26 novembre 2012

[Julien Gunzinger - Eschaton] Les inquiétudes de l’abbé Stolz

SOURCE - eschaton.ch - 26 novembre 2012

L’abbé Stolz anime un blog que j’aime consulter. Il fourmille de commentaires ou d’éclairages souvent très pertinents. J’ai beaucoup d’estime pour l’abbé Stolz car il est dans le Jura un des seuls à oser contester les modernistes qui règnent en maître dans l’Eglise diocésaine. Mais je ne partage bien évidemment pas toutes ses positions. Dans un récent article, il s’inquiète des conséquences de la libéralisation du rite St Pie V. Voici ce qu’il écrit :« On a parlé parfois d’un effet guérisseur, ce propos est-il justifié ? La question commence à se poser. N’aurait-il pas été pastoralement plus judicieux de procéder au préalable à une réforme du rite de Paul VI avant de se lancer dans pareille intervention ? Les conséquences pastorales commencent à être visibles. Des noyaux de fidèles pieux prennent dit-on des distances avec leurs communautés, préférant d’autres tables. Ce rite semble  même pour certains être une passerelle vers la communauté quasi-schismatique Saint Pie X. Qui est sensible à ce rite ? Certainement ceux qui ont des connaissances liturgiques et un sens de la tradition. Un autre groupe paraît être concerné qui n’est toutefois pas toujours clairement séparé du premier, celui qui est touché par certaines révélations privées. Le thème est fréquent, il suffit de parcourir la toile pour qui n’en est pas convaincu.»

Ses préoccupations sont parfaitement fondées à ce que je peux en juger. De nouveaux fidèles, issus notamment des mouvements charismatiques du Jura, se rendent toujours plus régulièrement à l’Eglise du saint Esprit de Delémont pour y suivre les messes de la Fsspx. Ce que l’abbé Stolz déplore me réjouit donc profondément. Il se passe en effet quelque chose. L’Eglise ne peut abriter longtemps en son sein une doctrine fausse, comme l’est celle de Vatican II sur de nombreux points, et continuer à déborder de santé. 40 ans après Vatican II ceux qui n’ont pas rejoint l’hérésie moderniste ont besoin de liturgie solide, de repères stables et c’est du côté de la Tradition qu’ils savent pouvoir les trouver, loin des enseignements  embarrassés des prêtres qui, sans être modernistes, couvrent parfois de leur silence les contradictions du Magistère ordinaire et non infaillible de l’Eglise depuis Vatican II. L’article de l’abbé Stolz surprend également dans sa conclusion. Car après avoir constaté la désaffection de certains fidèles, il croit pouvoir faire une comparaison entre le film Les visiteurs et le rite tridentin : « En son temps, j’avais beaucoup apprécié le film avec Jean Reno, Les Visiteurs. Sa prière du soir avait été fabuleuse… Mais passé le charme, il reste bon nombre de questions. On ne peut renvoyer un chevalier avec son armure galoper sur une autoroute ou affronter la bombe atomique ou un tank. En matière spirituelle, il y a bien sûr des différences, des difficultés ne manqueront pas en rencontrant les poids lourd de la modernité. »  Or comment la comparaison peut-elle fonctionner si, comme l’abbé Stolz en fait pourtant le constat, la messe tridentine attire toujours plus par son sérieux? Le fait que c’est vers la messe tridentine que se tournent toujours plus les fidèles qui ont soif de liturgie conséquente avec l’enseignement constant de l’Eglise  témoigne exactement de l’inverse de ce que l’abbé Stolz veut exprimer par sa comparaison. L’attrait du film Les visiteurs repose sur l’effet comique que dégage le  contraste entre modernité et moyen-âge, celui que suscite la messe tridentine repose, lui, sur sa précision à traduire l’enseignement constant de l’Eglise et sur son actualité face au relativisme et du monde et du rite de Paul VI.