15 janvier 2014

[Frère Philippe de la Face de Dieu - CRC] Le syndrome de Jean-Baptiste

SOURCE - Frère Philippe de la Face de Dieu - La Contre-Réforme Catholique au XXIe siècle - janvier 2014

C’est animé d’une joie profonde que saint Jean-Baptiste, cet incomparable « ami de l’époux », vit Jésus s’engager dans son ministère messianique, et qu’il lui céda sans regret les meilleurs de ses disciples. C’était dans l’ordre, Jésus devait croître et lui diminuer (cf. Jn 3, 29-30). Mais après quelques semaines, dérouté par l’attitude du Christ, un doute corrosif lui vola toute sa joie.

Cet homme d’Ancien Testament n’imaginait pas que le mouvement de conversion qu’il avait inauguré, et dont Jésus avait pris la tête, allait déboucher sur l’année de la miséricorde prédite par les prophètes (cf. Lc 4, 16-19). Jean n’avait retenu de leur enseignement que le terrible jugement par lequel le Messie devait restaurer Israël dans toute sa gloire religieuse et politique. Le Christ devait donc sans tarder frapper à la tête le schisme et l’hérésie, qui démantelaient la religion de ses pères en une confusion de sectes et de partis. Or, il n’en faisait rien. Pourquoi Jésus perdait-il son temps à raconter des histoires aux paysans et aux pêcheurs de Galilée, tandis qu’à Jérusalem tout continuait comme avant, dans l’injustice ?

Cette perplexité amplifiée par les ténèbres et la solitude des prisons d’Hérode, Jean connut alors une véritable agonie. Elle fut d’autant plus cruelle que certains de ses disciples lui faisaient comprendre qu’il s’était trompé : « Ce Jésus n’est qu’un “ rabbi de campagne ”... »

N’y tenant plus, « il lui envoya de ses disciples pour lui dire : “ Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? ” Jésus leur répondit :“ Allez rapporter à Jean ce que vous entendez et voyez : les aveugles voient et les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés et les sourds entendent, les morts ressuscitent et la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres ; et heureux celui pour qui je ne serai pas une occasion de chute ! ” » (Lc 7, 22-23)
CŒUR DE JÉSUS, CŒUR DE FRANÇOIS
Nous n’avons pas enduré les souffrances de la prison. Nous sommes ou nous devrions être, nous les enfants du « Royaume des Cieux », plus grands que Jean (cf. Mt 11, 11-12), et pourtant force est de reconnaître que, comme lui, le Bon Dieu nous surprend, et nous aussi, il nous arrive d’en être anormalement décontenancés. C’est “ le syndrome de Jean-Baptiste ”, la maladie qui nous guette depuis l’élection du pape François, le 13 mars 2013. Le Vicaire du Christ n’étant pas plus grand que son divin Maître, il suscite, pour les mêmes raisons, un certain scandale.

Notre frère Bruno fait tout pour nous en prémunir en nous montrant, mois après mois, à quel point c’est le Cœur de Jésus qui anime celui du pape François, non seulement d’un amour très miséricordieux pour les pauvres brebis de l’Église restées si longtemps sans pasteur, mais aussi d’une prudence consommée dans sa dénonciation courageuse et perspicace des effets induits de Vatican II, à tous les degrés de la hiérarchie.

C’est la contre-réforme et contre-révolution de Jésus qui s’ébranle en douceur sous le couvert de la “ nouvelle évangélisation ” ; c’est le vaisseau tribord amure de l’Église qui cargue de nouveau les voiles au vent de l’Esprit-Saint après cinquante ans de calme plat conciliaire, mondain et sans vraie joie. Le capitaine est à la barre, l’équipage se reprend à espérer, les passagers aussi...
RADIOSCOPIE
Et nous autres pendant ce temps-là, nous bouderions notre joie ? Nous nous laisserions voler l’espérance ? Notre frère Bruno a reçu la lettre d’un ami, très emblématique sous ce rapport. Ne cherchez pas à l’identifier, car cet ami, c’est vous, c’est moi. Ce fut, c’est, et ce sera encore chacun de nous, à un moment donné ou à un autre, lorsque faute de lire Il est ressuscité, nous perdrons de vue le pape François tel que frère Bruno nous le donne à voir et entendre, en toute vérité-charité. Notre cœur ne battant plus tout à fait à l’unisson de celui du Saint-Père et de notre frère Prieur, notre esprit troublé multipliera alors les tristes considérations d’une étroitesse tout humaine.

