| Ça pourra surprendre, mais je m’intéresse parfois à l’actualité de      l’église catholique. Ou disons plutôt que je m’y intéresse      lorsqu’elle déborde de la fameuse « sphère privée » pour      mieux se répandre dans la non moins fameuse « sphère publique ».      A cette aune, le retour des brebis égarées intégristes dans le giron      romain vaut largement d’être commenté. D’abord parce que les brebis      prodigues sont toujours aussi égarées qu’il y a vingt ans, mais      surtout parce que la démarche de Benoît XVI      s’inscrit dans une perspective de plus en plus réactionnaire. Car j’ai du mal à gober qu’il s’agisse vraiment de rassembler      tous les catholiques dans un souci « d’apaisement »: les      seuls supporters de l’OM sont plus nombreux      que les amis de Monseigneur Lefebvre (150 000 sur un peu plus d’un      milliard de catholiques à travers le monde) et cette main tendue aux      nostalgiques de l’avant-Vatican II ira      davantage dans le sens de la discorde que dans celui de l’harmonie…
 Un panthéon politique hébergeant les plus magnifiques      crapules du siècle
 A ceux qui s’intéressent encore moins que moi à ce genre de choses,      rappelons ainsi que la poignée de fondamentalistes préférant le latin      au français n’est pas qu’une association de défense et promotion des      traditions folkloriques.
 L’abbé Laguérie, lorsqu’il ne baptise pas les rejetons de      Dieudonné, ne joue pas du biniou dans le bagad de Lann-Bihoué! Non, les      tenants de la Fraternité Saint-Pie X sont d’authentiques fanatiques      dont les références religieuses tendent plus vers la consumation des pécheurs      dans les flammes de l’enfer que vers les causeries de Saint-François      d’Assise avec les petits zoziaux. Pour ne rien dire d’un panthéon      politique hébergeant les plus magnifiques crapules du siècle, de Franco      à Pétain, de Salazar à Le Pen.
 Tiens, même le petit moustachu autrichien, dont les méfaits seraient      largement surévalués par la propagande judéo-maçonnique, est      susceptible d’y faire une, hum, apparition…
 Les critiques peu crédibles du discours de Ratisbonne
 Toutes choses égales par ailleurs, les intégristes auxquels il est      question de rendre le bénéfice de leur baptême sont comparables aux      barbus lanceurs de fatwas à travers le monde ou aux fondamentalistes en      redingotes noires assurant que la Shoah n’était qu’une punition bien méritée.
 La grande différence, c’est que ces derniers ne représentent      qu’eux-mêmes, ni l’islam ni le judaïsme ne possédant une structure      centrale donnant le ton. En ayant l’oreille du big boss, les      lefebvristes auront donc bien plus d’influence sur les croyants qu’un      mollah éructant ses imprécations dans le désert.
 Il y a deux ans, au moment du fameux discours de Ratisbonne, je m’étais      agacé du sophisme des critiques de Benoît XVI,      qui lui reprochaient de ne pas se faire plus subtil pour évoquer les      rapports entre la foi et la raison.
 Je n’ai pas changé d’avis et je ne vois toujours pas en quoi le      pape serait infondé à citer, sans les reprendre à son compte, les      propos d’un empereur byzantin du XIVe siècle… Un mouvement religieux,      même important, même central dans la culture et l’histoire de mon      pays, n’est jamais qu’un mouvement religieux et ce qu’il impose à      ses fidèles ne nous regarde pas.
 Au-delà de la messe en latin, des tendances antisémites et homophobes
 Mais que ce mouvement offre une place légitime à sa frange extrémiste,      une frange extrémiste dont le projet est susceptible d’avoir un impact      sur la vie de ceux qui n’en ont qu’une (de vie) -et ce n’est plus du      tout pareil. Le prêtre qui tourne le dos à ses ouailles pendant la messe      et s’exprime en latin, c’est son problème et le leur.
 La remise au goût du jour de la « perfidie des juifs »      dans la liturgie ou la propagation de l’idée que les homosexuels sont      à l’espèce humaine ce que la déforestation est à l’environnement,      en revanche, c’est notre problème à tous.
 Benoît XVI est un pape intelligent, un      intellectuel plus qu’un émotif et je ne crois pas qu’il soit dans      l’improvisation avec cette affaire de réintégration. Pas plus que      Jean-Paul II ne l’était en canonisant le      fondateur de l’Opus Dei…
 Bon, c’est sûr, l’église catholique est un gros machin      ultra-politique et il a bien fallu que les intégristes soient d’abord      excommuniés avant d’être réintégrés. De même, c’est bien parce      qu’il y a eu un Vatican II qu’il y a      aujourd’hui des gens pour lui faire un sort.
 Faire et défaire, c’est toujours faire, hein? Mais nous sommes en      2009 et, pour le moment, c’est au retour en grâce dun négationniste      Richard Williamson (je ne vais quand même pas lui donner du monseigneur      ou lui serrer la pince…) qu’il nous est donné d’assister.
 Vivement le prochain concile, qu’on change un peu de cycle. Celui-ci      commence à me fatiguer.
 Ailleurs sur le Web
 ► Pétition:      Pas de négationnistes dans l’Eglise, sur LaVie.fr
 |