11 novembre 2014

[Abbé Simoulin, fsspx - Le Seignadou] Et «Notre-Dame de Bourguillon» vous connaissez?

Abbé Simoulin, fsspx - Le Seignadou - novembre 2014

Et «Notre-Dame de Bourguillon» vous connaissez? Nous l’avons tous un peu oubliée peut-être, alors que c’est elle qui a béni les tout premiers pas de la Fraternité.

Commençons par un peu d’histoire. Nous sommes en Suisse et peu après la fondation de la ville de Fribourg en 1157, les bourgeois érigèrent sur la colline une maison pour y accueillir les lépreux que l'on ne pouvait guérir à l'époque. En 1438, un pèlerinage organisé par les autorités demandait la guérison du duc Frédéric IV d'Autriche. L'illustre lépreux fut guéri. Depuis lors, la madone située dans la chapelle de l'hôpital attira irrésistiblement les pèlerins. Mais le miracle le plus important fut sans doute la conservation et la consolidation de la foi catholique dans le canton de Fribourg. Dès la Réforme et sous l’impulsion de saint Pierre Canisius, on fit et refit le voyage pour demander à Marie la conservation de la foi. Le gouvernement lui-même ordonna que tous les hommes de Fribourg fassent ensemble un pèlerinage pour demander la fidélité à la foi catholique. Par un regain de ferveur mariale, la chapelle fut dédiée en 1655 à Notre-Dame du Scapulaire ; elle devint siège d’une des nombreuses confréries de Notre-Dame du Mont Carmel, le 18 juillet 1655. La chapelle a été dédiée constamment à la Mère de Dieu sous des vocables qui se sont additionnés au cours des siècles : Marie, gardienne de la Foi, dés 1523 ; Notre-Dame du Scapulaire du Mont Carmel, en 1655. Notre-Dame de Bourguillon a été couronnée par Mgr Besson, évêque du diocèse le 7 octobre 1923.

Quel rapport avec la Fraternité, me diront ceux qui ont oublié que la Fraternité est née à Fribourg, avant de venir s’installer à Ecône ?

En effet, en 1969, Mgr Lefebvre avait été accueilli les bras ouverts à l'évêché de Fribourg par son ami Mgr Charrière : « Monseigneur, faites votre séminaire dans mon diocèse, pas de problème, faites venir vos séminaristes, choisissez une maison. ».

Et les premiers séminaristes arrivent à Fribourg le 13 octobre 1969. Ils s’installent dans deux appartements loués route de Marly. Ils sont neuf, parmi lesquels deux seulement persévéreront: Paul Aulagnier et Bernard Tissier de Mallerais. Lisons quelques-uns de leurs souvenirs : « Et aussitôt première visite, première sortie de dimanche, Notre-Dame de Bourguillon, le pèlerinage marial fribourgeois à Notre-Dame de Bourguillon gardienne de la Foi, où c'est comme une consécration de notre séminaire à la sainte Vierge, gardienne de la Foi, celle qui avait protégé Fribourg des Bernois et des protestants, qui avait sauvé l'Eglise catholique à Fribourg. Alors là, nous allons nous donner à la sainte Vierge, pour garder la Foi.

Lundi 20 octobre: messe à la chapelle Notre-Dame de Bourguillon.

Samedi 21 février 1970 : C’est la cérémonie d’ordination, la première en date pour le séminaire Saint-Pie X, qui a lieu dans le sanctuaire marial de Bourguillon, sous la protection de «Marie, gardienne de la foi». Monseigneur donne la tonsure à Paul Aulagnier et confère le sous-diaconat à Pierre Picque.

Dimanche 8 novembre : [Dès la réception du décret d’érection de la Fraternité des Apôtres de Jésus et de Marie, ou selon son titre public, Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, reçu le 7 novembre 1970] nous décidons unanimement d’aller à Bourguillon remercier la Très Saint Vierge «Gardienne de la foi» en son sanctuaire Fribourgeois.»