Tout commençait bien pourtant, par la parfaite expression des pensées et sentiments de tous :

« Sachez que, toute cette année, vous m’avez convaincu pour ce qui est du cœur du pape François et du cœur de sa Foi. Et c’est l’essentiel, puisque dès lors la grâce d’état de son Office ne lui sera pas refusée, et qu’il voudra sûrement la faire fructifier : je garde ainsi non seulement ma Foi en notre Église, et l’Espérance qui va avec, mais aussi, pour l’avenir de ce pontificat, une réelle confiance dans la personne de ce nouveau pape que le Père avait vu, de loin, comme si excellent qu’il le réputait “ saint ” déjà : d’où la joie que j’ai éprouvée, dans ce souvenir, il y a dix mois, en entendant annoncer le nom de l’élu du Conclave. Et depuis, je le redis : vos démonstrations sur son cœur ont réellement pris le pas, au plus profond de moi, sur ce qui ressort du constat objectif de ses idées et des projets qui en découlent dans l’Église et pour elle. »
VATICAN II PIERRE D’ACHOPPEMENT.
« Seulement, ce second aspect de la question, c’est aussi une réalité, qu’une “ pia interpretatio ” ne saurait dissimuler complètement, comme il vous arrive de le remarquer. L’univers de pensée de Vatican II est bien toujours là, continuant de dissoudre insidieusement l’Église et ce qui reste de la Chrétienté.

« Bien sûr, il fallait laisser au nouveau successeur de Pierre le temps de réaliser dans quel drame nous sommes effectivement et surtout ses causes exactes : il pouvait sans doute ne pas les avoir vues jusque-là. »

Autrement dit, le Pape a tort de nous livrer sa bonne marchandise dans l’emballage défectueux, corrupteur de Vatican II. Pour détendre notre lecteur, nous répondons à l’objection en empruntant les paroles mêmes de saint Pie X à un de ses amis juifs qui s’étonnait d’avoir à transmettre, lui juif, la bénédiction apostolique à sa famille juive : « Si l’emballage est mauvais, la marchandise est bonne ! » Une telle réponse n’est pas aux normes de la logique d’Aristote, ni de la théologie scolastique, j’en conviens, mais elle n’en est pas moins d’une profondeur tout à fait catholique, et elle fait mouche, nous y reviendrons.

« Peut-être que ce que dit le Saint-Père, ce qu’il fait et montre chaque matin dans la petite sphère des fidèles de sa chapelle étendue à celle des pèlerins de la place Saint-Pierre, et encore étendue à la sphère plus vaste des abonnés de Twitter ou de KTO (dont je ne suis pas), peut-être que cet “ humble ministère de bon curé de campagne ” pour ses proches, comme on a dit, est le premier temps nécessaire d’une réelle “ reconstruction de l’Église ”, insufflant au moins là les “ vitamines ” spirituelles nécessaires avant toute autre “ pastorale ” envisageable.

« Je puis le croire en vous suivant, mais sans personnellement ressentir le même enthousiasme devant l’éblouissante clarté qui vous apparaît surtout dans ce pontificat. »

