Homélie de Son Excellence Mgr Guido Pozzo
(le sermon prononcé est plus long que celui-ci et comprenait une partie sur le synode probablement ajoutée ces derniers jours)
Cette année encore vous êtes venus à Rome en pèlerinage sur la tombe des Très Saints Apôtres Pierre et Paul pour accomplir, comme pèlerins, un parcours extérieur, visible, de dévotion et d'hommage, qui demeure toutefois avant tout un parcours intérieur de foi, de recherche et d'approfondissement de votre rencontre avec le Dieu vivant.
Les temps que nous vivons sont difficiles mais nous ne devons pas nous décourager et céder au renoncement et au pessimisme. N'oublions pas que dans le contexte culturel présent il existe de nombreuses personnes qui, bien que ne reconnaissant pas le don de la foi, sont sincèrement à la recherche du sens véritable de la vie et que cette recherche est un authentique « préalable » à la foi parce qu'elle porte ces personnes sur la voie qui conduit au mystère de Dieu.
Ces chercheurs spirituels auront toutefois du mal à rencontrer le vrai Dieu et la vraie Église si nous ne sommes pas nous-mêmes des témoins crédibles de cette rencontre. Ce dont le monde a particulièrement besoin aujourd’hui, c'est du témoignage crédible des chrétiens capables d'ouvrir le cœur et l'esprit des hommes au désir de Dieu et de la vraie vie, celle qui ne passe pas.
La mission chrétienne ne consiste pas seulement à communiquer un message mais à aider les hommes à rencontrer le Christ pour faire l'expérience intime de Son amour et de Sa miséricorde. L'invitation à sortir de soi-même pour évangéliser est un petit résumé de l'être chrétien. Et votre pèlerinage à Rome est le signe concret que vous voulez sortir de vous-mêmes pour communiquer la joie d'avoir rencontré Dieu aux hommes qui ne le connaissent pas encore ou qui s'en sont détournés. Votre pèlerinage doit vous faire sentir comme une communauté de disciples missionnaires.
L'évangile parle d'une graine qui, une fois semée, croît même quand le semeur dort (Marc 4, 26-29). L'intimité de l'Église avec Jésus est une intimité itinérante et durant ce pèlerinage, l'Église est une communion missionnaire comme nous l'a rappelé le pape François.
Mais à ce point surgit une interrogation : que pouvons-nous donner aux autres que nous n'ayons pas au préalable expérimenté en nous ? Comment pouvons-nous aider les autres à rencontrer le Christ, le Dieu vivant, si nous ne l'avons pas nous-mêmes rencontré avant ? Si nous ne l'avons pas connu et si nous n'avons pas contemplé le mystère de Dieu dans notre vie ?
Où peut-on d'ailleurs vivre, contempler et intérioriser, de façon privilégiée et sûre, la rencontre avec le mystère divin ?
La grandeur de la liturgie consiste non pas à offrir un divertissement spirituel, aussi plaisant soit-il, mais à se laisser toucher par le mystère de Dieu qui se présente à nous puisque, par nos forces seules, nous ne réussirions pas à nous en approcher.
La célébration de la Sainte Messe dans le rite romain traditionnel met en évidence des éléments et des aspects indispensables pour nous faire percevoir la sacralité du Rite, la présence réelle du Christ, le caractère sacrificiel de la Messe qui est, précisément, le sacrifice du Christ. Tout ceci participe à la construction du corps du Christ qui est l'Église.
La liturgie ancienne n'est pas une relique du passé mais une réalité vivante de l'Église qui contribue à rendre actuel le patrimoine de sainteté et de prière que la Tradition nous transmet.
La célébration de la Sainte Messe selon la liturgie traditionnelle nous fait aussi mieux prendre conscience de ce que la raison d'être de la liturgie est l'adoration du mystère de Dieu, Père, Fils et Esprit Saint. La grandeur de la liturgie et sa force résident dans l'éducation des croyants à l'adoration : il n'y a que dans l'adoration que peut mûrir l'expérience profonde de la rencontre vécue avec le Dieu vivant. Dans l'acte d'adoration mûrit également la mission sociale de l'eucharistie qui, non seulement abat les distances entre Dieu et nous, mais entend aussi abattre les frontières qui nous séparent les uns des autres et qui empêchent la réconciliation fraternelle et la bonne entente entre les hommes.
Pendant votre pèlerinage romain, alors qu'est sur le point de s'ouvrir l'année jubilaire de la miséricorde, proclamez à voix haute la profession de notre foi catholique. Nous croyons avec une ferme certitude que le Seigneur Jésus a vaincu le mal et la mort. Forts de cette confiance assurée, nous nous confions à Lui : Christ présent au milieu de nous vainc la puissance du Malin et l'Église, en tant que communauté visible de sa miséricorde, demeure comme le signe de notre réconciliation définitive avec le Père.
Dans ce saint temple dédié à la Vierge protectrice, nous comprenons que le Seigneur a voulu demeurer dans le temple qu'est Marie et offrir ainsi au monde entier une maison et que cette maison est la foi, sur le modèle de Marie, la mère de tous les croyants. C'est la foi qui nous offre une vraie demeure dans ce monde et qui nous réunit dans l'Église où nous sommes tous frères et sœurs.
Demandons à la Très Sainte Vierge de regarder avec tendresse nos âmes et nos familles afin que, comme pèlerins, nous apprenions de ce pèlerinage à poursuivre notre chemin vers notre demeure définitive, vers la Cité éternelle, vers la joie de notre Patrie céleste, ainsi soit-il.