Arnaldo Vidigal Xavier da Silveira est né à Sao Paulo, au Brésil, en 1929. Cet universitaire et théologien s’est particulièrement penché sur le Magistère de l’Église et sur le problème de l’Infaillibilité. Ancien collaborateur de feu Monseigneur Antonio de Castro Mayer, évêque de Campos au Brésil, on lui doit un ouvrage qui a fait à son époque quelque bruit : La Nouvelle Messe de Paul VI : qu’en penser ? (Éditions de Chiré, 1975). Il fut membre fondateur de la Société brésilienne de Défense de la Tradition, de la Famille et de la Propriété (T.F.P.). Cet auteur a fait paraître sur son blogue Bonum Certamen, le 23 décembre dernier, une étude intitulée « La surprenante condamnation des traditionalistes par le Préfet de la Congrégation de la doctrine de la Foi [Mgr Gehrard Müller] ». Il nous l’a transmis le 4 janvier en nous suggérant de le publier, ce que nous faisons très volontiers compte tenu de l’intérêt de la problématique qu’il y développe. Voici donc sa contribution sous forme de “Tribune Libre”...
Le problème ne consiste pas à savoir si une telle assistance absolue et générale 
[omnimoda] de l’Esprit Saint serait, en principe, possible. Il est clair 
qu’il le serait. – Néanmoins, Notre Seigneur n’a pas voulu, en réalité, 
doter Saint Pierre et ses successeurs, ou le Collège des évêques unis au 
Pape, bref l’Église, d’une assistance aussi absolue. Les chemins de Dieu ne 
sont pas toujours les nôtres. La barque de Pierre doit traverser des tempêtes. 
En principe, rien ne s’oppose, en particulier en temps de crise, à ce qu’il 
y ait des erreurs et même des hérésies dans des décisions papales et 
conciliaires non garanties par l’infaillibilité.
● Le doux Christ sur la Terre
1] Je ne suis pas sédévacantiste. 
Je ne l’ai jamais été, même si quelques commentateurs distraits ont prétendu 
voir des traces de sédévacantisme dans mon étude sur la possibilité théologique 
d’un pape hérétique, qui fait partie de mon livre La Nouvelle Messe de 
Paul VI, Qu’en penser? (Diffusion de la Pensée Française, Chiré-en-Montreuil, 
France, 1975). Basé sur la bonne théologie dogmatique traditionnelle, je ne 
considère pas, concernant les pontificats de ces dernières décennies, qu’il 
ait été théologiquement possible, à un moment ou un autre, de déclarer le 
siège de Pierre vacant (cf. Paul Laymann SJ, +1635, Th Mor., Venise, 
1700, pp. 145-146 ; et Pietro Ballerini, De Pot. Eccl., Rome, 1850, 
pp. 104-105). Si la Divine Providence m’en donne la force, je publierai prochainement 
une étude sur les erreurs théologiques des théories sédévacantistes 
courantes.
2] Pour tous fidèles attachés à leur foi catholique, le Pape est le 
« doux Christ sur la Terre », il est le pilier et fondement de la vérité. 
Des grands saints, des docteurs et des Papes admettent néanmoins la possibilité 
pour le Pape de tomber dans l’erreur, et même en hérésie. Et cela 
n’exclut pas l’hypothèse théologique qu’une telle chute se produise dans 
des documents officiels du Pape ou de Conciles avec le Pape (voir La Nouvelle 
Messe …, Part II, chap. IX et X, et mes travaux antérieurs cités dans 
cet article).
● Les paroles de Mgr Müller
3] Le 29 Novembre dernier, L’Osservatore Romano a donné le jour à 
un texte de Mgr Gerhard Ludwig Müller, préfet de la Congrégation pour la 
doctrine de la foi, l’ancien Saint-Office, intitulé : « Une 
image de l’Église de Jésus-Christ qui embrasse le monde entier ». 
En commentant le Discours à la Curie Romaine du 22 décembre 2005, dans lequel 
Benoît XVI avait déclaré que Vatican II devait faire l’objet d’une 
« herméneutique de la réforme dans la continuité » par 
opposition à une « herméneutique de la discontinuité et de la 
rupture », Mgr Müller écrit que l’interprétation de la réforme 
dans la continuité « est la seule possible selon les principes de la théologie 
catholique », et poursuit: « En dehors de cette unique interprétation 
orthodoxe, il existe malheureusement une interprétation hérétique, à savoir 
l’herméneutique de la rupture, à la fois sur le versant progressiste et sur 
le versant traditionaliste. Ces deux versants sont unis par le refus du 
Concile : les progressistes veulent le laisser derrière eux, comme s’il 
ne s’agissait que d’une saison qui passe pour aborder à une autre Église; 
les traditionalistes ne veulent pas y arriver, comme si c’était l’hiver de 
la [Église] Catholique.»
