SOURCE - Le Barroux - Lettre aux Amis du Monastère - 11 juin 2018
Nous connaissons tous l’histoire du peuple de l’ancienne Alliance, au moins dans les grandes lignes. C’est comme étranger que ce peuple a pris sa première forme, en exil en Égypte. D’abord bien accueilli grâce à Joseph, il a ensuite connu l’esclavage et une liberté chèrement acquise par la traversée de la mer Rouge, puis du désert pendant quarante ans. Cette réalité originelle a été souvent rappelée à ce peuple, et c’est pourquoi Yahvé lui a demandé d’accueillir l’étranger. Le pape François rappelle que cette exigence de droit divin est toujours actuelle : « L’immigré qui réside avec vous sera parmi vous comme un compatriote, et tu l’aimeras comme toi-même, car vous-mêmes avez été immigrés au pays d’Égypte. Je suis le Seigneur votre Dieu » (Lv 19, 34), et plus forte encore est la condamnation de Jésus : « J’étais étranger et vous ne m’avez pas accueilli » (Mt 25, 35). Le magistère insiste sur ce point depuis au moins Pie XII. Il est clair que ce message ne rencontre pas un grand enthousiasme auprès des Européens, même auprès des catholiques. Il y a des raisons à cela : le terrorisme, les viols, le chômage et la défense de l’identité des pays accueillants. Certains prétendent que les évangiles ne concernent que les individus et non pas l’État. Ce point-là manque de précision.
Faut-il donc accueillir tous les étrangers sans aucune limite et sans prudence politique?
Je crois qu’il est bon de rappeler une distinction entre les commandements positifs (dits aussi affirmatifs) qui exigent de faire le bien, et les commandements négatifs, qui interdisent de faire le mal. Ces derniers valent pour tous, toujours, à tout instant, et en tout lieu. « Ne pas tuer l’innocent, ne pas commettre d’impureté, ne pas voler et ne pas mentir » sont valables sans exception. Il n’y a pas de circonstance extrinsèque qui permettrait de les commettre. Par contre, pour les commandements positifs, bien qu’ils soient a priori toujours valables, ce n’est pas à tout instant. Leur application doit tenir compte des circonstances qui la rendent possible, opportune, ou non, et déterminent la mesure selon laquelle les exécuter. Par exemple « faire l’aumône » exige que l’on aide les pauvres mais n’oblige pas à mettre en péril sa propre famille ou son pays. C’est ce qu’enseigne le Catéchisme de l’Église Catholique au n° 2241:
«Les nations mieux pourvues sont tenues d’accueillir autant que faire se peut l’étranger en quête de la sécurité et des ressources vitales qu’il ne peut trouver dans son pays d’origine. Les pouvoirs publics veilleront au respect du droit naturel qui place l’hôte sous la protection de ceux qui le reçoivent. Les autorités politiques peuvent en vue du bien commun dont ils ont la charge subordonner l’exercice du droit d’immigration à diverses conditions juridiques, notamment au respect des devoirs des migrants à l’égard du pays d’adoption. L’immigré est tenu de respecter avec reconnaissance le patrimoine matériel et spirituel de son pays d’accueil, d’obéir à ses lois et de contribuer à ses charges.»
Ainsi, un pays peut décider de fermer ses frontières à tel type d’immigration si elle présente objectivement un danger important, qu’il soit économique ou politique, à court ou à long terme, et cela sans aller contre le commandement de Dieu.
Saint Benoît demande que l’on accueille l’étranger comme le Christ, et qu’on lui témoigne toutes les marques d’humanité. Et il ajoute que l’on devra d’abord prier ensemble pour déjouer les ruses du démon, puis lire un passage de l’Écriture. Enfin, il précise que si l’hôte est exigeant, on le priera de se retirer.
+ F. Louis-Marie, o. s. b., abbé
Nous connaissons tous l’histoire du peuple de l’ancienne Alliance, au moins dans les grandes lignes. C’est comme étranger que ce peuple a pris sa première forme, en exil en Égypte. D’abord bien accueilli grâce à Joseph, il a ensuite connu l’esclavage et une liberté chèrement acquise par la traversée de la mer Rouge, puis du désert pendant quarante ans. Cette réalité originelle a été souvent rappelée à ce peuple, et c’est pourquoi Yahvé lui a demandé d’accueillir l’étranger. Le pape François rappelle que cette exigence de droit divin est toujours actuelle : « L’immigré qui réside avec vous sera parmi vous comme un compatriote, et tu l’aimeras comme toi-même, car vous-mêmes avez été immigrés au pays d’Égypte. Je suis le Seigneur votre Dieu » (Lv 19, 34), et plus forte encore est la condamnation de Jésus : « J’étais étranger et vous ne m’avez pas accueilli » (Mt 25, 35). Le magistère insiste sur ce point depuis au moins Pie XII. Il est clair que ce message ne rencontre pas un grand enthousiasme auprès des Européens, même auprès des catholiques. Il y a des raisons à cela : le terrorisme, les viols, le chômage et la défense de l’identité des pays accueillants. Certains prétendent que les évangiles ne concernent que les individus et non pas l’État. Ce point-là manque de précision.
Faut-il donc accueillir tous les étrangers sans aucune limite et sans prudence politique?
Je crois qu’il est bon de rappeler une distinction entre les commandements positifs (dits aussi affirmatifs) qui exigent de faire le bien, et les commandements négatifs, qui interdisent de faire le mal. Ces derniers valent pour tous, toujours, à tout instant, et en tout lieu. « Ne pas tuer l’innocent, ne pas commettre d’impureté, ne pas voler et ne pas mentir » sont valables sans exception. Il n’y a pas de circonstance extrinsèque qui permettrait de les commettre. Par contre, pour les commandements positifs, bien qu’ils soient a priori toujours valables, ce n’est pas à tout instant. Leur application doit tenir compte des circonstances qui la rendent possible, opportune, ou non, et déterminent la mesure selon laquelle les exécuter. Par exemple « faire l’aumône » exige que l’on aide les pauvres mais n’oblige pas à mettre en péril sa propre famille ou son pays. C’est ce qu’enseigne le Catéchisme de l’Église Catholique au n° 2241:
«Les nations mieux pourvues sont tenues d’accueillir autant que faire se peut l’étranger en quête de la sécurité et des ressources vitales qu’il ne peut trouver dans son pays d’origine. Les pouvoirs publics veilleront au respect du droit naturel qui place l’hôte sous la protection de ceux qui le reçoivent. Les autorités politiques peuvent en vue du bien commun dont ils ont la charge subordonner l’exercice du droit d’immigration à diverses conditions juridiques, notamment au respect des devoirs des migrants à l’égard du pays d’adoption. L’immigré est tenu de respecter avec reconnaissance le patrimoine matériel et spirituel de son pays d’accueil, d’obéir à ses lois et de contribuer à ses charges.»
Ainsi, un pays peut décider de fermer ses frontières à tel type d’immigration si elle présente objectivement un danger important, qu’il soit économique ou politique, à court ou à long terme, et cela sans aller contre le commandement de Dieu.
Saint Benoît demande que l’on accueille l’étranger comme le Christ, et qu’on lui témoigne toutes les marques d’humanité. Et il ajoute que l’on devra d’abord prier ensemble pour déjouer les ruses du démon, puis lire un passage de l’Écriture. Enfin, il précise que si l’hôte est exigeant, on le priera de se retirer.
+ F. Louis-Marie, o. s. b., abbé