Sophie de Ravinel - Le Figaro - 27 août 2005
Benoît XVI recevra lundi matin en audience le supérieur de la Fraternité Saint Pie X, Mgr Bernard Fellay. Le responsable de la plus importante communauté anticonciliaire avait lui-même exprimé le souhait de rencontrer le nouveau pape. «Par simple déférence», indique-t-on dans son entourage pour couper court à toute rumeur d'une résolution rapide de la crise lefebvriste. Il lui exposera cependant ses deux requêtes principales : faciliter la célébration du rite latin de Saint Pie V et lever les sanctions canoniques. L'ancien cardinal Ratzinger possède les atouts nécessaires pour retrouver l'unité perdue. Mais dans l'Eglise catholique, certains craignent que cette perspective ne s'accompagne d'une moindre considération des évolutions du concile Vatican II. Quatre mois après son élection, Benoît XVI se saisit d'un dossier sur lequel avait peiné son prédécesseur : le dialogue avec les lefebvristes, séparés de Rome depuis 1988. Lorsque le Pape recevra le supérieur de la Fraternité Saint Pie X, Mgr Bernard Fellay, il lui demandera sans doute de présenter ses arguments et ses attentes. Un exercice de pure forme puisque l'ancien cardinal Ratzinger travaille ce dossier depuis plus de vingt ans. Qu'il s'agisse des aspects liturgiques, doctrinaux ou canoniques, rien ne lui échappe des arcanes compliqués du monde anticonciliaire. Cette audience aura donc valeur de symbole, celui d'une considération réciproque et d'une volonté d'avancer. C'est aussi ce que souhaite manifester Mgr Fellay qui, selon son entourage, se rend à Castel Gandolfo afin de manifester sa «déférence». En avril dernier, le chef de file des lefebvristes avait qualifié de «lueur d'espérance» son élection, susceptible de «sortir de la profonde crise qui secoue l'Eglise catholique».
[PHOTO, avec comme légende: L'attachement de Benoît XVI à la liturgie traditionnelle en latin est un fait largement répandu, qui lui a permis d'établir des relations privilégiées avec les lefebvristes durant tout le pontificat de Jean-Paul II.]
Mais ce lien, aussi solide soit-il, ne permettra pas la résolution de divisions qui ne sont qu'en partie liturgiques. Le reste des points de rupture porte sur le concile Vatican II, en particulier sur l'oecuménisme et les fondements du dialogue avec les autres religions.
Et sur ces points, le Pape n'est pas disposé à transiger. Il l'a rappelé lors de son discours d'intronisation en avril dernier et concrètement manifesté en marge des dernières Journées mondiales de la jeunesse à Cologne.
Les lefebvristes sont bien conscients qu'il s'agit là de l'écueil principal. En juillet dernier, Mgr Fellay l'a lui-même affirmé à Dici, l'agence de presse de la Fraternité Saint-Pie X : «Il ne faut pas le cacher, dès le départ il y a un problème qui menace d'éteindre la lueur : Benoît XVI reste attaché au concile.»
Pour sortir de ce piège et ouvrir une brèche, Benoît XVI distingue clairement la question de la liturgie de celle des lefebvristes.
Selon certaines sources ecclésiastiques proches du dossier, on peut raisonnablement s'attendre à un élargissement de l'autorisation faite aux prêtres de célébrer selon le rite tridentin. Cette autorisation pourrait être annoncée autour du prochain synode sur l'Eucharistie qui se déroulera au mois d'octobre au Vatican. On reparle par ailleurs de la création d'une «administration apostolique», une sorte de «diocèse sans frontière», dans lequel pourraient choisir d'être incardinés les prêtres fidèles au rite antéconciliaire.
Aujourd'hui, seul un évêque peut permettre la célébration selon Saint Pie V. Demain, c'est au curé d'une paroisse que pourrait échoir cette responsabilité. Le cardinal Ratzinger y était favorable. Avec quelques autres cardinaux de curie, il avait effectué des démarches en ce sens auprès de Jean-Paul II, entre 2001 et 2002.
Certains évêques interrogés sur la question prévoient au mieux une «véritable pagaille» dans les diocèses où cohabiteraient les deux rites. Par ailleurs, unis en cela aux lefebvristes, ils affirment que lex orandi, lex credendi, la manière de prier influe sur la manière de croire. Et craignent qu'en renouant avec la messe en latin, on renonce implicitement aux avancées du concile.
