SOURCE - summorum-pontificum.fr - 2 mars 2010
On a beaucoup parlé récemment de l’entretien accordé par Mgr Batut, évêque auxiliaire de Lyon, à l’hebdomadaire Famille Chrétienne. Il y présentait l’ouverture d’une maison de formation, la maison Sainte-Blandine, qui accueillera à la rentrée prochaine des jeunes gens désireux de devenir prêtre diocésain tout en célébrant la forme traditionnelle du rite romain. J’ai déjà dit voici plusieurs mois sur ce blog que cette nouvelle voie de formation avait mal commencé puisqu’elle devait démarrer à la rentrée 2009 et que faute de candidats elle fut reportée d’un an. Ayant pris acte d’un manque de communication, les promoteurs de cette nouvelle initiative, non seulement le cardinal Barbarin et Mgr Batut, mais aussi les anciens prêtres de la Fraternité Saint-Pierre fondateurs de l’association Totus tuus, redoublent d’efforts.
Faut-il s’en réjouir ?
Oui, à mon avis, il faut se réjouir de cette nouvelle voie offerte à des jeunes gens pour devenir prêtre et célébrer selon le rite antique. Elle installe, en effet, un peu plus la messe traditionnelle au cœur de la vie de nos futurs prêtres, des habitudes diocésaines et elle donnera des habitus liturgiques nécessaires quand l’Église commencera réellement à sortir de la crise qui nous touche encore.
Oui, il faut se réjouir car il est évident que tous ces jeunes gens n’ont pas forcément une vocation pour une vie au sein d’un institut que ce soit la Fraternité Saint-Pierre, l'Institut du Bon-Pasteur ou l'Institut du Christ Roi Souverain Prêtre, ce dernier ayant d’ailleurs une spiritualité bien marquée.
Oui, il faut se réjouir mais sans être dupe des intentions qui se nichent derrière cette nouvelle offre. Car il ne s’agit pas seulement de répondre à une demande de vie diocésaine tout en vivant de la liturgie traditionnelle. Il s’agit d’abord d’une stratégie de débordement des communautés Ecclesia Dei, et éventuellement demain, de la Fraternité Saint-Pie X, afin que les demandes de messes traditionnelles ne soient plus confiées à ces instituts.
Plus largement encore, il s’agit d’une stratégie de récupération des vocations qui se seraient dispersées sinon dans ces fameux instituts, faisant baisser encore davantage le nombre de prêtres diocésains, le véritable révélateur de (l'échec de) la pastorale de nos évêques.
C’est donc trois intentions qui guident vraiment cette proposition :
1°) répondre au désir légitime de jeunes gens de célébrer habituellement (et non toujours) selon la forme extraordinaire ;
2°) déborder les instituts Ecclesia Dei en les rendant inutiles ;
3°) renforcer le recrutement diocésain puisqu’il se confirme que la majorité des vocations vient des milieux proche du courant traditionaliste.
A sa manière, l’opération de communication de Mgr Batut le confirme. Ne déclare-t-il pas à Famille Chrétienne :
« Tout ce qui est reconnu par l’Eglise est légitime, donc la question ne se pose pas. Mais aujourd’hui, un jeune qui pense être appelé au sacerdoce et qui souhaite célébrer un jour la messe sous les deux formes est obligé de choisir entre une formation Ecclesia Dei, où habituellement est pratiquée la seule forme extraordinaire, et une formation classique, où habituellement est pratiquée la seule forme ordinaire. Avec l’année Sainte-Blandine s’ouvre une troisième voie, qui permet de discerner une vocation diocésaine en mettant la question liturgique à sa vraie place. Un certain nombre de prêtres ont quitté telle ou telle communauté Ecclesia Dei pour rejoindre les diocèses, parce qu’ils avaient découvert, une fois devenus prêtres, que la liturgie ne justifiait pas l’appartenance à une fraternité de prêtres particulière : c’étaient en réalité des hommes qui avaient tout simplement une vocation diocésaine, mais que les controverses sur la liturgie avaient troublés au point de leur faire penser qu’ils ne pourraient vivre leur spécificité qu’en renonçant à être des diocésains comme les autres. Depuis le Motu proprio de Benoît XVI, les choses peuvent se faire beaucoup plus simplement, en se mettant directement à la disposition de son évêque. J’en suis heureux, car j’ai toujours pensé que ce sont les prêtres diocésains qui réévangéliseront notre pays, et qu’être prêtre diocésain est la plus belle des vocations. »
Ancien curé de Saint-Eugène, Mgr Batut sait la dynamique qu’installe la liturgie traditionnelle. Il sait aussi que son ancien vicaire lui enverra des vocations, ce qui se dessine déjà pour la rentrée prochaine. À terme, il n’est pourtant pas dit que cette opération de débordement ne soit elle-même débordée, un jour, quand les jeunes prêtres, nouvellement ordonnés, enflammés par la mystique diocésaine, s’interrogeront face aux distorsions existantes entre les pastorales diocésaines et leur idéal du sacerdoce et de la vie liturgique.
Comme nombre des solutions proposées depuis des années, l’offre de Mgr Batut repose en partie sur l’ignorance d’un facteur décisif. Il semble que l’on oublie tout simplement que l’Église n’est pas sortie de la terrible crise qui la traverse et que tant que celle-ci n’est pas traitée à sa racine par les autorités il est peu probable que les choses se fassent aussi tranquillement que le théologien Batut le pense. Il ne s’agit pas simplement d’écrire ici un article dans la revue Communio. Il s’agit de régler une crise à côté de laquelle la crise moderniste du début du XXe siècle n’est qu’un rhume de foin comme disait Maritain.
