4 février 2009





La réhabilitation d'un évêque intégriste dérange particulièrement l'Allemagne
04.02.09 - Jean-Baptiste Chastand - lemonde.fr
C'est avec une rare dureté qu'Angela Merkel a demandé "une clarification" à Benoît XVI, mardi 3 février, sur la réintégration de Richard Williamson au sein de l'Eglise catholique. D'habitude plus diplomate, la chancelière allemande n'a pas hésité à dire qu'il fallait "que de la part du pape et du Vatican il soit clairement établi qu'on ne peut pas nier l'Holocauste". Aucun autre chef d'Etat n'a osé s'exprimer sur ce sujet. Est-ce que parce que la Shoah pèse naturellement dans les consciences allemandes, parce que Benoît XVI, ancien cardinal Ratzinger, est bavarois ? Toujours est-il que les propos négationnistes de Richard Williamson, un des évêques réintégrés par le pape, sont particulièrement débattus en Allemagne. Au sein même de l'Eglise allemande, cette réintégration dérange. Les évêques de Hambourg et de Stuttgart n'ont pas hésité à exprimer publiquement leur désaccord avec la décision de Benoit XVI. L'archevêque de Berlin, Georg Sterzinsky, a même déclaré au tabloïd Bild que nier l'Holocause était "monstrueux", en demandant l'annulation de la réintégration de Richard Williamson. Du côté de la communauté juive allemande, la condamnation est encore plus ferme, puisque le consistoire central des juifs d'Allemagne a annoncé son intention de rompre tout dialogue avec l'Eglise catholique.
Mais, si les propos d'Angela Merkel ont été appréciés du côté des sociaux-démocrates du SPD, partenaires dans la coalition au pouvoir, ils ont été critiqués par plusieurs membres de la CSU, l'aile bavaroise, conservatrice et profondément catholique, de la CDU. Un député européen a ainsi déconseillé à Merkel de "jouer la maîtresse à penser du pape". "Elle devrait plutôt s'occuper de promouvoir les fondamentaux chrétiens au sein de la coalition", continue-t-il.
Malgré la demande du Vatican à Williamson de retirer ses propos, la presse allemande reste très critique. Mercredi, dans un éditorial titré "Nous ne voulons plus être papes" le Süddeutsche Zeitung s'indigne: "Un pape, qui vient d'Allemagne, qui arrive à se mettre à dos la communauté juive et qui fait d'un négationniste une personnalité importante, n'a pas compris quelque chose de fondamental". "Les Allemands ne comprennent plus leur pape" conclue le Spiegel.
Jean-Baptiste Chastand