6 février 2009






Affaire Williamson : les mondains se trompent de cible
6 février 2009 - Yves Meaudre - libertepolitique.com
De nombreux amis se sont sentis obligés de signer “L’Appel des intellectuels catholiques” de La Vie, contre la levée de l’excommunication de Mgr Williamson. Ils ont voulu, pour d’honnêtes raisons ou d’opportunité, rester solidaires des gens « du monde ».
Pour être admis dans ce cercle qui donnent le « la » à la conscience collective, il faut donner des gages. Même certains prêtres du clergé parisien ont cédé à la tentation malgré la tranquille et courageuse position de leur archevêque commentant l’événement. Donner des gages est une tentation constante mais qui peut être glissante. Je suis certain que Judas a dû, par seuil successif, passer des reproches affectueux au Seigneur jusqu’à la consommation de la trahison finale.

J’avais un ami, ancien religieux qui me fascinait pour sa rapidité intellectuelle. Il était courageux et ses positions catholiques avaient un relief et une sûreté intellectuelle qui dominait. Et puis… le monde l’a pris en main, l’a aspiré. De concession intellectuelle en compromis mentaux, il a voulu se démarquer de l’enseignement de l’Église. Puis sa vie personnelle a disjoncté ; les médias le citent aujourd’hui comme le spécialiste de référence des religions. C’est un homme ironique, désabusé et amer, mais il est membre du club germanopratin. Ce qu’il voulait.

Je pense que la place du chrétien, c’est d’être un signe de contradiction. C’est la Croix — ce que nous fuyons tous, moi le premier. Nous sommes en discordance avec le monde voire en affrontement « à mort ». Celui-ci est de plus en plus mortifère et de plus en plus violent.

80.000 brebis perdues

Il faut que nous soyons comme « un carré » autour de notre merveilleux et si doux pape, cadeau du ciel. Que veut-il, de tout son cœur de Père aimant et soucieux de Paix ? Éviter le drame d’un schisme, car aucun schisme n’a été résorbé depuis le début de l’Église ! Le dernier est celui de la Petite Église ou des dissidents. Schisme qui perdure alors que les raisons qui l’ont créée n’existent plus !

Avec la Fraternité sacerdotale St Pie X, en France, c’est 80.000 personnes qui sont en cause. Notre doux et si intelligent pape est un trésor pour l’Église. Il veut créer les conditions nécessaires pour permettre à ces hommes et ces femmes blessées, scandalisées parfois par l’attitude de toute une partie de l’Église des années soixante-dix, enfermées dans des schémas intellectuels et psychologiques de « parfaits », de se sortir de leur prison intellectuelle.

Certains veulent en sortir, c’est une chance, une opportunité qu’il ne faut pas laisser passer. Il faut créer les conditions de cœur et de confiance pour discuter. Et puis l’Église n’est pas le lieu des purs mais des prostituées, des receleurs et des païens… au cœur honnête. Le Christ ne prend pas la température de leur sainteté avant de leur parler. Il ouvre ses bras, condition nécessaire à la liberté de l’homme, surtout lorsque celui-ci veut exprimer ses souffrances et son désir d’en sortir. Celui qui souffre s’exprime toujours maladroitement pour ceux qui vont bien !

Deux intégrismes

Il existe deux intégrismes qui se nourrissent l’un l’autre, c’est le principe de toute dialectique :
-Pour exister il faut des ennemis à dénoncer. « Le monde » des médias, les penseurs germanopratins ont les leurs. Ils sont répertoriés, rangés dans des boîtes d’où on les sort lorsqu’il faut faire un exemple. L’enregistrement deux mois auparavant de la calamiteuse déclaration de Mgr Williamson obéit à cette règle, c’était une munition « à l’occasion ». L’occasion s’est présentée. Les censeurs sifflent ceux qui veulent obtenir des indulgences de leur part. Ils les mettent en rang derrière eux et plus ceux-ci seront proches de l’Église, plus ils donneront de crédibilité à leur procès en inquisition.
-En face les « crétins », les « bornés », des intégristes qui, en fait, cultivent leurs positions cathares à Montségur !

L’un et l’autre parti se nourrissent de la violence, des calomnies, des excommunications de l’autre. Et lorsque le temps se calme, il y en toujours quelqu’un pour lancer une provocation afin d’alimenter et de légitimer qui, son autorité morale sur le monde, qui, le cri de sa persécution pour être dans le vrai.

