SOURCE - Isabelle de Gaulmyn - 17 septembre 2009
Abordant la rentrée, le président de la Conférence des évêques de France estime que la voix de l’Église peut peser dans le débat public
L’Église catholique en France vient de vivre une année difficile, marquée par une série de crises qui serait presque parvenue à effacer des mémoires la visite – réussie – de Benoît XVI il y a un an. Pourtant, le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris et président de la Conférence des évêques de France, qui rencontrait jeudi 17 septembre quelques journalistes, aborde cette rentrée avec sérénité.
Notamment concernant la première et la plus profonde de ces crises, provoquée par la levée de l’excommunication des évêques de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X (FSSPX), après la libéralisation de la messe en rite ancien : contrairement à ce que certains avaient craint, « il n’y a pas eu de “tsunami” de la pratique religieuse en France : çà et là, des arrangements ont été trouvés, mais globalement la pratique des catholiques français n’a pas été profondément modifiée».
À plus long terme, le cardinal Vingt-Trois ne peut cacher un certain scepticisme sur un futur retour de la FSSPX dans l’Église. Certes, à Rome vont débuter les discussions théologiques avec les intégristes. Mais l’archevêque de Paris observe d’emblée que « par définition, pour faire l’unité, il faut être deux ». Or, rappelle-t-il, le préalable à la discussion, clairement posé par Benoît XVI, à savoir l’acceptation de Vatican II, continue d’être repoussé par les responsables intégristes.
Travail d'unité
Le geste d’ouverture du pape n’a d’ailleurs guère provoqué de « ralliements », signe que le problème n’était pas uniquement liturgique : en trois ans, le diocèse de Paris a accueilli quatre prêtres lefebvristes, le nombre, pour la France, ne devant pas dépasser la vingtaine. Pour autant, le cardinal ne minimise aucunement la question de la communion avec les intégristes : « Ce n’est pas annexe, et on ne peut traiter le phénomène de l’intégrisme ecclésial comme on traite le Front national en politique. » Il convient donc d’accueillir les chrétiens qui vont de bonne foi dans les institutions intégristes, mais cela laisse entier le problème de « la capacité d’engendrer une culture de communion ».
Ce travail d’unité passe aussi, pour les catholiques, par une réappropriation en profondeur des textes de Vatican II. « Dans les années 1970, on estimait suffisant d’appliquer le Concile, note-t-il. On s’aperçoit aujourd’hui que le Concile est bien évidemment un élément constitutif de la vie de l’Église, mais que son application suppose un gros travail d’intégration. » Alors que l’on s’apprête à fêter le 50e anniversaire de l’ouverture de Vatican II (1962), une série d’initiatives sera lancée pour cet effort de réinvestissement. « Nous avons désormais une majorité de catholiques qui n’étaient pas nés, ou à peine, au moment du Concile. »
Plus généralement, le président de la Conférence épiscopale ne nie pas que l’image de l’Église se soit ressentie des difficultés de ces derniers mois. Mais il estime que l’on assiste aujourd’hui « à une amplification considérable des effets médiatiques, au point que la virtualité se substitue à la réalité ». La réalité de l’Église est plutôt à chercher, selon lui, « au niveau des chrétiens qui vivent leur foi au quotidien ».
Questions bioéthiques
L’actualité montre aussi, a enfin expliqué l’archevêque de Paris, que la voix de l’Église n’est pas toujours ignorée dans le débat public. Sur les questions bioéthiques, par exemple. Ou encore à l’occasion de la récente décision de ne pas appliquer les tests ADN dans le cadre du regroupement familial, mesure à laquelle l’Église s’était toujours opposée.