4] Je ne veux pas approfondir ici certains points de cette déclaration, 
comme la question, déjà si commentée et développée ces derniers temps, de 
« l’herméneutique de la réforme dans la continuité » et 
de « l’herméneutique de la discontinuité et de la rupture ». 
Je ne veux pas non plus analyser la phrase dans laquelle Son Excellence déclare 
que les progressistes et les traditionalistes « sont unis par le refus 
du Concile ». Je ne dirai rien non plus sur le titre donné au texte 
de Mgr Müller, où on lit l’expression, ambigüe et suspecte dans le contexte 
d’aujourd’hui, « l’Église de Jésus-Christ qui embrasse le monde 
entier ». Et je ne discourrai pas davantage sur le fait 
historique qu’après tant de décennies une condamnation du progressisme 
intervienne finalement. Condamnation qui serait de bon augure et présage de 
jours meilleurs si elle se revêtait de la force canonique ou si, au moins du 
point de vue magistériel, elle commençait à façonner vraiment la vie 
catholique, que ce soit dans l’enseignement des séminaires ou comme critère 
des promotions ecclésiastiques. Le progressisme aurait alors été radicalement 
proscrit comme hérétique par le Préfet de la Congrégation pour la doctrine 
de la foi.
5] À ce stade, je veux juste faire quelques commentaires sur le passage où 
Mgr Müller dit que les traditionalistes donnent au Vatican II une « interprétation 
hérétique ». Je sais bien qu’il ne s’agit point d’un décret 
de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Je constate aussi qu’il ne précise 
pas quels sont les courants dits « traditionalistes » qu’il 
condamne, tout en exprimant qu’il vise ceux qui n’acceptent pas entièrement 
et inconditionnellement Vatican II. Je conviens, enfin, que l’orientation 
adoptée par Mgr Müller face aux traditionalistes et aux progressistes n’est 
pas celle qui domine dans de nombreux cercles du Vatican, ni surtout celle de 
Benoît XVI. Rien de cela ne retire cependant à ses paroles leur énorme 
importance.
● La gravité extrême de cette condamnation
6] Ne minimisons pas, en fait, la force de cette condamnation. La logique 
s’impose : celui qui interprète de façon hérétique un Concile œcuménique 
est un hérétique. On ne peut prétendre que cette condamnation serait sans 
portée au motif qu’elle ne serait pas une condamnation formelle. Il est grave 
que le Préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi ait affirmé ce 
qu’il a écrit. Il est grave que, pour essayer un premier anathème contre les 
traditionalistes, il se soit abrité derrière sa condition de doctor 
privatus, parce que si le mal a une telle dimension – celui d’interpréter 
un Concile œcuménique dans un  sens hérétique – l’Église ne 
devait-elle pas s’exprimer officiellement ?  Ne serait-ce pas cela un 
devoir du custos fidei vis-à-vis des fidèles ? Il est de plus à 
craindre que ces manières de penser et d’agir viennent désormais à guider 
les attitudes de la Congrégation pour la doctrine de la foi.
7] Comme saint Thomas d’Aquin l’enseigne, « l’hérésie 
s’oppose essentiellement  à la foi » (S.Th., II-II, 39, 1, ad 
3), et hérétiques sont « ceux qui professent la foi chrétienne mais en 
corrompent les dogmes » (S.Th., II-II, 11, 1). « De soi, il est 
certain qu’entre toutes les vertus la première est la foi » (S.Th., 
II-II, q. 4, a.7). « Il est beaucoup plus grave de corrompre la foi qui 
assure la vie de l’âme, que de falsifier la monnaie qui sert à la vie 
temporelle » (S.Th., II-II, Q.11, a. 3).
8] Sur la portée de la condamnation. – Le monde moderne a perdu la notion 
de ce qu’est la foi, comme il a perdu celle de la gravité de l’hérésie. 
L’intégrité de la foi est le point de départ de la vie catholique. L’hérétique 
formel n’a pas la vertu théologale de la foi, raison pour laquelle il est 
exclu de l’Eglise. Mgr Müller a proféré sa condamnation dans des termes génériques 
et sommaires. Compte tenu de l’importance de la question, les personnes 
concernées par sa démarche ont le droit de demander que soient explicitées, 
au moins in sede theoretica, la portée et les conséquences théologiques, 
canoniques et pratiques de son anathème, s’il est recevable.
● La faute théologique fondamentale de Mgr Müller
9] Texte de Mgr Müller sur le Magistère. – Dans la déclaration citée, 
Mgr Müller affirme comme un principe de la théologie catholique « l’ensemble 
indissoluble de la Sainte Écriture, la Tradition complète et intégrale et le 
Magistère, dont la plus haute expression est le Concile présidé par le 
successeur de Pierre, comme chef de l’Église visible ».
