28 juin 2014

[Lettre à Nos Frères Prêtres / FSSPX France] Le prêtre au confessionnal

SOURCELettre à Nos Frères Prêtres / District de France de la FSSPX - n°62 - juin 2014

Étant donné la faiblesse des âmes blessées par le péché originel, mais aussi les multiples occasions de péché dans la société, et dont le nombre ne s’est pas amenuisé à notre époque, bien au contraire, les chutes sont malheureusement fréquentes. Notre-Seigneur a institué, dans son infinie miséricorde, une deuxième planche de salut, le sacrement de pénitence, de réconciliation de l’âme avec Dieu, qui occupe normalement une partie du temps que le prêtre consacre à l’apostolat.
Misère corporelle et misère spirituelle
La miséricorde consiste à se pencher sur ceux qui sont dans la misère : particulièrement la misère spirituelle, qui est plus grave que la misère corporelle. Évidemment, nous nous penchons volontiers sur ceux qui souffrent dans leur corps, qui sont abandonnés, qui sont malades. C’est très bien, c’est très beau, mais la misère spirituelle est celle qui doit être avant tout l’objet de la sollicitude du prêtre. Le prêtre doit sentir battre en lui ce coeur miséricordieux et être attiré par ces âmes qui sont dans un état de péché, de misère spirituelle, afin de leur apporter la vie.
Un moyen privilégié pour toucher les âmes
Le confessionnal est un des moyens privilégiés pour le prêtre de toucher les âmes et de transmettre l’Esprit-Saint, comme le note saint Jean : « Recevez le Saint-Esprit, ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis, ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus » (Jn 20, 22-23). C’est pourquoi l’Église a toujours estimé le sacrement de pénitence. Beaucoup de saints ont d’ailleurs passé leur vie au confessionnal : par exemple le Curé d’Ars ou, plus près de nous, le Padre Pio. Mais les bons prêtres en général ont toujours eu une grande dévotion envers le sacrement de pénitence et s’adonnaient à ce ministère avec un zèle surnaturel.

Ce n’est pas que ce ministère, naturellement parlant, soit tellement attrayant. Il est éprouvant de passer des heures au confessionnal, d’entendre toutes les misères humaines. Il y a une tension exigée du prêtre qui, certainement, est très fatigante, très éprouvante. En revanche, du point de vue surnaturel, le ministère de la confession est vraiment très beau. En effet, c’est là que le prêtre a vraiment le contact avec les âmes et, par l’absolution qu’il donne, c’est vraiment le sang de Notre Seigneur Jésus-Christ qu’il répand sur ces âmes pour les laver de leurs péchés.
Un ministère exigeant
Le ministère de la confession est certainement celui qui demande le plus de qualités sacerdotales. C’est notamment un sacrement qui fait exercer au prêtre tout le savoir acquis au cours du séminaire. Il n’est pas tellement difficile de bien célébrer le saint sacrifice de la messe : il suffit de connaître les rites et de prendre conscience de ce que l’on fait. Tandis que, pour le sacrement de pénitence, le prêtre a tout un ensemble de principes à connaître, de qualités à posséder et de jugements à exercer.

L’exercice fructueux de ce ministère exige ainsi du prêtre de nombreuses qualités : la science de la loi divine et des lois de l’Église pour juger de la gravité du péché qui est confessé, la prudence, la discrétion, le conseil, la charité miséricordieuse à l’exemple de Notre-Seigneur, afin d’apporter à l’âme infirme les secours appropriés. C’est certainement une charge très lourde que Notre-Seigneur a mise sur les pauvres épaules du prêtre que de devoir guider des âmes qui ne lui appartiennent pas, des âmes que Dieu lui amène pour les diriger vers lui. C’est un ministère délicat, et l’un des plus importants du sacerdoce.
Un oeuvre de miséricorde
Le prêtre joue le rôle de médecin des âmes. Notre-Seigneur l’a devancé dans ce rôle, et avec quelle perfection ! Cela a-t-il de quoi nous étonner ? Non, c’est logique.

Quelle est la vertu qui porte à guérir les âmes et les corps ? La miséricorde. Qu’est-ce que la miséricorde ? C’est la perfection de la charité, car la charité est par essence un don désintéressé. Or, pour pratiquer la miséricorde, il faut être désintéressé car, dans le pécheur, dans le malade, il y a un commencement de mort, et la mort répugne, elle est repoussante.