Les démonstrations de notre frère Bruno ont convaincu notre ami de la sincérité, de la loyauté, de la bonté du Saint-Père, mais elles n’ont pas été comprises ou ont été vite oubliées. Oubliés la joie de l’Évangile qui est de nouveau annoncé au monde, et l’ordre qui est ramené dans l’Église. Le miracle de la grâce n’est plus discerné, ni son Pontife...
« JE SUIS UN PEU COMME JEAN-BAPTISTE. »
« Certes vous le dites aussi : “ déroutant ” !!! Mot incroyable, s’agissant d’un Pape, d’un père, mot que j’entends dans tout son sens ! » Quand le Pape en question est notre Saint-Père François, « déroutant » s’accepte précisément, « dans tout son sens », à la lumière d’une foi filiale et non en raison d’une “ pia interpretatio ”. Nous sommes fils de l’Église, enfants pécheurs d’un Dieu dont le propre est de sans cesse “ dérouter ” pour remettre dans le droit chemin. Lent à la colère, il patiente, pardonne à son enfant prodigue au point de “ dérouter ” son « fils aîné »... Cette leçon évangélique de réconciliation est celle-là même que notre Père tirait de son cycle d’études sur les grandes crises de l’Église. Lucifer de Cagliari, défenseur de la foi contre l’hérésie d’Arius n’a pas voulu se laisser “ dérouter ”, ni par le pape Libère, ni par le pape saint Damase : il a fini sa vie dans l’aigreur du schisme... (cf. CRC n°  89, février 1975, p. 7-9 : Vers la réconciliation ; p. 12 : Sagesse surnaturelle)

« C’est bien ce caractère “ déroutant ”, qui m’apparaît souvent, plutôt que l’autre, je vous l’avoue ! »

Le dilemme de notre ami et de bien d’autres, c’est de poser les termes du problème en mathématicien, ou pire en scolastique rationaliste, et de constater, sans sortir de la solitude de leur laboratoire, qu’ils sont contradictoires. Le pape François a la foi, la piété, le zèle et le courage d’un saint, or il ne remet pas en question le concile Vatican II.

Pourtant, pensent tous ces gens par-devers eux, peu ou prou, c’est ce qu’il aurait dû faire, tout de suite et vite, en trois coups de cuillère à pot.

« Rationalisme totalitaire » propre à l’homme moderne, diagnostiquerait notre Père (cf. Il est ressuscité n° 133, novembre 2013, p. 33-34), doublé et renforcé par une justification religieuse d’Ancien Testament. C’est Jean-Baptiste – notre ami va le reconnaître lui-même – qui s’est enfermé dans la prison de ses propres raisonnements. Prison d’autant plus rude que le raisonnement paraît logiquement imparable, tout en étant partial, car complètement déconnecté de la réalité concrète, existentielle, excessivement complexe avec laquelle le Christ Notre-Seigneur et son vicaire sont chaque jour aux prises, pour le salut de l’Église.

« L’aiguillage “ funeste ” a été pris il y a cinquante ans, et l’on entend formellement [sic] rester plus que jamais sur ce rail, s’interdisant tout ce qui amorcerait d’en sortir pour retrouver la vraie bonne route... Peut-être parce qu’on n’a pas encore vu que ce “ rail ” va à l’abîme, mais la réalité n’en est pas moins là... »

Quand le Pape reconnaît que quatre-vingt-dix-neuf brebis sur cent ont quitté son enclos, et que l’Église aujourd’hui ressemble à un hôpital militaire de campagne après la bataille, et quand on constate que François a imposé une prodigieuse sourdine aux célébrations des cinquante ans de Vatican II, n’est-ce pas suffisamment clair ?

« Me reconnaissant volontiers moins informé que vous, et moins bien situé pour détecter l’authentique sainteté, je ne demande qu’à suivre votre jugement, mais je suis un peu comme Jean-Baptiste dans sa prison et ne trouve alors qu’à mendier des “ signes ”... »

Encore faut-il les voir et les entendre : « Les aveugles voient et les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés et les sourds entendent, les morts ressuscitent et la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres. » Ce que Jésus a fait pour les corps, François le fait pour les âmes et à plus grande échelle. Notre-Seigneur pourrait ajouter à notre intention et en toute vérité : « Heureux celui pour qui le pape François ne sera pas une occasion de chute ! ” » (cf. Mt 11, 4-6)
« ON NE REVIENDRA PAS EN ARRIÈRE ! »
Une conclusion s’impose au terme des dix premiers mois du pontificat de François :

« On ne reviendra pas en arrière, Vatican II, c’est fini, c’est bien fini ! »

Le président russe Vladimir Poutine a utilisé la même expression pour signifier, sans équivoque possible, le définitif enterrement du régime soviétique. Qui songerait aujourd’hui à mettre en doute la sincérité et vérité de sa parole ?