10] Le présupposé de la condamnation de Mgr Müller aux traditionalistes 
est que, selon lui, il ne peut y avoir d’erreur ou d’hérésie dans des 
documents du Magistère, qu’ils émanent du Pape ou d’un concile, y compris 
ceux qui ne remplissent pas les conditions requises pour jouir de 
l’infaillibilité. En effet, en proclamant le caractère indissoluble de 
l’union entre l’Écriture, la Tradition et le Magistère, son texte indique 
qu’il conçoit ce dernier comme étant garanti contre toute et n’importe 
quelle erreur ou hérésie. En outre, en ne parlant pas simplement de Tradition, 
mais en la qualifiant de « complète et intégrale », Son 
Excellence sous-entend que la Tradition comprend aussi les enseignements 
conciliaires non couverts par le charisme de l’infaillibilité, y compris les 
« nouveautés d’ordre doctrinal » de Vatican II (voir point 
13, ci-dessous), qui auraient ainsi force de dogme, ne pouvant être niées ou 
mises en doute que par des hérétiques.
● Le Concile Vatican II et l’infaillibilité de l’Église
11] Magistère extraordinaire ? – Selon Vatican I, le Pape est infaillible 
quand, en matière révélée de foi ou de morale et en s’adressant à l’Église 
universelle, il définit solennellement que telle vérité doit être crue par 
les fidèles. Selon la doctrine sédimentée par les docteurs, ces conditions de 
l’infaillibilité papale s’appliquent, mutatis mutandis, aux conciles 
œcuméniques dont les définitions infaillibles s’imposent aux fidèles avec 
l’obligation stricte de professer les doctrines qui y sont proposées. Or, 
Paul VI a déclaré à plusieurs reprises que dans le Concile Vatican II il 
n’a été promulgué aucun nouveau dogme du Magistère extraordinaire. C’est 
ce que les théologiens de bonne doctrine ont aussi affirmé à satiété. En 
conséquence, le postulat de Mgr Müller selon lequel il ne peut y avoir de déviation 
doctrinale dans les documents du Concile Vatican II est troublant pour de 
simples fidèles, et inacceptable pour un penseur catholique. Quel est, à cet 
égard, le fond de la pensée du Préfet de la Congrégation pour la doctrine de 
la foi?
12] Magistère infaillible ordinaire ? – Selon Vatican I, le « magistère 
ordinaire et universel » est aussi infaillible. Par ce biais, dans son 
enseignement quotidien, l’Église prêche aux fidèles une vérité comme 
devant être crue, et cela partout dans le monde et avec la continuité dans le 
temps ; de telle sorte que, pour les fidèles, il devient évident que 
cette vérité a été révélée et doit être crue sous peine d’abandon de 
la foi. Le concept d’ « universel » dans ce contexte n’est pas 
toujours bien interprété, parce que certains affirment qu’il indique 
seulement l’universalité dans l’espace, c’est-à-dire, partout dans le 
monde. Selon ce point de vue, les enseignements doctrinaux de Vatican II 
seraient infaillibles, car ils ont été solennellement approuvés par le Pape, 
avec l’unanimité morale des évêques du monde entier. Des actes magistériels 
isolés du Pape et du Concile, tels que ceux de Vatican II, ne peuvent pourtant 
pas définir des dogmes du magistère ordinaire, parce qu’il leur manque la 
continuité dans le temps et la force obligatoire qui en découle, nécessaires 
pour lier entièrement les consciences des fidèles.
13] Les « nouveautés d’ordre doctrinal » de Vatican II. – Le 
2 décembre 2011, Mgr Fernando Ocáriz, vicaire général de l’Opus Dei et 
professeur de théologie, a publié dans L’Osservatore Romano un 
article intitulé: À propos de l’adhésion au Concile Vatican II, où 
il écrivait: « Au Concile Vatican II, il y eut diverses nouveautés 
d’ordre doctrinal (…) Certaines d’entre elles ont été et sont encore 
l’objet de controverses en ce qui concerne leur continuité avec le Magistère 
précédent, c’est-à-dire leur compatibilité avec la Tradition ». 
Mgr Ocáriz reconnaît ensuite les «difficultés qui peuvent apparaître 
pour comprendre la continuité de certains enseignements conciliaires avec la 
Tradition ». À leurs propos, « des espaces légitimes de 
liberté théologique demeurent, pour expliquer, d’une façon ou d’une 
autre, la non-contradiction avec la Tradition de certaines formulations présentes 
dans les textes conciliaires et, par conséquent, pour expliquer la 
signification même de certaines expressions contenues dans ces passages ». 
