SOURCE - Henri Tincq - Le Monde -        9 septembre 2006
Une poignée d'anciens prêtres français et de       séminaristes de la Fraternité traditionaliste Saint Pie X - créée par       Mgr Marcel Lefebvre, excommunié en 1988 par Jean Paul II pour avoir       ordonné illégalement quatre évêques à Ecône (Suisse) - ont accepté       de se rallier au Vatican. Ce dernier a fondé, vendredi 8 septembre, un       institut, Le Bon Pasteur, appelé à accueillir les transfuges de ce       courant. Son supérieur sera Philippe Laguérie, 53 ans, ancien curé de       choc de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, à Paris, et actuel curé de       l'église lefebvriste Saint-Eloi de Bordeaux.       Cette décision est un tournant dans le traitement par Benoît XVI de       la crise traditionaliste. Toujours courtois avec les disciples de Mgr       Lefebvre, le pape s'est efforcé de trouver un accord avec l'ensemble de       la Fraternité Saint Pie X : 460 prêtres, 178 séminaristes et 150 000       fidèles revendiqués dans cinquante pays. Il avait même reçu à Rome,       en août 2005, le supérieur de la fraternité, Mgr Bernard Fellay. Les       négociations étaient menées par le cardinal Castrillon-Hoyos, préfet       de la congrégation du clergé.
"Sans conditions"
Mais, depuis peu, la fraternité schismatique faisait à nouveau monter       les enchères. Confirmé à son poste en juillet, Mgr Fellay exigeait       comme préalable à toute réconciliation "la liberté entière et       sans conditions" pour l'ancienne messe en latin et le retrait du       décret d'excommunication des quatre évêques ordonnés par Mgr Lefebvre.       Le Vatican a donc changé de stratégie et repris celle des ralliements       partiels, qui avait obtenu quelque succès sous Jean Paul II, avec la       reconnaissance, en 2002, d'une communauté traditionaliste à Campos, au       Brésil.
Ce ralliement à Rome de Philippe Laguérie, prêtre au cheveu court et au verbe imprécateur, familier des occupations d'églises musclées, icône des catholiques traditionalistes du Front national, risque de faire exploser la Fraternité Saint Pie X, qui l'avait exclu en 2004. En mars, il parlait encore d'un accord avec le pape comme d'une "évidence", tant paraissait grande sa volonté d'en finir avec "le délire doctrinal des années 1960-2000". Parmi les autres prêtres ralliés à Rome, on compte des figures hautes en couleur comme Paul Aulagnier, ancien supérieur en France de la fraternité, ou Guillaume de Tanouarn. Demain, ce petit milieu d'intégristes, où les haines sont recuites, va régler ses comptes.
Mais les évêques de France risquent aussi de faire pâle figure devant ce qui apparaît comme une curieuse concession du Vatican. Si l'abbé Laguérie a obtenu du pape le droit de garder l'ancienne tradition liturgique, rien n'indique qu'il a approuvé l'esprit et les réformes du concile Vatican II (1962-1965), jugé diabolique par les siens. "Nous serons autorisés à des critiques positives sur des textes qui nous paraissent contestables ou flous", disait vendredi l'un de ses proches. On peine à imaginer une cohabitation au sein de l'Eglise avec des hommes comme l'abbé Laguérie, qui ont tant de fois manié l'insulte contre le cardinal Lustiger et de nombreux évêques.
Ce ralliement à Rome de Philippe Laguérie, prêtre au cheveu court et au verbe imprécateur, familier des occupations d'églises musclées, icône des catholiques traditionalistes du Front national, risque de faire exploser la Fraternité Saint Pie X, qui l'avait exclu en 2004. En mars, il parlait encore d'un accord avec le pape comme d'une "évidence", tant paraissait grande sa volonté d'en finir avec "le délire doctrinal des années 1960-2000". Parmi les autres prêtres ralliés à Rome, on compte des figures hautes en couleur comme Paul Aulagnier, ancien supérieur en France de la fraternité, ou Guillaume de Tanouarn. Demain, ce petit milieu d'intégristes, où les haines sont recuites, va régler ses comptes.
Mais les évêques de France risquent aussi de faire pâle figure devant ce qui apparaît comme une curieuse concession du Vatican. Si l'abbé Laguérie a obtenu du pape le droit de garder l'ancienne tradition liturgique, rien n'indique qu'il a approuvé l'esprit et les réformes du concile Vatican II (1962-1965), jugé diabolique par les siens. "Nous serons autorisés à des critiques positives sur des textes qui nous paraissent contestables ou flous", disait vendredi l'un de ses proches. On peine à imaginer une cohabitation au sein de l'Eglise avec des hommes comme l'abbé Laguérie, qui ont tant de fois manié l'insulte contre le cardinal Lustiger et de nombreux évêques.
Henri Tincq
Article paru dans l'édition du 10.09.06   
