16 février 2017

[DICI] Des affiches contre le pape, un faux numéro de L’Osservatore Romano… Qui sont ceux qui critiquent François ?

SOURCE - DICI - 16 février 2017

Dans la nuit du 3 au 4 février 2017, environ 200 affiches non signées ont été placardées dans le centre-ville de Rome. On y voit le pape, mine renfrognée, au-dessus d’un texte qui l’interpelle en ces termes : « Tu as placé sous tutelle des Congrégations, tu as écarté des prêtres, tu as décapité l’Ordre de Malte et les Franciscains de l’Immaculée, tu as ignoré les cardinaux… Mais où est ta Miséricorde?» La municipalité de Rome a annoncé, le 5 février, avoir retiré les 200 affiches, avec une célérité inhabituelle dans la Ville éternelle. Une enquête a été ouverte pour tenter de retrouver, grâce aux caméras de surveillance, les auteurs du délit.
    
Sur ces affiches, la référence à l’Ordre de Malte renvoie à la récente éviction du Grand maître, Fra’ Matthew Festing qui a été conduit à « présenter sa démission » le 24 janvier, démission acceptée le lendemain par le pape, pour le « bien de l’Ordre et de l’Eglise ». Depuis deux mois les relations entre l’Ordre et le Saint-Siège sont tendues : le 6 décembre dernier, le Grand maître avait exigé la démission du Grand chancelier Albrecht von Boeselager. Les raisons exactes de la mise à l’écart de ce dernier restent pour l’heure floues. Toujours est-il que, le 4 février, François a nommé Mgr Giovanni Angelo Becciu, actuel substitut pour les affaires générales de la Secrétairerie d’Etat, comme délégué spécial du Saint-Siège auprès de l’Ordre de Malte. Jusqu’au terme de son mandat, c’est-à-dire jusqu’à la conclusion du prochain Chapitre extraordinaire qui élira un nouveau Grand maître, Mgr Becciu sera le « porte-parole exclusif » du pape pour tout ce qui concerne les relations entre le Siège apostolique et l’Ordre. Le pape François lui délègue tous les pouvoirs nécessaires pour décider des questions éventuelles qui devraient surgir concernant la mise en œuvre de son mandat. Le pape a ainsi retiré toute compétence au cardinal Raymond Burke, représentant du pape auprès de l’Ordre et normalement en charge des relations entre le souverain pontife et les chevaliers de Malte. 
    
Au moment où les affiches étaient placardées, début février 2017, des cardinaux ont reçu par courriel un faux numéro du quotidien du Vatican L’Osservatore Romano. Selon la presse italienne, le Vatican a ouvert une enquête pour découvrir les auteurs de ce faux.
    
La publication critique le pape François, notamment pour sa façon de ne pas prendre en considération les dubia, les “doutes” qui lui ont été adressés, le 19 septembre 2016, par les cardinaux Walter Brandmüller, président émérite du Comité pontifical des sciences historiques, Raymond L. Burke, patronus de l’Ordre de Malte, Carlo Caffarra, archevêque émérite de Bologne (Italie), et Joachim Meisner, archevêque émérite de Cologne (Allemagne) à propos de l’exhortation Amoris lætitia. Ces dubia demandent au Saint-Père une « clarification » d’Amoris lætitia, en particulier en ce qui concerne la possibilité pour les divorcés « remariés » de recevoir l’eucharistie. Le pape n’a pour l’instant pas donné de réponse à cette demande. (Voir DICI n°345 du 25/11/16 et DICI n°346 du 09/12/16)
    
« Il a répondu ! », titre ce faux Osservatore Romano, qui porte la date du 17 janvier 2017. « Puisse ton discours être oui oui, non non », affirme le texte, en référence au verset : « Que votre oui soit oui, que votre non soit non ; ce qu’on y ajoute vient du Malin » (Mt 5, 37). Selon l’auteur anonyme de cet article, François a répondu aux cinq questions qui lui étaient posées sur Amoris lætitia à la fois par « oui » et « non ». Ce qui serait l’expression du caractère « équivoque » de son magistère.
Qui sont ceux qui critiquent le pape François ?
Ces critiques du pape qui se multiplient au grand jour, incitent à s’interroger sur l’identité de leurs auteurs. C’est ainsi que le 26 janvier, lors des Journées Saint-François-de-Sales qui réunissent les journalistes catholiques à Annecy (France), Romilda Ferrauto, ancienne rédactrice en chef à Radio Vatican, a tenté de dresser le portrait de ceux qui n’aiment pas François. D’après l’agence suisse cath.ch qui rapporte ses propos le 27 janvier, la journaliste qui fut responsable de la rédaction francophone de Radio Vatican pendant 20 ans, récuse la simple opposition entre progressistes, du côté du pape, et conservateurs hostiles. La situation est, selon elle, plus complexe.
    
Sous l’angle de la communication, les critiques du pape François se classent en trois catégories : le premier groupe estime que le pape argentin n’est pas sincère et qu’il mène une opération de séduction bien orchestrée. Ils voient une contradiction entre la bonhomie affichée et sa personnalité profonde plutôt sévère et autoritaire, voire intransigeante. Ce groupe d’opposants se plaint du peu de considération de François pour le clergé et le personnel de la curie. La réforme avec ses changements de postes passe mal. Ces critiques s’étonnent aussi du changement de style entre l’archevêque de Buenos Aires et le pape à Rome.
    
La deuxième catégorie regroupe ceux qui pensent que le pape François est sincère et spontané, mais que son attitude crée la confusion parmi les croyants et sème le trouble. Ils jugent que le souverain pontife favorise l’image au détriment du fond, et que l’Eglise passe ainsi à côté de l’essentiel. Selon eux, la meilleure preuve serait que les églises ne sont pas plus remplies qu’avant.
    
Le troisième groupe réunit ceux qui n’aiment pas le pape François « et puis c’est tout ». En poussant un peu plus loin l’analyse, on comprend qu’ils opposent à la vision large de la fraternité du pape, la recherche d’une identité catholique plus forte et mieux affirmée. Ils se sentent lâchés par ce pape, alors qu’ils attendaient un soutien face à une société où ils sont en minorité. En ramenant des familles de réfugiés musulmans de sa visite à Lesbos, le pape François aurait affiché son mépris des chrétiens d’Orient persécutés.
    
(Sources : cath.ch/imedia/riposte catholique – DICI n°349 du 17/02/17)