Et pourtant un Russe, à l’instar de notre ami, pourrait encore ratiociner et se lamenter en voyant que le parti communiste siège toujours à la Douma ; que les criminels pourvoyeurs du Goulag n’ont pas été châtiés ; que Poutine n’a pas détruit le mausolée de Lénine, que le petit Père Staline a encore ses rues et statues pour perpétuer son souvenir ; que Poutine ne cherche même pas à détromper les citoyens russes attachés à son souvenir en raison des services rendus à la patrie, etc. En paraphrasant notre ami, ce Russe pourrait dire avec toutes les apparences de la vérité que « l’univers de pensée du régime soviétique est bien toujours là, continuant de dissoudre insidieusement la patrie ». Et de fait, les tares de soixante-dix ans de régime soviétique pèsent très lourd, non seulement sur l’économie et la politique mais, ce qui est plus grave encore, sur la morale et la religion des Russes. C’est pourquoi le remède proposé par le Ciel est plus que jamais d’actualité : la consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie.
SAINTE ÉGLISE, SAINTE RUSSIE, MÊME DÉFI
Pour comprendre, en effet, ce qui se passe dans l’Église, comme en Russie et dans le reste du monde d’ailleurs, point besoin d’avoir fait science-po, ce serait plutôt un handicap, ni d’être licencié en théologie scolastique. Il suffit de se pénétrer de la sagesse biblique que notre bien-aimé Père nous a communiquée dans sa dernière retraite sur la Circumincessante charité (vidéo VHS ou CD : S 134).

C’est le dessein de Dieu tel que nous le révèle la Bible, des origines jusqu’à la consommation des siècles, son déploiement trinitaire, ses alliances apparemment mises en échec par Satan et ses suppôts ou par la tiédeur et lâcheté de ses propres enfants, mais toujours miséricordieusement renouées par le Bon Dieu. Il est si bon qu’il lui suffit de trouver un “ petit reste ” de fidèles, un seul homme parfois qui se mette à son service sans discuter, et c’est toute l’humanité qui profite alors des bénédictions divines...

Et dans les derniers temps qui sont les nôtres, c’est le Cœur de Jésus qui veut embraser le monde du feu de son amour afin d’en chasser le diable et d’y régner pour le plus grand bonheur temporel et éternel de l’humanité. Apparemment mis en échec, la victoire finale va échoir au Cœur Immaculé de Marie, comme nous le révèlent les grandes apparitions de Notre-Dame à Fatima (1917), puis celle de Pontevedra (1925), et enfin celle de la Sainte Trinité à Tuy (1929). L’Église, en la personne du Saint-Père, et la nation russe y sont intimement associés, l’une et l’autre devant se prêter un mutuel appui afin de sortir, l’une de la pire des révolutions et l’autre de la grande apostasie, rien de moins, le tout à la louange de gloire du Cœur Immaculé de Marie !

En bonne logique cartésienne, il devrait n’y avoir rien de nouveau, à l’Est comme à l’Ouest, puisque depuis Pie XI les Papes n’obéissent pas aux demandes de la Sainte Vierge, condition sine qua non du miracle. Et pourtant nous sommes obligés de reconnaître que le Bon Dieu a commencé à faire miséricorde. Par les mérites de qui ? Le martyre violent de Jean-Paul Ier et de tant de chrétiens, celui du cœur de sœur Lucie de Fatima et de notre bien-aimé Père ?...

C’est ainsi que nous avons vu la Sainte Russie hier, et que nous voyons aujourd’hui la Sainte Église, affligées par la révolution se relever l’une et l’autre de la même providentielle et pacifique manière : “ Le doigt de Dieu ” est là qui pousse ses pions et joue sa partie d’échecs...