Nous signalons la différence de ton entre ce texte et la condamnation lancée 
par Mgr Müller, et le fait que Mgr Ocáriz affirme, plus loin, qu’« une 
caractéristique essentielle du Magistère est sa continuité et son homogénéité 
dans le temps ». Le 28 décembre de la même année, j’ai publié un 
article sur mon site web intitulé Un lapsus théologique grave de Mgr Ocáriz, 
dans lequel j’ai soutenu, comme dans mes précédentes études, que « Jésus 
aurait pu, évidemment, avoir donné à saint Pierre et à ses successeurs le 
charisme de l’infaillibilité absolue. [...] Mais le problème ne consiste pas 
à savoir si une telle assistance absolue et générale de l’Esprit Saint 
serait, en principe, possible. Il est clair qu’il le serait. – Notre 
Seigneur n’a néanmoins pas voulu, en réalité, doter saint Pierre et ses 
successeurs, ou le Collège des évêques unis au Pape, bref l’Église, 
d’une assistance aussi absolue. Les chemins de Dieu ne sont pas toujours les nôtres. 
La barque de Pierre doit traverser des tempêtes. En deux mots: la théologie 
traditionnelle affirme qu’il se dégage de la Révélation que l’assistance 
de l’Esprit Saint n’a pas été promise, et n’a donc pas été assurée, 
d’une façon aussi étendue, couvrant tous les cas et toutes les 
circonstances. L’assistance garantie par Notre Seigneur couvre sans 
restriction les définitions extraordinaires des papes et des conciles œcuméniques. 
Mais les imposants ouvrages théologiques du passé, surtout ceux de l’âge 
d’argent de la Scholastique, affirment la possibilité qu’il y ait des 
erreurs et même des hérésies dans des décisions papales et conciliaires non 
garantis par l’infaillibilité ». C’est ce que je réaffirme 
maintenant.
● Trois demandes respectueuses à Mgr Müller
14] Profession de foi catholique. – Compte tenu du texte ci-dessus du Préfet 
de la Congrégation pour la doctrine de la foi, je lui demande d’accueillir 
ici ma profession de foi en tout ce qui est enseigné infailliblement par la 
Sainte Église, tant dans les dogmes du Magistère extraordinaire, papal ou 
conciliaire, que dans les dogmes du Magistère ordinaire et universel. 
J’affirme mon assentiment religieux aux autres vérités de la doctrine 
catholique, chacune avec la qualification théologique que les docteurs 
traditionnels leur attribuent. Et je rejette comme théologiquement incongrue et 
factieuse l’accusation d’être tombé en hérésie par attachement à la 
Tradition.
15] Le sens et la portée de la condamnation. – Compte tenu du besoin de précision 
dans un acte théologique de poids comme l’est la condamnation de tout un 
courant de pensée de grande expression dans le monde catholique, même si elle 
n’a été proférée que d’un siège uniquement doctrinal, je demande à Mgr 
Müller de préciser la portée théorique et pratique de son anathème, au vu 
des observations du point 8 ci-dessus. En faisant cette demande, j’ai également 
en vue le salut des âmes simples, celles qui croient avec une foi inébranlable 
aux dogmes de la Transsubstantiation, de la Virginité de Marie avant, pendant 
et après l’Enfantement, et à tous les autres dogmes de la foi: des âmes qui 
n’ont pas accès à des distinctions théologiques subtiles et dont la foi 
peut être ébranlée par la déclaration du Préfet de l’ancien Saint-Office 
selon laquelle les traditionalistes de tous poils sont des hérétiques.
16] La possibilité d’erreur dans des documents du Magistère. – En tant 
que fidèle catholique qui connaît l’autorité magistérielle des dicastères 
du Vatican et en tant qu’auteur d’écrits ayant un nombre pondérable de 
lecteurs dont je suis, qu’on le veuille on non, responsable en cela devant 
Dieu, je me sens dans le droit de demander filialement au Préfet de la Congrégation 
pour la doctrine de la foi qu’il définisse de façon formelle, claire et précise 
si la thèse que j’ai défendu dans mes ouvrages cités plus haut, et que je 
soutiens encore maintenant, est vraie ou fausse ; c’est-à-dire la thèse 
qui soutient la possibilité théologique de l’existence d’erreurs et même 
d’hérésies dans des documents conciliaires ou papaux qui ne remplissent pas 
les conditions requises pour jouir de l’infaillibilité.
17] À la veille de Noël et invoquant le Divin Enfant, Sa Sainte Mère et 
saint Joseph, patron de l’Église universelle, je rends publiques ces considérations 
en légitime défense et cum moderamine inculpatae tutelae, puisque 
publique a été l’agression.