Depuis, les séminaristes aiment aller en pèlerinage à Bourguillon, remercier et implorer «Marie gardienne de la foi» afin qu’elle veille sur cette œuvre née sous son regard et qui est un peu la sienne. Nos statuts sont clairs sur ce point : [la Fraternité] « est aussi sous l'égide de Marie, Mère du Prêtre par excellence et par Lui Mère de tous les prêtres en qui Elle forme son Fils. »

Il serait superflu d’insister encore sur l’âme très mariale de Mgr Lefebvre. Sans parler de sa déclaration datée du 21 janvier, c’est le 2 février qu’il a choisi pour la réception de la soutane, le 8 décembre pour les engagements dans la Fraternité… sans omettre ce 25 mars qui vit son âme s’endormir dans le cœur de l’Immaculée. Nous nous souvenons aussi de sa douce habitude de ne jamais prêcher sans évoquer la Vierge Marie. Ceux qui l’ont connu au séminaire se souviennent de ses conférences spirituelles sur le Père de Montfort et sur l’amour de la Sagesse éternelle. Ils gardent aussi en mémoire l’image de Monseigneur agenouillé au pied de la Vierge le soir après le chant des complies, pour confier la nuit du séminaire à sa protection. J’entends encore ce cliquetis que faisait le chapelet spiritain de son frère René qu’il avait repris en main dans ses derniers mois pour prier le chapelet avec la communauté du séminaire. Et je ne peux oublier le si beau sermon qu’il donna au séminaire pour la fête de la Pentecôte, le 14 mai 1989. Cette fête de la Pentecôte était chère à son cœur de Spiritain, et je crois qu’il avait une grâce particulière pour nous parler en cette fête. Il n’est pas possible de tout citer mais nous pouvons en extraire quelques passages trop beaux pour être oubliés.

« Marie fut déjà remplie du Saint-Esprit bien avant les apôtres, bien avant la Pentecôte. Le seul fait que l'Ange Gabriel lorsqu’il vint pour lui annoncer la grande nouvelle de sa maternité divine, lui dit: Ave Maria, gratia plena : Salut Marie, pleine de grâce. Oui, elle est pleine de grâce, c'est-à-dire pleine du Saint-Esprit, remplie déjà du Saint-Esprit.

Et l'Ange ajoute : Spiritus Sanctus superveniat in te : L'Esprit Saint va venir en vous et par la vertu de l'Esprit Saint vous serez Mère de Jésus.

La très Sainte Vierge Marie a eu sa Pentecôte, avant le jour de la Pentecôte. Et elle aussi a parlé. Et coepit loqui. Elle a parlé. A peine avait-elle reçu le Saint-Esprit et ainsi devenue la Mère de Jésus, elle s'en fut visiter Élisabeth sa cousine. Et c'est par son intermédiaire que Jean-Baptiste lui aussi, a reçu l'Esprit Saint et sa cousine Élisabeth par l'intermédiaire de Jean-Baptiste.
Ainsi la Vierge Marie répandait déjà la grâce du Saint-Esprit à ceux qu'elle approchait. Et alors elle parla; elle parla et elle nous a laissé ces paroles vibrantes du Magnificat. Oui, c'est l'Évangile de Marie, son Magnificat.

Dans les quatre premiers versets de son Magnificat, Marie remplie de l'Esprit Saint, chante la gloire du Bon Dieu. Pendant ces quatre premiers versets, elle rend grâce à Dieu de ce qu'elle a reçu l'Esprit Saint et de ce qu'elle est devenue la Mère de Jésus. […]

Et puis pendant les versets qui suivent, on peut dire les quatre versets qui suivent, Marie, en définitive, nous donne déjà, à l'avance, ce que Notre Seigneur va décrire dans son Sermon sur la montagne, les Béatitudes, en particulier. […]

Et puis, dans les deux derniers versets, la Vierge Marie prophétise en quelque sorte:

