17 mai 2012

[Frédéric Mounier - La Croix] Rome choisit Mgr Fellay comme interlocuteur pour les intégristes

SOURCE - Frédéric Mounier - La Croix - 17 mai 2012

La Congrégation pour la doctrine de la foi demande de « nouveaux approfondissements »  aux lefebvristes.

Les discussions entre Rome et la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X (FSSPX) vont encore prendre du temps. Dans un communiqué publié mercredi 16 mai, la Congrégation pour la doctrine de la foi a confirmé qu’après examen de la réponse apportée par Mgr Bernard Fellay, supérieur général de la FSSPX, au Préambule doctrinal soumis en 2011, « quelques observations ont été formulées, dont il sera tenu compte dans des discussions ultérieures entre le Saint-Siège et la Fraternité Saint-Pie-X ».
Mais ces « observations » semblent plus importantes que prévu. La veille de la réunion, en effet, on affirmait de source romaine que les modifications demandées, simples conseils de réécriture, ne devaient pas être un obstacle et ouvriraient, d’ici à l’été, la voie à une réintégration de la FSSPX dans l’Église par une prélature personnelle. Pourtant, ce 16 mai, le P. Lombardi, directeur de la Salle de presse, a affirmé : « La question ne devrait pas être réglée à courte échéance. Les instances chargées du dossier ne semblent pas avoir terminé leur travail. »
  
Surtout, relevant les fortes dissensions internes à la FSSPX, la Congrégation pour la doctrine de la foi a mis en garde ses trois autres évêques, l’Anglais Richard Williamson, le Français Bernard Tissier de Mallerais et l’Espagnol Alfonso de Galarreta. Ceux-ci avaient en effet fermement critiqué la volonté de Mgr Fellay d’un rapprochement avec Rome. « Compte tenu des positions prises par les trois autres évêques de la Fraternité Saint-Pie-X, leur situation devra être traitée séparément et personnellement »,  précise la Congrégation. Cette disjonction met au jour les failles parcourant la FSSPX et justifie la désignation par Rome de Mgr Fellay comme seul interlocuteur.
 
Lors d’une rencontre avec la presse, à Rome le 16 mai, le cardinal suisse Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, a précisé, évoquant les positions négationnistes de Mgr Williamson : « Le pape a toujours été clair : il n’y a pas de place pour le négationnisme dans l’Église catholique. »  Et il a confirmé le « rôle central »  de la déclaration conciliaire Nostra aetate  sur le dialogue judéo-chrétien, récusée par les lefebvristes : « Nous ne pouvons pas être catholiques sans accepter le magistère de Vatican II dans son intégralité. Chaque catholique, de gauche ou de droite, ne peut pas décider de ce qui serait à prendre ou à laisser. »
Rendez-vous début juillet
En revanche, trois jours plus tôt, l’abbé Wailliez, supérieur du district de Belgique de la FSSPX, avait annoncé dans son homélie que le cardinal Malcolm Ranjith, archevêque de Colombo (Sri Lanka) et ex « numéro deux » (2005-2009) de la Congrégation pour le culte divin, aurait promis à la FSSPX, dès que sa situation serait réglée, de lui confier son séminaire. Si ce point était confirmé, il marquerait de réelles dissensions entre cardinaux.
 
Dans ce contexte, la convocation par Mgr Fellay d’un chapitre général de la FSSPX, début juillet, pourrait être la nouvelle ligne d’horizon de ce dossier. Son éventuelle reconnaissance de Vatican II, du bout des lèvres, sera-t-elle suivie par tous ? C’est désormais peu probable. L’abbé Régis de Cacqueray, supérieur du district de France, a affirmé clairement, le 12 mai, son opposition.
 
Par ailleurs, un éventuel acte d’autorité de la part de Mgr Fellay lui permettrait d’être nommé par le pape à la tête de la prélature promise, avec deux avantages : il ne serait plus soumis à réélection par ses pairs ; et selon le droit canonique, cette prélature ne nécessiterait pas l’assentiment des évêques locaux pour les œuvres (paroisses, écoles, séminaires, prieurés) déjà fondées, mais seulement pour les nouvelles. Deux garanties non négligeables, à tout le moins pour une partie des héritiers de Mgr Lefebvre.
 
FRÉDÉRIC MOUNIER, à Rome