Benoît XVI recevra lundi matin en audience le supérieur de la Fraternité Saint Pie X, Mgr Bernard Fellay. Le responsable de la plus importante communauté anticonciliaire avait lui-même exprimé le souhait de rencontrer le nouveau pape. «Par simple déférence», indique-t-on dans son entourage pour couper court à toute rumeur d'une résolution rapide de la crise lefebvriste. Il lui exposera cependant ses deux requêtes principales : faciliter la célébration du rite latin de Saint Pie V et lever les sanctions canoniques. L'ancien cardinal Ratzinger possède les atouts nécessaires pour retrouver l'unité perdue. Mais dans l'Eglise catholique, certains craignent que cette perspective ne s'accompagne d'une moindre considération des évolutions du concile Vatican II. Quatre mois après son élection, Benoît XVI se saisit d'un dossier sur lequel avait peiné son prédécesseur : le dialogue avec les lefebvristes, séparés de Rome depuis 1988. Lorsque le Pape recevra le supérieur de la Fraternité Saint Pie X, Mgr Bernard Fellay, il lui demandera sans doute de présenter ses arguments et ses attentes. Un exercice de pure forme puisque l'ancien cardinal Ratzinger travaille ce dossier depuis plus de vingt ans. Qu'il s'agisse des aspects liturgiques, doctrinaux ou canoniques, rien ne lui échappe des arcanes compliqués du monde anticonciliaire. Cette audience aura donc valeur de symbole, celui d'une considération réciproque et d'une volonté d'avancer. C'est aussi ce que souhaite manifester Mgr Fellay qui, selon son entourage, se rend à Castel Gandolfo afin de manifester sa «déférence». En avril dernier, le chef de file des lefebvristes avait qualifié de «lueur d'espérance» son élection, susceptible de «sortir de la profonde crise qui secoue l'Eglise catholique».
[PHOTO, avec comme légende: L'attachement de Benoît XVI à la liturgie traditionnelle en latin est un fait largement répandu, qui lui a permis d'établir des relations privilégiées avec les lefebvristes durant tout le pontificat de Jean-Paul II.]
Mais ce lien, aussi solide soit-il, ne permettra pas la résolution de divisions qui ne sont qu'en partie liturgiques. Le reste des points de rupture porte sur le concile Vatican II, en particulier sur l'oecuménisme et les fondements du dialogue avec les autres religions.
Et sur ces points, le Pape n'est pas disposé à transiger. Il l'a rappelé lors de son discours d'intronisation en avril dernier et concrètement manifesté en marge des dernières Journées mondiales de la jeunesse à Cologne.
Les lefebvristes sont bien conscients qu'il s'agit là de l'écueil principal. En juillet dernier, Mgr Fellay l'a lui-même affirmé à Dici, l'agence de presse de la Fraternité Saint-Pie X : «Il ne faut pas le cacher, dès le départ il y a un problème qui menace d'éteindre la lueur : Benoît XVI reste attaché au concile.»
Pour sortir de ce piège et ouvrir une brèche, Benoît XVI distingue clairement la question de la liturgie de celle des lefebvristes.
Selon certaines sources ecclésiastiques proches du dossier, on peut raisonnablement s'attendre à un élargissement de l'autorisation faite aux prêtres de célébrer selon le rite tridentin. Cette autorisation pourrait être annoncée autour du prochain synode sur l'Eucharistie qui se déroulera au mois d'octobre au Vatican. On reparle par ailleurs de la création d'une «administration apostolique», une sorte de «diocèse sans frontière», dans lequel pourraient choisir d'être incardinés les prêtres fidèles au rite antéconciliaire.
Aujourd'hui, seul un évêque peut permettre la célébration selon Saint Pie V. Demain, c'est au curé d'une paroisse que pourrait échoir cette responsabilité. Le cardinal Ratzinger y était favorable. Avec quelques autres cardinaux de curie, il avait effectué des démarches en ce sens auprès de Jean-Paul II, entre 2001 et 2002.
Certains évêques interrogés sur la question prévoient au mieux une «véritable pagaille» dans les diocèses où cohabiteraient les deux rites. Par ailleurs, unis en cela aux lefebvristes, ils affirment que lex orandi, lex credendi, la manière de prier influe sur la manière de croire. Et craignent qu'en renouant avec la messe en latin, on renonce implicitement aux avancées du concile.