Suscepit Israël puerum suum….. […] Et Marie aperçoit déjà la fondation de l'Eglise à laquelle précisément elle va participer d'une manière efficace à la Pentecôte en donnant par son canal, l'Esprit Saint aux apôtres. Marie prévoit déjà cela. C'est l'Israël nouveau. C'est l'Israël du Nouveau Testament. C'est le Sang de Jésus du Nouveau Testament. : Novi et æterni testament ! Hic est enim Calix Sanguinis mei, novi et æterni testamenti : Voici le Sang de la Nouvelle Alliance. Marie voit tout cela; elle voit la fondation de l'Eglise. Et non seulement Marie nous décrira ainsi son Évangile, dans son Magnificat, mais elle le réalisera. […]
Et puis, elle participera à la fondation de l'Eglise. Elle aura ce souci de l'Eglise, elle, qui est remplie de l'Esprit de Vérité et de sainteté, veut que les apôtres soient remplis de cet Esprit de Vérité et de sainteté. […]

Alors, je conclus par quelques applications pour le temps que nous vivons aujourd'hui.

On nous dit, et l'on nous répète […]: Là où est le pape, là est l'Eglise. […] Mais, ne pourrait-on pas dire avec une vérité encore plus profonde et plus exacte : Là où est Marie, là est l'Eglise. Car c'est par Marie que les apôtres ont été faits fondateurs de l'Eglise. Et Marie ne se trompe pas. Et Marie est infaillible. Marie ne peut pas professer l'erreur; Marie ne peut pas pécher. Elle est sainte; elle est parfaite; elle est la lumière de Vérité. Et c'est cela qu'elle a communiqué aux apôtres. […] Lorsqu’il y a eu cette réunion à Assise, des catholiques fidèles ont voulu que Notre-Dame de Fatima vienne à Assise. Il y a eu un cortège fait par des fidèles italiens venant avec la statue de la Vierge Marie. Ils ont été refoulés. On ne voulait pas de la Vierge Marie à Assise. […]  La Vierge Marie n’est pas œcuménique, la Vierge Marie ne connaît que Jésus, Jésus et l’esprit de Jésus, l’Esprit de Vérité et l’Esprit de sainteté, ce qui est le fondement de l'Eglise, ce qu'est l'Eglise elle-même. […]Marie est mère de l’Église Catholique […] Marie est mère de l’unique Église catholique. […] Il faut être clairs, fermes et décidés et ne pas hésiter. Nous voulons être avec la Vierge Marie. Nous voulons être à la Pentecôte, avec les apôtres, avec la Vierge Marie dans l’Esprit de Vérité et dans l’Esprit de sainteté, qui est l'esprit de l'Eglise. Et nous ne voulons pas en changer. […] Et la Vierge Marie nous y aidera. Parce que la Vierge Marie est allergique à l'erreur, allergique au péché. Elle ne peut pas sentir l'erreur. Elle est la Vérité. Elle est contre l'hérésie. Elle est contre ce qui s'oppose à la Vérité, par nature. Elle est contre tout ce qui s'oppose à la sainteté, contre tout péché, quel qu’il soit, même le moindre péché véniel, le moindre péché de négligence, elle est allergique, parce qu'elle demeure sainte; elle veut demeurer dans la Vérité.

Demandons-lui qu'elle nous communique cette allergie. Le Père Garrigou-Lagrange la nomme Notre-Dame de l'horreur. Qu'est-ce qu’il veut dire par là ? Il dit Notre-Dame de l'horreur, oui, parce que la Vierge Marie a horreur de l'erreur et horreur du péché. C'est dans sa nature. Elle ne peut pas sentir l'erreur; elle ne peut pas sentir le péché. Parce que l'erreur et le péché, c'est le démon. C'est lui qui a introduit cela dans le monde. Alors elle est allergique au démon. Vous savez bien qu'elle a été créée pour écraser la tête du serpent, pour réduire à néant Satan et tous les suppôts de Satan.

Alors, unissons-nous à la Vierge Marie. Demeurons bien unis à elle et elle nous préservera et de l'erreur et du péché et elle nous maintiendra dans la Vérité et la sainteté.»

«Notre-Dame de Bourguillon, Gardienne de la foi, priez pour nous!»