SOURCE - Golias - 23 octobre 2009
Dans cette perspective, le Supérieur Général de la Fraternité, Mgr Bernard Fellay, a nommé pour représenter la Fraternité sacerdotale intégriste : Mgr Alfonso de Galarreta, un espagnol de 52 ans, directeur du Séminaire argentin Nuestra Senora Corredentera de La Reja (Argentine) ; l’abbé Benoît de Jorda, directeur du Séminaire international d’Ecône, l’abbé Jean-Michel Gleize, qui y enseigne la théologie de l’Eglise et l’abbé Patrick de La Rocque, à la tête du Prieuré Saint-Louis de Nantes.
L’évêque de Galarreta était déjà président de la commission qui, au sein de la Fraternité, était chargée de la préparation de ces entretiens. Et ce depuis le mois d’avril 2009. On doit cependant remarquer qu’à la différence de Mgr Fellay, désireux d’une issue positive des pourparlers, et qui se dit optimiste (y compris dans un entretien très récent) ce prélat appartient à l’aile dure de la Fraternité. Il estime en effet que le Concile Vatican II a fait des ravages dans l’Eglise. L’abbé de Jorda, homme au caractère très trempé, se présente lui aussi comme un dur. On remarque l’absence d’hommes plus modérés, plus proches de positions romaines, tels l’abbe Grégoire Célier ou l’abbé Alain Lorans.
Cette représentation intégriste rencontrera en particulier trois théologiens qui jouissent de la plus grande confiance de Benoît XVI : le jésuite Karl Becker, le dominicain Charles Morerod et Mgr Fernando Ocariz (Opus Dei). Des conservateurs soucieux d’une interprétation strictement « orthodoxe » du Concile.
On sait que les discussion auront lieu dans la discrétion. Elles seront sans doute tendues, même si Mgr Guido Pozzo, le maître d’oeuvre des négociations est réputé pour sa courtoisie et pour son habileté. Et il sera très patient !
La surenchère intégriste de Mgr Fellay pour rassurer sa base hostile au rapprochement
Toutefois, à la veille de l’ouverture des négociations avec les intégristes de la Fraternité Saint Pie X, au niveau proprement doctrinal, les choses s’annoncent plutôt mal. En effet, dans une lettre remarquée « Aux amis et bienfaiteurs » de la Fraternité sacerdotale Saint Pie X (octobre 2009), Mgr Bernard Fellay, évêque sacré en 1988 par Marcel Lefebvre et actuel Supérieur Général de la Fraternité, loin d’exprimer une volonté d’apaisement dénonce avec virulence « Les conséquences désastreuses du Concile (...) La guerre des sans-foi continue de plus belle, mais elle a pris une tournure tout à fait inattendue : c’est en particulier par une subversion, une infiltration de l’Eglise que se poursuit la démolition ».
Déjà dans un autre et récent message (daté du 11 octobre), le même Mgr Fellay affirmait : « notre Mère, la sainte Eglise, est en train de se transformer en amas de ruines spirituelles, alors que la façade extérieure se maintient plus ou moins bien, trompant ainsi la multitude sur son état réel. Et il faut bien constater que cette subversion a trouvé une efficacité accrue inespérée à l’occasion du Concile Vatican I. Point n’est besoin de faire de la haute théologie, c’est aujourd’hui un fait historique ». Mgr Fellay attribue nettement au Concile Vatican II lui-même et non à des abus la décomposition du catholicisme.
Les Lefebvristes veulent « convertir » le pape
On peut se demander pourquoi, au mépris de tout sens diplomatique, Mgr Fellay qui appartient pourtant à l’aile de la Fraternité qui désire le plus un rapprochement avec Rome, se livre ainsi à une telle offensive initiale. En fait, faisant ainsi monter les enchères d’emblée, il se place en situation de force dans la négociation. Mais il y a une autre raison à un tel choix. Bernard Fellay doit apaiser la contestation interne qui se fait jour au sein de la Fraternité. En effet, les plus durs le mettent en garde contre un rabibochage supposant une acceptation, même feutrée et implicite, du Concile. Lequel ralliement entraînerait une fracture au sein même de la Fraternité.
En tout cas, le moins que l’on puisse dire est que les intégristes ne se rendront pas à Rome, pour les futurs pourparlers, dans l’esprit de faire amende honorable. Ni même de débattre fraternellement. En envisageant d’avoir pu, même partiellement, se tromper. Il est vrai que le moindre doute fissurait dangereusement la cuirasse dans laquelle il se drape. Dans une telle posture, la moindre concession est à haut risque. Le risque de la vérité et de la liberté ?