publique » épiscopale (en Allemagne par exemple) cherchant à barrer la bonne volonté du Pape.
Ce troisième point – décisif car il n’y a pas de négociation sans donnant-donnant – montre ses capacités diplomatiques, en même temps que la faiblesse de sa marge de manœuvre.
Je prends un exemple : après la levée des excommunications, il a envoyé par fax dans tous les prieurés du monde une « lettre aux fidèles » (24 janvier 2009), contenant la citation de sa propre lettre au cardinal Castrillón (15 décembre 2008) qui avait permis la levée des censures : « Nous acceptons et faisons nôtres tous les conciles jusqu’à Vatican II au sujet desquels nous émettons des réserves ». Cette formulation provoqua une telle levée de boucliers que quelques jours plus tard, une nouvelle version de cette lettre du 24 janvier citait ainsi la lettre au cardinal : « Nous acceptons et faisons nôtres tous les conciles jusqu’à Vatican I. Mais nous ne pouvons qu’émettre des réserves au sujet du Concile Vatican II, qui etc. »
C’est bien entendu la première version qu’a reçue le cardinal Castrillón. La seconde version n’est pas à proprement parler un faux : c’est une traduction à l’usage de l’opinion publique de la FSSPX. Au reste, dans les deux versions le principe de la critique du Concile est posé.
Nul n’ignore que l’issue des discussions entre le Saint-Siège et la Fraternité Saint-Pie-X est suspendue à la volonté de Mgr Bernard Fellay. Tout laisse penser qu’il veut parvenir à un accord, sans doute d’abord provisoire vers l’été prochain avant même la conclusion des conversations doctrinales, ensuite définitif sous la forme du statut proposé par le Saint-Siège, à savoir une prélature personnelle sui generis qui garantirait à sa communauté une indépendance vis-à-vis des évêques locaux (ordinations et autres sacrements) en même temps que la reconnaissance du caractère « respectueusement » discutable des questions brûlantes.
Toute la difficulté est que, si le pouvoir de Bernard Fellay est grand sur sa Fraternité, il est loin d’être absolu. De la même manière que le Pape doit compter avec une « opinion publique » épiscopale, Mgr Fellay doit compter avec l’« opinion publique » de ses troupes. Or, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce ne sont pas directement les questions doctrinales pures qui motivent les « anti-accordistes », mais le risque encouru par les troupes anticonciliaires : les accords sont vus comme la sortie du château fort doctrinal et liturgique pour se risquer en rase campagne moderniste (« Voyez ce qui est arrivé aux ralliés ! »).
La force de la diplomatie de Mgr Fellay tient en trois points, dont le troisième est incertain:
1) D’abord, c’est le Saint-Siège qui est en position de demandeur de la cessation de la « rupture » plus que l’inverse. En effet, en raison des blessures (liturgie, doctrine), les vocations affluent dans la FSSPX (et plus largement dans les autres instituts traditionnels, car l’osmose morale existe quoi qu’on en ait) et l’on sait que le nombre des fidèles traditionnels, actuellement incompressible, est potentiellement très extensible.
2) Ensuite, la lenteur helvétique de Mgr Fellay lui a permis d’obtenir que sa « feuille de route » soit, de fait, avalisée par le saint-siège (libéralisation de la messe traditionnelle ; levée des excommunications ; ouverture de discussions doctrinales).
3) Enfin, il a su adopter progressivement un langage mesuré, qui fait oublier ses déclarations en tous sens du passé, comme les discours agressifs des autres évêques de la FSSPX, et qui enlève des armes à l’« opinion publique » épiscopale (en Allemagne par exemple) cherchant à barrer la bonne volonté du Pape.
Ce troisième point – décisif car il n’y a pas de négociation sans donnant-donnant – montre ses capacités diplomatiques, en même temps que la faiblesse de sa marge de manœuvre.
Je prends un exemple : après la levée des excommunications, il a envoyé par fax dans tous les prieurés du monde une « lettre aux fidèles » (24 janvier 2009), contenant la citation de sa propre lettre au cardinal Castrillón (15 décembre 2008) qui avait permis la levée des censures : « Nous acceptons et faisons nôtres tous les conciles jusqu’à Vatican II au sujet desquels nous émettons des réserves ». Cette formulation provoqua une telle levée de boucliers que quelques jours plus tard, une nouvelle version de cette lettre du 24 janvier citait ainsi la lettre au cardinal : « Nous acceptons et faisons nôtres tous les conciles jusqu’à Vatican I. Mais nous ne pouvons qu’émettre des réserves au sujet du Concile Vatican II, qui etc. »
C’est bien entendu la première version qu’a reçue le cardinal Castrillón. La seconde version n’est pas à proprement parler un faux : c’est une traduction à l’usage de l’opinion publique de la FSSPX. Au reste, dans les deux versions le principe de la critique du Concile est posé.
Mais cette malléabilité – audacieuse ! – d’un discours qui reste identique sur les principes, a des allures de pis-aller de dernière minute qui cache une faiblesse dans la communication. Car il y a belle lurette que Mgr Fellay aurait désarmé toute opposition s’il avait su expliquer que, dans le contexte du pontificat de Benoît XVI, l’acceptation des mirobolantes propositions du cardinal Castrillón, non seulement n’enterrait pas la critique du Concile, mais lui donnait un « droit de cité » institutionnel par le seul fait qu’elle permettait l’officialisation d’une Fraternité dont l’essence même restait, volens nolens, la critique de ce concile...