Le coeur miséricordieux aperçoit à travers ces laideurs une possibilité de vie et, domptant ses répugnances, s’oubliant lui-même, il ramène à la vie le malade, le pécheur. Notre-Seigneur a été la miséricorde par excellence. Toute sa vie est miséricorde. « Dieu, qui est riche en miséricorde à cause de l’amour extrême dont il nous a aimés, alors que nous étions morts par nos péchés, nous a rendu la vie dans le Christ » (Ep 2, 4-5).

Tout en demeurant confondus devant l’oeuvre de miséricorde qu’est toute la Rédemption, méditons pour notre éducation sacerdotale et pastorale ces faits et paroles de Notre-Seigneur vis-àvis des pécheurs. Voyons l’admirable miséricorde du père de famille envers l’enfant prodigue : « Comme il était encore loin, son père le vit et fut ému de compassion, et accourant il se jeta à son cou et le baisa » (Lc 15, 20). Quel magnifique exemple ! A la femme adultère, il dit : « Va, et désormais ne pèche plus » (Jn 8, 11). Enfin, tout est résumé dans cette parole : « Soyez donc miséricordieux comme votre Père céleste est miséricordieux » (Lc 6, 36).
Le médecin des âmes
Le prêtre zélé sonde les coeurs, il sait tantôt corriger, car « le Seigneur châtie celui qu’il aime » (He 12, 6), tantôt patienter, tantôt conseiller, comme un médecin sait diagnostiquer la maladie et appliquer le remède approprié. Il se penche donc sur la misère du pécheur avec miséricorde.

Si le prêtre a une attitude de condamnation, de dureté vis-à-vis du pécheur, celui-ci va se renfermer sur lui-même, ce qui provoquera peut-être sa mort. Il n’aura plus confiance dans le prêtre, il ne saura plus à qui s’adresser et il dépérira.

Le prêtre doit donc avoir cette miséricorde dans son coeur et savoir écouter les gens. Il est là pour recevoir les doléances, les difficultés, les misères des gens et essayer de les remettre sur le chemin, doucement, paisiblement, tout en étant ferme quelquefois. Car Dieu seul peut peser toutes choses, savoir dans quelles circonstances ces gens-là ont pu vivre.

Tant qu’une personne est sur la terre, elle peut être sauvée, toujours ! Bien sûr, on peut concevoir qu’il y ait quelquefois une indignation vis-à-vis du péché, devant une situation vraiment abominable, devant des actes odieux, devant des manières de faire absolument inadmissibles, mais il faut toujours garder au pécheur la possibilité de se convertir.

Un conseil précieux pour cet apostolat, c’est de se comporter dans la société, dans les relations sociales, de telle sorte que les personnes n’aient pas d’appréhension à demander le sacrement de pénitence, c’est-à-dire de toujours garder un comportement vraiment sacerdotal.
Un ministère sanctifiant pour le prêtre
Le ministère de la confession bien exercé est évidemment efficace pour les fidèles, qui sont ainsi purifiés du péché et emplis de grâce, mais également pour la sanctification du prêtre lui-même.

Il est clair que celui qui exerce sérieusement et avec la désir de plaire à Dieu ce ministère exigeant y trouvera la source d’un progrès spirituel tangible. Le fait d’entendre les fautes d’autrui nous met en garde contre nos propres fautes, nous découvre souvent des tentations ou des faiblesses en nous-même que nous n’avions pas bien repérées et contre lesquelles nous pouvons ainsi nous mettre en garde. Souvent aussi, le prêtre est édifié et encouragé dans ses propres difficultés spirituelles en constatant l’héroïsme caché d’une âme, ou bien la grande miséricorde de Dieu à son égard. Pour donner de bons conseils, il est évidemment obligé de songer à lui-même et d’appliquer ses conseils dans sa propre vie.

Si donc le prêtre exerce cet apostolat de la confession comme Dieu le veut, il reçoit des grâces particulières qui lui permettent de faire du bien à ceux vers lesquels il est envoyé, et en même temps de progresser chaque jour dans l’amour de Dieu.