On n’en sort pas si on se laisse piéger par leurs logiques infernales. Ils veulent la guerre, de toutes leurs forces.

Sortir par le haut

Il faut faire comme le pape, sortir des condamnations par le haut, ouvrir son cœur pour amorcer un vrai dialogue avec ceux qui, blessés et à vif, seraient néanmoins de bonne volonté.

Se sentir obligés de dire vingt fois que les propos de Mgr Williamson sont absurdes, insanes, monstrueux et terrifiants, révèle qu’on ne doit pas bien se sentir à l’aise vis-à-vis de la Shoah. Ce n’est pas parce qu’on soutiendra vingt fois la même chose qu’elle sera plus vraie que la première fois. L’Église a parlé définitivement sur le génocide juif. Le non sens historique de l’évêque est tellement stupide qu’en faire les manchettes de la presse trahit un sentiment de culpabilité à l’égard de l’antisémitisme. Ne pas jurer le contraire quinze fois par jour serait soupçonnable de sympathie pour le négationnisme ! Où va-t-on ? Le mieux est l’ennemi du bien ! Faut-il réciter des mantras pour se persuader qu’on n’est pas soupçonnable d’antisémitisme ?

Ce qui est plus grave, c’est que ceux qui mènent la danse en entraînant derrière eux les intellectuels chrétiens tombés en bourgeoisie (clercs ou penseurs) confondent des affaires sans rapport : les délires d’un évêque anglo-saxon marginal et la portée d’une excommunication qui touche des dizaine de milliers de gens parmi lesquels il y a d’honnêtes personnes mais peu formées. Non seulement ces censeurs ne savent pas ce qu’est une excommunication, mais ils ne mettent jamais les pieds à la messe, condamnent avec constance et férocité la moindre position morale de l’Église, sont incapables de faire la distinction entre un évêque et un diacre, entre l’assomption et l’ascension voire la résurrection, etc. Bref n’y entendent pas plus que moi sur les pratiques des lamas tibétains ou les innombrables subtilités philosophiques du bouddhisme — religions dont les préconisations des supérieurs me laissent d’une indifférence absolue et que je m’abstiens bien de commenter.

Car enfin, entendre Mirza à l’émission « Le téléphone sonne » qui ne fait pas la différence entre la Sainte Vierge et la référence au sagittaire, juger de la compétence des décisions du Saint-Père a quelque chose d’insupportable. Quant aux journalistes qui, de façon péremptoire, vont dire que Benoît XVI est négationniste, leur inculture donne l’idée de ce que peut être l’infini, le procédé de l’amalgame dispensant de tout recours à l’intelligence. À moins que ceux-ci reconnaissent fondamentalement que leurs racines sont chrétiennes et à ce titre, se sentent concernés par leur Église !

Un vrai danger

En revanche pour lutter contre l’antisémitisme violent, le vrai, le plausible, le dangereux et le présent, celui qui est train de créer les futurs pogroms, celui qui réclame ouvertement la vitrification des juifs d’Israël, celui qui crie à leur mort sur des pancartes écrites en français, il serait bon que ces penseurs germanopratins imitent les jeunes chrétiens des cités.

Ceux-ci vont enseigner l’esprit de paix, de concorde, de respect du prochain au nom du Prince de la Paix et avec l’autorité de l’Église dans des lieux ouvertement antisémites. Le lieu de la vraie violence. Ce qu’ils font n’est pas une pause intellectuelle pour attirer la presse mondaine. Ils luttent sans armes contre une fureur exaltée que la situation tragique du Moyen-Orient exacerbe.

Cette violence ronfle avant — si rien n’est fait — de se déverser un jour avec démesure sur les bien-pensants. Bref, il serait bon que les bonnes consciences qui se croient obligées de faire la leçon au pape, évitent de hurler avec les loups sur des moulins à vent qui ne menacent personne, mais mettent en garde sur la montée des vrais dangers qui en leur temps ont permis à l’antisémitisme actif de mettre le feu aux jeunes générations allemandes : le mépris des identités, l’affaiblissement de l’autorité, le déracinement social, l’inaction… des vecteurs de violence qui aujourd’hui trouvent un autre véhicule : l’islamisme.