« Par le concile Vatican II, comme le disait justement l’expert Congar, l’Église a fait pacifiquement sa révolution d’octobre. ». C’est si vrai que cette révolution a fini, comme la Russe, dans une semblable décomposition et ruine. Si la chute du mur de Berlin fut le symbole de l’une, la démission du Panzer-Pape Benoît XVI fut le signal de l’autre.
VATICAN II, C’EST FINI !
Vatican II, dans sa partie minoritaire, “ bolchevique ”, celle des brigandages, du lobbying des experts et de quelque trois cents évêques, celle des ruptures de tradition opérées avec la complicité active des papes Jean XXIII et Paul VI, a rempli son office. Elle a vidé l’Église de sa substance. L’herméneutique de la rupture avait été exaltée pour le quarantième anniversaire du Concile en 2002, mais pour le cinquantième cela n’était plus possible..

Benoît XVI avait compris cela depuis longtemps, et dès son élection en 2005, il fit tout pour sauver son Concile ; cette obsession allant de pair avec sa hantise d’une Contre-Réforme catholique dont il sentait bien qu’elle rencontrait le profond désir de l’Église réelle...

Il lança alors une véritable OPA à l’adresse des milieux traditionalistes de partout... Il lui fallait rallier une jeunesse cléricale, en soutane et col romain, rassurante par conséquent... Il fallait montrer les fruits de Vatican II, relever la vieille garde soixante-huitarde des caciques de l’Action catholique qui s’en allait rejoindre ses pères et grands ancêtres... Habile, il trouva le slogan passe-partout qui devait, en bonne logique, rallier tout le monde : Interpréter les textes de Vatican II dans un sens de continuité avec la Tradition et non plus de rupture. « L’herméneutique de la continuité » n’était somme toute que la version savante de la larmoyante revendication du fondateur d’Écône : « Le concile Vatican II oui, mais à la lumière de la Tradition, qu’on nous laisse faire l’expérience de la Tradition... »

Le slogan qui devait faire merveille et redonner à Vatican II une nouvelle jeunesse, précipita sa chute. Les célébrations de son cinquantième anniversaire révélèrent que Vatican II, celui qu’on croyait vivant et bien vivant puisqu’on ne cessait de le proclamer, était en fait bien mort et qu’il sentait mauvais, en proie à la plus extrême décomposition. Vous en trouverez la preuve dans les articles relatant les actions phalangistes de l’année 2012. Vatican II ? Les gens s’en foutent, mais à un point que l’on ne pouvait pas soupçonner... Les jeunes à l’occasion de ces célébrations ? Pour la plupart des CRC... On s’attendait à trouver des “ jmjistes”, des jeunes sympas, enthousiastes de Vatican II, et qui auraient voulu convaincre les nôtres de leur erreur ; personne ou presque.

Et nos jeunes CRC de découvrir l’indigence intellectuelle des mandatés chargés de nous vendre Vatican II. Que de bêtises ont été dites aux Bernardins... et par égard envers la dignité sacerdotale et épiscopale, notre frère Bruno n’a pas permis que l’on publie les pires...

La démission de Benoît XVI surprit, mais soulagea tout le monde. Frère Bruno a tout de suite identifié les deux auteurs de ce dernier acte. Le coup de majesté du Christ qui écarte son vicaire félon en lui inspirant le seul motif pour lequel il acceptera de partir : sauver son Concile.
ENFIN FRANÇOIS VINT.
L’Église au soir de l’élection du pape François était dans une situation analogue à la Russie lors de l’arrivée au pouvoir de Gorbatchev... François et lui ont plus d’un point en commun. Gorbatchev a tout de suite rompu avec la langue de bois et a commencé aussitôt l’audit de son pays ruiné. En s’imposant comme le leader mondial le plus influent, il donna le change, dissimula pendant longtemps l’état réellement catastrophique de son pays, et fit jouer à la Russie un rôle politique au-dessus de ses moyens. Il ne fit pas de chasse aux sorcières, et garda les structures en place afin de les faire évoluer lentement... Il y serait arrivé sans la pression des usa soudoyant Eltsine et les oligarques. Mais après la parenthèse ruineuse de dix ans de capitalisme sauvage, providentiellement, Vladimir Poutine reprit la même politique de restauration nationale et religieuse tout en faisant brillamment face à mille difficultés, au-dedans comme au-dehors...