On a beaucoup parlé récemment de l’entretien accordé par Mgr Batut, évêque auxiliaire de Lyon, à l’hebdomadaire Famille Chrétienne. Il y présentait l’ouverture d’une maison de formation, la maison Sainte-Blandine, qui accueillera à la rentrée prochaine des jeunes gens désireux de devenir prêtre diocésain tout en célébrant la forme traditionnelle du rite romain. J’ai déjà dit voici plusieurs mois sur ce blog que cette nouvelle voie de formation avait mal commencé puisqu’elle devait démarrer à la rentrée 2009 et que faute de candidats elle fut reportée d’un an. Ayant pris acte d’un manque de communication, les promoteurs de cette nouvelle initiative, non seulement le cardinal Barbarin et Mgr Batut, mais aussi les anciens prêtres de la Fraternité Saint-Pierre fondateurs de l’association Totus tuus, redoublent d’efforts.
Faut-il s’en réjouir ?
Oui, à mon avis, il faut se réjouir de cette nouvelle voie offerte à des jeunes gens pour devenir prêtre et célébrer selon le rite antique. Elle installe, en effet, un peu plus la messe traditionnelle au cœur de la vie de nos futurs prêtres, des habitudes diocésaines et elle donnera des habitus liturgiques nécessaires quand l’Église commencera réellement à sortir de la crise qui nous touche encore.
Oui, il faut se réjouir car il est évident que tous ces jeunes gens n’ont pas forcément une vocation pour une vie au sein d’un institut que ce soit la Fraternité Saint-Pierre, l'Institut du Bon-Pasteur ou l'Institut du Christ Roi Souverain Prêtre, ce dernier ayant d’ailleurs une spiritualité bien marquée.
Oui, il faut se réjouir mais sans être dupe des intentions qui se nichent derrière cette nouvelle offre. Car il ne s’agit pas seulement de répondre à une demande de vie diocésaine tout en vivant de la liturgie traditionnelle. Il s’agit d’abord d’une stratégie de débordement des communautés Ecclesia Dei, et éventuellement demain, de la Fraternité Saint-Pie X, afin que les demandes de messes traditionnelles ne soient plus confiées à ces instituts.
Plus largement encore, il s’agit d’une stratégie de récupération des vocations qui se seraient dispersées sinon dans ces fameux instituts, faisant baisser encore davantage le nombre de prêtres diocésains, le véritable révélateur de (l'échec de) la pastorale de nos évêques.
C’est donc trois intentions qui guident vraiment cette proposition :
1°) répondre au désir légitime de jeunes gens de célébrer habituellement (et non toujours) selon la forme extraordinaire ;
2°) déborder les instituts Ecclesia Dei en les rendant inutiles ;
3°) renforcer le recrutement diocésain puisqu’il se confirme que la majorité des vocations vient des milieux proche du courant traditionaliste.
A sa manière, l’opération de communication de Mgr Batut le confirme. Ne déclare-t-il pas à Famille Chrétienne :
« Tout ce qui est reconnu par l’Eglise est légitime, donc la question ne se pose pas. Mais aujourd’hui, un jeune qui pense être appelé au sacerdoce et qui souhaite célébrer un jour la messe sous les deux formes est obligé de choisir entre une formation Ecclesia Dei, où habituellement est pratiquée la seule forme extraordinaire, et une formation classique, où habituellement est pratiquée la seule forme ordinaire. Avec l’année Sainte-Blandine s’ouvre une troisième voie, qui permet de discerner une vocation diocésaine en mettant la question liturgique à sa vraie place. Un certain nombre de prêtres ont quitté telle ou telle communauté Ecclesia Dei pour rejoindre les diocèses, parce qu’ils avaient découvert, une fois devenus prêtres, que la liturgie ne justifiait pas l’appartenance à une fraternité de prêtres particulière : c’étaient en réalité des hommes qui avaient tout simplement une vocation diocésaine, mais que les controverses sur la liturgie avaient troublés au point de leur faire penser qu’ils ne pourraient vivre leur spécificité qu’en renonçant à être des diocésains comme les autres. Depuis le Motu proprio de Benoît XVI, les choses peuvent se faire beaucoup plus simplement, en se mettant directement à la disposition de son évêque. J’en suis heureux, car j’ai toujours pensé que ce sont les prêtres diocésains qui réévangéliseront notre pays, et qu’être prêtre diocésain est la plus belle des vocations. »
Ancien curé de Saint-Eugène, Mgr Batut sait la dynamique qu’installe la liturgie traditionnelle. Il sait aussi que son ancien vicaire lui enverra des vocations, ce qui se dessine déjà pour la rentrée prochaine. À terme, il n’est pourtant pas dit que cette opération de débordement ne soit elle-même débordée, un jour, quand les jeunes prêtres, nouvellement ordonnés, enflammés par la mystique diocésaine, s’interrogeront face aux distorsions existantes entre les pastorales diocésaines et leur idéal du sacerdoce et de la vie liturgique.
Comme nombre des solutions proposées depuis des années, l’offre de Mgr Batut repose en partie sur l’ignorance d’un facteur décisif. Il semble que l’on oublie tout simplement que l’Église n’est pas sortie de la terrible crise qui la traverse et que tant que celle-ci n’est pas traitée à sa racine par les autorités il est peu probable que les choses se fassent aussi tranquillement que le théologien Batut le pense. Il ne s’agit pas simplement d’écrire ici un article dans la revue Communio. Il s’agit de régler une crise à côté de laquelle la crise moderniste du début du XXe siècle n’est qu’un rhume de foin comme disait Maritain.