"Je veux être un catholique évangélique" |
23 novembre 2006 - Jérôme Anciberro - temoignagechretien.fr |
TC : Le système romain semble vous être insupportable. Pourquoi restez-vous catholique ? Hans Küng : C’est ma patrie spirituelle. Ce n’est pas parce que je ne suis pas content de mon gouvernement que je vais quitter ma patrie. J’apprécie aussi cette particularité de l’Église catholique de toucher à l’universalité dans l’espace – contrairement à un certain provincialisme qu’on peut trouver dans les Églises protestantes – et d’incarner une grande tradition de deux mille ans. Mais en même temps, il faut un critère de jugement. Pour moi, ce critère, c’est l’Évangile. Je veux être un catholique évangélique, ou un évangélique catholique, comme vous voudrez… Vous avez pu observer de près, à la fin des années 50, le paysage intellectuel catholique français. Quelles différences percevez-vous avec l’époque actuelle ? À l’époque, il y avait encore des intellectuels catholiques français qui avaient une certaine influence. Les débats du Centre des intellectuels catholiques attiraient des centaines de personnes. C’est peut-être dû à mon ignorance, mais j’ai l’impression que tout cela a changé. C’est sans doute la « tabouisation » de nombreux problèmes dans le milieu catholique qui éloigne les gens qui osent réfléchir à voix haute. Selon Rome, on n’a même pas le droit de seulement discuter la question de l’ordination des femmes. Vous avez également peu de figures épiscopales de premier plan. Mais si on ne connaît pas les évêques, c’est peut-être parce qu’ils ne disent rien de spécial. Le système de nominations n’ouvre la voie qu’à ceux qui sont complètement en accord avec la ligne officielle. Comment, dans ces conditions, avoir envie d’entrer dans le débat ? Que pensez-vous de la polémique actuelle autour du retour de la messe traditionnelle ? J’étais contre toute politique rigoriste vis-à-vis de Lefebvre. On aurait dû lui permettre de célébrer ses messes à l’ancienne. Il n’y a à mon avis aucun danger que la population catholique se rallie au rite ancien et au latin. Je pense qu’on exagère un peu l’importance de cette question, même si je sais qu’en France, la situation est particulière puisque les traditionalistes sont plus nombreux qu’ailleurs et qu’ils sont souvent liés à l’extrême droite. Mais il y a d’autres problèmes autrement sérieux dans l’Église catholique. Encore une fois, la question du mode de nomination des évêques, par exemple.. |