En revanche, quant au travail du dimanche, le cardinal Vingt-Trois ne masque pas ses regrets : « Il s’agit d’une décision néfaste pour la vie sociale, la vie des familles et l’équilibre humain : une société se construit aussi sur une organisation symbolique du temps. »
Isabelle de GAULMYN
Abordant la rentrée, le président de la Conférence des évêques de France estime que la voix de l’Église peut peser dans le débat public
L’Église catholique en France vient de vivre une année difficile, marquée par une série de crises qui serait presque parvenue à effacer des mémoires la visite – réussie – de Benoît XVI il y a un an. Pourtant, le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris et président de la Conférence des évêques de France, qui rencontrait jeudi 17 septembre quelques journalistes, aborde cette rentrée avec sérénité.
Notamment concernant la première et la plus profonde de ces crises, provoquée par la levée de l’excommunication des évêques de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X (FSSPX), après la libéralisation de la messe en rite ancien : contrairement à ce que certains avaient craint, « il n’y a pas eu de “tsunami” de la pratique religieuse en France : çà et là, des arrangements ont été trouvés, mais globalement la pratique des catholiques français n’a pas été profondément modifiée».
À plus long terme, le cardinal Vingt-Trois ne peut cacher un certain scepticisme sur un futur retour de la FSSPX dans l’Église. Certes, à Rome vont débuter les discussions théologiques avec les intégristes. Mais l’archevêque de Paris observe d’emblée que « par définition, pour faire l’unité, il faut être deux ». Or, rappelle-t-il, le préalable à la discussion, clairement posé par Benoît XVI, à savoir l’acceptation de Vatican II, continue d’être repoussé par les responsables intégristes.
Travail d'unité
Le geste d’ouverture du pape n’a d’ailleurs guère provoqué de « ralliements », signe que le problème n’était pas uniquement liturgique : en trois ans, le diocèse de Paris a accueilli quatre prêtres lefebvristes, le nombre, pour la France, ne devant pas dépasser la vingtaine. Pour autant, le cardinal ne minimise aucunement la question de la communion avec les intégristes : « Ce n’est pas annexe, et on ne peut traiter le phénomène de l’intégrisme ecclésial comme on traite le Front national en politique. » Il convient donc d’accueillir les chrétiens qui vont de bonne foi dans les institutions intégristes, mais cela laisse entier le problème de « la capacité d’engendrer une culture de communion ».
Ce travail d’unité passe aussi, pour les catholiques, par une réappropriation en profondeur des textes de Vatican II. « Dans les années 1970, on estimait suffisant d’appliquer le Concile, note-t-il. On s’aperçoit aujourd’hui que le Concile est bien évidemment un élément constitutif de la vie de l’Église, mais que son application suppose un gros travail d’intégration. » Alors que l’on s’apprête à fêter le 50e anniversaire de l’ouverture de Vatican II (1962), une série d’initiatives sera lancée pour cet effort de réinvestissement. « Nous avons désormais une majorité de catholiques qui n’étaient pas nés, ou à peine, au moment du Concile. »
Plus généralement, le président de la Conférence épiscopale ne nie pas que l’image de l’Église se soit ressentie des difficultés de ces derniers mois. Mais il estime que l’on assiste aujourd’hui « à une amplification considérable des effets médiatiques, au point que la virtualité se substitue à la réalité ». La réalité de l’Église est plutôt à chercher, selon lui, « au niveau des chrétiens qui vivent leur foi au quotidien ».
Questions bioéthiques
L’actualité montre aussi, a enfin expliqué l’archevêque de Paris, que la voix de l’Église n’est pas toujours ignorée dans le débat public. Sur les questions bioéthiques, par exemple. Ou encore à l’occasion de la récente décision de ne pas appliquer les tests ADN dans le cadre du regroupement familial, mesure à laquelle l’Église s’était toujours opposée.
En revanche, quant au travail du dimanche, le cardinal Vingt-Trois ne masque pas ses regrets : « Il s’agit d’une décision néfaste pour la vie sociale, la vie des familles et l’équilibre humain : une société se construit aussi sur une organisation symbolique du temps. »
Isabelle de GAULMYN