Selon Mgr Fellay, une éventuelle libéralisation du rite tridentin ne permettra pas pour autant un retour rapide des lefebvristes vers Rome. La libéralisation de la messe de saint Pie V comme solution au schisme lefebvriste ? Au cours d’une conférence prononcée jeudi soir devant près de 400 personnes (*) à la Mutualité, à Paris, Mgr Bernard Fellay, supérieur général de la Fraternité sacerdotale saint-Pie X (FSSPX), a d’ores et déjà fait part de ses doutes sur un retour rapide à Rome des fidèles de Mgr Lefebvre en cas de « libération » de la messe tridentine. Certes, « ce que l’on sait du motu proprio traduit la volonté du pape de redonner sa place au rite traditionnel », explique celui que Mgr Lefebvre a ordonné illicitement évêque en 1988. Il voit dans ce geste « plus qu’une simple concession à des nostalgiques » de la part d’un pape « qui aime l’ancienne messe ». mais cette libéralisation du rite préconciliaire est-il pour autant la réponse au premier préalable – avec la levée des excommunications posées au moment des ordinations épiscopales illicites de 1988 – posée par la FSSPX à l’ouverture de discussions à Rome ? « Même si Rome ne peut le dire comme cela, il y a une volonté de répondre à cette demande », estime Mgr Fellay. « Mais tout dépendra des restrictions mises dans le texte », ajoute-t-il aussitôt. Et d’expliquer : « « Si l’ouverture est telle qu’on peut parler d’une véritable libération, pas de problème, dit-il. Mais si on remet dans les mains de l’évêque le pouvoir de refermer la porte ouverte par le pape, ce ne sera pas possible ». Une référence directe au n°39 de l’exhortation apostolique de Benoît XVI Sacramentum caritatis selon laquelle il revient à l’évêque « de sauvegarder l’unité unanime des célébrations dans son diocèse ». « Si on utilise cet argument pour dire que l’ancienne messe est un danger pour l’unité du diocèse », prévient Mgr Fellay, qui prévoit toutefois que si le pouvoir de l’évêque était réaffirmé par le motu proprio, les fidèles pourront aussi recourir à Rome. « L’après-motu proprio sera très intéressant », prévient déjà le chef de file des intégristes. « Si on laisse une chance égale aux deux rites, il n’est pas difficile de deviner lequel l’emportera », estime-t-il. Selon lui, « il y a une véritable attente du peuple chrétien » vis-à-vis de l’ancienne messe. « Il suffit de voir les églises vides : n’est-ce pas une sanction contre la nouvelle messe ? », demande-t-il. D’où les oppositions qu’il prévoit de la part de ceux qui ont promu le rite de Paul VI. « Il y aura un mouvement d’opposition énorme », prévient-il. Une opposition certes « passive », « mais c’est cela qui fait peur au pape », souligne Mgr Fellay, selon qui il faudra « un long travail ». « A Rome, on nous explique que dans une génération la nouvelle messe aura disparu, affirme-t-il. Moi je pense qu’il en faudra plutôt deux… » Pour autant, ce qu’il appelle la « libération » de l’ancienne messe ne sera pas une condition suffisante pour provoquer le retour de la FSSPX dans le giron romain, estime Mgr Fellay. « La messe a été l’instrument de la réforme de l’esprit catholique : en ce sens elle est une cause de l’état actuel de l’Eglise. Mais elle a été un outil pour mettre en application des principes : ce sont eux qui sont dangereux et auxquels il faut s’attaquer », explique-t-il, reprochant à Benoît XVI de « vouloir être moderne » et demandant une discussion de fond sur le concile Vatican II, et notamment sur la liberté religieuse, l’œcuménisme et la collégialité épiscopale. « Comment un tel concile a-t-il pu avoir lieu dans l’Eglise ? », s’indigne Mgr Fellay, selon qui « signer maintenant un accord serait une solution facile qui n’obligerait pas à réfléchir sur ce concile qui pose des questions théologiques énormes ». |