Frère Bruno nous montre que le pape François agit avec la même sagesse, la même prudence, la même fermeté. Il n’est pas étonnant dès lors de voir le Pape et le chef de la plus grande nation chrétienne imposer ensemble l’ordre et la paix sur la scène internationale, en résistant à l’impérialisme yankee et à ses supplétifs djihadistes.

Le 13 octobre 2013, c’est visiblement à contrecœur que François n’a pas consacré la Russie au Cœur Immaculé de Marie. Frère Bruno pense que l’opposition est venue de Benoît XVI et de son lobby, tous partisans de Dhanis, l’adversaire de Notre-Dame de Fatima et de sa politique. Le pape François est « rusé » et s’il n’a pas jugé bon de passer outre à ce qui a dû être une pression, il a ses raisons. Ce n’est que partie remise, on le comprit lorsqu’on vit, le 25 novembre 2013, Poutine offrir au Saint-Père l’icône de la Mère de Dieu de Vladimir, image miraculeuse et tutélaire de la nation russe au cours de son histoire. Tout est prêt pour cette consécration. En attendant, Poutine et François l’anticipent en menant de concert une politique extérieure commune. C’est le retour en force et sagesse du christianisme sur la scène internationale, notamment au Moyen-Orient, pour secourir les chrétiens qu’on assassine, et soutenir avec beaucoup d’habileté diplomatique le président syrien qui les protège.
ET VATICAN II ?
Le pape François n’a probablement pas la même lucidité que notre Père sur le concile Vatican II, ou il affecte prudemment de ne pas l’avoir. Notre frère Bruno l’a relevé à plusieurs reprises. Mais notre frère met toute sa confiance en la foi vive du successeur de Pierre, et surtout en l’Esprit-Saint qui le guide et lui viendra en aide pour mettre en œuvre un restaurateur concile Vatican III. C’est François qui consacrera la Russie au Cœur Immaculé de Marie, gage de toutes les bénédictions, dont la première sera de reprendre le grand mouvement des saintes, surnaturelles et pastorales réformes initiées sous le règne de saint Pie X, hélas ! désorientées, sécularisées sous les papes Jean XXIII, Paul VI, Jean-Paul II et Benoît XVI.

En attendant, il en va des orientations conciliaires comme de ces grandes avenues démesurément larges que le régime soviétique avait conçues pour que ses chars s’opposent plus facilement aux révoltes populaires. Les orientations conciliaires sont là, on les laisse, on circule dessus, on respecte la signalisation, on emprunte les mêmes couloirs, mais c’est pour travailler d’une manière surnaturelle à l’évangélisation et au service des pauvres, par l’Église, pour le Christ Jésus.
NOUVELLE LIGNE DE CRÊTE
Défendre la foi de l’Église contre le schisme et l’hérésie fut le lot quotidien de la plupart des grands docteurs de l’Église. Mais à notre bien-aimé Père échut la vocation inouïe de la défendre contre un schisme au sommet, une révolution par voie d’autorité. Dès 1969, il rappelait à ses amis ce qui allait être le principe surnaturel majeur de ses démarches canoniques de 1973, 1983, 1993 :

« Nous ne sommes pas les sauveurs de l’Église, c’est elle qui est encore et toujours notre salut. Je ne le vois pas, mais je le crois de foi certaine : le salut de l’Église est aujourd’hui, comme hier et toujours, dans ses Pasteurs. Même passagèrement enfoncés dans l’erreur et le sectarisme de leur “ Réforme ”, la grâce subsiste en eux, indéfectible, inapparente, mais prête à rejaillir au jour de Dieu pour le salut de tous. Le trouble peut être grand, le dommage pour les âmes mortel : Dieu ne veut nous gouverner que par la hiérarchie. Il ne tolère pas en cette matière sacrée d’usurpation frauduleuse. Si nous étions assez insensés pour imaginer sauver l’Église en l’emportant avec nous dans l’aventure d’un autre schisme, nous qui ne sommes rien, c’est nous seuls qui serions irrémédiablement perdus. La vie n’est en nous que reçue, c’est de la Pierre romaine qu’elle jaillit uniquement. » (CRC n° 25, octobre 1969, p. 12)

La foi de notre Père en l’Église n’a pas été déçue, malgré les apparences, elle a même réconforté celle des autres. Ses accusations d’hérésie, schisme et scandale portées à l’encontre des théologiens privés Montini (Paul VI), Wojtyla (Jean-Paul II) et de l’auteur du CEC (Ratzinger), auraient dû ouvrir en cour de Rome un procès en matière de foi ; ces mêmes Papes auraient dû, dans la plénitude de leur infaillibilité, juger cette cause, condamner l’abbé de Nantes s’il était dans l’erreur et poussait autrui au schisme. Ce procès n’eut jamais lieu. C’est cette “ non-réponse ”, comme dirait l’autre, qui fit dire à Monsieur Louis Vimal, le maître et professeur de séminaire de l’abbé de Nantes : « Il faut vraiment que l’Église soit divine pour que ses chefs aient finalement été contraints de reculer. Ils ne vous ont frappé d’aucune peine canonique. »

L’espérance de notre bien-aimé Père n’a pas été confondue non plus. Depuis le 13 mars 2013, et frère Bruno ne cesse de le constater, la foi, l’espérance et la charité jaillissent de nouveau du trône de Pierre, et par le cœur de François elles redonnent vie aux « ossements desséchés » (cf. Ez 37, 1-13) de notre pauvre Église, qui fut cinquante ans durant accablée par tant de schismes et d’hérésies d’où qu’ils viennent. Ils ont produit leur œuvre de mort, n’en parlons plus. L’heure est à la grande reconstruction de l’Église :

« Ce qui relèvera l’Église, ce sera l’œuvre promptement religieuse de “ revitalisation ” du tissu même de la société chrétienne où nous vivons, l’œuvre de la sanctification des âmes. Les manifestations, la polémique parlée ou écrite ne seraient que bruits de cymbale sans cette œuvre positive, constructive, de longue haleine, silencieuse, plus exigeante et difficile que tout autre. » (Lettre de notre Père du 8 décembre 1969)
Par son exhortation Evangelii gaudium le Saint-Père a posé les bases d’une pastorale d’ensemble, dont notre frère Bruno se plaît chaque jour à montrer l’accord, la correspondance avec la doctrine de notre bien-aimé Père C’est plus que réjouissant n’est-ce pas ? C’est sur le roc de cette sagesse globale et totalement d’Église que le Saint-Père pourra compter lorsqu’il s’apercevra que le soubassement doctrinal hérité de certains maîtres supporte finalement mal, voire très mal, ses plus chers désirs apostoliques.
JÉSUS AVEC NOUS.
Le pape François, comme Jésus en Galilée, aime et est aimé des gens de bonne volonté. Comme Jésus montant à Jérusalem pour chasser les marchands du Temple, il a entrepris, lui aussi, de chasser les voleurs et autres parasites qui encombrent la maison de Dieu. Le Vicaire du Christ a sorti pour ces circonstances, sa « verge de fer » (cf. Ap 2, 27). Il en aura bien besoin au cours de cette année qui va probablement voir des coalitions cléricalo-maffieuses se liguer contre lui. Elles s’agitent déjà dans l’ombre...

Nous le suivrons tout au long de ce chemin de Croix, avec confiance, car en lui brille la blanche lumière de la foi et l’assistance du Divin Paraclet... Quelles que soient les ténèbres et les adversités qu’il sera obligé de traverser, la phalange de l’Immaculée, lui tiendra spirituellement office de garde rapprochée, et à la suite de notre frère Bruno sur cette nouvelle ligne de crête, comme jadis Philippe le Hardi au secours de son père Jean le Bon, nous le défendrons de notre mieux : « Père gardez-vous à gauche, Père gardez-vous à droite. »

frère Philippe de la Face de Dieu.